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05/07/2022 | FRANCE | N°19BX04918

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 05 juillet 2022, 19BX04918


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Le Fond des Airs, M. A... D... et Mme E... C... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 15 février 2018 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a approuvé le plan de prévention des risques naturels de la commune de La Couarde-sur-Mer ainsi que les décisions implicites de rejet de leurs recours gracieux.

Par un jugement n° 1801913 du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 17 décembre 2019, 30 novem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Le Fond des Airs, M. A... D... et Mme E... C... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 15 février 2018 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a approuvé le plan de prévention des risques naturels de la commune de La Couarde-sur-Mer ainsi que les décisions implicites de rejet de leurs recours gracieux.

Par un jugement n° 1801913 du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 17 décembre 2019, 30 novembre 2020, 26 janvier 2021 et 24 février 2022, l'association Le Fond des Airs, M. A... D... et Mme E... C... épouse D..., représentés par Me Jean-Meire, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 17 octobre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Charente-Maritime du 15 février 2018 ainsi que les décisions implicites de rejet de leurs recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de mettre en œuvre la procédure de modification prévue à l'article R. 561-140-1 du code de l'environnement pour modifier le zonage du secteur du Fond des Airs en tenant compte de son caractère urbanisé, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable ;

- le délai de trois ans pour l'approbation d'un plan de prévention des risques prévu à l'article R. 562-2 du code de l'environnement est prescrit à peine de nullité et n'a pas été respecté en l'espèce ;

- le projet était soumis à un examen au cas par cas en vertu de l'article R. 122-17 II 2° du code de l'environnement et donc au respect des exigences de la directive du 27 juin 2001 qui soumet à évaluation environnementale certains plans et programmes susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ; le tribunal a commis une erreur de droit en décidant d'écarter cet article au prétendu motif de son illégalité alors que le décret du 2 mai 2012 créant cet article n'a jamais fait l'objet d'une déclaration d'illégalité ; en tout état de cause, l'article R. 122-17 du code de l'environnement ne méconnaît pas l'article L. 122-4 V du même code puisqu'il prévoit que les plans de prévention des risques naturels sont susceptibles d'être soumis à évaluation environnementale en vertu de la procédure d'examen au cas par cas ;

- la préfète ayant choisi librement de se soumettre à une procédure d'examen au cas par cas en application des articles R. 122-17 et R. 122-18 du code de l'environnement, il lui appartenait d'y procéder dans des conditions régulières, ce qui n'a pas été le cas ;

- la décision de ne pas soumettre à évaluation environnementale le plan de prévention des risques et la décision approuvant ce plan ont été prises par la même autorité, la préfète de la Charente-Maritime, en méconnaissance des articles 3 et 6 de la directive du 27 juin 2001 du fait de l'absence d'autonomie effective visant à garantir l'impartialité et l'indépendance des décisions rendues ; ce vice de procédure a privé les requérants d'une garantie ;

- en application des dispositions des articles 3 et 6 de la directive du 21 mai 1992 et de l'article L. 414-4 du code de l'environnement, le plan litigieux devait faire l'objet d'une évaluation des incidences Natura 2000 mais tel n'a pas été le cas en l'espèce ;

- le dossier d'enquête publique ne comportait ni note de présentation à vocation notamment environnementale ou résumé non technique, ni la décision prise après examen au cas par cas en méconnaissance de l'article R. 123-8 2° du code de l'environnement et de l'article 7 de la Charte de l'environnement ;

- les couleurs définissant et délimitant les différentes zones étaient très approchantes et il était quasiment impossible parfois pour le public participant à l'enquête publique de déterminer de quelle zone relevait leur parcelle et en conséquence, les règles juridiques applicables, en particulier pour le secteur du Fond des Airs, ce qui a nécessairement nui à l'information et à la participation du public ;

- la commission d'enquête ne peut pas être regardée comme ayant donné un avis motivé au sens de l'article R. 123-19 du code de l'environnement ;

- le plan de prévention est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation sur le zonage et la qualification d'espace naturel du secteur du Fond des Airs ;

