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18/07/2023 | FRANCE | N°22BX01388

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 18 juillet 2023, 22BX01388


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui verser la somme de 131 052 euros en réparation du préjudice financier subi du fait des erreurs commises par l'administration dans le calcul de son indemnité différentielle pour la période du 1er septembre 1986 au 30 avril 2016.

Par un jugement n°1702004 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18BX04379 du 5 mai 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annu

lé le jugement du 30 octobre 2018 du tribunal administratif de Pau, a condamné l'Etat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui verser la somme de 131 052 euros en réparation du préjudice financier subi du fait des erreurs commises par l'administration dans le calcul de son indemnité différentielle pour la période du 1er septembre 1986 au 30 avril 2016.

Par un jugement n°1702004 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18BX04379 du 5 mai 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du 30 octobre 2018 du tribunal administratif de Pau, a condamné l'Etat à verser à M. A... la différence entre l'indemnité différentielle qu'il a perçue à compter du 1er janvier 2009 jusqu'au 30 avril 2016 et celle qu'il aurait dû percevoir en retenant une prime de rendement au taux de 32 %, a renvoyé M. A... devant la ministre des armées pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité en principal à laquelle il a droit à compter du 1er janvier 2009, avec intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 2017 et capitalisation des intérêts au 3 juillet 2018, a mis à la charge de l'Etat une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. A....

Procédure devant la cour :

Par un courrier du 3 décembre 2021, M. A... a demandé l'exécution de l'arrêt de la cour.

Par une ordonnance n° 22BX01388 du 25 mai 2022, la présidente de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par un mémoire enregistré le 10 juin 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la demande d'exécution.

Elle soutient que l'arrêt de la cour a été entièrement exécuté.

Par un mémoire enregistré le 6 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Laveissière, demande à la cour :

1°) de prononcer à l'encontre de l'Etat une astreinte de 150 euros par jour de retard s'il ne justifie pas avoir, dans le mois suivant l'arrêt à intervenir, entièrement et régulièrement exécuté l'arrêt n° 18BX04379 rendu par la cour le 5 mai 2021 ;

2°) d'enjoindre au ministre des armées de communiquer à la cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter les décisions précitées, et notamment le détail du calcul de chacune des sommes mises à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le ministre ne justifie lui avoir versé ni les intérêts dus sur l'indemnité différentielle à laquelle il a droit ni les frais qu'il a exposés pour l'instance ;

- il a été contraint d'exposer des frais d'avocat pour obtenir l'exécution encore incomplète d'un jugement de 2019.

Par une ordonnance du 6 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 novembre 2022.

Un mémoire du ministre des armées a été enregistré le 7 juillet 2023, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,

- les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique,

- et les observations de Me Roncin, représentant M A....

Une note en délibéré présentée par Me Laveissière a été enregistrée le 11 juillet 2023.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., recruté en qualité d'ouvrier de l'Etat, a été intégré en 1986 dans le corps des techniciens supérieurs d'études et de fabrications de l'Etat. A ce titre, il a bénéficié d'une indemnité différentielle en application du décret du 23 novembre 1962 relatif à l'octroi d'une indemnité différentielle à certains techniciens d'études et de fabrications du ministère des armées. Estimant que le calcul de cette indemnité était erroné, il a, par courrier réceptionné par l'administration le 3 juillet 2017, sollicité auprès du ministre de la défense l'indemnisation de son préjudice à hauteur de 131 052 euros et que son indemnité différentielle soit calculée en prenant en compte un taux de 32 % de prime de rendement. Suite à la décision implicite rejetant ses réclamations, il a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui verser la somme de 131 052 euros en réparation du préjudice financier subi du fait des erreurs commises par l'administration dans le calcul de son indemnité différentielle pour la période du 1er septembre 1986 au 30 avril 2016. Par un jugement du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Par un arrêt N°18BX04379 du 5 mai 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du 30 octobre 2018 du tribunal administratif de Pau, a condamné l'Etat à verser à M. A... la différence entre l'indemnité différentielle qu'il a perçue à compter du 1er janvier 2009 jusqu'au 30 avril 2016 et celle qu'il aurait dû percevoir en retenant une prime de rendement au taux de 32 %, a renvoyé M. A... devant la ministre des armées pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité en principal à laquelle il a droit à compter du 1er janvier 2009, avec intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 2017 et capitalisation des intérêts au 3 juillet 2018, a mis à la charge de l'Etat une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. A.... Ce dernier demande l'exécution de cet arrêt.

