La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/04/2005 | FRANCE | N°03DA00120

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3 (bis), 28 avril 2005, 03DA00120


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

7 février 2003, présentée pour l'établissement public VOIES NAVIGABLES DE FRANCE dont le siège est 175 rue Ludovic Boutleux à Béthune (62408), représenté par son directeur général, par

Me Gros ; VOIES NAVIGABLES DE FRANCE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2317 du 12 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Lille a déchargé la société Eurolav des redevances d'occupation du domaine public qui lui ont été assignées au titre de la période

du 26 juillet 2001 au 26 janvier 2002 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la socié...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

7 février 2003, présentée pour l'établissement public VOIES NAVIGABLES DE FRANCE dont le siège est 175 rue Ludovic Boutleux à Béthune (62408), représenté par son directeur général, par

Me Gros ; VOIES NAVIGABLES DE FRANCE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2317 du 12 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Lille a déchargé la société Eurolav des redevances d'occupation du domaine public qui lui ont été assignées au titre de la période du 26 juillet 2001 au 26 janvier 2002 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Eurolav devant le Tribunal administratif de Lille ;

3°) de condamner la société Eurolav à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

L'établissement public soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal administratif, la demande de première instance de la société Eurolav, qui n'avait pas été précédée d'une réclamation formée auprès du comptable, n'était pas recevable ; que l'instruction du 5 juin 1997 a été régulièrement signée par le directeur général, M. X, en l'absence du président, retenu ce

5 juin 1997 à Colmar, puis à Paris ; que la délibération de délégation de compétence du

7 décembre 1994, confirmant celle du 12 janvier 1993, a été expressément approuvée par les ministres concernés par le canal de leurs représentants au conseil d'administration de l'établissement ; qu'en tout état de cause, la non-opposition des ministres valait approbation tacite ; que toute occupation privative d'une dépendance du domaine public étant assujettie à une redevance en vertu de l'article L. 29 du code du domaine de l'Etat, c'est à bon droit qu'ont été émis à l'encontre de la société Eurolav, dont la péniche La Rolande était stationnée sans autorisation sur le canal de la Haute Deûle, les titres exécutoires contestés, correspondant aux redevances d'occupation pour la période du 26 juillet 2001 au 26 janvier 2002, calculées selon les barèmes nationaux de l'établissement public ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2003, présenté pour la société à responsabilité limitée Eurolav par la SCP Cobert et Marchand ; la société Eurolav conclut au rejet de la requête et demande, en outre, à la Cour de condamner VOIES NAVIGABLES DE FRANCE à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article 89-1 du code des procédures collectives ; elle soutient que sa demande de première instance était recevable ; que l'empêchement du président de VOIES NAVIGABLES DE FRANCE le 5 juin 1997 n'est nullement établi ; que l'approbation des ministres concernés quant à la fixation des redevances d'occupation fait défaut ; que, ni la présence de fonctionnaires des ministères concernés au conseil d'administration, ni le silence des ministres, faute pour le président de VOIES NAVIGABLES DE FRANCE de justifier leur avoir adressé la délibération pour avis, ne peuvent valoir approbation des ministres au sens du décret du

26 décembre 1960 ; que les titres exécutoires contestés ne sont pas motivés et ne contiennent pas les modalités de leur calcul ; que le montant des redevances est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que la péniche dont elle est propriétaire est classée monument historique et bénéficiait d'un droit acquis à l'occupation gracieuse du domaine fluvial ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 26 mai 2003, présenté pour l'établissement public VOIES NAVIGABLES DE FRANCE qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, qu'en première instance, la société Eurolav ne contestait pas le

bien-fondé de la redevance d'occupation ; que l'absence prétendue de motivation et de précision des titres exécutoires manque en fait ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 mars 2005, présenté pour la SARL Eurolav ; la société Eurolav, qui persiste dans ses précédentes conclusions, indique que, pour une autre péniche classée monument historique, VOIES NAVIGABLES DE FRANCE a accepté de ne pas réclamer de redevances ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du domaine de l'Etat ;

Vu la loi de finances pour 1991, n° 90-1168 du 29 décembre 1990, notamment son

article 124 ;

Vu le décret n° 60-1441 du 26 décembre 1960 modifié ;

Vu le décret n° 91-797 du 20 août 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2005 à laquelle siégeaient

M. Merloz, président de chambre, M. Dupouy, président-assesseur et M. Stéphan, premier conseiller :

- le rapport de M. Dupouy, président-assesseur ;

- les observations de Me Gros, pour VOIES NAVIGABLES DE FRANCE ;

- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du Gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande présentée par la société Eurolav devant le Tribunal administratif de Lille :

Considérant que VOIES NAVIGABLES DE FRANCE a notifié à la société Eurolav, le

26 avril 2002, deux titres de recettes exécutoires, d'un montant total de 643,94 euros, correspondant à des redevances mises à sa charge pour occupation sans titre du domaine public fluvial au titre de la période du 26 juillet 2001 au 26 janvier 2002 ; que VOIES NAVIGABLES DE FRANCE relève appel du jugement du 12 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Lille a déchargé la société Eurolav des redevances qui lui ont été assignées ;

