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08/11/2023 | FRANCE | N°21BX01180

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 08 novembre 2023, 21BX01180


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2021 régularisée le 8 avril 2021 et des mémoires enregistrées les 4 et 29 novembre 2022, la société par actions simplifiée (SAS) Casino Distribution France, prise en la personne de son président en exercice et représentée par Me Bolleau, demande à la cour :

1°) d'annuler le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré le 22 janvier 2021 par le maire de la commune de Cenon (Gironde) pour le projet présenté par la société en noms collectif Lidl en vue de l'extensio

n de 810,05 mètres carrés de la surface de vente, après démolition - reconstruct...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2021 régularisée le 8 avril 2021 et des mémoires enregistrées les 4 et 29 novembre 2022, la société par actions simplifiée (SAS) Casino Distribution France, prise en la personne de son président en exercice et représentée par Me Bolleau, demande à la cour :

1°) d'annuler le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré le 22 janvier 2021 par le maire de la commune de Cenon (Gironde) pour le projet présenté par la société en noms collectif Lidl en vue de l'extension de 810,05 mètres carrés de la surface de vente, après démolition - reconstruction, d'un supermarché à l'enseigne " Lidl " portant la surface de vente de ce magasin de 912 mètres carrés à 1 722 mètres carrés , autorisation délivrée après avis de la commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) du 27 novembre 2020.

2°) de mettre à la charge de la commune de Cenon la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'avis de la CNAC est insuffisamment motivé dès lors que la commission ne se prononce ni sur les impacts négatifs du projet en termes de flux de circulation, alors même qu'un projet d'ensemble commercial disposant des mêmes accès que le magasin en cause avait fait l'objet d'un refus de la commission en juillet 2020 pour ce motif, ni sur les nuisances générées pour l'environnement immédiat du projet, jouxtant des immeubles d'habitation ;

- le dossier est incomplet s'agissant de l'impact des flux de véhicules générés par le projet sur la voirie d'accès au site, déjà fortement encombrée ;

- la commission ne pouvait se borner à indiquer que la seule circonstance que ce projet de doublement d'une surface de vente est situé dans une ZACOM le rendait compatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) de l'aire métropolitaine bordelaise, dès lors que ce projet méconnaît les objectifs fixés dans le document d'aménagement commercial en matière de limitation de la congestion des flux de transports et de gestion économe du foncier par des solutions de densification des polarités commerciales ;

- pour ce qui concerne l'objectif d'aménagement du territoire, le projet aura un impact négatif sur l'animation de la vie urbaine de la commune en accroissant l'offre commerciale en périphérie au détriment des commerces de centre-ville de la zone de chalandise ; par ailleurs, ce projet génèrera des flux de véhicules importants et entrainera des difficultés de circulation ; enfin, dès lors que cette extension vient s'implanter en lieu et place de plusieurs habitations individuelles disposant de jardins, et donc pour partie sur des terrains non artificialisés, le projet n'est pas justifié en termes de consommation foncière, et s'avère ainsi contraire à la logique de " zéro artificialisation nette " prônée par le gouvernement ;

- s'agissant de l'objectif de développement durable, le projet d'extension n'apporte aucun élément permettant de limiter les nuisances notamment visuelles et sonores générées par le projet situé à proximité immédiate de quartiers résidentiels ;

- le pétitionnaire ne profite pas de cette extension pour tenter de valoriser les filières de production locales, à l'exception du vin, et a ainsi méconnu l'objectif de protection des consommateurs.

Par des mémoires en défense enregistrés les 12 septembre et 2 décembre 2022, la commune de Cenon, représentée par Me Gauci, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Casino Distribution France de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par trois mémoires en défense enregistrés les 4 novembre, 8 décembre 2022 et 26 avril 2023, la société en nom collectif (SNC) Lidl, représentée par Me Bozzi, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Casino Distribution France de la somme de

3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La commission nationale d'aménagement commerciale a produit des pièces relatives à l'instruction du recours exercé devant elle par un bordereau de pièces enregistré le 4 avril 2023.

Par une ordonnance du 27 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 28 avril 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,

- les observations de Me Gauci, représentant la commune de Cenon et de Me Bozzi, représentant la SNC Lidl.