- l'annulation de l'arrêté devra entraîner sa disparition de l'ordonnancement juridique à l'égard de tous et pas uniquement à l'égard des requérants ; le fait que l'acte attaqué ait vocation à protéger la sécurité des administrés n'est pas, à lui seul, susceptible de devoir conduire systématiquement à ce que les effets de l'annulation soient différés en vertu de la jurisprudence AC !.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 novembre 2020, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête, à défaut, à l'annulation de l'arrêté en tant seulement qu'il porte sur le secteur du Fond des Airs ou à ce qu'il soit sursis à statuer en application de l'article L. 191-1 du code de l'environnement.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de la méconnaissance de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement est inopérant et, de surcroit, infondé ;

- les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une lettre du 7 juin 2022, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur la possibilité pour la cour de surseoir à statuer sur la requête, en application de l'article L. 191-1 du code de l'environnement, afin de permettre la régularisation du vice tiré de ce que la décision de dispenser le plan d'évaluation environnementale a été prise par la même autorité que celle chargée de l'élaboration du plan, en méconnaissance de l'obligation d'impartialité.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte de l'environnement ;

- la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 ;

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 ;

- le décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 ;

- le décret n° 2012-616 du 2 mai 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public,

- et les observations de Me Jean-Meire, représentant l'association Le Fond des Airs et autres.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 15 février 2018, le préfet de la Charente-Maritime a approuvé le plan de prévention des risques naturels (risques littoraux - érosion côtière et submersion marine - et incendie de forêt) de la commune de La Couarde-sur-Mer. L'association Le Fond des Airs, M. A... D... et Mme E... C... épouse D... ont formé des recours gracieux à l'encontre de cet arrêté, lesquels ont été reçus par la préfecture les 13 et 16 avril 2018 et ont été implicitement rejetés. Ils relèvent appel du jugement du 17 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2018 et des décisions implicites de rejet de leurs recours gracieux.

Sur la légalité de l'arrêté du 15 février 2018 approuvant le plan de prévention des risques naturels prévisibles de La Couarde-sur-Mer :

En ce qui concerne le délai d'approbation du plan :

2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 562-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'article 1er du décret du 28 juin 2011 : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé dans les trois ans qui suivent l'intervention de l'arrêté prescrivant son élaboration. Ce délai est prorogeable une fois, dans la limite de dix-huit mois, par arrêté motivé du préfet si les circonstances l'exigent, notamment pour prendre en compte la complexité du plan ou l'ampleur et la durée des consultations. ".

3. En l'espèce, le plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de La Couarde-sur-Mer a été approuvé le 15 février 2018, soit plus de trois ans après l'arrêté du 28 novembre 2014 prescrivant l'élaboration du plan, sans qu'aucun arrêté de prorogation n'ait été pris dans l'intervalle. Toutefois, l'article R. 562-2 du code de l'environnement ne prévoit aucune conséquence au dépassement de ce délai. Par ailleurs, l'expiration de ce délai, pour regrettable qu'elle soit, ne prive les administrés d'aucune garantie de la nature de celles qui justifieraient que la procédure d'élaboration ne puisse arriver à son terme alors qu'un plan de prévention des risques naturels a pour objet de définir les mesures de prévention des risques naturels existant sur un territoire. Quant aux considérations liées à l'application anticipée des plans de prévention des risques, elles sont en l'espèce inopérantes, l'arrêté attaqué n'ayant ni pour objet ni pour effet de les mettre en œuvre. Par suite, le délai d'élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles prévu par les dispositions précitées du code de l'environnement n'étant pas prescrit à peine de nullité, les requérants ne peuvent utilement invoquer une irrégularité de procédure à l'encontre de l'arrêté préfectoral du 15 février 2018.

