La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/06/2023 | FRANCE | N°21BX02486

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 22 juin 2023, 21BX02486


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Ronde Préchotine d'Echanges et d'Initiative pour l'Appui à la Parentalité (ARONPEI) a demandé au tribunal administratif de la Martinique de condamner la commune de Saint-Pierre à lui verser la somme de 139 985,02 euros, majorée des intérêts moratoires au taux légal, en exécution du marché de prestations de services sociaux conclu le 5 septembre 2016.

Par un jugement n° 2000208 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de la Martinique a condamné la commune de Saint-Pierre à vers

er l'association ARONPEI la somme de 109 398 euros HT, assortie des intérêts morat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Ronde Préchotine d'Echanges et d'Initiative pour l'Appui à la Parentalité (ARONPEI) a demandé au tribunal administratif de la Martinique de condamner la commune de Saint-Pierre à lui verser la somme de 139 985,02 euros, majorée des intérêts moratoires au taux légal, en exécution du marché de prestations de services sociaux conclu le 5 septembre 2016.

Par un jugement n° 2000208 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de la Martinique a condamné la commune de Saint-Pierre à verser l'association ARONPEI la somme de 109 398 euros HT, assortie des intérêts moratoires à compter du 11 mars 2020, a mis à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juin 2021, la commune de Saint-Pierre, représentée par Me Dumont, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du 11 mars 2021 du tribunal administratif de la Martinique ;

2°) à titre subsidiaire, de ramener à 38 995 euros HT la somme qu'elle a été condamnée à verser à l'association ARONPEI ;

3°) de mettre à la charge de l'association ARONPEI une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le contrat dont l'exécution était demandée ayant été résilié, la demande de première instance devait être regardée comme une action fondée sur l'enrichissement sans cause ; le tribunal n'a pas répondu à ce moyen ;

- la demande de première instance de l'association doit être analysée comme reposant sur un fondement extracontractuel ; or, l'association ne démontre pas son appauvrissement ;

- dans le cadre de ce type de contrat, la commune ne rémunère le prestataire que du solde du coût du service, une fois déduites les sommes perçues de l'usager et des organismes de subventions ; en l'espèce, si l'association ne conteste pas ce mode de calcul et avoir perçu des versements des familles à hauteur de 5 820 euros, elle a prétendu n'avoir perçu aucune subvention de la Caisse des Allocation Familiales (CAF) ; il résulte toutefois des éléments obtenus auprès de la CAF qu'après contrôle des documents présentés, le montant de base des prestations réalisées par l'association a été ramené à 33 785 euros pour 2016 et à 61 737 euros pour 2017, correspondant aux prestations effectivement réalisées ; seules ces prestations peuvent donner lieu à un paiement ;

- le montant de la créance de l'association doit être fixé à 38 995 euros après déduction des sommes versées par les familles et des subventions accordées par la CAF, lesquelles n'ont pas à être proratisées dès lors qu'elles ont été versées pour la période d'exécution du marché ;

- cette somme ne portera intérêts qu'à compter du prononcé du jugement, au vu du comportement de l'association, et non à la date du 11 mars 2020.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2021, l'association Ronde Préchotine d'Echanges et d'Initiative pour l'Appui à la Parentalité (ARONPEI), pris en la personne de son liquidateur, représentée par Me Nicolas, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Saint-Pierre d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande de paiement est légitime ; si la convention conclue avec la commune prévoyait qu'elle recherche des ressources, elle ne s'était pas engagée à les trouver ; elle justifie par la production des reçus correspondants avoir perçu une somme totale de 5 820 euros au titre des versements des familles ; elle justifie également avoir sollicité, sans succès, des subventions auprès de la CAF ;

- le tribunal a considéré à juste titre que la commune lui devait une somme de 109 398 euros ;

- elle a droit aux intérêts moratoires sur les factures restées non payées à l'issue d'un délai de trente jours suivant réception de la demande de paiement, et ce jusqu'à la date de paiement du principal ;

Par une ordonnance du 7 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,

- les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique,

- et les observations de Me Dumont, représentant la commune de Saint-Pierre.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Saint-Pierre (Martinique) a conclu le 5 septembre 2016 avec l'association Ronde Préchotine d'Echanges et d'Initiative pour l'Appui à la Parentalité (ARONPEI) un marché de prestations d'activités périscolaires. Par ce contrat, la commune a confié à l'association, pour la période allant du 5 septembre 2016 au 29 juin 2017, l'animation d'activités périscolaires à l'intention des enfants des niveaux maternelle et élémentaire comprenant, d'une part, l'animation des temps de garderie et de pause méridienne, d'autre part, des temps d'activités périscolaires. Par courrier du 29 mai 2017, l'association a informé la commune de la résiliation unilatérale de la convention, fondée sur le défaut de paiement de ses factures de prestations. Par un jugement du 11 mars 2021, le tribunal administratif de la Martinique a condamné la commune de Saint-Pierre à verser à l'association ARONPEI la somme de 109 398 euros HT, assortie des intérêts moratoires à compter du 11 mars 2020, en paiement des prestations réalisées du 5 septembre 2016 au 29 mai 2017, date de résiliation du marché. La commune de Saint-Pierre relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La demande de première instance de l'association ARONPEI tendait à la condamnation de la commune de Saint-Pierre à lui verser une somme de 139 985,02 euros, correspondant au montant total des factures afférentes aux prestations réalisées en exécution du marché conclu le 5 septembre 2016, pour la période allant du 5 septembre 2016 jusqu'au 29 mai 2017, date de résiliation de ce marché. D'une part, en regardant cette demande comme tendant au règlement financier du marché pour la période antérieure à sa résiliation, le tribunal ne s'est nullement mépris sur la portée des conclusions dont il était saisi. D'autre part, si la commune de Saint-Pierre soutenait devant le tribunal que cette demande devait être requalifiée en action quasi-contractuelle, le tribunal a implicitement mais nécessairement écarté cette demande de requalification.

