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20/10/2022 | FRANCE | N°20BX02662

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre (formation à 5), 20 octobre 2022, 20BX02662


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 30 avril 2019 par laquelle la ministre des armées, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours administratif préalable formé à l'encontre du bulletin de notation établi au titre de l'année 2018 et d'enjoindre à la ministre de procéder à une nouvelle notation.

Mme A... a également demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 3 janvier 2019 par laquel

le la ministre des armées, après avis de la commission des recours des militaires, a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 30 avril 2019 par laquelle la ministre des armées, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours administratif préalable formé à l'encontre du bulletin de notation établi au titre de l'année 2018 et d'enjoindre à la ministre de procéder à une nouvelle notation.

Mme A... a également demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 3 janvier 2019 par laquelle la ministre des armées, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours administratif préalable formé à l'encontre de la décision du 21 décembre 2017 portant inscription au tableau d'avancement au grade de médecin chef pour l'année 2018 en tant qu'elle n'y figure pas et d'enjoindre à la ministre de réexaminer sa candidature et de procéder à son inscription au tableau d'avancement au grade de médecin chef pour l'année 2018.

Par deux jugements n° 1900866 et 1801684 des 24 juin 2020 et 29 juillet 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 17 août 2020, sous le n°20BX02662, Mme A..., représentée par Me Maumont, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 24 juin 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 30 avril 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté le recours administratif préalable obligatoire régularisé devant la commission des recours des militaires suivant correspondance du 19 octobre 2018 reçu le 24 octobre 2018, formé à l'encontre de son bulletin de notation au titre de l'année 2018, qui lui a été notifié le 10 septembre 2018 ;

3°) d'enjoindre à l'administration d'établir un nouveau bulletin de notation conforme à ses réels mérites, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son recours exercé dans le délai légal de deux mois est recevable ;

- le jugement de première instance est insuffisamment motivé en droit s'agissant en particulier des points 3, 4 et 5 ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses mérites et de sa carrière ;

- sa notation pour l'année 2018, qui comporte plusieurs incohérences entre les cotations et les appréciations littérales retenues, doit être révisée ;

- cette notation ne tient pas compte de l'ensemble de ses réalisations ;

- en l'absence de toute sanction ou punition dans son dossier et compte tenu des bulletins de notation antérieurs aux faits dénoncés et des multiples récompenses obtenues, la lettre A aurait dû être retenue pour sa notation 2018 ;

- sa notation révèle un détournement de pouvoir eu égard aux circonstances de fait entourant la prise de la décision attaquée ;

- la notation qui lui a été attribuée ne respecte pas l'exigence d'objectivité requise ; la référence par le notateur à son placement en congé maladie est constitutive d'une discrimination fondée sur son état de santé ; la notation 2018 méconnaît dès lors les principes consacrés aux articles R. 4135-1 à R.431-3 du code de la défense ainsi que les dispositions de l'instruction n°19931/DEF/ SGA/DRH-MD/SDPEP du 6 septembre 2016.

II. Par une requête enregistrée le 22 septembre 2020, sous le n°20BX03207, Mme A..., représentée par Me Maumont, demande à la cour :

1°) avant dire droit, de mettre en œuvre son pouvoir d'instruction aux fins de contrôle de la valeur professionnelle des candidats à l'avancement et des travaux de la commission d'avancement ;

2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 29 juillet 2020 ;

3°) d'annuler la décision du 3 janvier 2019 par laquelle la ministre des armées, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours à l'encontre de la décision du 21 décembre 2017 portant inscription au tableau d'avancement pour l'année 2018 et non inscription au grade de médecin en chef ;

4°) d'enjoindre à la ministre des armées de l'inscrire au grade de médecin en chef au titre du tableau d'avancement 2018 et de la rétablir dans les droits et avantages dont elle a été privée ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ne disposaient pas des éléments pour juger que d'autres candidatures étaient plus méritantes ;

- il revient à la cour de solliciter auprès de l'administration la communication des dossiers de candidatures ainsi que des procès-verbaux de la commission d'avancement pour contrôler les mérites des autres candidats et les travaux de la commission d'avancement ;

- il n'est pas formellement établi que l'administration a procédé à un réel examen de son dossier et de sa valeur professionnelle alors que des candidats plus jeunes et de classement inférieur ou encore des candidats qui ne sont jamais partis en opération extérieures ont été nommés au grade ;

