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04/07/2023 | FRANCE | N°22BX03011

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 04 juillet 2023, 22BX03011


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2105668 du 8 février 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. B... tendant à son admission à l'aide juridictionn

elle provisoire et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2105668 du 8 février 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. B... tendant à son admission à l'aide juridictionnelle provisoire et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2022, et la communication de pièces complémentaires enregistrée le 25 février 2023, M. B..., représenté par Me Coste, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2105668 du 8 février 2022 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- la commission du titre de séjour devait être consultée, puisqu'il a été pris en charge avant l'âge de seize ans et remplissait les conditions pour bénéficier du titre de séjour prévu par l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la préfète de la Gironde n'a pas porté d'appréciation sur sa situation particulière ; sa demande a été traitée sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-3, alors qu'elle était fondée sur les dispositions de l'article L. 423-22 ;

- l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;

- la décision est entachée d'erreurs de fait ; les documents pour justifier de son identité et de sa minorité sont authentiques et comportent des mentions concordantes relatives à son état civil ; le formalisme et les mentions pré imprimées sont conformes ; l'acte ne présente pas de traces d'altération frauduleuse ; l'enquête pénale a abouti à un classement sans suite pour infraction insuffisamment caractérisée ;

- la préfète a commis une erreur de droit en exigeant des critères exceptionnels non requis par l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en statuant sur des considérations générales et non sur les éléments particuliers de sa situation ;

- l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;

- l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 28 février 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 28 mars 2023 à 12h00.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 17 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Martin,

- et les observations de Me Coste, représentant. M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien, déclare être entré irrégulièrement en France au mois d'octobre 2017. Il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Gironde du 9 octobre 2017 au 15 février 2020, par ordonnances du procureur de la République, puis du juge des enfants près le tribunal judiciaire de Bordeaux. En 2020, il a bénéficié d'un contrat jeune majeur conclu avec le département de la Gironde, renouvelé du 15 février 2020 au 14 novembre 2021. Le 29 mai 2020, il a sollicité son admission au séjour dans le cadre des dispositions des articles L. 423-23, L. 421-1 et L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 13 septembre 2021, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 8 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " L'étranger qui demande la délivrance (...) d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1° Les documents justifiants de son état civil ; / (...) La délivrance du premier récépissé et l'intervention de la décision relative au titre de séjour sollicité sont subordonnées à la production de ces documents (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 811-2 du même code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies à l'article 47 du code civil ", ce dernier disposant que " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.

4. Il ressort des termes de l'arrêté contesté que, pour refuser de délivrer le titre de séjour sollicité par M. B..., la préfète de la Gironde s'est fondée sur le caractère irrégulier des documents d'état civil présentés à l'appui de sa demande.

5. Il ressort des pièces du dossier que pour établir son identité, M. B... a transmis à l'administration, dans le cadre de l'instruction de sa demande, un acte de naissance n° 30 du mois d'août 2020, un extrait d'acte de naissance n° 216 du 28 février 2002 et une copie comportant le même état-civil et un jugement supplétif n° 812 du 29 janvier 2020. Pour contester l'authenticité de ces différents documents, la préfète de la Gironde s'est appuyée sur un rapport d'analyse technique du 25 novembre 2020 établi par un analyste en fraude documentaire et à l'identité de la direction zonale sud-ouest de la police aux frontières. Le rapport a conclu au caractère non recevable de ces documents aux motifs que le jugement supplétif ne comportait aucune validation de l'autorité administrative et qu'aucune transcription sur un registre n'était établie, l'acte de naissance n° 30 ne présentait aucune numérotation, ni mention de l'imprimeur et ne pouvait être extrait d'un registre officiel, l'extrait d'acte de naissance n° 2016 et sa copie révélaient une anomalie en ayant un numéro d'enregistrement différent du précédent ainsi qu'une incohérence en renvoyant un jugement supplétif, alors que la naissance avait été déclarée dans le délai légal. La carte consulaire délivrée le 5 décembre 2019 par l'ambassade du Mali a pour seule vocation d'établir la preuve de résidence à l'étranger d'un ressortissant et ne saurait permettre de justifier de l'identité de M. B.... La consultation du fichier Visabio a aussi permis à la préfète de la Gironde de constater, en se fondant sur la correspondance des empreintes digitales et des photographies fournies, que l'intéressé avait sollicité le 3 mai 2017 un visa touristique auprès des autorités consulaires espagnoles sous une autre identité faisant apparaître qu'il serait né le 29 juillet 1996 à Bamako (Mali). Enfin, le classement sans suite de l'enquête diligentée par le Procureur de la République n'est pas de nature à établir que les documents présentés par M. B... à l'appui de sa demande de titre de séjour présentaient un caractère authentique, le Procureur de la République s'étant borné, selon les dires de l'appelant, à estimer que l'infraction était insuffisamment caractérisée. Dans ces conditions, la préfète de la Gironde a pu légalement considérer que les éléments en sa possession étaient suffisants pour écarter comme dépourvus de valeur probante les actes d'état civil communiqués par M. B... et estimer, dès lors, qu'il ne justifiait pas avoir été mineur lors de son entrée en France et, en particulier, avoir été âgé de seize à dix-huit ans lorsqu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance. Par suite, l'autorité administrative n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en rejetant la demande de titre de séjour présentée sur ce fondement.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française. ".