En ce qui concerne la décision dispensant le plan d'une évaluation environnementale :

4. Aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I.-L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II.-Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. / III.-La réalisation des mesures prévues aux 3° et 4° du II peut être rendue obligatoire en fonction de la nature et de l'intensité du risque dans un délai de cinq ans, pouvant être réduit en cas d'urgence. A défaut de mise en conformité dans le délai prescrit, le préfet peut, après mise en demeure non suivie d'effet, ordonner la réalisation de ces mesures aux frais du propriétaire, de l'exploitant ou de l'utilisateur. / IV.-Les mesures de prévention prévues aux 3° et 4° du II, concernant les terrains boisés, lorsqu'elles imposent des règles de gestion et d'exploitation forestière ou la réalisation de travaux de prévention concernant les espaces boisés mis à la charge des propriétaires et exploitants forestiers, publics ou privés, sont prises conformément aux dispositions du titre II du livre III et du livre IV du code forestier. / V.-Les travaux de prévention imposés en application du 4° du II à des biens construits ou aménagés conformément aux dispositions du code de l'urbanisme avant l'approbation du plan et mis à la charge des propriétaires, exploitants ou utilisateurs ne peuvent porter que sur des aménagements limités. (...) ".

5. Les plans de prévention des risques naturels prévisibles ainsi définis par le législateur ont pour finalité d'assurer la protection civile des populations contre les risques naturels.

6. D'une part, aux termes de l'article 3 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement : " 1. Une évaluation environnementale est effectuée, conformément aux articles 4 à 9, pour les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. / 2. Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes : a) qui sont élaborés pour les secteurs de l'agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l'énergie, de l'industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l'eau, des télécommunications, du tourisme, de l'aménagement du territoire urbain et rural ou de l'affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 85/337/CEE pourra être autorisée à l'avenir ; ou b) pour lesquels, étant donné les incidences qu'ils sont susceptibles d'avoir sur des sites, une évaluation est requise en vertu des articles 6 et 7 de la directive 92/43/CEE. (...) ". Il résulte toutefois du paragraphe 8 du même article que ne sont pas couverts par la directive, notamment, " les plans et programmes destinés uniquement à des fins de défense nationale et de protection civile ".

7. Il résulte clairement de ces dispositions que les plans ou programmes dont la finalité est d'assurer la protection des populations contre les risques naturels n'entrent pas dans le champ d'application de la directive du 27 juin 2001, alors même qu'ils seraient par ailleurs susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le plan de prévention des risques naturels de La Couarde-sur-Mer devait être soumis à évaluation environnementale au regard des exigences de la directive du 27 juin 2001.

8. D'autre part, aux termes du V de l'article L. 122-4 du code de l'environnement qui assure la transposition du paragraphe 8 de l'article 3 de la directive du 27 juin 2001 : " Les plans et documents établis uniquement à des fins de défense nationale ou de protection civile ne sont pas soumis à une évaluation environnementale. ". Le IV de l'article L. 122-4 prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat définit les plans, schémas, programmes et documents qui font l'objet d'une évaluation environnementale " après un examen au cas par cas effectué par l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement ". En vertu du II de l'article R. 122-17 du code de l'environnement, dans sa version en vigueur à la date de la décision de dispense d'évaluation environnementale : " Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification susceptibles de faire l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas et, sous réserve du III, l'autorité de l'Etat compétente en matière d'environnement devant être consultée sont définis dans le tableau ci-dessous ". Le tableau annexé à cet article prévoyait à son 2° que les plans de prévention des risques naturels prévisibles prévus par l'article L. 562-1 du code de l'environnement, dans sa version issue de l'article 1er du décret du 2 mai 2012, relèvent de l'examen au cas par cas et que l'autorité administrative de l'Etat chargée de cet examen est le préfet de département. Pour ces plans, l'examen au cas par cas est réalisé dans les conditions et formes prévues à l'article R. 122-18 du code de l'environnement, lequel renvoie à l'autorité environnementale désignée au II de l'article R. 122-17.

9. Si le V de l'article L. 122-4 du code de l'environnement, cité au point 8, n'exige pas que les plans de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation dont la finalité est d'assurer la protection des populations contre les risques naturels, fassent l'objet d'une évaluation de leurs incidences sur l'environnement, les dispositions du II de l'article R. 122-17 du code de l'environnement imposent en revanche qu'ils fassent l'objet d'un examen au cas par cas destiné à déterminer s'ils doivent faire l'objet d'une telle évaluation.

