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07/11/2023 | FRANCE | N°23BX01819

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 07 novembre 2023, 23BX01819


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... et M. B... C... ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la délibération du 28 février 2020 par laquelle le conseil municipal de Saint-Brice-sur-Vienne a approuvé son plan local d'urbanisme, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 15 avril 2020.

Par un jugement n° 2001409 du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Limoges a annulé la délibération du 28 février 2020 du conseil municipal de Saint-Brice-sur-Vienne.

Procédure deva

nt la cour :

I. Par une requête enregistrée le 3 juillet 2023 sous le n° 23BX01819, e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... et M. B... C... ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la délibération du 28 février 2020 par laquelle le conseil municipal de Saint-Brice-sur-Vienne a approuvé son plan local d'urbanisme, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 15 avril 2020.

Par un jugement n° 2001409 du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Limoges a annulé la délibération du 28 février 2020 du conseil municipal de Saint-Brice-sur-Vienne.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 3 juillet 2023 sous le n° 23BX01819, et des pièces enregistrées le 13 septembre 2023, la commune de Saint-Brice-sur-Vienne, représentée par Me Martin, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 25 mai 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée en première instance par M. et Mme C... ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- les premiers juges n'ont pas tenu compte des éléments produits dans la note en délibéré du 6 mai 2023 ;

- elle a produit devant le tribunal administratif une note en délibéré qui apportait les éléments justifiant de ce qu'elle avait bien compétence pour prendre la décision en litige ;

- le classement en zone AU du secteur des Rochetaux est cohérent avec les orientations du PADD, notamment celle qui vise à maîtriser l'urbanisation nouvelle ;

- la décision en litige n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'éventuelle illégalité de la délibération du 28 février 2020 pourrait faire l'objet d'une régularisation au titre de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 août 2023, Mme C..., représentée par Me Ramdenie, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Saint-Brice-sur-Vienne d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la commune de Saint-Brice-sur-Vienne ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, en cas d'annulation du jugement, elle demande que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement de la parcelle D13/BB105 soit retenu.

Par ordonnance du 19 juillet 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 septembre 2023 à 12h00.

II. Par une requête enregistrée le 3 juillet 2023 sous le n° 23BX01820, et des pièces enregistrées le 13 septembre 2023, la commune de Saint-Brice-sur-Vienne, représentée par Me Martin, demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Limoges du 25 mai 2023 ;

2°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de sursis à exécution remplit les conditions de l'article R. 811-15 et de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;

- elle justifie de moyens sérieux de nature à entrainer l'annulation du jugement et le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par celui-ci ;

- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables dès lors que les autorisations d'utilisation des sols devront être délivrées sur le fondement de l'ancien plan local d'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 août 2023, Mme C... conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Saint-Brice-sur-Vienne d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la commune de Saint-Brice-sur-Vienne ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Evelyne Balzamo,

- les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bourdin, représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... sont propriétaires d'une parcelle cadastrée BB 105, située rue Ronsard à Saint-Brice-sur-Vienne. Par une délibération du 28 février 2020, le conseil municipal de la commune de Saint-Brice-sur-Vienne a approuvé la révision de son plan local d'urbanisme (PLU). Par un courrier du 15 avril 2020, les consorts C... ont sollicité le retrait de cette délibération, ce qui a implicitement été refusé par la commune. Par une requête n° 23BX01819, la commune de Saint-Brice-sur-Vienne relève appel du jugement du 25 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé la délibération du 28 février 2020. Par la requête n° 23BX01820, elle demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement.

Sur la jonction :

2. Les requêtes enregistrées respectivement sous les nos 23BX01819 et 23BX01820 sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Contrairement à ce que soutient l'appelante, en renvoyant aux motifs exposés au point 7 du jugement, les premiers juges ont précisé de façon suffisamment circonstanciée les motifs pour lesquels ils ont considéré que la création de l'orientation d'aménagement et de programmation " zone 1AU Les Rochetaux " était entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Si l'appelante conteste la teneur des réponses apportées par le tribunal, elle remet ainsi en cause le bien-fondé du jugement et non la régularité de celui-ci.