Au fond :

3. L'article 7 de la convention conclue entre la commune de Saint-Pierre et l'association ARONPEI, relatif à la rémunération du prestataire, indique que l'association s'engage " à rechercher toutes les ressources financières (CAF, participation parentale...) " et à " mettre en place toutes les procédures permettant de percevoir les subventions externes auxquelles elle a droit ", précise que le montant de la part communale est fixé après déduction de ces ressources financières, et prévoit enfin que le paiement intervient mensuellement, sur présentation d'une facture au terme d'un mois d'activité. Concernant le prix du marché, ces mêmes stipulations, d'une part, fixent le montant mensuel HT des activités d'animation du temps de garderie et de pause méridienne à 2 299 euros s'agissant de la garderie du matin, à 2 749 euros s'agissant de la pause méridienne et à 4 729 euros s'agissant de la garderie du soir, d'autre part, fixent à 273, 95 euros HT le montant mensuel de chacune des dix activités périscolaires proposées aux élèves de maternelle et de chacune de neuf activités périscolaires proposées aux élèves des classes élémentaires.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'association ARONPEI a demandé en vain auprès de la commune de Saint-Pierre le paiement de l'ensemble des prestations prévues par les stipulations contractuelles précitées. L'association a par ailleurs sollicité auprès de la caisse d'allocations familiales (CAF) de la Martinique des subventions au titre de ces mêmes prestations, qu'elle a déclaré avoir intégralement réalisées. La circonstance qu'elle n'ait pas obtenu de subvention de la CAF pour certaines de ces prestations ne révèle ni qu'elle ne les aurait pas exécutées, ni même que la CAF aurait procédé à un contrôle de son activité. Dans ces conditions, la commune de Saint-Pierre, qui n'a au demeurant jamais remis en cause la réalité des prestations accomplies par l'association ARONPEI en cours d'exécution du marché, ne peut soutenir que l'association n'aurait en réalité exécuté que les seules prestations au titre desquelles elle a obtenu des subventions de la CAF. Dans ces conditions, le montant des prestations réalisées en exécution du marché doit être établi, compte tenu de leur montant mensuel ci-dessus rappelé et de la période d'exécution du marché d'une durée de neuf mois, à 134 838,45 euros.

5. En deuxième lieu, il résulte des reçus de paiement produits au dossier que l'association ARONPEI a perçu au titre de l'année scolaire 2016/2017, en contrepartie de ses prestations d'animation d'activités périscolaires, des participations des usagers à hauteur de 5 760 euros. Par ailleurs, selon les éléments obtenus par la commune de Saint-Pierre auprès de la CAF de la Martinique, l'association a bénéficié, au titre de la période allant de septembre à décembre 2016, d'une subvention de 17 368,87 euros pour ses prestations d'accueil périscolaire d'enfants âgés de plus de six ans, puis, au titre du premier semestre 2017, d'une " aide spécifique " de 6 141,42 euros pour ses prestations d'animation d'activités périscolaires ainsi que d'une subvention de 27 196,56 euros pour ses prestations d'accueil périscolaire des enfants âgés de plus de six ans et de moins de six ans. Comme le fait valoir la commune en appel, il résulte des documents émis par la CAF que ces subventions ont été accordées, non pas pour des années entières, mais au titre des prestations accomplies par l'association en exécution du marché conclu avec la commune au titre de l'année scolaire 2016/2017. Elles doivent dès lors être intégralement déduites de la part communale. Dans ces conditions, après déduction de ces participations et subventions, la somme dont la commune de Saint-Pierre est redevable envers l'association ARONPEI en paiement du marché s'élève à 78 371,60 euros HT.

6. Enfin, la commune soutient que le " comportement " de l'association ARONPEI justifierait que le point de départ des intérêts moratoires soit fixé à la date du jugement attaqué. Toutefois, s'il est vrai que l'association a sollicité le paiement de ses prestations en omettant de faire état des subventions accordées par la CAF de la Martinique, cette circonstance est sans incidence sur la détermination du point de départ des intérêts moratoires.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la somme de 109 398 euros HT que la commune de Saint-Pierre a été condamnée à verser à l'association ARONPEI doit être ramenée à 78 371, 60 euros HT. La commune est fondée à demander, dans cette seule mesure, la réformation du jugement attaqué.

8. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La somme de 109 398 euros HT que la commune de Saint-Pierre a été condamnée à verser à l'association ARONPEI est ramenée à 78 371,60 euros HT.

Article 2 : Le jugement n° 2000208 du 11 mars 2021 du tribunal administratif de la Martinique est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Pierre et à l'association Ronde Préchotine d'Echanges et d'Initiative pour l'Appui à la Parentalité.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2023 à laquelle siégeaient :

M. Luc Derepas, président de la cour,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2023.

La rapporteure,

Marie-Pierre Beuve Dupuy

Le président,

Luc Derepas

Le greffier,

Anthony Fernandez

La République mande et ordonne au préfet de la Vienne en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX02486


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02486
Date de la décision : 22/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. DEREPAS
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : DUMONT

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-06-22;21bx02486 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award