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04/05/2023 | FRANCE | N°22BX00489

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 04 mai 2023, 22BX00489


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... et Mme F... E... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 19 mars 2020 par lequel le maire de Castres-Gironde a délivré à M. D... A... un permis de construire en vue de l'édification de trente maisons individuelles sur un terrain situé route de Nadon, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2003732 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a sursis à statuer, en application de l'article L.

600-5-1 du code de l'urbanisme, sur la demande de M. et Mme E... afin de permet...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... et Mme F... E... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 19 mars 2020 par lequel le maire de Castres-Gironde a délivré à M. D... A... un permis de construire en vue de l'édification de trente maisons individuelles sur un terrain situé route de Nadon, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2003732 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a sursis à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sur la demande de M. et Mme E... afin de permettre à M. A... de justifier auprès du tribunal de la régularisation du vice tiré de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 2 de l'article 13 du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme.

Un permis de construire modificatif a été délivré par le maire de Castres-Gironde par un arrêté du 1er mars 2022.

Par un jugement n° 2003732 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de M. et Mme E....

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 15 février 2022, le 24 mai 2022 et le 6 octobre 2022, M. et Mme E..., représentés par Me de Lagausie, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 décembre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Castres-Gironde du 19 mars 2020, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Castres-Gironde la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la voie desservant le terrain d'assiette du projet est comprise dans deux autres lotissements et constitue un espace commun ; l'accord des colotis aurait donc dû être sollicité ;

- M. A... a inclus dans l'emprise du terrain d'assiette du projet des espaces communs du lotissement ;

- le bassin de rétention des eaux pluviales envisagé, en zone NG du plan local d'urbanisme, ne peut être regardé comme une installation d'intérêt collectif dès lors que cet ouvrage ne vise qu'à la gestion des eaux sur la parcelle elle-même ; cette installation est ainsi interdite par le règlement de la zone ;

- le projet de M. A... méconnaît l'article 7 de la zone UB du plan local d'urbanisme ; la maison n° 14 ne respecte pas l'exigence de retrait de 3,50 mètres par rapport à l'ensemble des limites séparatives des fonds voisins ;

- ce projet méconnaît l'article 13 de la zone UB du plan local d'urbanisme en ce qu'il ne prévoit que 14 places de stationnement ; par ailleurs, le plan de masse ne matérialise pas l'espace vert commun exigé par ces dispositions, sans permettre le calcul réel de sa surface ;

- le projet de M. A... méconnaît l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ; la zone est en effet peu dense et présente un intérêt patrimonial qui sera dénaturé par la densité disproportionnée du projet ; la zone est composée de maisons individuelles anciennes, de surface relativement importante, situées au centre de parcelles de grande taille ; ces maisons ne sont pas accolées ; le plan local d'urbanisme ne prévoit qu'une relative densification dans ce secteur ; l'architecte des bâtiments de France avait émis un avis réservé lors de la création du lot n° 2 concernant la construction d'une seule maison individuelle au regard de l'environnement remarquable ;

- ce projet méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; l'atteinte à la sécurité publique est manifeste au regard des dangers de la circulation automobile ; en raison de la déclivité du terrain, la visibilité est mauvaise, sans que les récents aménagements de la route de Nadon n'aient permis de réduire la dangerosité de cette voie ; la route départementale 214 est très fréquentée ; il existe par ailleurs des risques pour la salubrité publique liés aux ordures ménagères, les services de collecte ayant indiqué qu'ils ne pénétreraient pas dans l'enceinte de la parcelle pour relever ces ordures.