- sa candidature n'a pu être examinée à bon escient compte tenu des difficultés liées à l'établissement de sa notation au titre de l'année 2016, annulée par le tribunal administratif et de celle de 2017 qui ne repose pas sur ses réels mérites ;

- le tableau d'avancement pour l'année 2018 a été pris en violation de la procédure de classement par ordre de mérite telle que fixée par l'instruction n°220086/DEF/SGA/DRH-MD/SDPEP relative à l'avancement des officiers et à l'évaluation de leur potentiel du 14 mars 2014 ; la mention d'appui ne lui pas été communiquée ;

- sa non inscription au tableau d'avancement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle a obtenu des notations élogieuses jusqu'en 2016, de nombreuses décorations et récompenses, qu'elle est titulaire de nombreux diplômes, que son dossier disciplinaire ne fait état d'aucune sanction, qu'elle a occupé un poste à responsabilité en qualité de médecin-chef adjoint du CMIA de Dakar et qu'elle s'est vue confier de nombreuses missions illustrant la reconnaissance de ses compétences de commandement et de son expertise opérationnelle ;

- la décision de ne pas l'inscrire au tableau d'avancement 2018 est entachée de détournement de pouvoir dès lors qu'elle ne repose pas sur ses mérites réels mais sur des motifs autres ; sa non inscription au tableau d'avancement résulte d'une mise au placard qui a débuté avec la dénonciation des faits de harcèlement moral qu'elle a subis.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le décret n° 2008-933 du 12 septembre 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... D...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., recrutée en 1997, a été nommée en 2007 dans le corps des médecins des armées au grade de médecin et a obtenu, le 1er octobre 2011, le grade de médecin principal. Le 4 décembre 2013, elle a été affectée au centre médical interarmées des éléments français au Sénégal à Dakar, en qualité de médecin-chef adjoint de ce centre, pour une durée de trois ans puis, à compter du 15 août 2016, elle a été nommée au poste de médecin adjoint du centre médical interarmées de Rochefort-Cognac et de médecin-adjoint de la 107ème antenne médicale de Poitiers-Ladmirault. Mme A..., qui dénonçait une dégradation de ses conditions de travail, a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 30 avril 2019 par laquelle la ministre des armées, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours administratif préalable formé à l'encontre du bulletin de notation établi au titre de l'année 2018. Mme A... a également demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 3 janvier 2019 par laquelle la ministre des armées, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours administratif préalable formé à l'encontre de la décision du 21 décembre 2017 portant inscription au tableau d'avancement au grade de médecin chef pour l'année 2018 en tant qu'elle n'y figure pas et n'a pas fait l'objet d'un avancement au grade supérieur. Mme A... relève appel des jugements n° 1900866 et 1801684 des 24 juin 2020 et 29 juillet 2020 par lesquels le tribunal administratif de Poitiers a rejeté l'ensemble de ses demandes.

2. Les requêtes n°20BX02662 et 20BX03207 concernent la situation d'un même agent. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la requête n°20BX02662 :

En ce qui concerne la régularité du jugement n° 1900866 :

3. Contrairement à ce que soutient Mme A..., le jugement attaqué, qui rappelle les dispositions des articles L. 4135-1, R. 4135-1, R. 4135-2, R. 4135-3 et R. 4135-5 du code de la défense ainsi que les éléments de fait sur lesquels il est fondé, ne s'est pas borné à un simple contrôle des faits mais a procédé à une analyse des moyens invoqués par l'intéressée, ce qui lui a permis de contester utilement la solution retenue par les premiers juges. Par suite, contrairement à ce que soutient l'appelante, le jugement est suffisamment motivé.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision de la ministre du 30 avril 2019 arrêtant la notation de Mme A... au titre de l'année 2018 :

4. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 4135-1 du code de la défense : " Les militaires sont notés au moins une fois par an. / La notation est traduite par des notes et des appréciations qui sont obligatoirement communiquées chaque année aux militaires. / A l'occasion de la notation, le chef fait connaître à chacun de ses subordonnés directs son appréciation sur sa manière de servir (...). ". Selon le second alinéa de l'article R. 4135-3 du même code : " Pour établir la notation du militaire, ces autorités doivent prendre en considération l'ensemble des activités liées au service exécutées par l'intéressé au cours de la période de notation, à l'exception de celles exercées en tant que représentant de militaires auprès de la hiérarchie ou au sein d'un organisme consultatif. ". Enfin, aux termes de l'article R. 4135-5 du même code : " Le militaire est noté au moins une fois par an lorsqu'il a accompli au moins cent vingt jours de présence effective en position d'activité durant la période de notation. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la notation d'un militaire doit constituer une appréciation objective et complète par l'autorité hiérarchique des qualités et des aptitudes dont il a fait preuve pendant la période de notation.

