La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/04/2005 | FRANCE | N°02DA00736

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Formation pleniere, 26 avril 2005, 02DA00736


Vu la requête, enregistrée le 12 août 2002, présentée pour la société anonyme Z Y FRANCE, dont le siège est 14 boulevard industriel BP 47 à Sotteville-les-Rouen (76301), par Me Fonlupt ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-343 et 97-344 en date du 13 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel la société X a été assujettie pour la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1989 ;

2°) de prononcer la décharge de ladi

te imposition ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 22 867 euros sur ...

Vu la requête, enregistrée le 12 août 2002, présentée pour la société anonyme Z Y FRANCE, dont le siège est 14 boulevard industriel BP 47 à Sotteville-les-Rouen (76301), par Me Fonlupt ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-343 et 97-344 en date du 13 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel la société X a été assujettie pour la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1989 ;

2°) de prononcer la décharge de ladite imposition ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 22 867 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la société X, devenue la société Z Y FRANCE, a décidé, au cours des exercices 1987 à 1989, de participer à l'effort d'implantation en France de sa filiale, elle-même alors dénommée la société Z Y FRANCE, pour un montant total de 12 700 000 francs, les sommes versées étant majorées de la taxe sur la valeur ajoutée, qui a ensuite été portée en déduction ; que l'administration, pour réintégrer la charge correspondant aux versements réalisés dans les résultats de la société et remettre en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée y afférente s'est fondée sur la notion d'acte anormal de gestion ; que, dès lors que l'administration, tout en maintenant son argumentation initiale, a adjoint une nouvelle motivation au redressement à l'occasion de son mémoire en défense de première instance, sans solliciter de substitution de base légale, le jugement, qui a fait droit à ce nouveau motif, doit être annulé ; que la charge de la preuve, sur laquelle n'ont pas statué les premiers juges, incombe à l'administration ; que les sommes versées par la société X à la société Z Y FRANCE constituaient la contrepartie d'une opération réalisée au profit de la partie versante, dans la mesure où il est établi que les subventions versées à la filiale ont permis un développement substantiel de sa marque « San Marco », le Tribunal ayant admis l'intérêt de la société versante et l'impact positif de ces versements sur son propre développement économique ; que les conditions posées par la doctrine administrative 3 CA-94 n° 30 à 32 du 8 septembre 1994 étant remplies, les subventions versées entraient ainsi dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et la taxe correspondante était déductible pour la société versante ; que si le jugement fait état de l'absence de lien direct entre la somme versée par la société X et la prestation rendue par sa filiale, en se plaçant sous le régime de la doctrine administrative 3 CA-94 dont l'entrée en vigueur a été fixée à la date de sa publication, sur la période soumise au contrôle, l'instruction 4 A-7-83 du 22 août 1983, qu'elle est fondée à invoquer sur le fondement de l'article L. 80 A alinéa 2 du livre des procédures fiscales, s'appliquait ; qu'en application de cette instruction, les aides qu'elle a consenties à sa filiale, présentant un caractère commercial, étaient soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, celle-ci étant par suite déductible ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que, dans la mesure où les litiges relatifs à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée n'entrent pas dans le champ de compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaire, l'avis rendu le 14 mai 1992 par la commission est sans effet sur la charge de la preuve ; que si, pour refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée récupérée par la société X sur les participations à l'effort d'implantation versées à sa filiale, la société Z Y FRANCE, le service s'est fondé sur l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts, les rappels en cause peuvent être maintenus par voie de substitution de base légale sur le fondement des articles 256 et 271-1 du code général des impôts ; qu'en effet, l'engagement, suivant délibération du conseil d'administration du 27 avril 1987, par lequel la société X a décidé d'accorder à sa filiale une participation à son effort d'implantation sur le marché français, était unilatéral, en l'absence de convention engageant la société Z Y FRANCE à fournir un service individualisé à sa société mère en contrepartie des subventions reçues, leur montant étant, en outre, fixé de manière forfaitaire par rapport aux dépenses prévisibles de la société Z Y FRANCE, et en conséquence sans corrélation avec les retombées commerciales à attendre ; que la requérante n'a pas démontré qu'à la date d'octroi des participations, il était prévu que la filiale devait procurer en contrepartie un avantage précis et direct, alors qu'au surplus la société X n'exploitait pas la marque et n'opérait pas à travers le même canal de distribution ; qu'ainsi la participation versée par la requérante à sa filiale était sans lien direct avec une prestation de service individualisable et l'administration était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante ; que par l'instruction 3 CA-94 du 8 septembre 1994, l'administration a pris acte de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes fixant le critère du lien direct, en indiquant qu'une aide interentreprises entre dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée dans le cas où les sommes versées soit constituent la contrepartie d'une opération au profit de la société versante, soit complètent le prix d'une opération imposable pour la société bénéficiaire de l'aide ; que, dès lors que les sommes versées par la société X ne sont pas la contrepartie d'une opération réalisée à son profit et ne constituent pas un prix payé pour un service rendu et, pour la filiale, le complément du prix d'une opération imposable, les subventions litigieuses n'étaient pas imposables à la taxe sur la valeur ajoutée et symétriquement, la société X ne pouvait pas déduire la taxe correspondante ; que la société Z Y FRANCE ne peut ainsi se prévaloir de cette instruction ; que le fait que les aides octroyées pour le démarrage de la filiale aient pu se révéler, a posteriori et indirectement, bénéfiques pour l'activité de la société mère, ne permet pas pour autant de considérer, en l'absence de lien direct, que les aides en cause constituaient, au regard des principes applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la rémunération d'une prestation de services effectuée à titre onéreux par la filiale au profit de sa mère ; que si la société Z Y FRANCE entend se prévaloir des dispositions de l'instruction 4 A-7-83 du 22 août 1983 relative au régime fiscal des abandons de créances et des subventions entre entreprises, selon laquelle les subventions consenties pour des motifs commerciaux constituent la contrepartie d'une prestation de services imposable à la taxe sur la valeur ajoutée, celle-ci étant déductible s'agissant d'aides à caractère commercial relevant d'une gestion normale, le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée défini à l'article 256 du code général des impôts, visé dans l'instruction du

