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18/07/2023 | FRANCE | N°22BX01389

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 18 juillet 2023, 22BX01389


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui payer la somme de 153 403 euros en réparation du préjudice financier subi du fait des erreurs commises par l'administration dans le calcul de son indemnité différentielle.

Par un jugement n° 1701185 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Pau a, en premier lieu, condamné l'Etat à payer à Mme A... la différence entre l'indemnité différentielle qu'elle a perçue à compter du 1er janvier 2009 et celle qu'

elle aurait dû percevoir en retenant une prime de rendement au taux de 32 %, en deux...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui payer la somme de 153 403 euros en réparation du préjudice financier subi du fait des erreurs commises par l'administration dans le calcul de son indemnité différentielle.

Par un jugement n° 1701185 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Pau a, en premier lieu, condamné l'Etat à payer à Mme A... la différence entre l'indemnité différentielle qu'elle a perçue à compter du 1er janvier 2009 et celle qu'elle aurait dû percevoir en retenant une prime de rendement au taux de 32 %, en deuxième lieu, l'a renvoyée devant la ministre des Armées pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité en principal à laquelle elle a droit à compter du 1er janvier 2009, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2017 et la capitalisation des intérêts échus à la date du 24 mars 2018, en troisième lieu, a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et enfin, a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par un arrêt n° 19BX01899, 19BX01900 du 11 janvier 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête de la ministre des armées tendant à l'annulation de ce jugement et mis à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par un courrier du 3 décembre 2021, Mme A... a demandé l'exécution de l'arrêt de la cour.

Par une ordonnance n° 22BX01389 du 25 mai 2022, la présidente de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par un mémoire enregistré le 10 juin 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la demande d'exécution.

Elle soutient que l'arrêt de la cour a été entièrement exécuté.

Par un mémoire enregistré le 6 octobre 2022, Mme A..., représentée par Me Laveissière, demande à la cour :

1°) de prononcer à l'encontre de l'Etat une astreinte de 150 euros par jour de retard s'il ne justifie pas avoir, dans le mois suivant l'arrêt à intervenir, entièrement et régulièrement exécuté l'arrêt n° 19BX01899, 19BX01900 rendu par la cour le 5 mai 2021 ;

2°) d'enjoindre au ministre des armées de communiquer à la cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter les décisions précitées, et notamment le détail du calcul de chacune des sommes mises à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le ministre n'a pas produit l'intégralité des fiches de calcul établies pour la fixation du rappel d'indemnité différentielle qui lui est due ;

- les intérêts dus sur l'indemnité différentielle à laquelle il a droit ne lui ont pas été versés ;

- elle a été contraint d'exposer des frais d'avocat pour obtenir l'exécution encore incomplète d'un jugement de 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,

- les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique,

- et les observations de Me Roncin, représentant Mme A....

Une note en délibéré présentée par Me Laveissière a été enregistrée le 11 juillet 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., recrutée en qualité d'ouvrier de l'Etat, a été titularisée le 1er septembre 1982 dans le corps des techniciens supérieurs d'études et de fabrications. A ce titre, elle a bénéficié de l'indemnité différentielle en application du décret du 23 novembre 1962 relatif à l'octroi d'une indemnité différentielle à certains techniciens d'études et de fabrications du ministère des armées. Par un jugement n° 1701185 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Pau a, en premier lieu, condamné l'Etat à payer à Mme A... la différence entre l'indemnité différentielle qu'elle a perçue à compter du 1er janvier 2009 et celle qu'elle aurait dû percevoir en retenant une prime de rendement au taux de 32 %, en deuxième lieu, l'a renvoyée devant la ministre des Armées pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité en principal à laquelle elle a droit à compter du 1er janvier 2009, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2017 et la capitalisation des intérêts échus à la date du 24 mars 2018, en troisième lieu, a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et enfin, a rejeté le surplus des conclusions de la requête. Par un arrêt du 11 janvier 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête de la ministre des armées tendant à l'annulation de ce jugement et mis à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mme A... a saisi la cour d'une demande d'exécution de ce jugement et de cet arrêt.

