La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2022 | FRANCE | N°21BX04442

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 22 septembre 2022, 21BX04442


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 25 mai 2021 par lequel la préfète de la Vienne lui a retiré son titre de séjour, ainsi que les deux arrêtés du même jour par lesquels la préfète, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi, et, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2101385 du 14 septembre 2021, le tribunal administratif

de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 25 mai 2021 par lequel la préfète de la Vienne lui a retiré son titre de séjour, ainsi que les deux arrêtés du même jour par lesquels la préfète, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi, et, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2101385 du 14 septembre 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 décembre 2021, M. A..., représenté par Me Hay, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 14 septembre 2021 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2021 par lequel la préfète de la Vienne a retiré son titre de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 mai 2021 par lequel la préfète de la Vienne lui a retiré son titre de séjour ;

3°) d'enjoindre à la préfète de lui restituer son titre de séjour dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il n'a pas été mis à même de présenter ses observations préalablement à l'intervention de la décision en litige, en méconnaissance de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- son titre de séjour lui a été retiré plus de quatre mois après sa délivrance, en méconnaissance de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration ; ainsi, ce retrait est illégal ;

- son comportement ne pouvait être regardé comme constituant une menace à l'ordre public.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 juin 2022, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 28 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme E... B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 20 février 1998, est entré sur le territoire français au mois de septembre 2014 à l'âge de seize ans et a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance. Il a bénéficié de titres de séjour portant la mention étudiant du 8 avril 2016 au 7 avril 2018, puis de titres de séjour portant la mention vie privée et familiale depuis le 21 février 2019. Par un arrêté du 25 mai 2021, la préfète de la Vienne a décidé le retrait du titre de séjour de M. A..., et, par deux arrêtés du même jour, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi, et, d'autre part, l'a assigné à résidence. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 14 septembre 2021 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2021 par lequel la préfète de la Vienne a retiré son titre de séjour.

Sur la légalité de l'arrêté du 25 mai 2021 :

2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Et aux termes de l'article L. 121-2 de ce code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été informé par un courrier du 25 mai 2021 de ce que le retrait de son titre de séjour était envisagé par la préfète. Or, l'arrêté en litige lui a été notifié le même jour que ce courrier, à 11h37. Dans les circonstances de l'espèce, au regard de ce très bref délai, et alors que le préfet n'allègue aucune situation d'urgence permettant d'en justifier, M. A... ne peut être regardé comme ayant été mis en mesure de se faire assister par un conseil et a ainsi été privé d'une garantie. Par suite, il est fondé à soutenir que l'arrêté en litige a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière de nature à entacher cet arrêté d'illégalité alors même qu'il a été mis à même de présenter des observations lors de son audition par les services de police dans le cadre de son interpellation pour " conduite malgré l'annulation de son permis de conduire et défaut d'assurance ", audition au cours de laquelle la question du retrait de son titre de séjour n'a pas été évoquée, et qu'il a formulé une observation succincte sur le courrier l'informant de ses droits.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2021 par lequel la préfète lui a retiré son titre de séjour.

Sur l'injonction :

5. Il résulte de l'instruction que la validité du titre de séjour de M. A... a expiré le 20 février 2022. Ainsi, les conclusions présentées par le requérant tendant à la restitution de son titre de séjour doivent être rejetées. En revanche, eu égard du motif d'annulation retenu, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Vienne de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois. Par ailleurs, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros à verser au conseil de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : L'arrêté du 25 mai 2021 par lequel la préfète de la Vienne a retiré son titre de séjour à M. A... est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 14 septembre 2021 est annulé en tant qu'il est contraire à l'article 1er.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Vienne de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'État versera au conseil de M. A... une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Émilie Hay.

Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 septembre 2022.

La rapporteure,

Charlotte B...La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX04442 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04442
Date de la décision : 22/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : HAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-09-22;21bx04442 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award