La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2024 | FRANCE | N°22BX01165

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 07 mai 2024, 22BX01165


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau, d'une part, d'annuler le certificat d'urbanisme du 24 avril 2019 par lequel le maire de Saint-Jean-de-Luz a retiré le certificat d'urbanisme du 29 novembre 2018 et a décidé que la parcelle cadastrée section AP n° 276 ne pouvait être utilisée en vue de l'édification d'une maison à usage d'habitation, et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2019 par lequel le maire de Saint-Jean-de-Luz a rejeté sa demande d

e permis de construire en vue de l'édification d'une maison à usage d'habitation sur la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau, d'une part, d'annuler le certificat d'urbanisme du 24 avril 2019 par lequel le maire de Saint-Jean-de-Luz a retiré le certificat d'urbanisme du 29 novembre 2018 et a décidé que la parcelle cadastrée section AP n° 276 ne pouvait être utilisée en vue de l'édification d'une maison à usage d'habitation, et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2019 par lequel le maire de Saint-Jean-de-Luz a rejeté sa demande de permis de construire en vue de l'édification d'une maison à usage d'habitation sur la dite parcelle.

Par deux jugements n° 1901536 et 2000256 du 1er mars 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête n° 22BX01165 et des mémoires complémentaires enregistrés les 25 avril 2022, 19 mai, et 29 juin 2023, M. B... A..., représenté par Me Cambot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1901536 du 1er mars 2022 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler le certificat d'urbanisme négatif du 24 avril 2019 valant retrait du certificat d'urbanisme positif délivré le 29 novembre 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Jean-de-Luz la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision attaquée est illégale dès lors que le délai de retrait était écoulé et qu'aucune procédure contradictoire préalable au retrait n'a été respectée ;

- le maire ne s'est pas opposé, à proximité immédiate du terrain, à une déclaration préalable de division foncière en vue de construire et a accordé un permis de construire sur une parcelle située non loin du projet ; le terrain est d'ailleurs situé en zone constructible, UDb, du plan local d'urbanisme (PLU) applicable à la date de l'arrêté attaqué ;

- le quartier de Chantaco constitue une agglomération au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ; il est couvert par une aire de mise en valeur du patrimoine et de l'architecture (AVAP) créée en 2011, devenue site patrimonial remarquable (SPR), dont le règlement assure la constructibilité du quartier dans le respect d'une urbanisation aérée mais suffisamment dense pour être qualifiée d'agglomération au sens de la loi littoral ;

- le terrain d'assiette du projet est situé en continuité de cette agglomération, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;

- dans l'hypothèse où la qualification d'agglomération ne serait pas retenue, le secteur répond en tout état de cause à la qualification de secteur déjà urbanisé (SDU) ; le projet devait être autorisé au regard des dispositions transitoires prévues par le III de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018, qui sont applicables au litige.

Par des mémoires en défense enregistrés les 20 avril, 2 juin et 5 septembre 2023, la commune de Saint-Jean-de-Luz, représentée par Me Dunyach, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelant la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 22 septembre 2023 à 12h00.

II. Par une requête n° 22BX01171 et des mémoires complémentaires enregistrés les 25 avril 2022, 19 mai, et 29 juin 2023, M. B... A..., représenté par Me Cambot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2000256 du 1er mars 2022 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2019 par lequel le maire de Saint-Jean-de-Luz a rejeté sa demande de permis de construire en vue de l'édification d'une maison à usage d'habitation, d'un garage et d'une piscine ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Jean-de-Luz la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- le jugement est insuffisamment motivé dès lors que les premiers juges n'ont pas motivé leur réponse au moyen tiré de ce que le terrain en litige serait situé dans un secteur déjà urbanisé (SDU) et pourrait bénéficier des dispositions du III de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018 applicable jusqu'au 31 décembre 2021 ;

Sur la légalité de l'arrêté du 6 décembre 2019 :

- le projet se situe dans les espaces déjà urbanisés de la commune au sens et pour l'application des dispositions combinées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme et du III de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018 ;