Par des mémoires en défense enregistrés le 11 avril 2022 et le 5 septembre 2022, M. A..., représenté par Me Achou-Lepage, conclut à ce qu'il n'y ait lieu de statuer sur la requête, ou, à défaut, au rejet de cette requête et demande de mettre à la charge de M. et Mme E... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- M. et Mme E... n'ayant pas contesté le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mai 2022, le permis de construire du 19 mars 2020 doit être regardé comme devenu définitif ;

- les moyens de M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense enregistrés le 25 avril 2022 et le 25 mai 2022, la commune de Castres-Gironde, représentée par Me Cornille, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. et Mme E... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que M. et Mme E... ne justifient pas d'un intérêt à agir ;

- les requérants n'établissent pas avoir dument notifié la copie complète de leur requête d'appel au pétitionnaire, dès lors que le courrier de notification qui lui a été adressé ne comporte pas la mention " PJ " ;

- les moyens de M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Par une lettre du 14 mars 2023, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de mettre en œuvre la procédure prévue par l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et de surseoir à statuer en vue de la régularisation du vice tiré de la méconnaissance de l'article 1 de la zone N du plan local d'urbanisme de Castres-Gironde par l'implantation d'un bassin d'infiltration des eaux pluviales en secteur Ng.

Des observations ont été produites par M. A..., le 21 mars 2023, par M. et Mme E... le 21 mars 2023 et par la commune de Castres-Gironde le 27 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G... C...,

- les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,

- les observations de Me Foix, représentant M. et Mme E..., les observations de Me Gournay représentant la commune de Castres-Gironde et les observations de Me Achou-Lepage, représentant M. A....

Une note en délibéré présentée pour M. A..., par Me Achou-Lepage, a été enregistrée le 13 avril 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 19 mars 2020, le maire de Castres-Gironde a délivré à M. A... un permis de construire en vue de l'édification de trente maisons individuelles sur un terrain cadastré section 109 A n° 2361 situé route de Nadon. Par un jugement du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur la demande de M. et Mme E..., voisins du pétitionnaire, tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2020. A la suite de ce jugement, le maire de Castre-Gironde a délivré à M. A... un permis de construire modificatif par un arrêté du 1er mars 2022. Par un jugement du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de M. et Mme E.... Ces derniers relèvent appel du jugement du 16 décembre 2021.

Sur l'exception de non-lieu :

2. Si, à compter de la délivrance du permis modificatif en vue de régulariser le vice relevé, dans le cadre du sursis à statuer prononcé par le jugement avant dire droit, les conclusions dirigées contre ce jugement en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet, il n'en va pas de même du surplus des conclusions dirigées contre ce premier jugement, qui conservent leur objet, même après la délivrance du permis de régularisation. Ainsi, la délivrance par le maire de Castres-Gironde, par un arrêté du 1er mars 2022, d'un permis de construire modificatif au bénéfice de M. A..., et l'intervention, le 5 mai 2022, d'un second jugement du tribunal administratif de Bordeaux mettant fin à l'instance ont seulement pour effet de rendre sans objet les conclusions de M. et Mme E... en tant qu'elles sont dirigées contre la mise en œuvre, par le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 décembre 2021, des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme. En revanche, les conclusions des appelants dirigées contre ce jugement en tant qu'il a écarté comme non fondés les moyens dirigés contre l'arrêté du 19 mars 2020 ont conservé leur objet, même après la délivrance du permis de construire modificatif. Par suite, l'exception de non-lieu opposée par M. A... doit être écartée dans cette mesure.

Sur la recevabilité de la requête :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas (...) de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du (...) recours. (...) ". Ces dispositions font obligation à l'auteur d'un recours contentieux de notifier une copie du texte intégral de son recours à l'auteur ainsi qu'au bénéficiaire du permis attaqué.

3. Il ressort des pièces du dossier que pour satisfaire à l'obligation de notification de leur recours issue de ces dispositions, M. et Mme E... ont adressé à la commune de Castres-Gironde et à M. A..., dans le délai de quinze jours imparti par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, des courriers indiquant avoir introduit une requête à l'encontre du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2003732 du 16 décembre 2021 par lequel le tribunal a sursis à statuer, et, dans les deux courriers, qu'une copie de ce recours était jointe à ce pli. S'il est soutenu que M. A... n'aurait pas reçu cette copie, cette allégation n'est établie ni par des diligences qu'aurait vainement accomplies ce dernier auprès de l'expéditeur pour obtenir ce document, ni par un autre moyen. Par suite, cette fin de non-recevoir doit être écartée.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

4. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. M. et Mme E..., voisins immédiats du projet de M. A..., font notamment valoir que la construction de trente maisons individuelles aura des effets sur leurs conditions d'habitation, notamment en raison d'une densification du secteur au-delà de ce qui était prévisible, de la vue depuis ces nouvelles constructions sur leur maison et alors que la voie de desserte de leur habitation sera partagée avec les futurs habitants de ces nouveaux logements. Ils justifient ainsi d'un intérêt à agir. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune en défense doit être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 19 mars 2020 :

5. En premier lieu, il n'est pas contesté que M. A... est propriétaire de la bande de terrain permettant l'accès aux constructions du projet en cause. La circonstance que le terrain de M. et Mme E... et les propriétaires de la parcelle cadastrée section A n° 2360 bénéficient d'une servitude de passage, dont l'existence découle justement de ce que cet espace n'est pas public, sur cette bande d'accès ne saurait lui conférer le caractère " d'espace commun de deux lotissements ", contrairement à ce que soutiennent les requérants. Par suite, le moyen tiré de ce que le pétitionnaire aurait dû obtenir l'accord des colotis pour utiliser la voie d'accès au terrain d'assiette doit être écarté.

6. En deuxième lieu, il résulte des dispositions des articles R. 423-1 et R. 431-5 du code de l'urbanisme que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Il résulte de ce qui précède que les tiers ne sauraient utilement invoquer, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, la circonstance que l'administration n'en aurait pas vérifié l'exactitude. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a obtenu, par deux arrêtés du 3 novembre 2015, deux permis d'aménager en vue du détachement de deux lots d'un terrain lui appartenant. Si les plans joints à ces demandes de permis d'aménager faisaient apparaître des surfaces destinées à devenir des espaces communs à ces lots et au terrain qu'il conservait, il n'est pas contesté qu'il est demeuré propriétaire de ces espaces, alors même que cette situation résulterait de sa carence à créer une association syndicale pour la propriété, la gestion et l'entretien des terrains et équipements communs. Ainsi, alors que M. A... a attesté, conformément à l'article R. 421-3 du code de l'urbanisme, avoir qualité pour solliciter le permis de construire en litige, il n'appartenait pas à l'autorité compétente de refuser de lui délivrer l'autorisation d'occupation des sols ainsi demandée dès lors qu'elle ne disposait pas, au moment où elle statuait, d'informations de nature à établir le caractère frauduleux de la demande, qui n'est d'ailleurs pas allégué, ou faisant apparaître qu'il ne disposait pas du droit à la déposer. A cet égard, la circonstance que le maire de Castres-Gironde avait délivré, près de cinq ans auparavant, les permis d'aménager du 3 novembre 2015 ne peut être regardée comme constituant une telle information. Au demeurant, le permis de construire en litige, qui a pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'il autorise avec la législation et la réglementation d'urbanisme, a été accordé à M. A... sous réserve du droit des tiers. Par suite, le moyen tiré de ce que ce permis de construire est illégal en ce qu'il inclut des espaces communs de deux lotissements et en ce que la superficie de la parcelle d'assiette est inexacte doit être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 1 du règlement de la zone N du plan local d'urbanisme de Castres-Gironde : " Occupations et utilisations du sol interdites : Les constructions appartenant aux catégories de destinations suivantes sont interdites : habitations, à l'exception de celles prévues à l'article N2 (dans le sous-secteur Nh), hébergement hôtelier, -bureaux, - commerce, -artisanat, à l'exception de celles prévues à l'article N2 (dans le sous-secteur Nh), - industrie, - exploitation agricole ou forestière, à l'exception de celles prévue à l'article N2 (dans le sous secteur Nf), -entrepôt, - les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif, à l'exception de celles prévues à l'article N2 (...) ". Et selon l'article 2 du règlement de cette zone : " Occupations et utilisation du sol soumises à des conditions particulières : Sur l'ensemble de la zone sont admises les occupations et autorisations des sols suivantes si elles respectent les conditions ci-après : (...) - Les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif : - si elles sont nécessaires à l'entretien du milieu naturel et à la fréquentation du site ; - ou/et si elles concernent des ouvrages de télécommunication et des installations de distribution d'énergie électrique (...) ".