7. Il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 5 novembre 2020, reçu par les services de la préfecture le 12 novembre suivant, l'appelant a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 2° bis du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 423-22 du même code. Si M. B... soutient que la préfète de la Gironde se serait abstenue d'examiner sa demande sur ce fondement, il ressort toutefois des termes mêmes de la décision contestée que l'autorité administrative a mentionné que l'intéressé n'entrait dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen doit être écarté.

8. En troisième lieu, compte tenu des anomalies constatées sur les documents présentés par M. B... pour justifier de son état-civil, rappelées au point 5, la préfète de la Gironde a pu légalement se fonder sur le seul motif tiré de l'absence de minorité de M. B... pour refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de la Gironde se serait basée sur d'autres critères pour refuser la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du même code : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative:/ 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ;/ (...) ". Le préfet n'est toutefois tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions mentionnées à ces articles, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... ne remplit pas les conditions pour bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions dont il se prévaut. Dès lors, la préfète n'était pas tenue de consulter la commission du titre de séjour avant de lui opposer un refus de délivrance de titre de séjour.

11. En cinquième lieu, la motivation de la décision contestée révèle que la préfète a examiné la situation personnelle et particulière de M. B... au regard des conditions de son entrée et de son séjour en France. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen circonstancié de sa situation manque en fait.

12. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. /La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. /(...) ". Si M. B... a demandé son admission au séjour sur le fondement de ces dispositions, la préfète de la Gironde a pu légalement justifier son refus par l'absence d'authenticité des actes d'état civil présentés par le requérant. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

13. En septième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine./ L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

14. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui déclare être entré en France au mois d'octobre 2017, a bénéficié d'une prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Gironde en qualité de mineur étranger isolé sur la base d'actes d'état civil dont l'authenticité a été remise en cause. L'appelant se prévaut de son insertion professionnelle et notamment de l'obtention du titre professionnel d'" employé commercial en magasin " en mai 2021 et de la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à compter du 5 juin 2021 en qualité d'employé libre-service après avoir bénéficié d'un contrat de professionnalisation. Alors même que ses éducateurs et son employeur attestent de sa motivation, de ses qualités de sérieux et d'intégration, ces seuls éléments ne traduisent pas une insertion professionnelle particulière en France. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, l'intéressé, célibataire et sans charge de famille, aurait tissé des liens d'une particulière intensité sur le territoire français ni qu'il serait dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de sa vie et où résident ses parents et sa sœur. Dans ces conditions, et en dépit des efforts d'insertion dont l'intéressé a fait preuve, la préfète de la Gironde n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté contesté a été pris et n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces circonstances, la décision contestée n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'appelant.

15. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".

16. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

17. M. B... se prévaut de son insertion professionnelle et sociale en France. Toutefois, compte tenu des circonstances précédemment exposées au point 14, ces éléments ne sauraient être regardés, à eux seuls, comme des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant son admission exceptionnelle au séjour. Dès lors, la décision contestée n'a pas méconnu l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

18. Il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision pour contester la décision portant obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2023.

La rapporteure,

Bénédicte MartinLa présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX03011


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX03011
Date de la décision : 04/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : COSTE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-07-04;22bx03011 ?
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