- le maire ne s'est pas opposé, à proximité immédiate du terrain, à une déclaration préalable de division foncière en vue de construire et a accordé un permis de construire sur une parcelle située non loin du projet ; le terrain est d'ailleurs situé en zone constructible, UDb, du plan local d'urbanisme (PLU) applicable à la date de l'arrêté attaqué ;

- le quartier de Chantaco constitue une agglomération au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ; il est couvert par une aire de mise en valeur du patrimoine et de l'architecture (AVAP) créée en 2011, devenue site patrimonial remarquable (SPR), dont le règlement assure la constructibilité du quartier dans le respect d'une urbanisation aérée mais suffisamment dense pour être qualifiée d'agglomération au sens de la loi littoral ;

- le terrain d'assiette du projet est situé en continuité de cette agglomération, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;

- dans l'hypothèse où la qualification d'agglomération ne serait pas retenue, le secteur répond en tout état de cause à la qualification de secteur déjà urbanisé (SDU) ; le projet devait être autorisé au regard des dispositions transitoires prévues par le III de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018, qui sont applicables au litige.

Par des mémoires en défense enregistrés les 20 avril, 2 juin et 5 septembre 2023, la commune de Saint-Jean-de-Luz, représentée par Me Dunyach, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelant la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 22 septembre 2023 à 12h00.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public,

- les observations de Me Coto, représentant M. A... et de Me Abadie de Maupeou, représentant la commune de Saint-Jean-de-Luz.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... a déposé le 4 octobre 2018, une demande de certificat d'urbanisme portant sur la construction d'une maison individuelle sur la parcelle cadastrée section AP n° 276 située 40 chemin de Chantaco à Saint-Jean-de-Luz. Le 29 novembre 2018, le maire de Saint-Jean-de-Luz a délivré un certificat d'urbanisme positif pour le projet considéré. Par courrier du 22 février 2019, le sous-préfet de Bayonne a, dans le cadre de son contrôle de légalité, demandé au maire de retirer le certificat d'urbanisme délivré dès lors qu'il méconnaissait, selon lui, les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. Par une décision du 24 avril 2019, le maire de Saint-Jean-de-Luz a retiré le certificat d'urbanisme du 29 novembre 2018 et a délivré un certificat d'urbanisme négatif. Le 29 octobre 2019, M. B... A... a déposé une demande de permis de construire pour la construction d'une maison individuelle, d'un garage et d'une piscine sur ledit terrain. Par un arrêté du 6 décembre 2019, le maire de Saint-Jean-de-Luz a refusé d'accorder l'autorisation sollicitée. Par les présentes requêtes, M. B... A... relève appel des jugements du 1er mars 2022 par lesquels le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 24 avril 2019 et, d'autre part, à l'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2019.

2. Les requêtes n° 22BX01171 et n° 22BX01165 présentent à juger des questions communes relatives à un certificat d'urbanisme négatif et à un refus de permis de construire portant sur le même projet. Elles ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer dans un même arrêt.

Sur la légalité des décisions attaquées :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants./ Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, des constructions et installations peuvent être autorisées, en dehors de la bande littorale de cent mètres, des espaces proches du rivage et des rives des plans d'eau mentionnés à l'article L. 121-13, à des fins exclusives d'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et d'implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. / L'autorisation d'urbanisme est soumise pour avis à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. Elle est refusée lorsque ces constructions et installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux paysages ". Le III de l'article 42 de la même loi prévoit que : " Jusqu'au 31 décembre 2021, des constructions et installations qui n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre du bâti existant, ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti, peuvent être autorisées avec l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat, après avis de la commission départementale de la nature des paysages et des sites, dans les secteurs mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction résultant de la présente loi, mais non identifiés par le schéma de cohérence territoriale ou non délimités par le plan local d'urbanisme en l'absence de modification ou de révision de ces documents initiée postérieurement à la publication de la présente loi ". Le V du même article précise que les mots " en continuité avec les agglomérations et villages existants " - qui remplacent les mots : " soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement " s'appliquent " sans préjudice des autorisations d'urbanisme délivrées avant la publication de la présente loi ". Cette modification de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ne s'applique pas " aux demandes d'autorisation d'urbanisme déposées avant le 31 décembre 2021 ni aux révisions, mises en compatibilité ou modifications de documents d'urbanisme approuvées avant cette date ". La loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique ayant été publiée au Journal officiel de la République française du 24 novembre 2018 et les présentes demandes de certificat d'urbanisme et de permis de construire ayant été déposées respectivement les 4 octobre 2018 et 29 octobre 2019, les dispositions du premier alinéa de l'article L. 121-8 dans leur rédaction antérieure à la loi du 23 novembre 2018 sont applicables en l'espèce.