9. Le projet dont il s'agit prévoit la construction d'un bassin d'infiltration des eaux pluviales sur une partie de la parcelle située en secteur Ng, que le plan local d'urbanisme de Castres-Gironde définit comme un sous-secteur de la zone N à protéger strictement. Ce bassin, dont la construction est rendue nécessaire par les seules constructions projetées par M. A..., ne peut être regardé comme une construction ou une installation nécessaire aux services publics ou d'intérêt collectif. Au demeurant, à supposer même que cet ouvrage puisse être considéré comme tel, il n'entre pas dans les exceptions prévues par l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors qu'il n'est ni nécessaire à l'entretien du milieu naturel et à la fréquentation du site, ni ne concerne un ouvrage de télécommunication ou une installation de distribution d'énergie électrique. Par suite, M. et Mme E... sont fondés à soutenir que l'implantation d'un bassin d'infiltration des eaux pluviales en zone Ng méconnaît les dispositions du règlement de la zone N du plan local d'urbanisme de Castres-Gironde.

10. En revanche, M. et Mme E... ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de cette zone interdisant les affouillements et exhaussements du sol, dès que de telles dispositions doivent s'entendre comme concernant les " installations et travaux divers ", non soumis à la réglementation du permis de construire et dont la réalisation est subordonnée à autorisation dans les conditions prévues par le k) de l'article R. 421-19 et le f) de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme, mais ne sont en revanche pas applicables aux travaux de mise en état des terrains d'assiette des bâtiments et autres ouvrages dont la construction fait l'objet d'un permis de construire, lequel est délivré conformément à d'autres dispositions du même code et tient compte d'éventuels affouillements et exhaussements du sol.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 7 du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme de Castres-Gironde : " Implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : 7.1 Marges latérales : (...) En cas de retrait, la construction respectera une distance minimale de 3,50 mètres par rapport à la limite séparative (...) ".

12. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le plan de masse joint au dossier de demande de permis de construire fait clairement apparaître la ligne de recul, matérialisée par une ligne en pointillés bleus, qui présente une distance de 3,50 mètres. Il ressort des mentions figurant sur ce plan que la maison d'habitation n° 14 présente bien un retrait de 3,50 mètres par rapport aux limites séparatives du terrain d'assiette. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UB 7 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.

13. En cinquième lieu, aux termes du paragraphe 5 de l'article 13 du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme : " Espaces libres et plantations, espaces boisés classés : (...) Dans toute opération portant sur une surface de terrain supérieure à 5000m2, 10 % minimum de cette surface doit être aménagé en espace vert et planté collectif d'un seul tenant ".

14. Il ressort des pièces du dossier que la partie de la parcelle située en zone UB présente une surface de 6 095 mètres carrés. Il ressort tant des mentions du plan de masse que de celles de la notice architecturale du projet qu'il est prévu un espace vert commun d'un seul tenant d'une surface totale de 611 mètres carrés. Cet espace vert est par ailleurs clairement matérialisé sur le plan de masse, contrairement à ce que soutiennent les requérants, mettant ainsi à même le service instructeur d'apprécier sa localisation et sa surface. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UB.13.5 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.

15. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

16. D'une part, il ressort de la notice architecturale du projet de M. A... que la collecte des ordures ménagères s'effectuera par la mise en place de containers rangés dans un local poubelle et qu'un emplacement est prévu pour la dépose des ordures le jour de passage du service de collecte des déchets. Par ailleurs, le service de gestion des déchets de la communauté de communes de Montesquieu a émis un avis favorable au projet, en précisant que les bacs devront être sortis la veille au soir de la collecte en bord de la route de Nadon. Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme E..., aucun élément au dossier ne permet de conclure que les sacs dédiés au tri de déchets recyclables ne pourront être déposés dans un container spécifique, lequel pourra être sorti sur l'emplacement dédié le jour de collecte hebdomadaire de ce type de déchets. Par suite, le moyen tiré de l'atteinte à la salubrité publique doit être écarté.