22 août 1983 a été précisé par un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes de 1988, rendu sur renvoi préjudiciel et dont l'interprétation s'impose aux juges nationaux pour tous les litiges ultérieurs ; que les dispositions de l'instruction du 8 septembre 1994 précitée, qui ont un caractère interprétatif tenant compte de l'évolution jurisprudentielle communautaire sur la notion de lien direct et s'appliquent aux litiges en cours au moment de son entrée en vigueur, ont rapporté les solutions en matière de taxe sur la valeur ajoutée concernant les aides entre entreprises prévues par l'instruction 4 A-7-83 du 22 août 1983 ; que la société Z Y FRANCE ne peut donc invoquer, sur le fondement du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, cette dernière instruction ;

Vu l'ordonnance du 23 décembre 2004 fixant la clôture de l'instruction au

24 janvier 2005 ;

Vu le mémoire en réplique, reçu par télécopie du 20 janvier 2005 confirmée par courrier enregistré le 21 janvier 2005, présenté par la société Z Y FRANCE, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que les subventions litigieuses ont permis son développement commercial, la société X ayant ainsi un intérêt direct à participer à l'implantation de sa filiale ; que, dès lors que l'article L. 80 A s'applique à la date du fait générateur de l'impôt, elle peut bénéficier de l'instruction du 22 août 1983 ;

Vu l'ordonnance du 24 janvier 2005 reportant la clôture de l'instruction au

17 février 2005 ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 24 mars 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, après clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2005 à laquelle siégeaient M. Daël, président de la Cour, MM. Merloz, Gipoulon et Couzinet, présidents de chambre, et M. Platillero, conseiller :

- le rapport de M. Platillero, conseiller ;

- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que pour rejeter la demande de la société anonyme Z Y FRANCE tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1989, les premiers juges ont estimé, au regard des articles 271 et 272 du code général des impôts, que les participations versées par la société anonyme X, devenue la société Z Y FRANCE, à la société Z Y FRANCE, alors sa filiale, étaient sans lien direct avec une prestation de service individualisable rendue à titre onéreux par celle-ci dont elles auraient été la rémunération, et qu'ainsi lesdites participations n'étaient pas imposables à la taxe sur la valeur ajoutée, la requérante n'étant, par suite, pas fondée à en demander la déduction, alors que le redressement sur ce point avait pour base légale l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts, le service ayant estimé que l'octroi de ces participations ne relevait pas d'une gestion commerciale normale ; que, dès lors que l'administration n'avait formulé devant le Tribunal aucune demande expresse de substitution de base légale, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen d'annulation du jugement, la société Z Y FRANCE est fondée à soutenir que le jugement est dans cette mesure irrégulier ; qu'ainsi, le jugement du Tribunal administratif de Rouen du 13 juin 2002 doit être annulé en tant qu'il rejette la demande de la société Z Y FRANCE tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1989 ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur cette demande présentée par la société Z Y FRANCE devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes du II de l'article 25 de la loi n° 99-1173 du