4. D'une part, il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable en l'espèce, que l'extension de l'urbanisation doit se réaliser, dans les communes littorales, soit en continuité avec les agglomérations et les villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Constituent des agglomérations ou des villages où l'extension de l'urbanisation est possible, au sens et pour l'application de ces dispositions, les secteurs déjà urbanisés caractérisés par un nombre et une densité significatifs de constructions.

5. D'autre part, le deuxième alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, ouvre la possibilité, dans les autres secteurs urbanisés qui sont identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, à seule fin de permettre l'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et l'implantation de services publics, de densifier l'urbanisation, à l'exclusion de toute extension du périmètre bâti et sous réserve que ce dernier ne soit pas significativement modifié. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les espaces d'urbanisation diffuse éloignés de ces agglomérations et villages. Il ressort des dispositions de ce 2e alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme que les secteurs déjà urbanisés qu'elles mentionnent se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. Par ailleurs, le III de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique autorise, par anticipation, jusqu'au 31 décembre 2021 et sous réserve de l'accord de l'Etat, les constructions qui n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre du bâti existant, ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti dans les secteurs déjà urbanisés non encore identifiés par le schéma de cohérence territoriale ou non délimités par le plan local d'urbanisme.

6. A la date d'intervention des décisions attaquées, ni le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Jean-de-Luz, ni le schéma de cohérence territoriale SCoT) ne délimitaient de secteurs déjà urbanisés au sens du deuxième alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, la révision du PLU de cette commune, initiée antérieurement à la publication de la loi du 23 novembre 2018, n'ayant pas, à la date des décisions attaquées, encore été approuvée par le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays basque, autorité compétente en matière de document d'urbanisme. Si le SCoT Sud Pays Basque approuvé en 2005, était en cours de révision à la date des décisions en litige, révision qui s'intègre dans la procédure d'élaboration du SCoT Pays Basque et Seignanx prescrite par délibération du conseil communautaire du 13 décembre 2018, soit antérieurement à la publication de la loi du 23 novembre 2018, il ressort des travaux préparatoires de cette loi et de ce qui a été dit au point 5 que cette unique circonstance, ne peut, contrairement à ce que soutient la commune en défense, faire échec à l'application au litige des dispositions précitées et transitoires du III de l'article 42. En conséquence, les décisions attaquées sont soumises à ces dispositions.

7. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle en litige cadastrée section AP n°276 est située 40 chemin de Chantaco. Elle s'implante dans la partie nord du quartier de Chantaco et est classée en zone UDb constructible du PLU de la commune de Saint-Jean-de-Luz applicable à la date de l'arrêté attaqué. Ce quartier est identifié par le rapport de présentation du PLU, en cours de révision à la date de l'arrêté attaqué, comme un quartier historique datant de 1926, aux caractéristiques particulières, marqué par une faible densité de construction, et couvert, en raison de sa " valeur paysagère " et " pour le patrimoine architectural et paysager du XXème siècle ", par une aire de mise en valeur du patrimoine et de l'architecture (AVAP) créée en 2011, devenue site patrimonial remarquable (SPR). Il se situe au sud-est de la commune de Saint-Jean-de-Luz, distant d'environ 2,5 km du centre-ville et séparé de la zone agglomérée par de vastes espaces naturels s'implantant à l'est de l'autoroute A63, marquant une coupure d'urbanisation. Il comporte dans sa partie sud des équipements publics et notamment un collège, situés en bordure de la route départementale n° 918. S'il se caractérise par la présence de plusieurs lotissements implantés au gré du parcours du golf de Chantaco, ce quartier ne peut pour autant, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, être regardé, compte tenu du caractère très aéré de son urbanisation, comme comportant un nombre et une densité significatifs de constructions caractéristiques d'une agglomération ou d'un village au sens et pour l'application de la loi Littoral, tout du moins dans sa partie nord accueillant la parcelle en litige.

