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18/04/2024 | FRANCE | N°23BX01210

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 18 avril 2024, 23BX01210


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 19 août 2021 par laquelle le président de la communauté de communes du pays de Fénelon a refusé de faire droit à sa demande du 21 juin 2021 tendant à l'abrogation de la délibération du 28 novembre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme de Calviac-en-Périgord en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section A n°1563.



Par un jugement n° 2104707 du 6 mars 2023, l

e tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 19 août 2021 par laquelle le président de la communauté de communes du pays de Fénelon a refusé de faire droit à sa demande du 21 juin 2021 tendant à l'abrogation de la délibération du 28 novembre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme de Calviac-en-Périgord en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section A n°1563.

Par un jugement n° 2104707 du 6 mars 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 mai 2023, M. B... A..., représenté par Me Achou-Lepage, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 mars 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 19 août 2021 par laquelle le président de la communauté de commune du pays de Fénelon en Périgord noir a rejeté son recours du 21 juin 2021 sollicitant l'abrogation du plan local d'urbanisme de Calviac-en-Périgord en tant qu'il classe sa parcelle cadastrée section A n°1563 en zone agricole ;

3°) d'enjoindre au président de la communauté de commune du pays de Fénelon de réunir le conseil communautaire afin de modifier le plan local d'urbanisme en tant qu'il classe sa parcelle en zone A, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 € par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de commune du pays de Fénelon la somme de 2 000 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a insuffisamment motivé son jugement concernant le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par les auteurs du plan local d'urbanisme en classant sa parcelle en zone agricole en méconnaissance de l'article L.9 du code de justice administrative ;

- le classement de la parcelle A 1563 en zone agricole doit être regardé comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement de cette parcelle en zone A est incohérent avec le projet d'aménagement et de développement durable du plan local d'urbanisme de la communauté de communes du pays de Fénelon.

Par des mémoires en défense enregistrés le 14 février 2024 et le 1er mars 2024, la communauté de communes du Pays de Fénelon, représentée par Me Martin, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, au sursis à statuer sur le fondement de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 7 mars 2024.

Des mémoires présentés pour M. A... ont été enregistrés les 18 mars 2024 et 20 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme :

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Edwige Michaud,

- les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,

- les observations de Me Caparros, représentant M. A..., et de Me Rouget, représentant la communauté de communes du pays de Fénelon.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... est propriétaire d'une parcelle cadastrée section A n°1563 à Calviac-en-Périgord, au lieu-dit Les Campagnoles, d'une superficie de 3 340 m². Cette parcelle était anciennement classée en zone NB du plan d'occupation des sols approuvé le 20 novembre 1986 par le conseil municipal de Calviac. Par une délibération du 28 novembre 2019, le conseil communautaire du pays de Fénelon a approuvé le plan local d'urbanisme de Calviac-en-Périgord classant désormais cette parcelle en zone A. Par courrier du 21 juin 2021, M. A... a demandé au président de la communauté de communes du pays de Fénelon d'abroger la délibération du 28 novembre 2019 en tant qu'elle classe cette parcelle en zone A. Cette demande a été rejetée par une décision du président de la communauté de communes du pays de Fénelon du 19 août 2021. M. A... relève appel du jugement du 6 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 19 août 2021.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L.9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. Le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments développés par M. A... au soutien de sa demande de première instance, a exposé, par une motivation suffisante, aux points 2 à 7 du jugement, les raisons pour lesquelles il écarte le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation du classement de la parcelle cadastrée section A n°1563. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier pour ce motif.

Sur la légalité de la décision du 19 août 2021 :

4. Aux termes de l'article L.151-2 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme comprend : 1° Un rapport de présentation ; 2° Un projet d'aménagement et de développement durables ; 3° Des orientations d'aménagement et de programmation ; 4° Un règlement ; 5° Des annexes. / Chacun de ces éléments peut comprendre un ou plusieurs documents graphiques. Ces documents graphiques peuvent contenir des indications relatives au relief des espaces auxquels il s'applique ". En vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". Aux termes de l'article L. 151-8 du même code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Selon l'article L. 151-9 de ce code "

Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Enfin, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ".

