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21/02/2023 | FRANCE | N°22BX01143

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 21 février 2023, 22BX01143


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2019 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi, assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, et d'enjoindre à la même autorité de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un dé

lai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astrei...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2019 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi, assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, et d'enjoindre à la même autorité de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard et, à tout le moins, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Par un jugement n° 2000495 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de la Guyane a annulé l'arrêté du 12 octobre 2019 du préfet de la Guyane en tant qu'il porte refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 avril 2022, le préfet de la Guyane, représenté par Me Tomasi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 17 mars 2022 en tant qu'il a annulé le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et l'interdiction de retour sur le territoire français opposés à M. C... dans son arrêté du 12 octobre 2019.

2°) de rejeter la demande de M. C... présentée devant le tribunal administratif de la Guyane.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'erreur d'appréciation en ce que le tribunal a annulé sa décision refusant d'accorder à M. C... un délai de départ volontaire pour insuffisance de motivation en fait alors qu'il ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes pour qu'un délai de départ volontaire lui soit accordé, notamment qu'il s'était soustrait à une précédente mesure d'éloignement ;

- la décision portant refus de délai de départ volontaire étant légale, l'interdiction de retour sur le territoire français n'est pas entachée d'illégalité par voie de conséquence ;

- les autres moyens de première instance doivent être écartés compte tenu des éléments développés dans ses écritures de première instance et notamment que l'arrêté en litige n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C..., ressortissant haïtien né le 18 mai 1995, a déclaré être entré irrégulièrement en France en novembre 2017. Il a fait l'objet d'un contrôle de vérification de son droit de circulation et de séjour. Après avoir constaté qu'il ne justifiait d'aucun titre l'autorisant à séjourner sur le territoire national, le préfet de la Guyane a pris à l'encontre de M. C... un arrêté du 12 octobre 2019 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixation du pays de renvoi, et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. A la demande de M. C..., le tribunal administratif de la Guyane a annulé cet arrêté du 12 octobre 2019, en tant qu'il lui a refusé un délai de départ volontaire et prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Le préfet de la Guyane relève appel du jugement du 17 mars 2022 en tant que le tribunal administratif de la Guyane a annulé ses décisions.

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. ' L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. / L'autorité administrative peut faire application du troisième alinéa du présent II lorsque le motif apparaît au cours du délai accordé en application du premier alinéa. ".

3. Pour annuler la décision refusant d'accorder à M. C... un délai de départ volontaire, le tribunal s'est fondé sur son insuffisance de motivation dès lors que le préfet s'est borné à motiver son refus en énonçant que " selon les nouvelles dispositions applicables au 1er janvier 2019, le risque de fuite est considéré comme avéré lorsque l'intéressé déclare ne pas vouloir se conformer à son obligation de quitter le territoire français L. 511-1-II 3, h) ". Si cette décision est motivée en droit, sa motivation en fait est lacunaire et ne permet pas de vérifier que la situation personnelle de l'intéressé entrait dans le champ des dispositions du 3° h) du II de l'article L. 511-1 qui permettent au préfet de priver l'étranger d'un délai de départ volontaire.

4. Aux termes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " (...) Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. (...) ".

5. Il résulte de ce qui précède que la décision refusant d'accorder à l'intéressé un délai de départ volontaire étant illégale, le préfet de la Guyane ne pouvait lui faire interdiction de revenir sur le territoire français sur le fondement des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Guyane n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a annulé son arrêté du 12 octobre 2019 en tant qu'il porte refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Guyane est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de la Guyane, à M. D... C... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

Mme Agnès Bourjol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 février 2023.

La rapporteure,

Agnès B...Le président,

Didier ARTUSLa greffière,

Sylvie HAYET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX01143


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01143
Date de la décision : 21/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Agnès BOURJOL
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : BALIMA CHRIST ERIC

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-02-21;22bx01143 ?
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