2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) ". Aux termes de l'article R. 921-2 de ce code : " La demande d'exécution d'un jugement frappé d'appel, même partiellement, est adressée à la juridiction d'appel. La demande d'exécution d'un arrêt rendu par une cour administrative d'appel est adressée à celle-ci (...) ". Aux termes de l'article R. 921-5 du même code : " Le président de la cour administrative d'appel ou du tribunal administratif saisi d'une demande d'exécution sur le fondement de l'article L. 911-4, ou le rapporteur désigné à cette fin, accomplissent toutes diligences qu'ils jugent utiles pour assurer l'exécution de la décision juridictionnelle qui fait l'objet de la demande. Lorsque le président estime qu'il a été procédé à l'exécution ou que la demande n'est pas fondée, il en informe le demandeur et procède au classement administratif de la demande ". Et aux termes de l'article R. 921-6 de ce code : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa saisine, le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge de l'exécution de prescrire les mesures qu'implique nécessairement la décision dont l'exécution lui est demandée par la partie intéressée, alors même que ces mesures ne figuraient pas expressément dans la demande présentée au président de la juridiction ou dans les mémoires produits après l'ouverture de la procédure juridictionnelle. Il n'en va autrement que lorsque la partie qui a saisi la juridiction d'une demande d'exécution a indiqué, sans équivoque, qu'elle renonçait au bénéfice d'une partie de ces mesures.

3. Aux termes de l'article L. 911-9 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée a condamné l'Etat au paiement d'une somme d'argent dont le montant est fixé par la décision elle-même, cette somme doit être ordonnancée dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de justice./ (...) A défaut d'ordonnancement dans les délais mentionnés aux alinéas ci-dessus, le comptable assignataire de la dépense doit, à la demande du créancier et sur présentation de la décision de justice, procéder au paiement ". Dès lors que ces dispositions permettent à la partie gagnante, en cas d'inexécution d'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée, d'obtenir du comptable public assignataire le paiement de la somme que l'Etat est condamné à lui verser à défaut d'ordonnancement dans le délai prescrit, il n'y a, en principe, pas lieu de faire droit à une demande tendant à ce que le juge prenne des mesures pour assurer l'exécution de cette décision. Il en va toutefois différemment lorsque le comptable public assignataire, bien qu'il y soit tenu, refuse de procéder au paiement.

4. En premier lieu, la ministre des armées soutient avoir versé, le 19 avril 2021, antérieurement à sa demande d'exécution, la somme de 500 euros sur le compte CARPA du conseil de Mme A... au titre des frais qu'elle a exposés pour l'instance devant la cour. Mme A... ne conteste pas la réalité de ce versement et ne demande plus, dans le dernier état de ses écritures, qu'il soit enjoint à l'Etat de lui verser cette somme. Par suite, ses conclusions doivent, sur ce point, être rejetées.

5. En deuxième lieu, le jugement dont l'exécution est demandée ne prescrivait pas à l'administration de produire l'intégralité des fiches de calcul établies pour la fixation du rappel d'indemnité différentielle dû à Mme A.... Par suite, en demandant qu'il soit enjoint à l'administration de justifier des bases de liquidation retenues afin de s'assurer que les calculs effectués par l'administration pour fixer le montant de ce rappel d'indemnité différentielle ne sont pas erronés, celle-ci soulève un litige distinct dont il n'appartient pas au juge de l'exécution de connaître.

6. En dernier lieu, si la ministre des armées a annoncé que les intérêts moratoires dont est assorti le rappel d'indemnité versé à Mme A... en avril 2021 seraient prochainement versés à Mme A..., elle n'a pas justifié d'un tel versement. Toutefois, Mme A... n'établit ni même n'allègue avoir saisi, en vain, le comptable public du ministère afin que celui-ci procède au paiement de ces intérêts ainsi qu'il lui appartenait pourtant de faire en application des dispositions précitées de l'article L. 911-9 du code de justice administrative. Par suite, sur ce point, sa demande d'exécution ne peut être accueillie.

7. Il résulte de ce qui précède que la demande d'exécution de Mme A... doit être rejetées.

8. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande Mme A... au titre des frais exposés pour l'instance sot mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : La demande d'exécution de Mme A... ainsi que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 11 juillet 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,

Mme Agnès Bourjol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juillet 2023.

Le rapporteur,

Manuel Bourgeois

La présidente,

Marie-Pierre Beuve Dupuy

Le greffier,

Anthony Fernandez

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 22BX01389


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01389
Date de la décision : 18/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exécution décision justice adm

Composition du Tribunal
Président : Mme BEUVE-DUPUY
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : LAVEISSIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-07-18;22bx01389 ?
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