4. En second lieu, la commune de Saint-Brice-sur-Vienne soutient que le tribunal administratif de Limoges a entaché son jugement d'irrégularité en s'abstenant de tenir compte des éléments contenus dans la note en délibéré produite le 6 mai 2023, alors que ces éléments étaient de nature à démontrer la compétence du conseil municipal pour prendre la délibération litigieuse et pouvaient donc être produits postérieurement à la clôture d'instruction. Il ressort cependant des énonciations du point 4 du jugement, dans lequel sont citées les délibérations de plusieurs communes membres de la communauté de communes Porte océane du Limousin produites le 6 mai 2023, que les premiers juges ont pris en compte cette note en délibéré même si, ainsi qu'il sera exposé au point 9 ils ont mal apprécié la portée de celle-ci et des éléments qui y étaient joints. Par suite, le moyen d'irrégularité soulevé doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. Aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ". En vertu de ces dispositions il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un permis de construire en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation. Dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance. Dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens. Il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges.

6. Pour annuler la délibération du 28 février 2020 de la commune de Saint-Brice-sur-Vienne, le tribunal administratif de Limoges a retenu trois moyens tirés de l'incompétence du conseil municipal de la commune pour approuver la révision de son PLU, de l'incohérence entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables au sein du plan local d'urbanisme et de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la création de l'orientation d'aménagement et de programmation " zone 1AU Les Rochetaux ".

7. En premier lieu et d'une part, en vertu de l'article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales, dans sa version issue du I de l'article 136 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, en vigueur à la date de la décision attaquée : " I.- La communauté de communes exerce de plein droit au lieu et place des communes membres, pour la conduite d'actions d'intérêt communautaire, les compétences relevant de chacun des deux groupes suivants : / 1° Aménagement de l'espace pour la conduite d'actions d'intérêt communautaire ; schéma de cohérence territoriale et schéma de secteur ; plan local d'urbanisme, document d'urbanisme en tenant lieu et carte communale ; (...) / IV. Lorsque l'exercice des compétences mentionnées aux I et II est subordonné à la reconnaissance de leur intérêt communautaire, cet intérêt (...) est défini au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur de l'arrêté prononçant la fusion. A défaut, la communauté de communes exerce l'intégralité de la compétence transférée ". D'autre part, l'article 136 de la loi du 24 mars 2014 a prévu, à titre transitoire, que : " II. La communauté de communes ou la communauté d'agglomération (...) créée ou issue d'une fusion après la date de publication de cette même loi, et qui n'est pas compétente en matière de plan local d'urbanisme, de documents d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale le devient le lendemain de l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la publication de ladite loi. Si, dans les trois mois précédant le terme du délai de trois ans mentionné précédemment, au moins 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population s'y opposent, ce transfert de compétences n'a pas lieu. / (...) IV. ' Si une commune membre de la communauté de communes ou de la communauté d'agglomération a engagé, avant la date de transfert de la compétence, une procédure d'élaboration, de révision, de modification ou de mise en compatibilité avec une déclaration de projet d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale, la communauté de communes ou la communauté d'agglomération devenue compétente peut décider, en accord avec cette commune, de poursuivre sur son périmètre initial ladite procédure ".

8. Il résulte de ces dispositions d'une part, que, dans l'hypothèse où une commune, membre de la communauté de communes, a déjà engagé une procédure d'élaboration de son plan local d'urbanisme avant le transfert de cette compétence à la communauté de communes, cette dernière peut décider de poursuivre cette procédure, sur son périmètre initial, une fois devenue compétente et en accord avec la commune concernée. Il en résulte, d'autre part que si, à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014, la compétence en matière de plan local d'urbanisme pour la conduite d'actions d'intérêt communautaire devient une compétence obligatoire des communautés de communes, les communautés de communes préexistantes qui n'étaient pas compétentes en matière de plan local d'urbanisme avant l'entrée en vigueur de cette loi ne le deviennent qu'à l'issue d'un délai de trois ans et sauf opposition d'au moins 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population. Ce dispositif s'applique également aux communautés de communes ou communautés d'agglomération qui sont créées ou issues d'une fusion entre la date de publication de la loi et le 26 mars 2017.

9. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 18 décembre 2015, le préfet a prononcé la fusion des communautés de communes Vienne-Glane et Pays de la Météorite pour constituer, à compter du 1er janvier 2016, la communauté de communes Porte océane du Limousin. Par délibérations concordantes des conseils municipaux adoptant les statuts de la nouvelle communauté de communes intervenues entre novembre et décembre 2015, les communes de Chaillac-sur-Vienne, Cheronnac, Javerdat, Les Salles-Lavauguyon, Oradour-sur-Glane, Rochechouart, Saillat-sur-Vienne, Saint-Brice-sur-Vienne, Saint-Junien, Saint-Martin-de-Jussac, Saint-Victurnien et Videix ont défini les compétences de la future communauté de communes et se sont opposées au transfert de compétence en matière de plan local d'urbanisme. Par conséquent, en application du II de l'article 136 de la loi du 24 mars 2014, la communauté de communes Porte océane du Limousin, qui n'était pas compétente en matière de plan local d'urbanisme au moment de sa création, se voyait transférer cette compétence le 27 mars 2017, sauf à ce qu'au moins 25 % des communes membres représentant au moins 20 % de la population s'y opposent, par un vote ayant lieu entre le 26 décembre 2016 et le 26 mars 2017. La commune requérante a produit devant le tribunal, pour justifier de sa compétence, par note en délibéré enregistrée le 6 mai 2023, les délibérations des communes de Chaillac-sur-Vienne, Cheronnac, Javerdat, Les Salles-Lavauguyon, Oradour-sur-Glane, Rochechouart, Saint-Brice-sur-Vienne, Saint-Junien, Saint-Victurnien, et Videix, soit dix des treize communes membres de la communauté de communes Porte océane du Limousin, intervenues à cette fin entre le 9 janvier 2017 et le 18 mars 2017. Ainsi, conformément aux dispositions précitées de la loi du 24 mars 2014, au moins 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population s'étant opposées dans les trois mois précédant le terme du délai de trois ans, fixé au 27 mars 2017, au transfert de compétence en matière de plan local d'urbanisme, c'est à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré de l'incompétence du conseil municipal de la commune de Saint-Brice-sur-Vienne pour approuver son plan local d'urbanisme par la délibération du 28 février 2020.

10. En second lieu, aux termes de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : 1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques ; 2° Les orientations générales concernant l'habitat, les transports et les déplacements, les réseaux d'énergie, le développement des communications numériques, l'équipement commercial, le développement économique et les loisirs, retenues pour l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la commune. Il fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain. Il peut prendre en compte les spécificités des anciennes communes, notamment paysagères, architecturales, patrimoniales et environnementales, lorsqu'il existe une ou plusieurs communes nouvelles ". Aux termes de l'article L. 151-8 du même code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ".

11. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

12. Il ressort du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du PLU de la commune de Saint-Brice-sur-Vienne que celui-ci établit trois axes, répartis en huit orientations : " Une commune où il fait bon vivre ", comprenant le maintien de la qualité du paysage urbain, la préservation des grandes continuités écologiques du territoire et ses paysages naturels et l'intérêt porté au bien-être des habitants, " Un rôle économique à affirmer ", visant à rendre le bourg plus attractif, optimiser la fréquentation sur le territoire et dynamiser la stratégie touristique, et enfin " Entre urbanité et ruralité ", qui a pour ambition de maîtriser l'urbanisation nouvelle et préserver l'identité rurale et agricole de la commune. Tous ces axes intègrent en outre trois thèmes transversaux, que sont les déplacements, le développement urbain et la modération de la consommation spatiale. Au titre de la maîtrise de l'urbanisation nouvelle, le PADD indique chercher à lutter contre le mitage et la linéarisation des constructions, notamment en implantant les nouvelles zones de constructions en continuité des parties actuellement urbanisées et en interdisant la poursuite de l'urbanisation linéaire.