10. Il résulte de la combinaison de l'article L. 562-3 du code de l'environnement, selon lequel le plan de prévention des risques naturels est approuvé par arrêté préfectoral, et du tableau annexé à l'article R. 122-17 dans sa version issue de l'article 1er du décret du 2 mai 2012, que le préfet de département, par ailleurs compétent pour approuver le plan de prévention des risques naturels, était chargé d'effectuer l'examen au cas par cas propre à ce type de plans, destiné à déterminer s'ils devaient faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences sur l'environnement. Si, par ses décisions n° 360212 des 26 juin 2015 et 3 novembre 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé les dispositions du 2° du II de l'article R. 122-17 du code de l'environnement en tant qu'elles désignent l'autorité administrative de l'Etat compétente, il appartient aux juridictions administratives devant lesquelles il serait soutenu à bon droit qu'un plan ou programme pris en application du décret attaqué ou qu'un acte pris sur le fondement d'un de ces plans ou programmes est illégal au motif qu'il a été pris sur le fondement des dispositions en cause du décret du 2 mai 2012, d'apprécier s'il y a lieu de maintenir provisoirement en vigueur l'acte attaqué et de vérifier, à ce titre, si la condition d'impartialité est remplie. Sur ce point, aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obstacle à ce que l'autorité chargée de procéder à l'examen au cas par cas soit également l'autorité compétente pour se prononcer sur le plan ou programme, sous la réserve que cette autorité accomplisse les missions qui lui incombent de façon objective et ne se trouve pas dans une position donnant lieu à un conflit d'intérêts, notamment si l'autorité compétente est chargée de l'élaboration du plan ou du programme soumis à autorisation.

11. En l'espèce, le plan de prévention des risques naturels de la commune de La Couarde-sur-Mer a été prescrit, élaboré et approuvé par le préfète de la Charente-Maritime. Dans ces conditions, la préfète de la Charente-Maritime étant en charge de l'élaboration du document, la circonstance qu'elle ait dispensé l'élaboration du plan de prévention des risques naturels de La Couarde-sur-Mer de la réalisation d'une évaluation environnementale caractérise un manque d'objectivité et un conflit d'intérêts de la préfète de nature à vicier la procédure. Dans ces conditions, la décision de dispense d'évaluation environnementale du 27 novembre 2014 a été prise dans des conditions irrégulières.

12. En revanche, si les requérants soutiennent que l'agence régionale de santé n'avait pas à être consultée, il résulte des dispositions de l'article R. 122-18 du code de l'environnement selon lesquelles " I. - Pour les plans, schémas, programmes ou documents de planification faisant l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas en application du II, du second alinéa du IV ainsi que du V de l'article R. 122-17, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement détermine (...) si une évaluation environnementale doit être réalisée. (...) II.-Dès réception de ces informations, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement, sans délai : (...) c) Les transmet pour avis soit au ministre chargé de la santé lorsqu'il s'agit d'un plan, schéma, programme ou document de planification pour lequel l'autorité de l'Etat compétente en matière d'environnement est la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, soit au directeur général de l'agence régionale de santé dans les autres cas. (...) ", que le directeur de l'agence régionale de santé devait être consulté pour avis sur le plan litigieux. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'autorité administrative aurait entaché d'irrégularité la procédure en recueillant l'avis de l'agence régionale de santé.

13. Par suite, il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que la décision dispensant le plan de prévention en litige de la réalisation d'une évaluation environnementale a été prise dans des conditions irrégulières de nature à affecter la légalité de l'arrêté préfectoral du 15 février 2018.

En ce qui concerne l'évaluation des incidences Natura 2000 :

14. Aux termes de l'article L. 414-4 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après " Evaluation des incidences Natura 2000 " : / 1° Les documents de planification qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, sont applicables à leur réalisation ; (...) ". Aux termes de l'article L. 562-1 du même code : " I.-L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II.-Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques (...) / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. (...) "

15. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le plan litigieux serait susceptible de produire des effets affectant de manière significative les sites Natura 2000 présents sur le territoire de la commune de La Couarde-sur-Mer. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier devait comporter une évaluation des incidences Natura 2000.

