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25/04/2023 | FRANCE | N°21BX03344

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 25 avril 2023, 21BX03344


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 12 avril 2021 par lequel le préfet de la Charente Maritime a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et une assignation à résidence pour une durée de cinq mois.

Par un jugement n° 2101002 du 16 juillet 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande

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Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2021, M. B...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 12 avril 2021 par lequel le préfet de la Charente Maritime a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et une assignation à résidence pour une durée de cinq mois.

Par un jugement n° 2101002 du 16 juillet 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2021, M. B..., représenté par Me Drageon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 16 juillet 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 avril 2021 en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué, qui ne vise pas la délégation de pouvoir au secrétaire général, émane d'une autorité incompétente ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai est entachée d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que, contrairement à ce qu'a relevé le tribunal, il justifie d'une présence effective sur le territoire français depuis 2012, où il a travaillé dès l'année suivante et ce sans discontinuer depuis, qu'il parle couramment le français, qu'il justifie tant d'un hébergement à La Rochelle que d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée, et qu'il n'a plus aucune attache dans son pays d'origine où il n'est pas retourné depuis une décennie ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'ancienneté de son séjour en France et des attaches privées et professionnelles qu'il y a nouées ; de plus, il appartient à une ethnie qui a été persécutée lors d'un conflit au Niger, si bien qu'il est exposé à des dangers dans son pays d'origine ;

- la décision portant assignation à résidence est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et repose sur des motifs contradictoires avec ceux retenus pour prononcer son éloignement, qu'il s'agisse de la possession d'un document de voyage ou de l'absence de logement personnel.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant nigérien né le 29 avril 1972, est entré en France en 2012 en possession d'un visa de court séjour pour y déposer une demande d'asile. En avril 2021, il a été interpellé à La Rochelle par les services de police lors d'une opération de contrôle d'identité. M. B..., qui n'était pas en possession d'un titre l'autorisant à séjourner en France, s'est vu notifier par le préfet de la Charente-Maritime un arrêté du 12 avril 2021 prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ainsi qu'une assignation à résidence pendant cinq mois. M. B... relève appel du jugement rendu le 16 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 12 avril 2021.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions attaquées :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté n° 17-2020-05-11-002 du 20 mai 2020 régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial, le secrétaire général de la préfecture de la Charente Maritime s'est vu délivrer par le préfet délégation pour signer tous actes et décisions relevant du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'article 1er de cet arrêté précise, en particulier, que la délégation octroyée couvre la signature des décisions portant obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français et assignation à résidence. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté litigieux ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa (...) 3° Si la délivrance (...) d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'après le rejet de sa demande d'asile par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 27 novembre 2012 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 17 avril 2014, M. B... a fait l'objet d'un arrêté préfectoral du 27 mai 2014 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, devenu définitif. M. B..., qui s'est soustrait à l'exécution de la mesure d'éloignement, a cherché, en 2018, à régulariser sa situation en demandant un titre de séjour l'autorisant à travailler sur le territoire français en se prévalant de sa qualité de salarié d'une association pour laquelle il exerçait alors diverses tâches de menuiserie. Le préfet a rejeté cette demande par une décision du 2 novembre 2018, laquelle rappelait à M. B... son obligation de se conformer à la mesure d'éloignement prise à son encontre. Interpellé à La Rochelle dans la soirée du 11 avril 2021 alors qu'il circulait dans la rue plusieurs heures après le début du couvre-feu instauré dans le cadre de la protection contre le Covid-19, M. B... a déclaré, lors de son audition par les services de police, vivre seul en France et être dépourvu d'activité professionnelle, de toute ressource et d'hébergement stable. Si, pour justifier de sa présence en France depuis l'année 2012, M. B... produit, pour la première fois en appel, quelques relevés d'imposition et bulletins de salaire, ni ces éléments ni les autres pièces du dossier ne permettent d'établir qu'il aurait noué en France des relations familiales ou privées intenses, stables et anciennes. Au contraire, il ressort des pièces du dossier que la fille du requérant, âgée de 11 ans, et sa sœur résident dans son pays d'origine. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... serait exposé à des risques particuliers pour sa sécurité en cas de retour au Niger où il a vécu jusqu'à l'âge de 40 ans. Dans ces circonstances, la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, n'est entachée d'aucune erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

5. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du même code, alors en vigueur : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

6. Il ressort des termes de l'arrêté litigieux, qui vise les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que pour prononcer à l'encontre de M. B... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, le préfet a relevé que l'ancienneté du séjour en France de l'intéressé n'était pas établie, de même que la nature et l'ancienneté de ses liens dans ce pays, alors que sa famille réside au Niger. Le préfet a encore relevé que M. B... ne justifiait d'aucune circonstance humanitaire méritant d'être prise en compte et qu'il s'était soustrait à une précédente mesure d'éloignement. Ce faisant, alors que la demande d'asile de M. B... a d'ailleurs été rejetée par les autorités compétentes et que ce dernier ne justifie d'aucune intégration particulière dans la société française, le préfet a suffisamment motivé sa décision et n'a pas commis d'erreur d'appréciation.

En ce qui concerne l'assignation à résidence :

7. A l'appui de sa contestation de la décision en litige, M. B... n'apporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse des premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif pertinemment retenu par le tribunal.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les frais d'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser M. B... une somme correspondant aux dépens de l'instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 21BX03344 de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera transmise au préfet de la Charente Maritime.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

M. Frédéric Faick, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2023.

Le rapporteur,

Frédéric A...

La présidente,

Florence DemurgerLa greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21BX03344


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03344
Date de la décision : 25/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : CABINET DRAGEON et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-04-25;21bx03344 ?
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