La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2022 | FRANCE | N°21BX04073

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 22 septembre 2022, 21BX04073


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner

le centre hospitalier La Valette de Saint-Vaury à lui verser une indemnité de 6 251,24 euros.

Par un jugement n° 1700743 du 28 mai 2020, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et des mémoires enregistrés les 28 juillet 2020,

20 octobre 2020 et 6 mai 2021, M. B..., représenté par la SCP Jérôme Rousseau

et Guillaume Tapie, a demandé au Consei

l d'Etat d'annuler ce jugement et de mettre à la charge du centre hospitalier de Saint-Vaury une somme de 3 000 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner

le centre hospitalier La Valette de Saint-Vaury à lui verser une indemnité de 6 251,24 euros.

Par un jugement n° 1700743 du 28 mai 2020, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et des mémoires enregistrés les 28 juillet 2020,

20 octobre 2020 et 6 mai 2021, M. B..., représenté par la SCP Jérôme Rousseau

et Guillaume Tapie, a demandé au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement et de mettre à la charge du centre hospitalier de Saint-Vaury une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement a été rendu au terme d'une procédure irrégulière, sans audience publique ;

- dès lors qu'il a indiqué qu'il maintenait ses écritures après la production du mémoire en défense, c'est à tort que le président du tribunal a estimé qu'il ne remettait pas en cause les affirmations du centre hospitalier selon lesquelles un accord était intervenu entre les parties ;

- le courriel du 8 février 2016 du directeur du centre hospitalier à l'agence régionale de santé produit avec le mémoire en défense ne constituait pas la preuve de la transaction alléguée, et il a implicitement mais nécessairement contesté l'existence d'un accord en répondant au tribunal, dans le délai qui lui avait été imparti, qu'il maintenait l'ensemble des conclusions de sa requête ;

- alors qu'un doute subsistait sur la réalité d'un accord, le tribunal ne pouvait rejeter sa demande sans avoir procédé au préalable à un supplément d'instruction ;

- il n'a pas renoncé à percevoir le remboursement de ses frais de transport, mais au contraire a relancé l'administration le 23 juin 2016 en lui rappelant qu'elle avait accepté de faire droit à sa demande, et aucun versement n'a été effectué ;

- la décision définitive du 12 février 2013 invoquée par le centre hospitalier ne portait ni sur la même période ni sur les mêmes sommes que sa demande du 14 février 2017, relative

à 249 trajets de retour entre Bourganeuf et Saint-Vaury pour la période du 1er janvier 2013

au 30 novembre 2014.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2021, le centre hospitalier

de Saint-Vaury conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire, en cas d'annulation du jugement, au rejet de la demande présentée par M. B... devant le tribunal, et dans tous les cas à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- à titre principal, les moyens d'appel invoqués par M. B... ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, la demande de première instance avait pour objet d'obtenir par une voie détournée un remboursement de frais de déplacement qui avait été précédemment refusé par une décision devenue définitive, laquelle aurait dû être contestée par un recours pour excès de pouvoir dès lors qu'elle avait un caractère purement pécuniaire ; elle était ainsi entachée d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance et ne pouvait qu'être rejetée ;

- à titre infiniment subsidiaire, les besoins du service ne justifient pas que M. B... revienne chaque soir à Saint-Vaury après son service à Bourganeuf et avant de rentrer à son domicile.

Par une décision n° 442261 du 29 octobre 2021, le Conseil d'Etat a attribué à la cour le jugement de la requête de M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le décret n° 90-437 du 28 mai 1990 ;

- le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Gaucher-Piola, représentant le centre hospitalier La Valette de Saint-Vaury.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., pharmacien praticien hospitalier à temps plein, exerce ses fonctions depuis 1995 au centre hospitalier Bernard Desplas de Bourganeuf et au centre hospitalier La Valette de Saint-Vaury, à raison d'un mi-temps dans chaque hôpital, dans le cadre d'une convention prévoyant notamment que l'établissement de la résidence administrative de l'intéressé assure le paiement de ses frais de déplacement entre les deux hôpitaux, dont la moitié lui est remboursée mensuellement par l'autre. En 2012, sa résidence administrative a été transférée du centre hospitalier de Bourganeuf à celui de Saint-Vaury, et à partir de janvier 2013, le directeur de ce dernier établissement a limité le remboursement à un seul déplacement par jour de Saint-Vaury à Bourganeuf, au motif que le retour de M. B... à Saint-Vaury, au terme de son service de l'après-midi à Bourganeuf, n'apparaissait pas nécessaire. Ce n'est qu'à partir de décembre 2014 que les allers et retours ont été à nouveau pris en charge. Par une réclamation préalable reçue le 14 février 2017, M. B... a demandé au directeur du centre hospitalier de Saint-Vaury de lui verser la somme de 6 103,39 euros, dont 3 857,58 euros au titre des trajets de retour non admis entre le 1er janvier 2013 et le 30 novembre 2014 assortis des intérêts sur cette somme,

et 2 000 euros au titre de son préjudice moral. En l'absence de réponse, il a saisi le tribunal administratif de Limoges d'une demande de condamnation du centre hospitalier à lui verser une indemnité de 6 251,24 euros incluant les intérêts. Il relève appel du jugement du 28 mai 2020 par lequel le tribunal a rejeté sa demande au motif qu'il devait être regardé comme ne remettant pas en cause les affirmations du centre hospitalier selon lesquelles un accord était intervenu entre les parties.