En ce qui concerne la composition du dossier soumis à l'enquête publique :

16. Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. / Le dossier comprend au moins : / 1° Lorsqu'ils sont requis, l'étude d'impact et son résumé non technique, le rapport sur les incidences environnementales et son résumé non technique, et, le cas échéant, la décision prise après un examen au cas par cas par l'autorité environnementale mentionnée au IV de l'article L. 122-1 ou à l'article L. 122-4, ainsi que l'avis de l'autorité environnementale mentionné au III de l'article L. 122-1 et à l'article L. 122-7 du présent code ou à l'article L. 104-6 du code de l'urbanisme ; / 2° En l'absence d'évaluation environnementale le cas échéant, la décision prise après un d'examen au cas par cas par l'autorité environnementale ne soumettant pas le projet, plan ou programme à évaluation environnementale et, lorsqu'elle est requise, l'étude d'incidence environnementale mentionnée à l'article L. 181-8 et son résumé non technique, une note de présentation précisant les coordonnées du maître d'ouvrage ou de la personne publique responsable du projet, plan ou programme, l'objet de l'enquête, les caractéristiques les plus importantes du projet, plan ou programme et présentant un résumé des principales raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'environnement, le projet, plan ou programme soumis à enquête a été retenu ; (...) ". Aux termes de l'article R. 562-3 du même code, relatif à l'élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles : " Le dossier de projet de plan comprend : / 1° Une note de présentation indiquant le secteur géographique concerné, la nature des phénomènes naturels pris en compte et leurs conséquences possibles, compte tenu de l'état des connaissances ; / 2° Un ou plusieurs documents graphiques délimitant les zones mentionnées aux 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 ; / 3° Un règlement précisant, en tant que de besoin : / a) Les mesures d'interdiction et les prescriptions applicables dans chacune de ces zones en vertu des 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 ; / b) Les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde mentionnées au 3° du II de l'article L. 562-1 et les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existant à la date de l'approbation du plan, mentionnées au 4° de ce même II. Le règlement mentionne, le cas échéant, celles de ces mesures dont la mise en œuvre est obligatoire et le délai fixé pour celle-ci. "

17. En premier lieu, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, notamment des dispositions précitées des articles R. 123-8 et R. 562-3 du code de l'environnement, que le dossier de projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles de La Couarde-sur-Mer soumis à l'enquête publique devait comporter un résumé non technique et une note présentant un résumé des principales raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'environnement, le plan a été retenu. En revanche, le dossier de projet de plan contenait une note de présentation, un règlement et des plans de zonage réglementaire afin de délimiter les zones exposées à des risques naturels, conformément aux prescriptions précitées de l'article R. 562-3 du code de l'environnement.

18. En deuxième lieu, s'il est constant que l'arrêté du 27 novembre 2014 portant dispense d'évaluation environnementale ne figurait pas dans le dossier d'enquête publique, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle absence aurait nui à l'information du public ou aurait été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et sur la décision de l'autorité administrative dès lors que la note de présentation du projet, jointe au dossier d'enquête publique, faisait mention de l'arrêté du 27 novembre 2014 et de son contenu.

19. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que les couleurs choisies pour distinguer les différents zonages sur la carte de zonage réglementaire à l'échelle 1/5000 jointe au dossier d'enquête publique ont été fixées dans un cadre national et sont utilisées dans tous les plans de prévention des risques naturels. S'agissant du secteur du Fond des Airs, il ressort clairement de la carte de zonage que l'essentiel des parcelles du secteur sont en zone rose correspondant, selon la légende, à la zone Rs3, concernant les zones naturelles en aléas faible, modéré et fort pour l'aléa court terme et les zones naturelles hors aléa à court terme et en aléas modéré, fort et très fort pour l'aléa long terme, ainsi que les zones urbanisées en aléa modéré et fort pour l'aléa court terme. La seule circonstance que certains propriétaires du secteur du Fond des Airs ont confondu les couleurs et ont cru à tort que leurs parcelles étaient situées en zone orange Os, concernant les zones fortement urbanisées en aléa modéré à court terme, au lieu de la zone Rs3 ne permet pas de considérer que la carte de zonage était illisible au point de nuire à l'information du public. A cet égard, les auteurs du plan ont répondu à chacune de leurs observations au cours de l'enquête publique et ont rectifié les erreurs de lecture ainsi commises. En outre, il ressort du rapport d'enquête que d'autres propriétaires du secteur du Fond des Airs ont correctement lu la carte et ont retenu que leurs parcelles étaient classées en zone Rs3.