30 décembre 1999 : « ( ...) B. - Sont réputés réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressement effectuées avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se référeraient, pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, à la seule notification de redressement » ; qu'il résulte de cette disposition, éclairée par les travaux préparatoires à l'intervention de la loi, que le législateur, sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, a entendu valider les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressement effectuées avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se référeraient, notamment en ce qui concerne les éléments du calcul et le montant des droits réclamés, à la seule notification de redressement ; qu'ainsi et en tout état de cause, n'est plus susceptible d'être examiné par la Cour le moyen tiré de ce que l'avis de mise en recouvrement en date du 10 novembre 1992 méconnaîtrait les dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales en ce qu'il ne fait référence qu'aux seules notifications de redressements des 17 décembre 1990 et 11 février 1991, dont les bases d'imposition ont été ultérieurement modifiées par le service ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Sur la charge de la preuve :

Considérant qu'un différend relatif au droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée ne concerne pas une des matières pour lesquelles la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est compétente en application de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales ; que l'avis rendu par celle-ci le

14 mai 1992 est en tout état de cause sans effet sur la charge de la preuve, de même que la substitution de base légale demandée par le ministre ; qu'ainsi, en l'espèce, la solution du litige doit se fonder sur l'instruction ;

Sur l'application de la loi fiscale :

Considérant que, dans ses écritures d'appel, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande à la Cour, à titre principal, de procéder à une substitution de base légale s'agissant du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel a été assujetti la société Z Y FRANCE, correspondant aux participations versées par la société X à sa filiale, le redressement litigieux devant être fondé sur les articles 256 et 271-1 du code général des impôts ; qu'une telle substitution de base légale est possible, à tout moment de la procédure contentieuse, à condition qu'elle n'ait privé le contribuable d'aucune des garanties prévues par la loi ;

Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : « I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel » ; qu'aux termes de l'article 271 du même code : « 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération » ; qu'en application de ces dispositions, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, déductibles, les sommes dont le versement est en lien direct avec des prestations individualisées en rapport avec le niveau des avantages procurés aux personnes qui les versent ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société X, dont l'objet était d'assurer la commercialisation de plusieurs marques de café dans le réseau de la grande distribution, a créé une filiale, la société Z Y FRANCE, pour pénétrer le secteur des cafés-hôtels-restaurants ; que, par délibération du conseil d'administration du 27 avril 1987, la société X a décidé d'accorder à sa filiale une participation à son effort d'implantation sur le marché, pour un montant global de 12 700 000 francs sur la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1989 ; que cette participation, qui n'a fait l'objet d'aucune convention engageant la société Z Y FRANCE à fournir un service individualisé à sa société mère en contrepartie des sommes reçues, portait sur un montant fixé de manière forfaitaire par rapport aux dépenses prévisibles de la filiale, sans corrélation avec les retombées commerciales à attendre ; qu'à la date d'octroi des participations, aucun avantage précis et direct procuré par la filiale à sa société mère n'était prévu ; qu'ainsi, en l'absence de lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue et dans la mesure où les participations litigieuses ne constituaient ni la contrepartie directe d'une prestation de service ni un complément de prix, l'opération à laquelle a procédé la société X ne peut, quel que soit l'intérêt commercial qu'elle aurait eu au développement des activités de sa filiale, être regardée comme une prestation de services à titre onéreux passible de la taxe sur la valeur ajoutée ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est, dès lors, fondé, d'une part, à soutenir que l'opération litigieuse n'entrait pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, ne permettait pas la déduction de la taxe facturée à cette occasion, l'exercice du droit à déduction étant limité aux seules taxes correspondant à une opération soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, et, d'autre part, à demander par une substitution de base légale qui ne prive la requérante d'aucune garantie prévue par la loi, que le redressement dont est issu le complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel a été assujettie la société X, ait pour base légale les dispositions précitées des articles 256 et 271 du code général des impôts ;

Considérant, par ailleurs, que la société Z Y FRANCE ne peut utilement soutenir qu'un client de bonne foi peut déduire la taxe sur la valeur ajoutée facturée par un fournisseur qui n'en est pas redevable, s'il n'est pas manifeste que ce dernier échappe à cette taxe, dès lors qu'en l'espèce, le litige ne porte pas sur une taxe sur la valeur ajoutée facturée et déduite par un client ;

Sur le bénéfice de la garantie prévue à l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : « Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente » ;

Considérant, en premier lieu, que la société Z Y FRANCE ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions précitées, de l'instruction du

8 septembre 1994 3 CA-94 n° 30 à 32, qui ne donne pas une interprétation de la notion de lien direct différente de celle évoquée ci-dessus et est postérieure au fait générateur de l'imposition en litige ;