17. D'autre part, la sortie du terrain se fera sur la bande d'accès, laquelle donne sur la route de Nadon, qui correspond à la route départementale 124. En dépit d'une déclivité du terrain supérieure à 10 % sur les cinq derniers mètres de cette bande, il ressort des pièces du dossier que les automobilistes sortant de la parcelle disposeront d'une bonne visibilité sur la route de Nadon. Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme E..., aucun élément au dossier ne permet de conclure que la visibilité sera réduite de manière significative par la présence de bennes le long de la route de Nadon. Par ailleurs, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la route départementale 124 serait particulièrement fréquentée, il est constant que le centre routier départemental du conseil général a émis le 18 mars 2020 un avis favorable au projet, notamment au regard des aménagements de cette route, telle que la limitation de la vitesse à 30 kilomètres par heure sur la portion concernée par le projet. Par suite, le maire de Castres-Gironde n'a pas commis d'erreur d'appréciation quant à l'application de l'article R. 111-2 dès lors qu'aucun risque pour la sécurité publique n'est caractérisé.

18. Enfin, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Cet article prévoit que si les constructions projetées portent une atteinte aux paysages avoisinants, le permis de construire peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage au sens de cet article, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

19. En l'espèce, le projet dont il s'agit s'insère dans un environnement résidentiel qui présente des habitations sans unité ou harmonie architecturale particulière. Si M. et Mme E... se prévalent de l'avis réservé qui aurait été émis par l'architecte des Bâtiments de France préalablement à la délivrance du permis d'aménager du 3 novembre 2015, ce document, qui n'est d'ailleurs pas versé au dossier, ne permet pas à lui seul de témoigner de la qualité particulière du site d'implantation du projet en cause. Par ailleurs, il ressort de la notice architecturale que le style des constructions envisagées est inspiré par l'architecture traditionnelle locale, et que les matériaux utilisés s'inscrivent dans une démarche " d'insertion dans le patrimoine bâti ancien local ", notamment par l'utilisation d'enduits de ton pierre blanche et de toitures en tuile canal de teinte claire. En outre, la densité des constructions n'apparaît pas disproportionnée, alors même que la zone UB est décrite comme un secteur d'urbanisation ancienne peu dense à vocation urbaine dans le règlement du plan local d'urbanisme, dès lors notamment que le règlement de cette zone n'interdit pas ce type de constructions mitoyennes. Enfin, la circonstance que le projet prévoit la création de 30 maisons d'habitations alors que le plan d'aménagement et de développement durables fixe un objectif de 63 maisons nouvelles d'ici 2030 n'est pas de nature à caractériser une atteinte au caractère ou à l'intérêt du site au sens des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme. Ainsi, le maire de Castres-Gironde n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions. Par suite, ce moyen doit être écarté.

20. Il résulte de ce qui précède que seul le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1 de la zone N du plan local d'urbanisme est de nature à entraîner l'annulation du permis de construire en litige.

Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

21. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations (...) ".

22. L'illégalité visée au point 8 est susceptible de faire l'objet d'une régularisation. Il y a lieu, dès lors, de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et de fixer à M. A... et à la commune de Castres-Gironde un délai de quatre mois, à compter de la notification du présent arrêt, aux fins de notifier à la cour la mesure de régularisation nécessaire.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête en tant qu'elles sont dirigées contre la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme par le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 décembre 2021.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de M. et Mme E... jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, à compter de la notification du présent arrêt, imparti à M. A... et à la commune de Castres-Gironde pour notifier à la cour un permis de construire régularisant l'illégalité tirée de la méconnaissance des dispositions du règlement de la zone N du règlement du plan local d'urbanisme de Castres-Gironde par l'implantation d'un bassin d'infiltration des eaux pluviales en zone Ng.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et Mme F... E..., à M. D... A... et à la commune de Castres-Gironde.

Délibéré après l'audience du 13 avril 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mai 2023.

La rapporteure,

Charlotte C...Le président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 22BX00489 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00489
Date de la décision : 04/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : CABINET GRAVELLIER - LIEF - DE LAGAUSIE - RODRIGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-05-04;22bx00489 ?
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