20. Enfin, lorsque des dispositions législatives ont été prises pour assurer la mise en œuvre du principe de participation énoncé à l'article 7 de la Charte de l'environnement, la légalité d'une décision administrative s'apprécie par rapport aux dispositions législatives prises pour l'application de ce principe. Par suite, les requérants ne peuvent utilement invoquer le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait été pris au terme d'une procédure méconnaissant les exigences résultant de l'article 7 de la Charte de l'environnement, dont la mise en œuvre est assurée, s'agissant de l'enquête publique, par les dispositions des articles L. 123-1 et L. 123-3 du code de l'environnement.

21. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier soumis à enquête publique était incomplet ou de nature à induire en erreur le public.

En ce qui concerne l'avis de la commission d'enquête :

22. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...) ". Si ces dispositions n'imposent pas à la commission d'enquête de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent à indiquer en livrant ses conclusions, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

23. Il ressort des pièces du dossier que les conclusions et l'avis motivé émis par la commission d'enquête, compris dans un document séparé, comportent dix-neuf pages dans lesquelles elle dresse un bilan du déroulement de l'enquête publique, reprend les principaux thèmes abordés par le public, renvoie aux réponses du maître d'ouvrage faites aux observations du public et aux questionnements de la commission et donne un avis personnel sur les différents points du dossier qui, malgré le caractère succinct de certaines réponses, permet de comprendre les raisons pour lesquelles la commission d'enquête a émis un avis favorable sans réserve au projet de plan de prévention des risques naturels de la commune de La Couarde-sur-Mer. A cet égard, et contrairement à ce qui est soutenu, la commission d'enquête, qui relève que le plan de prévention des risques naturels constitue un rempart contre le risque quasi-certain de submersion marine et que son application s'impose comme une nécessité d'intérêt général, s'est positionnée de façon circonstanciée sur la nécessité de procéder à l'élaboration d'un nouveau plan de prévention des risques. S'agissant de l'utilisation du système " Litto3D ", après avoir indiqué dans son rapport que cette technologie fournie par l'Institut géographique national est la plus grande source d'information topographique précise disponible à l'échelle de l'île de Ré, que, d'ailleurs, dans le cadre des études demandées par la communauté de communes au bureau CASAGEC, l'altimétrie adoptée relève du même outil et que les données altimétriques issues de relevés effectués par des géomètres experts ont été introduites dans les modèles du système " Litto3D " lorsqu'elles ont été fournies aux services de l'Etat, la commission d'enquête a estimé dans ses conclusions que les réponses du pétitionnaire à ses questionnements notamment quant à la fiabilité du système " Litto3D ", ont été complètes et particulièrement argumentées. Par ailleurs, s'agissant de la possible défaillance massive des ouvrages de protection, la commission d'enquête relève que selon la circulaire du 27 juillet 2011, aucun ouvrage de protection ne doit être considéré comme infaillible et un scénario de défaillance de l'ouvrage doit être envisagé, et elle estime que les principes posés par cette circulaire " mêmes décriés ou contestés, sont toujours en vigueur " et qu'il ne peut en conséquence être reproché aux services de l'Etat d'avoir appliqué ce texte avec toutes les conséquences qui en découlent. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'avis de la commission d'enquête est insuffisamment motivé.

En ce qui concerne le classement du secteur du Fond des Airs :

24. Il résulte des articles L. 562-1 et R. 562-3 du code de l'environnement que le classement de terrains par un plan de prévention des risques naturels prévisibles a pour objet de déterminer, en fonction de la nature et de l'intensité des risques auxquels ces terrains sont exposés, les interdictions et prescriptions nécessaires, à titre préventif, notamment pour ne pas aggraver le risque pour les vies humaines.