Considérant ce qui suit :

1. La SNC Lidl a déposé le 20 mai 2020 auprès de la commune de Cenon une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de 810,05 mètres carrés de la surface de vente, après démolition-reconstruction, d'un supermarché portant la surface de vente de ce magasin de 912 mètres carrés à 1 722 mètres carrés, sur des terrains situés au niveau du 225 avenue Carnot sur les parcelles cadastrées section AH n° 190, 192 à 194, 246 à 249, 267 et 269. Le 12 août 2020, la commission départementale d'aménagement commercial de la Gironde a émis un avis favorable au projet. La société Casino Distribution France a déposé devant la commission nationale d'aménagement commercial un recours contre cet avis favorable. Lors de sa séance du 27 novembre 2020, la commission nationale d'aménagement commercial a rejeté ce recours et donné un avis favorable au projet. La société Casino Distribution France demande à la cour d'annuler le permis de construire délivré le 22 janvier 2021 par le maire de Cenon pour la réalisation de ce projet, en tant que ce permis vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur la légalité du permis de construire du 22 janvier 2021 en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale :

En ce qui concerne la motivation de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article L. 752-20 du code de commerce : " Les décisions de la commission nationale (...) doivent être motivées conformément aux articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration. ". Aux termes de l'article R. 752-38 du code du commerce, relatif au recours contre les décisions ou avis des commissions départementales d'aménagement commercial présentées devant la Commission nationale d'aménagement commercial : " (...) L'avis ou la décision est motivé (...) ". Cette obligation de motivation n'implique pas que la Commission soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect, par le projet qui lui est soumis, de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par les dispositions législatives applicables.

3. En l'espèce, l'avis émis par la commission nationale lors de sa séance du 27 novembre 2020 rappelle la localisation et les caractéristiques principales du projet, mentionne sa compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale de l'aire métropolitaine bordelaise et relève notamment l'absence d'impact négatif sur l'animation de la vie urbaine dans un secteur en forte progression démographique, la desserte satisfaisante du site par les modes de transports " doux ", la réduction de 20 % de l'imperméabilisation du terrain d'assiette du projet, notamment par la création d'un parc de stationnement souterrain et la forte augmentation de la surface dédiée aux espaces verts. La commission indique également que le projet prévoit des éléments performants en matière de développement durable, notamment l'installations de panneaux photovoltaïques sur la toiture ou le dépassement des exigences de la norme RT 2012 en matière d'isolation, et relève enfin que la clientèle pourra disposer d'un magasin plus moderne à l'offre diversifiée en produits issus de l'agriculture biologique. Ce faisant, la commission nationale d'ménagement commercial a suffisamment motivé son avis quand bien même il ne comporte pas d'éléments circonstanciés relatifs aux nuisances vis-à-vis du voisinage et à l'impact négatif sur les flux de circulation.

En ce qui concerne la composition du dossier de demande d'autorisation :

4. Aux termes de l'article R. 752-6 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable : " I.- La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments mentionnés ci-après ainsi que, en annexe, l'analyse d'impact définie au III de l'article L. 752-6. (...) 2° Cartes ou plans relatifs au projet : a) Un plan de masse faisant apparaître la surface de vente des magasins de commerce de détail, ensembles commerciaux ou points permanents de retrait ; b) Un plan faisant apparaître l'organisation du projet sur la ou les parcelles de terrain concernées : emplacements et superficies des bâtiments, des espaces destinés au stationnement et à la manœuvre des véhicules de livraison et des véhicules de la clientèle et au stockage des produits, des espaces verts ; c) Une carte ou un plan de la desserte du lieu d'implantation du projet par les transports collectifs, voies piétonnes et pistes cyclables ; d) Une carte ou un plan des principales voies et aménagements routiers desservant le projet ainsi que les aménagements projetés dans le cadre du projet ; e) En cas de projet situé dans ou à proximité d'une zone commerciale : le plan ou la carte de cette zone ; 3° Effets du projet en matière d'aménagement du territoire. Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : a) Prise en compte de l'objectif de compacité des bâtiments et aires de stationnement ; b) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; c) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules de livraison générés par le projet et description des accès au projet pour ces véhicules ; d) Indication de la distance du projet par rapport aux arrêts des moyens de transports collectifs, de la fréquence et de l'amplitude horaire de la desserte de ces arrêts ; e) Analyse prévisionnelle des flux de déplacement dans la zone de chalandise, tous modes de transport confondus, selon les catégories de clients ; f) En cas d'aménagements envisagés de la desserte du projet : tous documents garantissant leur financement et leur réalisation effective à la date d'ouverture de l'équipement commercial pour les aménagements pris en charge au moins pour partie par les collectivités territoriales, la mention des principales caractéristiques de ces aménagements, une estimation des coûts indirects liés aux transports supportés par les collectivités comprenant la desserte en transports en commun, ainsi qu'une présentation des avantages, économiques et autres, que ces aménagements procureront aux collectivités ; (...) "