5. Il ressort des pièces du dossier que pour attribuer à Mme A... la note globale de " B-très bon ", au titre de l'appréciation globale des services rendus sur la période du 1er juin 2017 au 31 mai 2018, le notateur de premier degré a relevé notamment que l'intéressée " confrontée à des difficultés sans liens avec l'antenne a fait face avec courage et détermination pour maintenir la cohésion et le fonctionnement optimal du 107ème AM " et que sa " grande expérience de la médecine d'unité et de la médecine en opération extérieure lui ont permis de réaliser un mandat exceptionnel en qualité de médecin chef de GTIA et d'être appréciée et écoutée avec bienveillance du commandement des unités soutenues ", tandis que le notateur de second degré a retenu que Mme A... " possède toutes les qualités pour accéder sans délai à des responsabilités supérieures ". Toutefois, il ressort également de cette évaluation que les résultats qu'elle a obtenus en dehors des missions extérieures " n'ont pas été à la hauteur de ce qui était attendu " et que " les résultats exceptionnels obtenus en opération extérieure exigeante ne se sont pas confirmés au retour à la tête de la 107ème antenne médicale, probablement en raison de problèmes extérieurs à l'antenne, qui ont interférer dans une volonté indéniable de faire au mieux ".

6. Contrairement à ce que soutient Mme A..., il résulte de cette évaluation que l'autorité hiérarchique a pris en compte les services accomplis en opération extérieure lui ayant valu une citation du 27 avril 2018 alors même que cette mission s'est déroulée pour l'essentiel en dehors de la période de notation considérée. Ni la date de l'établissement de l'indice relatif interarmées, lequel est au demeurant indépendant de la notation, ni les circonstances que le prédécesseur de Mme A... a obtenu une meilleure appréciation des services rendus et qu'elle a été empêchée d'exposer son travail lors du premier bilan du 21 mars 2018 du fait de son placement en congé maladie ne permettent de considérer, alors qu'il est constant qu'elle a accompli au moins cent vingt jours de présence effective en position d'activité, que sa notation définitive, arrêtée par la décision du 30 avril 2019, n'aurait pas été prise à l'issue d'une appréciation complète et objective par l'autorité hiérarchique des qualités et mérites dont elle a fait preuve pendant la période globale de notation.

7. Si Mme A... soutient que les qualificatifs retenus par le notateur dans l'appréciation globale des services rendus et sa manière de servir auraient justifié la note globale de " A-excellent " ainsi qu'une cotation supérieure à 3 de ses aptitudes pour les rubriques " partage et conviction ", " réalisation et performance " et " superviser ", des appréciations favorables portées sur la manière de servir du militaire ne justifient pas systématiquement l'attribution d'une note d'un niveau supérieur.

8. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'existerait une incohérence manifeste entre les appréciations littérales portées sur la manière de servir de Mme A..., sa notation, qui ne révèle aucunement un agent " médiocre ", et l'appréciation portée sur sa capacité à exercer un emploi supérieur.

9. Enfin, eu égard au caractère annuel de la notation et à son objet, qui est de permettre à l'autorité hiérarchique d'apprécier les qualités et les aptitudes d'un agent sur une période déterminée, la requérante ne saurait utilement se prévaloir ni des notations et des récompenses obtenues antérieurement ni de l'absence de sanction.

