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09/11/2022 | FRANCE | N°22BX01183

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 09 novembre 2022, 22BX01183


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2021 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101769 du 10 février 2022, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2022, et des mémoires en producti

on de pièces enregistrés les 3 mai 2022, 22 juin 2022 19 juillet 2022, 12 août 2022 et 9 septembre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2021 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101769 du 10 février 2022, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2022, et des mémoires en production de pièces enregistrés les 3 mai 2022, 22 juin 2022 19 juillet 2022, 12 août 2022 et 9 septembre 2022, ces trois derniers n'ayant pas été communiqués, M. D..., représenté par Me Karakus demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 février 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté est entaché d'incompétence de son auteur ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 7 ter d de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié par l'avenant du 8 septembre 2000, les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2022, la préfète de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 13 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 14 septembre 2022 à 12 heures.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... C... ;

- et les observations de M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D..., ressortissant tunisien né en avril 1981, est entré en France en janvier 2008. Le 24 avril 2018, il a demandé au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour en raison de ses attaches privées et familiales dans ce pays. Par des décisions du 17 janvier 2019, le préfet a refusé de faire droit à cette demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation. Ces décisions ont été annulées par un jugement du tribunal administratif de Limoges n° 1900815 du 12 juillet 2019 en raison de l'absence de saisine par le préfet de la commission du titre de séjour alors que M. D... était en France de manière continue depuis au moins dix ans. A la suite de cette annulation, le préfet, après avoir saisi la commission du titre de séjour, a par un arrêté du 30 septembre 2021 refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. D... relève appel du jugement du 10 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 7 ter d) de l'accord entre le gouvernement de la république française et le gouvernement de la république de Tunisie en matière de séjour et de travail " reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 (...) les ressortissants tunisiens qui, à la date d'entrée en vigueur de l'accord signé à Tunis le 28 avril 2008, justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans ; ".

3. D'une part, il ressort des pièces du dossier et notamment de la demande de titre de séjour présentée par M. D... au préfet le 24 avril 2018 que ce dernier a présenté sa demande tant au titre de ses liens personnels et familiaux qu'au titre de sa présence [en France] depuis 10 ans. Ce faisant, il doit être regardé comme ayant demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 7 ter d) de l'accord entre le gouvernement de la république française et le gouvernement de la république de Tunisie en matière de séjour et de travail.

4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier et notamment du jugement du tribunal administratif de Limoges n° 1900815 précité du 12 juillet 2019 que M D... justifiait à la date du 17 janvier 2019, résider habituellement en France depuis plus de dix ans. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé ait quitté le territoire français entre le 17 janvier 2019 et le 30 septembre 2021. Par suite, M. D... est fondé à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 7 ter d) de l'accord franco-tunisien.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

6. Eu égard tant aux motifs d'annulation retenus par le présent arrêt, qu'aux conclusions du requérant, il y a lieu d'enjoindre à la préfète de la Haute-Vienne de délivrer à M. D... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois.

Sur les frais liés au litige :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Me Karakus sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative , sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 2101769 du tribunal administratif de Limoges du 10 février 2022 et l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 30 septembre 2021 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de la Haute-Vienne de délivrer à M. D... un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Karakus, avocat de M. D..., la somme de 1 200 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Me Hanife Karakus et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Nicolas Normand, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2022.

Le rapporteur,

Nicolas C...

La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX01183


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01183
Date de la décision : 09/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : KARAKUS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-11-09;22bx01183 ?
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