5. En premier lieu, il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

6. La parcelle litigieuse cadastrée section A n°1563, d'une superficie de 3 340 m² et vierge de toute construction, se situe route du Chant de l'eau à proximité du lieu-dit " Les Campagnoles ". Si cette parcelle est entourée, à l'est et à l'ouest, par deux parcelles bâties, elle s'ouvre au nord sur un vaste espace agricole et s'insère dans un paysage de coteaux. Elle présente donc un potentiel agricole alors même qu'elle n'est actuellement pas exploitée à des fins agricoles. À cet égard, la circonstance, au demeurant non établie, que l'exploitation agricole de cette parcelle serait matériellement impossible au regard de sa configuration est sans incidence sur le bien-fondé du classement retenu. Si l'orientation n°1 du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) du plan local d'urbanisme de la commune de Calviac-en-Périgord, qui a pour objectif d'équilibrer le développement urbain entre les bourgs et les hameaux, précise qu'il est nécessaire pour maitriser le développement urbain, de définir les limites urbaines de plusieurs hameaux de nature à combler les " dents creuses " et cite le lieu-dit " Les Campagnoles " parmi les hameaux existants, la carte associée à cette orientation n'identifie pas ce lieu-dit parmi les hameaux à densifier et prévoit au contraire de stopper l'urbanisation linéaire le long des voies dans cette zone. Par ailleurs, le rapport de présentation du plan local d'urbanisme de la commune n'identifie pas davantage ce lieu-dit comme hameau ou village à densifier et rappelle l'objectif du PADD de limiter l'extension des zones urbaines dans les espaces agricoles en protégeant le paysage des coteaux. De plus, l'orientation n°3 du PADD, qui a pour objectif de valoriser le cadre de vie et l'environnement, précise qu'il est nécessaire de limiter l'extension des zones urbaines dans les espaces agricoles en protégeant le paysage des coteaux et de la vallée agricole de la commune. À cet égard, le rapport de présentation indique d'une part que l'agriculture reste une activité notable dans la commune qu'il faut protéger en raison de ses enjeux économiques et de protection du paysage et d'autre part, qu'il s'agit de densifier l'intérieur et la périphérie immédiate des enveloppes urbaines existantes dont le bourg et certains hameaux qui n'incluent pas le lieu-dit " Les Campagnoles ". Enfin, M. A... ne disposant pas de droit acquis au maintien du caractère constructible de sa parcelle ou des parcelles adjacentes à la sienne, ne peut utilement se prévaloir de ce qu'un permis de construire a été accordé en 1999 sur l'unité foncière composée des parcelles cadastrées section A n°1562 et A n°1563 en vue d'autoriser la construction d'un office notarial sur la première et une aire de stationnement afférente sur la sienne, qu'un bail professionnel a été conclu sur ces deux parcelles en 2019, qu'en 2017, que la parcelle cadastrée section A n°1562 a fait l'objet d'une autorisation de changement de destination vers une destination d'habitation et qu'en 2019, sa propre parcelle a fait l'objet d'une autorisation d'accès sur la voie publique depuis la route du Chant de l'eau. Dans ces conditions, eu égard au parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan local d'urbanisme, et alors même que la parcelle litigieuse est desservie par l'ensemble des réseaux publics hormis le réseau collectif d'assainissement, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation du classement de la parcelle cadastrée section A n°1563 en zone agricole doit être écarté, sans que M. A... ne puisse utilement se prévaloir de ce que les caractéristiques de sa parcelle sont compatibles avec un classement en zone urbaine au regard des objectifs du PADD.

7. En second lieu, pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

8. Tel qu'il a été dit au point 6, l'orientation n°1 du PADD du plan local d'urbanisme de la commune de Calviac-en-Périgord qui vise à équilibrer le développement urbain entre les bourgs et les hameaux n'inclut pas le lieu-dit " Les Campagnoles " parmi les hameaux à densifier et l'identifie comme une zone où il convient de stopper l'urbanisation le long des voies. Ainsi, alors en outre que l'orientation n°3 du PADD vise à limiter l'extension des zones urbaines dans les espaces agricoles, le règlement, en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section A n°1563 en zone agricole, ne révèle aucune incohérence avec l'orientation n°1 du PADD.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 août 2021. Par suite, sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

10. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la communauté de communes du Pays de Fénelon et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera une somme de 1 500 euros à la communauté de communes du Pays de Fénelon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à B... A... et à la communauté de communes du pays de Fénelon.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Edwige Michaud, première conseillère,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2024.

La rapporteure,

Edwige MichaudLa présidente,

Christelle Brouard-Lucas

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01210


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01210
Date de la décision : 18/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROUARD-LUCAS
Rapporteur ?: Mme Edwige MICHAUD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : ACHOU-LEPAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-18;23bx01210 ?
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