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16/12/2022 | FRANCE | N°20BX04172

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 16 décembre 2022, 20BX04172


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 12 novembre 2018 de la directrice interrégionale de la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer en tant que cette décision a reconnu que l'accident dont elle a été victime le 24 août 2016 est imputable à une rechute.

Par un jugement n° 1900771 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistr

e le 22 décembre 2020, Mme B..., représentée par Me Lindagba-Mba, demande à la cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 12 novembre 2018 de la directrice interrégionale de la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer en tant que cette décision a reconnu que l'accident dont elle a été victime le 24 août 2016 est imputable à une rechute.

Par un jugement n° 1900771 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2020, Mme B..., représentée par Me Lindagba-Mba, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 22 septembre 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 12 novembre 2018 de la directrice interrégionale de la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer ;

3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la Justice de régulariser sa situation administrative, de reconnaître l'imputabilité au service de son accident du 24 août 2016 et de la rétablir dans ses droits ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête d'appel est recevable compte tenu du délai de distance ;

- la décision contestée lui fait grief, dès lors qu'elle entendait contester la qualification retenue par l'administration de rechute consécutive à un accident de service intervenu le 12 mars 2003 ; elle établit avoir été victime d'un nouvel accident à la suite de l'agression verbale de la directrice des ressources humaines, le 24 août 2016, dans un contexte préexistant de harcèlement moral et de violences au travail ; les faits en cause sont exclusifs de toute notion de rechute, qui ont fait l'objet d'un certificat initial d'accident de service et non pas d'un certificat médical de rechute, en lien avec l'aggravation de la lésion initiale ou avec l'apparition d'une nouvelle lésion ; l'altercation du 24 août 2016 s'ajoute à d'autres prises à partie par l'ancienne directrice des ressources humaines, depuis qu'elle a repris ses fonctions en avril 2014 sur un poste de secrétaire de direction au centre pénitentiaire de Baie-Mahault ; ces faits ne sont pas isolés et d'autres agents ont subi des agissements répréhensibles de la directrice des ressources humaines, que l'administration pénitentiaire n'a pas protégés ;

- la décision du 12 novembre 2018 contestée refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 24 août 2016 est entachée d'erreur d'appréciation, dès lors que ses antécédents sont sans lien avec l'accident survenu le 24 août 2016 ;

- conformément aux dispositions de l'article 34 2° de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article 1er du décret du 26 août 2010, sa situation justifie qu'elle soit rétablie dans ses droits à plein traitement et aux indemnités qui s'y attachent.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2022, le garde des sceaux, ministre de la Justice, conclut au rejet de la requête de Mme B.... Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... C...,

- les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique,

- et les observations de Me Lindegba Mba, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... B..., surveillante des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire, et reclassée dans le corps des adjoints administratifs après avoir été la victime au centre pénitentiaire de Fresnes d'un accident le 12 mars 2003 reconnu imputable au service à l'occasion de l'évasion d'un détenu, a été victime le 24 août 2016, sur le lieu d'exercice de ses fonctions, d'un accident. La commission de réforme, dans ses avis du 20 septembre 2018 et du 25 octobre 2018, a regardé l'accident du 24 août 2016 comme une rechute de son accident initial survenu le 12 mars 2003. Au vu de ces avis, l'imputabilité au service de cet accident ainsi que des arrêts de travail de l'intéressée du 1er novembre 2018 au 28 février 2019, ont été reconnus imputables au service par arrêté du 12 novembre 2018 de la directrice interrégionale de la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer. Mme B... a formé le 11 mars 2019 un recours gracieux tendant à la reconnaissance de l'altercation du 24 août 2016 comme accident de service initial et non pas comme résultant d'une rechute, qui a été rejeté expressément par décision du 10 avril 2019 de la même autorité. Mme B... a alors saisi le tribunal administratif de la Guadeloupe d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 novembre 2018 en tant qu'elle considère l'accident de service survenu le 24 août 2016 comme résultant d'une rechute de son accident du 12 mars 2003. Mme B... relève appel du jugement du 22 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

2. Aux termes des dispositions du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, dans sa version alors en vigueur : " (...) si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ".