25. La zone Rs3 est liée aux aléas d'érosion côtière et de submersion marine et correspond, selon le règlement du plan de prévention des risques naturels de La Couarde-sur-Mer, aux zones naturelles en aléas faible, modéré et fort pour l'aléa à court terme, aux zones naturelles hors aléa à court terme et en aléas modéré, fort et très fort pour l'aléa à long terme ainsi qu'aux zones urbanisées en aléa modéré et fort pour l'aléa à court terme. Le règlement de cette zone prévoit que l'inconstructibilité est la règle générale et interdit toutes les nouvelles réalisations de constructions, d'ouvrages, d'installations, de travaux notamment la création de terrains de camping et de caravanage et l'extension des terrains existants, tous stationnements de caravanes sauf exceptions, toute nouvelle implantation de résidences mobiles de loisir, ainsi que le gardiennage de caravanes, toute création ou extension d'aires d'habitations légères de loisir de type parc résidentiel de loisirs et toute création ou extension d'aires de stationnement de camping-cars.

26. Il ressort des pièces du dossier que le secteur du Fond des Airs correspond, sur le territoire de La Couarde-sur-Mer, à une zone divisée en une quarantaine de parcelles privées utilisées pour la pratique du camping et du caravaning et abritant notamment des mobil-homes, des caravanes, des abris de jardin et des locaux sanitaires. La majorité des parcelles situées dans le secteur du Fond des Airs ont été classées en zone Rs3 aux motifs, d'une part, que le secteur se trouve en aléa de submersion marine modéré ou faible à court terme et modéré à long terme et, d'autre part, que cette zone de camping constitue un espace naturel au sens du plan de prévention des risques. Il ressort des pièces du dossier que le secteur du Fond des Airs est séparé du bourg de La Couarde-sur-Mer au sud par la route départementale n° 735, qui marque une coupure d'urbanisation, et ne peut donc être regardé comme étant situé en continuité d'une zone urbanisée. Le secteur est contigu au nord et à l'ouest de terrains non bâtis à vocation agricole. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le secteur serait constitué de constructions soumises à autorisation d'un nombre et d'une densité suffisante pour permettre de qualifier le secteur du Fond des Airs de zone urbanisée. En outre, il ressort de la note de présentation du plan de prévention que, dans le cadre de la détermination des enjeux, les auteurs du plan ont qualifié les espaces urbanisés en retenant le nombre de bâtiments " en dur " à l'hectare et ont retenu un enjeu particulier lié aux terrains accueillant des mobil-homes, spécialement vulnérables, et qui peuvent difficilement faire l'objet de mesures de réduction de leur vulnérabilité. En effet, et ainsi que l'indique la note de présentation, n'étant pas des bâtiments " en dur " et ce quand bien même ils ne disposeraient plus de leurs moyens de mobilité et seraient raccordés aux réseaux, les mobil-homes sont susceptibles d'être emportés par les eaux, de provoquer à cette occasion des dégâts sur des constructions et de constituer ainsi un risque pour les vies humaines. Dans ces conditions, les auteurs du plan n'ont commis ni erreur de fait ni erreur manifeste d'appréciation en classant la majorité des parcelles en zone inconstructible Rs3.

27. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêté du 15 février 2018 approuvant le plan de prévention des risques naturels prévisibles de la commune de La Couarde-sur-Mer est seulement entaché d'un vice affectant la décision de le dispenser d'une évaluation environnementale.

Sur la régularisation du vice entachant le plan litigieux :

28. Aux termes de l'article L. 191-1 du code de l'environnement, issu de la loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat : " Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre un plan ou programme mentionné au 1° de l'article L. 122-5, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'une illégalité entachant l'élaboration, la modification ou la révision de cet acte est susceptible d'être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation et pendant lequel le plan ou programme reste applicable. / Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. ". Aux termes de l'article L. 122-5 du même code : " Un décret en Conseil d'Etat précise notamment : / 1° La liste des plans et programmes soumis à évaluation environnementale de manière systématique ou à un examen au cas par cas, en application des II et III de l'article L. 122-4 et les conditions de son actualisation annuelle ; (...) ".

29. Ces dispositions, qui instituent des règles de procédure concernant exclusivement les pouvoirs du juge administratif en matière de contentieux des plans ou programmes mentionnés au 1° de l'article L. 122-5 du code de l'environnement, sont, en l'absence de dispositions expresses contraires, d'application immédiate aux instances en cours.