10. Par suite et alors même que M. A... possède des qualités professionnelles certaines, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision par laquelle la ministre des armées a confirmé sa notation au titre de l'année 2018 serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. En deuxième lieu, ainsi que l'a jugé la cour dans son arrêt n°18BX04125, passé en force de chose jugée, les faits de harcèlement moral qu'elle aurait subi entre 2015 et 2016 ne sont pas susceptibles, eu égard à leur nature et à leur fréquence et compte tenu des documents qu'elle produit, notamment les messages qui lui ont été adressés par son supérieur hiérarchique qui ne dénotent aucune agressivité ou animosité et ne comportent aucune demande excessive ou sans lien avec les fonctions de l'intéressée, de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. Par ailleurs, le courrier rédigé le 5 mars 2019 par le médecin général des armées, qui ne fait que relater des faits qui lui ont été exposés sans les avoir constatés lui-même, n'est pas de nature à tenir pour établi que le médecin-chef aurait eu à l'égard de Mme A... un comportement particulier traduisant un harcèlement moral ou une attitude de discrimination et Mme A... ne produit aucun témoignage de tiers constatant de tels comportement ou attitude. En outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la teneur de la notation de Mme A... au titre de l'année 2018 serait consécutive à la dénonciation de ces faits auprès de sa hiérarchie.

12. Par ailleurs, ainsi que l'ont jugé les premiers juges, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que cette évaluation aurait été effectuée en considération de l'état de santé de Mme A... alors que son évaluation ne fait aucune mention de son placement en congé maladie puis en congé de longue durée à compter du 20 août 2018, soit postérieurement à la période prise en compte au titre de la notation critiquée. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision de la ministre, qui confirme la notation litigieuse, serait entachée d'un détournement de pouvoir ou d'une erreur de droit.

13. Enfin, la requérante ne saurait utilement soutenir que la ministre aurait commis une erreur de droit en s'écartant des règles posées par l'instruction n°19331/DEF/ SGA/DRH-MD/SDPEP du 6 septembre 2016 relative à la notation des officiers d'active et de la réserve opérationnelle dès lors que les orientations générales qu'elle contient ne constituent pas des lignes directrices dont l'intéressée pourrait utilement se prévaloir devant le juge.

Sur la requête n° 20BX03207 :

14. D'une part, aux termes de l'article L. 4136-1 du code de la défense : " (...) L'avancement de grade a lieu soit au choix, soit au choix et à l'ancienneté, soit à l'ancienneté. Sauf action d'éclat ou services exceptionnels, les promotions ont lieu de façon continue de grade à grade et nul ne peut être promu à un grade s'il ne compte dans le grade inférieur un minimum de durée de service, fixé par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article L. 4136-3 de ce code : " Nul ne peut être promu au choix à un grade autre que ceux d'officiers généraux s'il n'est inscrit sur un tableau d'avancement établi, au moins une fois par an, par corps. / Une commission dont les membres, d'un grade supérieur à celui des intéressés, sont désignés par le ministre de la défense, présente à ce dernier tous les éléments d'appréciation nécessaires, notamment l'ordre de préférence et les notations données aux candidats par leurs supérieurs hiérarchiques (...) Les statuts particuliers précisent les conditions d'application du présent article ". Aux termes de l'article L. 4136-4 du même code : " I. - Les statuts particuliers fixent : 1° Les conditions requises pour être promu au grade supérieur ; 2° Les proportions respectives et les modalités de l'avancement à la fois au choix et à l'ancienneté, pour les corps et dans les grades concernés ; 3° Les conditions d'application de l'avancement au choix. II. - Au titre des conditions pour être promu au grade supérieur, les statuts particuliers peuvent prévoir : 1° Que l'ancienneté des militaires de carrière dans le grade inférieur n'excède pas un niveau déterminé. Dans le cas où des dérogations à cette règle sont prévues, les statuts particuliers en fixent les limites par référence au nombre de promotions prononcées chaque année dans les grades considérés ; 2° Le temps minimum à passer dans le grade supérieur avant la limite d'âge. ".

15. D'autre part, aux termes de l'article 33 du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier des praticiens des armées : " Pour être promu au grade ou à la classe supérieurs, les médecins, pharmaciens, vétérinaires et chirurgiens-dentistes des armées doivent compter un minimum de : (...) 2° Quatre ans et six mois dans les grades de médecin, pharmacien, vétérinaire ou chirurgien-dentiste principal (...) ". Aux termes de l'article 35 de ce même décret : " Les promotions aux grades de médecin, pharmacien, vétérinaire ou chirurgien-dentiste en chef ont lieu au choix, sans que le nombre annuel d'inscriptions au tableau d'avancement puisse être inférieur à 20 % de l'effectif des médecins, pharmaciens, vétérinaires ou chirurgiens-dentistes principaux réunissant les conditions pour être promu au grade supérieur ".