2. A l'appui de son mémoire en défense enregistré le 25 octobre 2018, dans lequel il faisait valoir que M. B... s'était engagé à abandonner ses prétentions sur les défraiements de ses trajets quotidiens, le centre hospitalier de Saint-Vaury a produit un courriel de son directeur à l'agence régionale de santé du 8 février 2016 affirmant que M. B... aurait pris un tel engagement lors d'un entretien du même jour. Ces éléments n'étaient pas corroborés par les pièces du dossier dès lors que la réclamation préalable du 10 février 2017 démontrait la persistance d'un désaccord. M. B... a répondu positivement, le 20 décembre 2018, à la lettre du magistrat délégué du 26 novembre 2018 lui demandant, sur le fondement des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative, de confirmer dans le délai d'un mois s'il maintenait ses conclusions. Par suite, et alors même que M. B... n'avait pas produit de mémoire en réplique, le tribunal ne pouvait se fonder, pour rejeter ses conclusions indemnitaires, sur ce qu'il n'aurait pas remis en cause les affirmations du centre hospitalier selon lesquelles un accord était intervenu.

3. Il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur la demande de M. B....

4. Si le centre hospitalier de Saint-Vaury invoque la tardiveté de la demande de remboursement des frais de déplacement pour avoir été précédemment rejetée par une décision devenue définitive, la décision qu'il invoque est un courriel du 12 février 2013 de son directeur à l'agent chargé du paiement des frais de déplacement, dont M. B... était destinataire en copie. En admettant même que ce courriel puisse être regardé comme un refus opposé à M. B..., il n'était pas assorti des voies et délais de recours, de sorte qu'il ne pouvait faire courir le délai de recours conformément aux dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait eu connaissance de cette décision avant le 10 février 2017, date de sa réclamation préalable, et il a ensuite saisi le tribunal dans un délai raisonnable, le 29 mai 2017. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de remboursement des frais de déplacement doit être écartée.

5. L'article R. 6152-32 du code de la santé publique prévoit que les frais de déplacement engagés par les praticiens hospitaliers à l'occasion de leurs déplacements temporaires effectués pour les besoins du service sont remboursés conformément aux dispositions applicables aux fonctionnaires de l'Etat. Aux termes de l'article 3 du décret

du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de remboursement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l'Etat : " Lorsque l'agent se déplace pour les besoins du service à l'occasion d'une mission, d'une tournée ou d'un intérim, il peut prétendre, (..)sous réserve de pouvoir justifier du paiement auprès du seul ordonnateur : /

- à la prise en charge de ses frais de transport ; / (...). " L'article 4 du décret n° 90-437

du 28 mai 1990 applicable aux fonctionnaires de l'Etat définit la résidence administrative comme le territoire de la commune sur lequel se situe le service où l'agent est affecté. Enfin, l'article 2 de la convention signée le 4 janvier 2012 par les directeurs des deux hôpitaux désigne celui de Saint-Vaury comme l'établissement de rattachement, ce qui fait de la commune de Saint-Vaury la résidence administrative du pharmacien praticien hospitalier, et l'article 7 de cette convention prévoit que ses frais de déplacement sont payés par le centre hospitalier de Saint-Vaury. Il en résulte que sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement, M. B... est fondé à demander la condamnation du centre hospitalier de Saint-Vaury à lui verser la somme non contestée de 3 857,58 euros au titre de 249 trajets de Bourganeuf à Saint-Vaury effectués

du 1er janvier 2013 au 30 novembre 2014.

6. Il ne résulte pas de l'instruction que la résistance du centre hospitalier serait susceptible de caractériser un préjudice moral. Par suite, la demande présentée à ce titre par M. B... ne peut être accueillie.

7. M. B... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 3 857,58 euros à compter du 14 février 2017, date de réception de sa réclamation préalable.

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier de Saint-Vaury une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... à l'occasion du présent litige. Le centre hospitalier, qui est la partie perdante, n'est pas fondé à demander l'allocation d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges n° 1700743 du 28 mai 2020

est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier de Saint-Vaury est condamné à verser à M. B... une somme

de 3 857,58 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 février 2017.

Article 3 : Le centre hospitalier de Saint-Vaury versera à M. B... une somme de 1 500 euros

au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au centre hospitalier La Valette de Saint-Vaury.

Délibéré après l'audience du 30 août 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2022.

La rapporteure,

Anne A...

La présidente,

Catherine GiraultLa greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21BX04073


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04073
Date de la décision : 22/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : SCP DAURIAC PAULIAT - DEFAYE BOUCHERLE MAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-09-22;21bx04073 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award