5. La circonstance que le dossier de demande d'autorisation ne comporterait pas l'ensemble des éléments exigés par les dispositions précitées, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité l'autorisation qui a été accordée que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

6. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation d'exploitation commerciale déposée par la SNC Lidl contenait notamment une étude de trafic réalisée en 2020 par le cabinet EMTIS sur la foi de comptages automatiques avec relevés horaires par sens de circulation réalisés du mardi 26 mars au lundi 1er avril 2019 et des relevés de flux directionnels au carrefour giratoire de l'avenue Carnot effectués le mardi 26 mars 2019 entre 17 heures et 18 heures, ainsi que d'une estimation de fréquentation future établie par analogie avec des magasins existants. En se bornant à remettre en cause la pertinence et la valeur de cette étude par des données issues de " Google trafic ", la société requérante ne justifie pas sérieusement l'insuffisance alléguée du dossier à cet égard. Par suite, le moyen tiré de ce que le dossier de demande de permis de construire serait incomplet en l'absence d'analyse de l'impact des flux de véhicules générés par le projet sur la voirie d'accès au site, doit être écarté.

En ce qui concerne la compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale de l'aire métropolitaine bordelaise :

7. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent pris dans leur ensemble.

8. Le document d'orientation et d'objectifs et le document d'aménagement commercial du schéma de cohérence territoriale de l'aire métropolitaine bordelaise, prévoit que le projet d'extension d'un équipement commercial situé dans une ZACom de type 2, au sein de laquelle est située le projet, est soumise à certaines conditions d'implantation. Le projet doit notamment démontrer que les flux de transports générés n'entraînent pas une congestion supplémentaire du site et garantir une gestion économe du foncier en proposant des solutions de densification des polarités commerciales au niveau de la conception du magasin et du stationnement. Il ressort des pièces du dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale que l'augmentation des flux de véhicules supplémentaires accédant au site sera très limitée et que les équipements de voirie existants, qui n'apparaissent pas saturés, bénéficient d'une réserve de capacité suffisante alors par ailleurs que l'accès au site par l'avenue Carnot ne sera pas conservé. En termes de consommation foncière, le projet, situé à moins de deux-cents mètres du centre-ville de Cenon, qui consiste à accroitre la surface commerciale d'un magasin existant prévoit notamment de réduire l'imperméabilisation des sols sur le site notamment par la création d'un parc de stationnement sous la surface de vente et des places en aérien en matériaux permettant l'infiltration des eaux de pluie. Le rapport de la direction départementale des territoires et de la mer relève également que le projet répond à l'objectif de compacité des bâtiments et d'optimisation des aires de stationnement. Dans ces conditions, le projet est compatible avec ces orientations et objectifs du schéma de cohérence territoriale. Par suite, ce moyen doit être écarté.

En ce qui concerne l'appréciation du projet par la commission nationale d'aménagement commercial :

9. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce alors applicable : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; f) Les coûts indirects supportés par la collectivité en matière notamment d'infrastructures et de transports ; / 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; 3° En matière de protection des consommateurs : a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. ". Il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant de l'aménagement du territoire :

10. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le projet de la SNC Lidl consiste en l'extension, après démolition et reconstruction sur le même site, d'un magasin à dominante alimentaire situé dans une zone d'aménagement commercial, en continuité du tissu urbain central en relation avec les commerces déjà établis et à proximité immédiate de zones résidentielles et du centre-ville de la commune de Cenon. Le projet, d'une surface de vente relativement modeste, constitue ainsi une offre de proximité en adéquation avec l'évolution démographique de la zone de chalandise dont la population a augmenté de près de 10 % entre 1999 et 2012, alors par ailleurs qu'il n'est pas fait état de difficultés particulières pour les commerces de centre-ville, notamment en termes de vacance de commerces. Par suite, la société Casino Distribution France n'est pas fondée à soutenir que le projet aurait un impact négatif sur l'animation de la vie urbaine de Cenon.