Considérant, en second lieu, que la société Z Y FRANCE entend se prévaloir, sur le fondement des dispositions précitées du livre des procédures fiscales, de l'instruction 4 A-7-83 du 22 août 1983 relative au régime fiscal des abandons de créances et des subventions entre entreprises, publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts, selon laquelle les subventions consenties pour des motifs commerciaux constituent la contrepartie d'une prestation de services imposable à la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement des articles 256 et suivants du code général des impôts, la taxe afférente au service commercial rendu pour les besoins de l'exploitation de la société qui consent la subvention étant déductible chez celle-ci dans les conditions de droit commun ; que la circonstance que l'instruction 3 CA-94 du 8 septembre 1994, précisant le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée défini à l'article 256 du code général des impôts, ait prévu sa propre application aux litiges en cours au moment de son entrée en vigueur ne peut, contrairement à ce que soutient le ministre, avoir eu pour effet de rapporter l'instruction 4 A-7-83 du

22 août 1983 à la date des opérations en cause et n'est pas de nature à écarter l'application de cette dernière instruction ; que toutefois l'interprétation du texte fiscal exprimée dans cette dernière instruction est contraire à un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 8 mars 1988, rendu sur renvoi préjudiciel, en matière de champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, selon lequel la notion de prestation de services effectuée à titre onéreux, au sens de la sixième directive n° 77/388 du 17 mai 1977, suppose l'existence d'un lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue, ce qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, n'est pas le cas en l'espèce ; qu'il appartient au juge de l'impôt, chargé d'appliquer dans le cadre de sa compétence les dispositions du droit communautaire, d'assurer le plein effet de ces normes, en laissant au besoin inappliquée toute disposition contraire de la législation nationale ; que, par suite, la société Z Y FRANCE ne peut bénéficier, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'interprétation du texte fiscal donnée par l'administration dans l'instruction 4 A-7-83 du 22 août 1983, contraire aux objectifs définis par la sixième directive ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Z Y FRANCE n'est pas fondée à demander la décharge ou la réduction du complément de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la société X a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1989 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société Z Y FRANCE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 3 du jugement du Tribunal administratif de Rouen du

13 juin 2002 est annulé, en tant qu'il rejette la demande de la société Z Y FRANCE enregistrée au greffe du Tribunal sous le n° 97-344.

Article 2 : La demande et le surplus des conclusions de la requête de la société Z Y FRANCE sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Z Y FRANCE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera adressée au directeur interrégional des impôts chargé de la direction des vérifications nationales et internationales.

Délibéré après l'audience publique du 1er avril 2005 à laquelle où siégeaient :

- M. Daël, président de la Cour,

- M. Merloz, président de chambre,

- M. Gipoulon, président de chambre,

- M. Couzinet, président de chambre,

- M. Platillero, conseiller,

Lu en audience publique, le 26 avril 2005.

Le rapporteur,

Signé : F. PLATILLERO

Le président de la Cour,

Signé : S. DAËL

Le greffier,

Signé : S. MINZ

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

S. MINZ

N°02DA00736 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Formation pleniere
Numéro d'arrêt : 02DA00736
Date de la décision : 26/04/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

15-03-03-0119-01-01-03-0219-06-02-08-03-01 COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE. - APPLICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE PAR LE JUGE ADMINISTRATIF FRANÇAIS. - PRISE EN COMPTE DES ARRÊTS DE LA COUR DE JUSTICE. - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE - CHAMP D'APPLICATION (ART. 256 DU CGI) - DÉDUCTION (ART. 271 DU CGI) - NOTION DE PRESTATION DE SERVICES EFFECTUÉE À TITRE ONÉREUX PAR UN ASSUJETTI AGISSANT EN TANT QUE TEL - ABSENCE - SOMMES VERSÉES PAR UNE SOCIÉTÉ MÈRE À L'UNE DE SES FILIALES EN VUE DE FAVORISER SON DÉVELOPPEMENT.

z15-03-03-01z19-01-01-03-02z19-06-02-08-03-01z En l'absence de lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue et dans la mesure où des sommes versées par une société mère en faveur du développement d'une filiale ne constituent ni la contrepartie directe d'une prestation de service ni un complément de prix, quel que soit l'intérêt commercial que peut y trouver le contribuable, ces sommes ne peuvent être regardées comme une prestation de services à titre onéreux passible de la taxe sur la valeur ajoutée. L'opération n'entre pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée au sens de l'article 256 du code général des impôts et, par suite, ne permet pas la déduction de la taxe facturée à cette occasion, en application de l'article 271 du même code.


Références :

[RJ1]

Comp. CAA Paris 17 décembre 1991, Plén., n° 357 : RJF 2/92 n° 232.


Composition du Tribunal
Président : M. le Prés Daël
Rapporteur ?: M. Fabien Platillero
Rapporteur public ?: M. Michel
Avocat(s) : FIDAL SOCIETE D'AVOCATS ; FIDAL SOCIETE D'AVOCATS ; FIDAL SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-04-26;02da00736 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award