16. Il résulte de ces dispositions que tant la promotion au grade de médecin chef que leur inscription préalable au tableau élaboré à cette fin ne constituent pas un droit et relèvent d'une appréciation des mérites et de la qualité des services des militaires remplissant les conditions exigées pour l'inscription à ce tableau.

17. Il est constant que Mme A... remplissait les conditions d'ancienneté dans le grade de médecin principal fixées par les dispositions de l'article 33 du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier des praticiens des armées pour pouvoir être promue au grade de médecin en chef. Par suite, la commission prévue à l'article L. 4136-3 du code de la défense cité ci-dessus a nécessairement examiné sa situation ainsi que celle de tous les militaires remplissant lesdites conditions. La seule circonstance que Mme A... n'ait pas été promue ne saurait suffire à révéler que cette commission n'aurait pas procédé à un examen approfondi de son dossier et de sa valeur professionnelle. Par ailleurs, si Mme A... estime que son dossier n'a pu être examiné à bon escient par la commission lors de sa séance du 30 octobre 2017 en raison des écarts injustifiés dans l'appréciation de ses mérites et de sa valeur professionnelle entachant, selon elle, sa notation établie au titre de l'année 2016, annulée par le tribunal administratif et celle établie au titre de l'année 2017, les notes annuelles des militaires ne constituent que l'un des éléments d'appréciation pour l'établissement des tableaux d'avancement au choix. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'effectuer la mesure d'instruction sollicitée, le moyen tiré de ce que la candidature de Mme A... n'aurait pas été étudiée dans le cadre des travaux d'avancement 2018 doit être écarté.

18. Aucun texte non plus qu'aucun principe général n'impose la communication à l'intéressée de la mention d'appui proposée par l'autorité locale indiquant la priorité particulière portée à l'inscription au tableau d'avancement de l'officier noté.

19. La requérante ne saurait utilement soutenir que la ministre aurait commis une erreur de droit en s'écartant des règles posées par l'instruction n°220086/DEF/SGA/DRH-MD/SDPEP relative à l'avancement des officiers et à l'évaluation de leur potentiel du 14 mars 2014 dès lors que les orientations générales qu'elle contient ne constituent pas des lignes directrices dont l'intéressée pourrait utilement se prévaloir devant le juge.

20. Si Mme A... se prévaut de ses notations élogieuses traduisant ses hautes qualités morales, intellectuelles et professionnelles ainsi que de ses diplômes, de ses compétences de commandement et de son expertise opérationnelle qui lui ont valu de nombreuses décorations et récompenses et de ce que son dossier disciplinaire ne fait état d'aucune sanction, ces éléments ne lui confèrent aucun droit à un avancement de grade, compte tenu des pouvoirs d'appréciation reconnus au ministre. Par ailleurs, si Mme A... soutient que des médecins principaux plus jeunes et ne disposant d'aucune expérience en opération extérieure ou de classement inférieur dans l'annuaire 2017 des officiers de carrière du service de santé des armées ont été promus au grade supérieur, ces éléments ne sauraient à eux seuls suffire pour permettre d'estimer que des candidats moins méritants auraient été inscrits au tableau d'avancement. Ainsi, sans qu'il soit besoin d'effectuer la mesure d'instruction sollicitée, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce tableau d'avancement serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

21. Enfin, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aucun des faits relatés par Mme A... ne permet de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard de la part de son supérieur hiérarchique. Par ailleurs, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la non inscription de Mme A... au tableau d'avancement au titre de l'année 2018 serait consécutif à la dénonciation de ces faits auprès de sa hiérarchie. Par suite, les éléments ainsi invoqués par Mme A... ne sont pas de nature à caractériser le détournement de pouvoir allégué.

22. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté l'ensemble de ses demandes.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

23. Il résulte de ce qui précède que, pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, le présent arrêt n'appelle aucune mesure particulière d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A... doivent donc être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, la somme que Mme A... demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes n°20BX02662 et 20BX03207 de Mme A... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Luc Derepas, président de la cour,

Mme Marianne Hardy, présidente de chambre,

Mme Christelle Bouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2022.

La rapporteure,

Birsen D...Le président,

Luc DerepasLa greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX02662, 20BX03207


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre (formation à 5)
Numéro d'arrêt : 20BX02662
Date de la décision : 20/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. DEREPAS
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SELARL MDMH

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-10-20;20bx02662 ?
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