11. En deuxième lieu, il ressort du dossier de demande, et notamment des schémas de flux de circulation, que l'accès au site s'effectuera par la seule rue René Cassagne. Les flux de circulation ont été initialement calculés sur la base de comptages récents réalisés par un cabinet spécialisé et le flux généré par le projet a été évalué à environ 51 véhicules par heure en heure de pointe, soit une augmentation de moins de 5 % du trafic présent sur cette voie, laquelle dispose, de même que le giratoire implanté au droit du terrain d'assiette du projet, de réserves de capacité suffisantes. Si la société Casino Distribution France conteste ces données, elle n'apporte aucun élément probant permettant de remettre en cause le calcul de ces flux routiers.

12. En troisième lieu, le projet prévoit la création d'un parc de stationnement sous la surface de vente pour la moitié de la capacité de stationnement du site, l'autre moitié en surface étant aménagée avec des matériaux permettant l'infiltration des eaux. Si la société requérante soutient que le projet prévoit la destruction de plusieurs maisons d'habitation et de jardins, il est constant que le projet qui s'implantera sur un site déjà artificialisé ne comprendra pas d'espace artificialisé supplémentaire, que les jardins des maisons démolis seront transformés en espaces verts et en places de stationnement perméables et que la surface dédiée aux espaces non imperméabilisés atteindra près de 30 % du terrain d'assiette du projet.

13. Par suite, la société Casino Distribution France n'est pas fondée à soutenir que le projet compromettrait l'objectif d'aménagement du territoire.

S'agissant du développement durable :

14. Il ressort des pièces du dossier que le projet autorisé prévoit notamment la mise en place de dispositifs permettant l'isolation du bâtiment au-delà des normes de la règlementation thermique 2012, la réduction des consommations d'énergie et l'installation de panneaux photovoltaïques en toiture. De plus, le projet situé en centre-ville s'intègre dans son environnement urbain et participe à la politique de renouvellement des quartiers de la commune en apportant un aménagement qualitatif, notamment du point de vue du traitement paysager. Si la société requérante évoque les diverses nuisances pour les riverains immédiats du site que génèrera le projet, elle n'apporte aucun élément précis sur ce point alors que le projet sera implanté dans un environnement urbain dense et que le pétitionnaire indique dans le dossier de demande avoir pris des mesures particulières, notamment que les camions chargés d'approvisionner le magasin présentent un seuil d'émission sonore inférieur à 60 db. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la commission nationale d'aménagement commercial aurait inexactement apprécié les caractéristiques du projet au regard de l'objectif de développement durable.

S'agissant de la protection des consommateurs :

15. Contrairement à ce que soutient la requérante, le projet vise à améliorer le confort de la clientèle et à proposer une gamme de produits diversifiés incluant le recours à des producteurs locaux. Un stand de vente en direct au consommateur sera en outre mis à la disposition des producteurs locaux. Le pétitionnaire fait valoir, sans être contesté, avoir conclu des partenariats avec des producteurs ainsi qu'en atteste la liste de ces fournisseurs incluse dans le dossier de demande. Par suite, il n'est pas établi que le projet méconnaîtrait les objectifs en matière de protection des consommateurs.

16. Il résulte de tout ce qui précède que le projet ne méconnait pas les objectifs définis par l'article L. 752-6 du code de commerce et que, par suite, la société Casino Distribution France n'est pas fondée à demander l'annulation du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en litige.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Cenon, qui n'est pas partie perdante dans cette instance, verse une quelconque somme à la société Casino Distribution France en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Casino Distribution France la somme de 1 500 euros chacune à verser, d'une part à la commune de Cenon et, d'autre part, à la société Lidl.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Casino Distribution France est rejetée.

Article 2 : La société Casino Distribution France versera la somme de 1 500 euros à la commune de Cenon et la somme de 1 500 euros à la société Lidl sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Casino Distribution France, à la commune de Cenon, à la société Lidl, à la commission nationale d'aménagement commercial et à la société Auchan Distribution.

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 novembre 2023.

La présidente assesseure,

Christelle Brouard-LucasLe président-rapporteur,

Jean-Claude PauzièsLa greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au u ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX01180


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01180
Date de la décision : 08/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : SCP CGCB et ASSOCIES BORDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-08;21bx01180 ?
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