8. S'il ne peut être regardé comme étant densément urbanisé, il ressort toutefois des pièces du dossier que ce quartier comporte de nombreuses constructions regroupées autour du golf et des axes de circulation le bordant (chemin de Chantaco, avenue René Thion de la Chaume, allée du Golf, allée du Parc), une centaine de parcelles étant construites, et qu'il ne peut ainsi, compte tenu de la configuration du bâti, être regardé comme une zone d'urbanisation diffuse. La parcelle concernée est entourée d'une quinzaine de maisons implantées le long du chemin de Chantaco et dans le haut de l'allée du Golf, et de l'allée du Parc et constitue un " trou " dans cette urbanisation délimitée au nord, par la dernière parcelle construite, cadastrée AP n° 149, bordant le chemin de Chantaco et au sud par les boisements et le secteur naturel la séparant du lotissement de Laraldia auquel elle fait face. Il n'est par ailleurs pas contesté que le secteur, structuré par des voies de circulation, est desservi par les différents réseaux de distribution. Dans ces conditions, il relève d'un secteur déjà urbanisé, au sens des dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme et du III de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018. Enfin, le projet en litige, qui consiste en la construction d'une maison d'habitation s'implantant à l'arrière des constructions existantes, dans le prolongement de ces dernières, dans la partie haute de la parcelle, et qui n'entraînera qu'une densification limitée du secteur, n'a pas pour effet d'étendre le périmètre du bâti existant, et n'a pas davantage pour effet de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Par suite, le maire de Saint-Jean-de-Luz, qui n'a sollicité ni l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat, ni l'avis de la commission départementale de la nature des paysages et des sites, ne pouvait légalement fonder le certificat d'urbanisme négatif ainsi que le refus de permis de construire en litige sur le motif tiré de ce que le projet serait contraire aux dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. ". En outre, aux termes de l'article L. 121-1 du même code : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ".

10. Par la décision attaquée du 24 avril 2019, le maire de Saint-Jean-de-Luz a " annulé et remplacé " la décision du 29 novembre 2018. Dans ces conditions, le certificat d'urbanisme du 24 avril 2019 doit s'analyser comme un retrait du certificat d'urbanisme du 29 novembre 2018. Or, il résulte de ce qui précède que cette dernière décision, créatrice de droits, par laquelle le maire de Saint-Jean-de-Luz a indiqué au pétitionnaire que le terrain objet de la demande pouvait être utilisé pour la construction d'une maison d'habitation, n'était pas illégale. Au surplus, il est constant que la décision du 24 avril 2019 est intervenue plus de quatre mois après la décision du 29 novembre 2018. Enfin, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'elle ait été précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaît les dispositions précitées des articles L. 242-1 et L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.

11. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes d'annulation du certificat d'urbanisme négatif du 24 avril 2019 et de l'arrêté de refus de permis de construire du 6 décembre 2019. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens invoqués n'est susceptible, en l'état du dossier, de fonder cette annulation.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Saint-Jean-de-Luz au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Saint-Jean-de-Luz une somme de 1 500 euros à verser à M. A... au même titre.

DECIDE :

Article 1er : Les jugements n°1901536 et n°2000256 du tribunal administratif de Pau du 1er mars 2022 sont annulés.

Article 2 : Le certificat d'urbanisme du 24 avril 2019 et l'arrêté du maire de Saint-Jean-de-Luz du 6 décembre 2019 sont annulés.

Article 3 : La commune de Saint-Jean-de-Luz versera une somme de 1 500 euros à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Saint-Jean-de-Luz tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Saint-Jean-de-Luz.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Sébastien Ellie, premier conseiller,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mai 2024.

La rapporteure,

Héloïse C...La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX01165, 22BX01171


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01165
Date de la décision : 07/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Héloïse PRUCHE-MAURIN
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-07;22bx01165 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award