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09/11/2022 | FRANCE | N°20BX02755

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 09 novembre 2022, 20BX02755


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1801862 du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 août 2020 et 13 septembre 2021,

M. C..., représenté par Me Rieu-Castaing puis Me Cattier, demande à la cour, dans le dernier ét...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1801862 du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 août 2020 et 13 septembre 2021, M. C..., représenté par Me Rieu-Castaing puis Me Cattier, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1801862 du tribunal administratif de Bordeaux du 26 juin 2020 ;

2°) à titre principal de prononcer la décharge, en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 ou, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des majorations qui lui ont été appliquées au titre de ces mêmes années ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne ses critiques relatives tant à la procédure d'imposition qu'au principe même de l'imposition en France ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

- aucune réunion de synthèse permettant d'annoncer les conséquences de l'examen fiscal de sa situation personnelle initié par le service n'a été organisée ; l'administration ne s'est pas prononcée sur la pertinence des pièces justificatives produites en cours de contrôle ; plusieurs de ses courriers n'ont pas reçu de réponse ; il n'a pas été informé du moment où les échanges prenaient fin ; ainsi, les conditions d'un débat oral et contradictoire éclairé n'ont pas été réunies ;

- la proposition de rectification relative à l'année 2012 est datée du 8 décembre 2015 alors que les conséquences financières sont datées du 7 décembre 2015 ; l'avis de mise en recouvrement, qui se réfère à un évènement inexistant, est donc irrégulier ; le montant de l'imposition totale figurant dans la proposition de rectification s'élève à 10 942 euros alors que le montant de l'imposition totale figurant sur l'avis d'imposition et l'avis de mise en recouvrement correspondant s'élève à 10 943 euros, soit un montant supérieur à celui des sommes initialement notifiées ;

- la proposition de rectification relative à l'année 2013 est datée du 17 février 2016 alors que les conséquences financières sont datées du 8 décembre 2016 ; l'avis de mise en recouvrement, qui se réfère à un évènement inexistant, est donc irrégulier ;

- les recoupements opérés par l'administration ne lui ont pas été communiqués ; les demandes de renseignements effectuées par l'administration fiscale ont été rédigées avec une approximation de base légale et comportent des questions très orientées qui n'ont pas permis de cerner les problématiques posées ;

- ces irrégularités doivent, à tout le moins, entraîner la décharge des pénalités et majorations, en application de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le principe de l'imposition en France :

- il est constant qu'au titre de l'année 2012, il n'a pas séjourné en France plus de six mois ; le critère d'ordre personnel est, dès lors, inopérant ;

- il n'exerce pas une activité professionnelle en France ; il se déplace dans différents pays pour les besoins de son activité de pilote professionnel de motocross ; le critère d'ordre professionnel est ainsi également inopérant ;

- il ne détient pas en France le centre de ses intérêts économiques ; ses revenus sont tirés d'une société britannique qui gère son contrat de travail et ses droits à l'image ; le critère d'ordre économique est donc inopérant ;

- son foyer ne se trouve pas en France dès lors qu'il y détient simplement une résidence secondaire où il se rend périodiquement pour rendre visite à sa fille mineure ; à l'inverse, il dispose d'un logement principal à Andorre, d'un compte bancaire ainsi que d'un permis de conduire et détient un certificat officiel du service d'immigration andorran ;

- la maison qu'il possède en Dordogne ainsi que les comptes bancaires détenus en France ne sont pas de nature à démontrer l'existence d'un foyer en France ; il ne dispose pas de la garde de sa fille qui réside avec sa mère, dont il est séparé ; il n'a pas voté dans la commune de Faux depuis son installation à Andorre.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 mars 2021 et 18 mars 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... D...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., qui exerce une activité de pilote professionnel de motocross, a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2012 et 2013. A l'issue des opérations de contrôle, l'administration, après avoir estimé que l'intéressé avait la qualité de résident fiscal français, a taxé d'office les revenus perçus au titre des deux années en cause, en l'absence de souscription de déclarations de revenus malgré l'envoi de mises en demeure. M. C... relève appel du jugement du 26 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

2. D'une part, aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française. ". Aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal (...) ". Pour l'application de ces dispositions, telles qu'éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 29 décembre 1976 modifiant les règles de territorialité et les conditions d'imposition des Français à l'étranger ainsi que d'autres personnes non domiciliées en France dont elles sont issues, le foyer d'un contribuable célibataire s'entend du lieu où il habite normalement et a le centre de sa vie personnelle, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles. Le lieu du séjour principal de ce contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où il ne dispose pas de foyer.

3. D'autre part, il appartient à l'administration de justifier du principe même de l'imposition de M. C... en France, alors même que l'intéressé a été taxé d'office.

4. Il résulte des éléments versés au dossier qu'au titre de la période contrôlée, M. C..., salarié d'une société britannique, disposait d'un logement pris en location dans la principauté d'Andorre ainsi que d'un permis de conduire andorran et d'une autorisation de résidence délivrée par les autorités de cette principauté. Pour justifier que l'intéressé avait son foyer en France au sens du a) du 1 de l'article 4 B du code général des impôts au titre de ces années, le service a principalement relevé que celui-ci était propriétaire depuis le mois d'octobre 2010 d'une maison située à Faux, pour laquelle il avait souscrit des abonnements auprès de fournisseurs d'eau et d'électricité, qu'il recevait du courrier à cette adresse et était inscrit sur les listes électorales de la commune, qu'il disposait en France de deux comptes bancaires dont l'un faisant état de dépenses régulières de train de vie en France et que sa fille mineure était scolarisée dans la commune voisine d'Issigeac. Toutefois, alors qu'il est constant que M. C..., célibataire, n'avait pas la garde de sa fille et qu'il ne lui versait aucune pension alimentaire, l'administration ne précise pas le volume de la consommation en eau et en électricité facturé ou relevé au titre du logement de l'intéressé à Faux, de nature à démontrer l'existence d'une occupation régulière et continue de ce bien. De même, au titre de l'année 2012, elle ne précise ni le montant ni la nature des dépenses courantes qui auraient été débitées sur l'un des comptes bancaires français du requérant alors que, s'agissant de l'année 2013, elle se borne à produire un tableau sommaire mentionnant des paiements par carte bancaire dans divers lieux en France, sans en indiquer la nature et les montants, ni établir que ces dépenses correspondraient à des achats de nourriture ou d'équipement effectués à proximité du logement de Faux, révélant l'existence d'une résidence habituelle et pérenne. Dans ces conditions, alors que M. C... affirme qu'il ne se rendait dans son logement de Faux que ponctuellement, pour rendre visite à sa fille, l'administration ne démontre pas, en se fondant sur les éléments précités, que le contribuable y habitait normalement et y avait le centre de sa vie personnelle. Par suite, c'est à tort que le service a estimé que l'appelant disposait d'un foyer en France et l'a imposé à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 2012 et 2013 à raison de ses revenus professionnels et de crédits d'origine indéterminée portés sur l'un de ses comptes bancaires.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué ni d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande et à obtenir la décharge, en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1801862 du 26 juin 2020 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.

Article 2 : M. C... est déchargé, en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'économie et des finances, et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale du contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2022.

Le rapporteur,

Michaël D... La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX02755

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02755
Date de la décision : 09/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Michaël KAUFFMANN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : RIEU-CASTAING

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-11-09;20bx02755 ?
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