13. Il ressort des pièces du dossier que le règlement du PLU de la commune de Saint-Brice-sur-Vienne prévoit, pour le secteur des Rochetaux, deux étapes d'urbanisation, avec une zone au nord classée 1AU, correspondant à un espace dédié au développement urbain à moyen terme et une zone au sud classée 2AU, ayant vocation à être urbanisée à plus long terme. Le secteur des Rochetaux, qui se situe à moins de 700 mètres au nord du bourg de la commune, est bordé à l'ouest par la route des Goupillères, le long de laquelle s'étend une urbanisation linéaire s'achevant sur un vaste espace majoritairement agricole et boisé. Contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'urbanisation de ce secteur, encadrée par une orientation d'aménagement et de programmation, ne contrevient pas à l'objectif de maîtrise de l'urbanisation nouvelle fixé par le PADD mais, au contraire, vise à mettre un frein à l'urbanisation linéaire le long de la route des Goupillères en constituant une urbanisation de second rang, derrière les habitations déjà présentes le long de cet axe routier, et ainsi densifier les constructions dans une zone en continuité des parties actuellement urbanisées de la ville. D'ailleurs, l'objectif " Maîtriser l'urbanisation nouvelle " du PADD prévoit de distinguer les hameaux à développer de ceux à préserver et identifie, à ce titre, le secteur des Rochetaux comme un hameau appelé à être conforté. L'objectif du PADD de préservation de l'identité rurale et agricole de la commune n'est pas davantage méconnu par le règlement dès lors que le projet de PLU prévoit une réduction de 76 % des terrains urbanisables à vocation d'habitat alors que les zones agricoles représentent plus de 51 % du territoire. Dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal administratif de Limoges a retenu que le règlement du PLU était incohérent avec le PADD.

14. Pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être énoncés, c'est également à tort que le tribunal a considéré que le PLU était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il comportait une orientation d'aménagement et de programmation " zone 1AU Les Rochetaux ".

15. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu ces motifs pour annuler la délibération en litige. Il appartient à la cour saisie par l'effet dévolutif d'examiner les autres moyens de première instance et d'appel soulevés par Mme C....

16. En premier lieu, si Mme C... soutient que les documents graphiques du PLU ne font pas apparaitre la construction située sur la parcelle BB n° 175, une telle erreur matérielle est sans incidence sur la régularité de la procédure, alors au demeurant qu'il n'est pas contesté que ce bâtiment à usage de bergerie a été réalisé sans autorisation.

17. En deuxième lieu, aux termes de l'article R 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites "zones N". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. ". Il ressort des pièces du dossier que la parcelle BB n° 105 (anciennement dénommée D n° 13), en nature de prairie, bien que située dans la partie actuellement urbanisée de la commune, est identifiée au PLU, notamment dans l'OAP n° 5 le Bourg, comme constituant une coulée verte entre deux lotissements situés rue Ronsard et allée de la Boétie, sur laquelle, en raison de la topographie des lieux, les eaux de ruissellement s'écoulent pour rejoindre la noue et le bassin d'orage situés sur la parcelle 1752. Il ressort des différents documents du PLU que ses auteurs ont choisi de préserver la continuité écologique en milieu urbain constituée par cette parcelle ainsi que plusieurs autres parcelles situées dans son prolongement. Par suite, alors même, en tout état de cause, que cette parcelle ne serait répertoriée ni par le schéma de gestion des eaux (SAGE) Vienne ni par le SRCE, et à supposer qu'elle ne présenterait pas les caractéristiques d'une zone humide, son classement en zone naturelle n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

18. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l'OAP n° 5 " le Bourg ", qui trouve sa justification ainsi que les autres OAP " aménagement " dans le rapport de présentation du PLU contrairement à ce qui est soutenu, n'est pas en contradiction avec le PADD qui prône la densification du centre-bourg dès lors que si elle prévoit la préservation d'une coulée verte, elle prévoit également la constructibilité de deux îlots au sein du secteur urbain. Par suite, le moyen doit être écarté.

19. Il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Brice-sur-Vienne est fondée à demander l'annulation du jugement du 25 mai 2023, par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé la délibération du 28 février 2020 du conseil municipal approuvant le PLU.

Sur la requête n° 23BX01820 :

20. La cour statuant au fond par le présent arrêt sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du 25 mai 2023 du tribunal administratif de Limoges, les conclusions de la requête n° 23BX01820 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement sont devenues sans objet.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de Mme C... une somme de 1 500 euros en application des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 25 mai 2023 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme C... devant le tribunal administratif de Limoges et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Mme C... versera à la commune de Saint Brice sur Vienne une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 23BX01820.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Brice-sur-Vienne et à Mme A... C....

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.

La présidente-assesseure,

Bénédicte MartinLa présidente-rapporteure,

Evelyne Balzamo Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Vienne en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01819, 23BX01820


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01819
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : GMR AVOCATS GRANGE-MARTIN-RAMDENIE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-07;23bx01819 ?
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