Considérant que le conseil d'administration de VOIES NAVIGABLES DE FRANCE, qui tient de l'article 124 de la loi de finances pour 1991 et du décret n° 91-797 du 20 août 1991 le pouvoir de fixer le montant des redevances dues en contrepartie de l'occupation du domaine public fluvial qui lui a été confié, a, par une délibération en date du 7 décembre 1994 prise en application des articles 14 et 16 du décret n° 60-1441 du 26 décembre 1960 modifié portant statut de VOIES NAVIGABLES DE FRANCE, donné délégation de pouvoir au président de l'établissement public pour prendre toutes décisions, notamment en matière de fixation des tarifs domaniaux applicables aux différents usages du domaine public fluvial ; que cette délibération, adoptée puis approuvée à l'unanimité des administrateurs présents aux réunions du conseil d'administration des

7 décembre 1994 et 9 février 1995 au nombre desquels figuraient le représentant du ministre chargé des voies navigables et celui du ministre chargé du budget, doit ainsi être regardée comme ayant été régulièrement approuvée par ces ministres ainsi que l'exigent les dispositions de l'article 14 du décret du 26 décembre 1960 ; que M. X, directeur général de VOIES NAVIGABLES DE FRANCE, a, en outre, reçu du président du conseil d'administration délégation permanente à l'effet de signer, notamment, les actes portant fixation des tarifs domaniaux ; que, si cette délégation de signature a été donnée à M. X en cas d'absence ou d'empêchement du président, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce dernier n'aurait pas été absent ou empêché à la date du 5 juin 1997 à laquelle le directeur général a signé l'instruction portant tarification des occupations du domaine fluvial ; qu'ainsi, VOIES NAVIGABLES DE FRANCE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour déclarer sans fondement les titres exécutoires notifiés le 26 avril 2002 et décharger la société Eurolav des redevances correspondantes, le Tribunal administratif s'est fondé sur l'irrégularité de la signature de cette instruction par le directeur général ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Eurolav devant le Tribunal administratif de Lille ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 28 du code du domaine de l'Etat : Nul ne peut, sans autorisation délivrée par l'autorité compétente, occuper une dépendance du domaine public national ou l'utiliser dans des limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous ; et qu'aux termes de l'article L. 29 du même code : La délivrance des autorisations de voirie sur le domaine public national est subordonnée au paiement, outre les droits et redevances perçus au profit soit de l'Etat, soit des communes, d'un droit fixe correspondant aux frais exposés par la puissance publique ; qu'il a été constaté, par procès-verbaux des 26 juillet 2001, 28 janvier et 29 avril 2002, que la péniche La Rolande dont est propriétaire la société Eurolav était stationnée sans autorisation au droit du quai Carolus sur le canal de la Haute Deûle à Lille ; qu'ainsi, la société Eurolav, qui ne justifie pas avoir un droit à l'occupation gracieuse de cet emplacement, était astreinte, en raison de cette occupation irrégulière d'une dépendance du domaine public fluvial, au paiement d'une redevance dans les conditions prévues par les dispositions précitées ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les redevances réclamées à la société Eurolav n'auraient pas été établies en conformité avec les barèmes définis par l'instruction du 5 juin 1997 portant tarification des occupations du domaine fluvial ;

Considérant, par ailleurs, que la société Eurolav ne peut utilement faire valoir que les titres de recettes exécutoires contestés ne comportent pas les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle ils ont été émis, dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article R. 153 du code du domaine de l'Etat que ces éléments n'ont pas à être portés lorsque le redevable, comme c'est le cas de la société, n'a pas fait la déclaration nécessaire à la liquidation de ladite créance ; qu'elle ne peut davantage se prévaloir de la circonstance que VOIES NAVIGABLES DE FRANCE, pour une autre péniche ayant également bénéficié d'un classement au titre des monuments historiques, aurait accepté de ne pas percevoir de redevances ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que VOIES NAVIGABLES DE FRANCE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge des redevances assignées à la société Eurolav à raison du stationnement sans autorisation sur le domaine public fluvial de la péniche dont elle est propriétaire ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner la société Eurolav à verser à VOIES NAVIGABLES DE FRANCE la somme que demande cet établissement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que VOIES NAVIGABLES DE FRANCE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la société Eurolav la somme demandée par cette société au titre des frais de même nature ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 02-2317 du Tribunal administratif de Lille en date du

12 décembre 2002 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Eurolav devant le Tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de VOIES NAVIGABLES DE FRANCE et de la société Eurolav tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement public VOIES NAVIGABLES DE FRANCE, à la société à responsabilité limitée Eurolav, au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience du 31 mars 2005, à laquelle siégeaient :

- M. Merloz, président de chambre,

- M. Dupouy, président-assesseur,

- M. Stéphan, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 avril 2005.

Le rapporteur,

Signé : A. DUPOUY

Le président de chambre,

Signé : G. MERLOZ

Le greffier,

Signé : B. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

B. ROBERT

N°03DA00120 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 03DA00120
Date de la décision : 28/04/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Merloz
Rapporteur ?: M. Alain Dupouy
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : GROS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-04-28;03da00120 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award