3. D'une part, lorsque l'état d'un fonctionnaire est consolidé postérieurement à un accident imputable au service, le bénéfice de ces dispositions est subordonné, non pas à l'existence d'une rechute ou d'une aggravation de sa pathologie, mais à l'existence de troubles présentant un lien direct et certain, mais non nécessairement exclusif, avec l'accident de service. D'autre part, la rechute d'un accident de service se caractérise par la récidive ou l'aggravation subite et naturelle de l'affection initiale après sa consolidation sans intervention d'une cause extérieure. Enfin, la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident initial ouvre les mêmes droits au fonctionnaire que la reconnaissance d'une rechute consécutive à un accident de service.

4. Il est constant que Mme B... a été victime, alors qu'elle exerçait les fonctions de surveillante au centre pénitentiaire de Fresnes, d'un accident le 12 mars 2003, qui a été reconnu imputable au service et à l'origine d'un syndrome de stress post-traumatique. Son état de santé a été regardé comme consolidé avec conservation de séquelles psychosomatiques. Alors que Mme B... avait repris ses fonctions à compter d'avril 2014 sur un poste de secrétaire de direction au centre pénitentiaire de Baie-Mahault, après son reclassement dans le corps des adjoints administratifs, une violente altercation le 24 août 2016 a opposé cette dernière à la directrice des ressources humaines alors en poste, à l'origine d'une perte de connaissance et d'une chute, ayant entraîné sa prise en charge le même jour par le service des urgences du centre hospitalier universitaire de Pointe à Pitre-Abymes, puis par une clinique pour état dépressif. Il ressort des pièces du dossier que les troubles psychosomatiques ainsi ressentis par Mme B... à partir du 24 août 2016 présentent la même symptomatologie que ceux développés après la tentative d'assassinat dont elle a été la victime le 12 mars 2003, reconnue par l'administration comme accident de service, pour lesquels elle a bénéficié de congés de maladie imputables au service du 24 août 2016 au 11 septembre 2018, et du 12 septembre 2018 au 31 octobre 2018 inclus. Dans ces conditions, ces troubles présentent un lien direct et certain avec l'accident de service du 12 mars 2003.

5. Par l'arrêté contesté du 12 novembre 2018, l'administration reconnaît que l'accident du 24 août 2016 dont Mme B... a été victime est imputable au service, maintient l'intéressée en congés pour maladie imputable au service du 1er novembre 2018 au 28 février 2019 inclus, avec bénéfice de son plein traitement jusqu'à rétablissement de son aptitude au service, et prend en charge les frais médicaux directement entraînés par cet accident.

6. Alors même que l'administration, dans l'article 1er du dispositif de son arrêté, a fait référence à une rechute, l'article 2 de son dispositif détaillé ci-dessus ne lui fait pas grief. Ainsi, Mme B... n'est pas recevable à demander l'annulation de la décision du 12 novembre 2018. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté sa requête comme irrecevable, sans que cette dernière puisse utilement se prévaloir de ce que la directrice interrégionale de la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer a entaché son arrêté du 12 novembre 2018 d'erreur d'appréciation pour s'être fondée à tort sur l'existence d'une rechute de son accident initial du 12 mars 2003.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

8. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B... n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au garde des sceaux, ministre de la Justice.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2022 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

Mme Agnès Bourjol, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2022.

La rapporteure,

Agnès C...Le président,

Didier ARTUSLa greffière,

Sylvie HAYET

La République mande et ordonne au ministre de la justice en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 20BX04172


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX04172
Date de la décision : 16/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Agnès BOURJOL
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : LINDAGBA MBA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-12-16;20bx04172 ?
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