2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) ". Aux termes de l'article R. 921-2 de ce code : " La demande d'exécution d'un jugement frappé d'appel, même partiellement, est adressée à la juridiction d'appel. La demande d'exécution d'un arrêt rendu par une cour administrative d'appel est adressée à celle-ci (...) ". Aux termes de l'article R. 921-5 du même code : " Le président de la cour administrative d'appel ou du tribunal administratif saisi d'une demande d'exécution sur le fondement de l'article L. 911-4, ou le rapporteur désigné à cette fin, accomplissent toutes diligences qu'ils jugent utiles pour assurer l'exécution de la décision juridictionnelle qui fait l'objet de la demande. Lorsque le président estime qu'il a été procédé à l'exécution ou que la demande n'est pas fondée, il en informe le demandeur et procède au classement administratif de la demande ". Et aux termes de l'article R. 921-6 de ce code : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa saisine, le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge de l'exécution de prescrire les mesures qu'implique nécessairement la décision dont l'exécution lui est demandée par la partie intéressée, alors même que ces mesures ne figuraient pas expressément dans la demande présentée au président de la juridiction ou dans les mémoires produits après l'ouverture de la procédure juridictionnelle. Il n'en va autrement que lorsque la partie qui a saisi la juridiction d'une demande d'exécution a indiqué, sans équivoque, qu'elle renonçait au bénéfice d'une partie de ces mesures.

3. Aux termes de l'article L. 911-9 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée a condamné l'Etat au paiement d'une somme d'argent dont le montant est fixé par la décision elle-même, cette somme doit être ordonnancée dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de justice./ (...) A défaut d'ordonnancement dans les délais mentionnés aux alinéas ci-dessus, le comptable assignataire de la dépense doit, à la demande du créancier et sur présentation de la décision de justice, procéder au paiement ". Dès lors que ces dispositions permettent à la partie gagnante, en cas d'inexécution d'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée, d'obtenir du comptable public assignataire le paiement de la somme que l'Etat est condamné à lui verser à défaut d'ordonnancement dans le délai prescrit, il n'y a, en principe, pas lieu de faire droit à une demande tendant à ce que le juge prenne des mesures pour assurer l'exécution de cette décision. Il en va toutefois différemment lorsque le comptable public assignataire, bien qu'il y soit tenu, refuse de procéder au paiement.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'Etat a versé à M. A... en avril 2019, soit avant l'enregistrement de sa demande d'exécution, un rappel d'indemnité différentielle en exécution du jugement ci-dessus mentionné. M. A... ne soutient pas que le montant de la somme versée serait erroné. Dans ces conditions, sa demande d'exécution ne peut, sur ce point, être accueillie.

5. En deuxième lieu, si la ministre des armées a annoncé, dans son mémoire en défense, que les intérêts moratoires dont est assorti le rappel d'indemnité en cause seraient prochainement versés à M. A..., elle n'a produit, avant la clôture de l'instruction, aucun élément permettant de considérer que ces intérêts auraient effectivement été versés à M. A....

6. En outre, la ministre n'établit pas davantage avoir versé à l'intéressé, en juillet 2021, la somme de 500 euros que la cour a mise à sa charge au titre des frais exposés pour l'instance en se bornant à produire une copie d'écran faisant état de l'enregistrement comptable de cette somme assortie des intérêts.

7. Enfin, si M. A... fait valoir que le compte CARPA de son conseil a été crédité, d'une somme de 1 402,35 euros, ce seul versement ne permet pas, en l'absence de tout élément permettant d'identifier à quelle poste correspond cette somme, de considérer que l'arrêt dont s'agit a été entièrement exécuté.

8. Toutefois, M. A... n'établit ni même n'allègue avoir saisi, en vain, le comptable public du ministère afin que celui-ci procède au paiement des sommes lui restant dues ainsi qu'il lui appartenait pourtant de faire en application des dispositions précitées de l'article L. 911-9 du code de justice administrative. Par suite, sur ces points, sa demande d'exécution ne peut être accueillie.

9. En troisième lieu, l'arrêt dont l'exécution est demandée ne prescrivait pas à l'administration de produire l'intégralité des fiches de calcul établies pour la fixation du rappel d'indemnité différentielle due à M. A.... Par suite, en demandant qu'il soit enjoint à l'administration de justifier des bases de liquidation retenues afin de s'assurer que les calculs effectués par l'administration pour fixer le montant de ce rappel d'indemnité différentielle ne sont pas erronés, celui-ci soulève un litige distinct dont il n'appartient pas au juge de l'exécution de connaître.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la demande d'exécution de M. A... doit être rejetée.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande M. A... au titre des frais exposés pour l'instance soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : La demande d'exécution de M. A... et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 11 juillet 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,

Mme Agnès Bourjol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juillet 2023.

Le rapporteur,

Manuel Bourgeois

La présidente,

Marie-Pierre Beuve Dupuy

Le greffier,

Anthony Fernandez

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 22BX01388


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01388
Date de la décision : 18/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exécution décision justice adm

Composition du Tribunal
Président : Mme BEUVE-DUPUY
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : LAVEISSIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-07-18;22bx01388 ?
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