30. Ces dispositions permettent au juge, même pour la première fois en appel, lorsqu'il constate un vice qui entache la légalité d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, mais qui peut être régularisé par un arrêté d'approbation modificatif, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l'intervention d'une décision corrigeant le vice dont est entachée l'arrêté attaqué. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de l'arrêté attaqué, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l'illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d'autres modalités, qu'il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue.

31. En l'espèce, le vice affectant la dispense du plan en litige d'une évaluation environnementale peut être régularisé par la consultation d'une autorité présentant les garanties d'objectivité requises.

32. Aux termes du 2° du II de l'article R. 122-17 du code de l'environnement dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, les plans de prévention des risques naturels prévisibles prévus par l'article L. 562-1 du code de l'environnement sont au nombre des plans et programmes susceptibles de faire l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas. Selon le 1° du IV du même article, pour les plans et programmes soumis à évaluation environnementale en application du II, l'autorité environnementale est la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable pour les plans et programmes mentionnés au 2° du II.

33. Il résulte des dispositions énoncées au point 32 que l'autorité administrative de l'Etat compétente pour procéder à l'examen au cas par cas des plans de prévention des risques naturels prévisibles est donc désormais la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable. Cette formation constitue une entité administrative de l'Etat, séparée de l'autorité compétente pour élaborer les plans de prévention des risques naturels prévisibles, disposant d'une autonomie réelle la mettant en mesure de décider objectivement si une évaluation environnementale des incidences de ces plans doit être réalisée. Le vice de procédure peut ainsi être régularisé par une décision de la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable sur la nécessité d'une telle évaluation.

34. Si, au regard des informations fournies par le préfet de la Charente-Maritime et des critères de l'annexe II de la directive n° 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001, la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable décide que le plan en litige doit faire l'objet d'une évaluation environnementale, celle-ci devra être réalisée et portée à la connaissance du public et faire l'objet d'une enquête publique comme l'imposait à la date de l'arrêté en litige les dispositions de l'article L. 562-3 du code de l'environnement ainsi que d'une consultation des conseils municipaux et organismes intéressés. Au vu des résultats de cette nouvelle enquête et de ces consultations, le préfet de la Charente-Maritime pourra décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant le vice entachant la procédure initiale.

35. Si la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable décide de dispenser d'évaluation environnementale le plan en litige, l'information du public et des organismes précédemment cités sur la nouvelle décision de l'autorité environnementale prendra la forme d'une mise en ligne sur le site internet de la préfecture de la Charente-Maritime ou, à défaut, sur celui de l'autorité environnementale saisie à cet effet. Le préfet de la Charente-Maritime pourra décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant le vice initial lié à l'irrégularité retenue par la cour.

36. Dans l'hypothèse où, comme rappelé au point 35, le préfet devrait organiser une simple procédure d'information de la décision prise par la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable avant de décider de prendre un arrêté de régularisation, il sera sursis à statuer sur la présente requête, pendant un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, jusqu'à ce que le préfet de la Charente-Maritime ait transmis à la cour l'arrêté de régularisation pris à la suite de cette procédure.

37. Dans l'hypothèse où, comme rappelé au point 34, le préfet devrait organiser de nouvelles consultations et une nouvelle enquête publique, il sera sursis à statuer sur la présente requête, pendant un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, jusqu'à ce que le préfet de la Charente-Maritime ait transmis à la cour l'arrêté de régularisation pris à la suite de cette procédure.

DECIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de l'association Le Fond des Airs et autres jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois ou de six mois à compter de la notification du présent arrêt pour permettre au préfet de la Charente-Maritime de notifier le cas échéant à la cour une mesure de régularisation de l'illégalité mentionnée au point 11 du présent arrêt.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Le Fond des Airs, à M. A... D..., à Mme E... C... épouse D..., à la ministre de la transition écologique et de la cohésion territoriale et au préfet de la Charente-Maritime.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Nathalie Gay, première conseillère,

Mme Laury Michel, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.

La rapporteure,

Laury B...

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX04918


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04918
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Laury MICHEL
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : JEAN MEIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-07-05;19bx04918 ?
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