La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/05/2005 | FRANCE | N°03DA00498

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3 (bis), 31 mai 2005, 03DA00498


Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Jean-Pierre X, demeurant ..., par Me Durand ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 00-5993 du Tribunal administratif de Lille en date du

27 février 2003 qui a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1996 dans les rôles de la commune de Blaringhem ;

2) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et

des pénalités y afférentes ;

3) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 1 ...

Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Jean-Pierre X, demeurant ..., par Me Durand ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 00-5993 du Tribunal administratif de Lille en date du

27 février 2003 qui a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1996 dans les rôles de la commune de Blaringhem ;

2) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités y afférentes ;

3) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme X soutiennent que c'est à tort que les premiers juges, pour justifier le rejet par l'administration du report sur leur résultat de l'année 1996 du déficit foncier enregistré au cours de l'année 1994, ont procédé à une substitution de base légale du redressement sans qu'une telle demande n'ait été au préalable formulée en ce sens par les services fiscaux ; que la procédure d'imposition est irrégulière, à défaut d'une motivation suffisante de la notification de redressements du 20 septembre 1999 ; que, dès lors que l'administration qui conteste l'existence distincte de l'acte de transfert de propriété des appartements et du marché de travaux concernant ces mêmes biens, a ainsi implicitement justifié l'imposition par l'application de la théorie de l'abus de droit, elle ne pouvait, sans entacher d'irrégularité la procédure d'imposition, priver les requérants de l'application du régime décrit à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que c'est à tort que l'administration a considéré, pour rejeter le report en 1996 du déficit foncier enregistré en 1994, que le prix d'acquisition des biens immobiliers litigieux devait comprendre les travaux d'amélioration dont ces biens ont bénéficié, alors que ce prix avait été fixé en fonction des caractéristiques de ces logements au moment de leur cession ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête ; il soutient que l'administration a développé devant le tribunal, dans sa défense du 15 octobre 2002 visant l'imposition supplémentaire sur le revenu de l'année 1996, une argumentation conférant aux travaux litigieux le caractère d'une charge augmentative du prix d'acquisition des logements concernés et que, pour se faire, elle s'est référée explicitement à sa défense précédente devant la même juridiction au cours de laquelle elle avait expressément demandé la substitution de base légale ; qu'à titre subsidiaire, il est demandé à la Cour, si elle l'estime nécessaire pour justifier l'imposition, de procéder à une telle substitution de base légale ; que, s'agissant de la réduction d'impôt accordée au titre de l'investissement locatif, la motivation de redressements est suffisamment motivée, dès lors que cette notification expose les motifs pour lesquels l'acquisition immobilière en cause ne donnait pas droit à la réduction d'impôt prévue et que, par ailleurs, une motivation par référence est admise, lorsque, comme en l'espèce, celle-ci est explicite ; que la notification de redressements litigieuse a permis au débat contradictoire de s'installer ainsi qu'en témoigne la réponse en date du 30 septembre 1999 du contribuable à cette notification ; que la procédure de répression des abus de droit n'est pas applicable dans le cas où le différend entre l'administration et le contribuable, ne mettant pas en cause le caractère sincère et licite des situations juridiques créées par ce dernier, ne porte en réalité que sur une question de fait ou ne touche qu'à l'interprétation des textes fiscaux ; qu'en l'espèce, seul le fait que l'un des éléments du prix n'ait pas été stipulé dans l'acte, a été retenu par l'administration pour considérer qu'il y avait eu une dissimulation du prix ; que la juridiction judiciaire, saisie de la même question, a considéré, d'une part, que l'administration n'avait procédé à aucune requalification de l'acte de vente pour rehausser la base imposable aux droits d'enregistrement de cette opération et que, par suite, la procédure prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales n'était pas applicable et que, d'autre part, les droits de mutation sont exigibles sur le prix exprimé dans l'acte, augmenté du contenu des travaux effectués par le vendeur et facturés à l'acquéreur ;

Vu le jugement n° 98-03745 du 10 mai 2001 du Tribunal administratif de Lille ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mai 2005 à laquelle siégeaient

M. Gipoulon, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. et Mme X font appel du jugement en date du 27 février 2003 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1996 dans les rôles de la commune de Blaringhem ;

Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'imposition contestée : I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° pour les propriétés urbaines : (...) b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; (...) e) Une déduction forfaitaire fixée à 10 % des revenus bruts et représentant les frais de gestion, l'assurance à l'exclusion de celle visée au a bis et l'amortissement (...) ; qu'aux termes de l'article 156 du même code : L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal (...) sous déduction : I. Du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus (...) Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (...) 3° des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une notification de redressements qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 64 du même livre des procédures fiscales : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : a) Qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement ou à une taxe de publicité foncière (...). L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit (...) ; que la procédure de répression des abus de droit n'est pas applicable dans le cas où le différend entre l'administration et le contribuable, ne mettant pas en cause le caractère sincère et licite des situations juridiques créées par ce dernier, ne porte en réalité que sur une question de fait ou ne touche qu'à l'interprétation des textes fiscaux ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si l'administration fiscale, pour justifier le redressement qu'elle a opéré sur l'imposition sur le revenu de M. et Mme X, a relevé le défaut de mention du coût des charges augmentatives du prix d'acquisition des deux appartements situés au ..., que les requérants ont acquis le 15 juin 1994, elle n'a pas entendu, pour autant, affirmer que l'acte en cause comportait une clause dissimulant la portée véritable de la convention conclue entre les parties ; qu'ainsi M. et Mme X ne sont pas fondés à prétendre que l'administration fiscale aurait entendu réprimer un abus de droit régi par les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales et les aurait, par suite, privés de la garantie que constitue la saisine du comité dont la consultation est prévue audit article ; que les requérants ne sont, en conséquence, pas fondés à soutenir que la procédure d'imposition serait, pour ce motif, entachée d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant, en premier lieu, que l'administration a remis en question le report sur leurs revenus de l'année 1996 du déficit foncier que M. et Mme X ont enregistré en 1994, au motif que les travaux d'amélioration réalisés au cours de ladite année sur les locaux d'habitation leur appartenant, qu'ils avaient entendu déduire sur le fondement de l'article 31. I. 1° b) susvisé du code général des impôts, ne l'étaient pas et que la seule déduction admissible résultait de l'application des dispositions du e) du même article ;

Considérant que les premiers juges ont pu à bon droit estimer que la substitution qui avait été retenue dans le jugement rendu le 10 mai 2001 par le Tribunal administratif de Lille, des dispositions du e) de l'article 31.I. 1° du code général des impôts comme fondement aux redressements notifiés le 20 septembre 1999 à M. et Mme X, au lieu de celles du b) du même article, pouvait être prise en compte, s'agissant du déficit foncier reporté sur l'année 1996, dès lors que l'administration avait rappelé dans son mémoire en défense qu'elle avait proposé au cours de l'instance afférente à l'imposition due au titre de l'année 1994, une telle substitution de base légale ; que les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que le Tribunal administratif de Lille, statuant sur la demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme X ont été assujettis au titre de l'année 1996, a, à tort, effectué une substitution de base légale sans qu'une demande en ce sens n'ait été au préalable formulée par le service ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration, sur le fondement des dispositions susévoquées du b) de l'article 31.I. 1° du code général des impôts, puis, ainsi qu'il a été dit, sur le fondement de celles du e) dudit article, a remis en cause la déduction de la somme de 50 000 francs mentionnée par M. et Mme X sur leur déclaration de revenus de l'année 1994 au titre du déficit foncier constaté consécutivement à la prise en compte des dépenses correspondant aux travaux effectués dans les deux appartements acquis par eux le 15 juin 1994 ; qu'il est constant que M. Y, marchand de biens, qui était également entrepreneur en électricité générale, a établi, dès le 11 janvier1994, soit antérieurement à la date de la transaction, un devis de réparations et d'aménagements desdits appartements ; que neuf factures adressées à

M. Y par des entreprises sous-traitantes ayant été appelées à réaliser, antérieurement au transfert de propriété des deux lots, les travaux convenus entre les parties à l'acte, ont été adressées aux consorts X qui les ont payées ; que, toutefois, ces dépenses n'ont pas été indiquées lors de la signature de l'acte notarié relatif à l'acquisition de ces biens immobiliers, comme charges augmentatives du prix de vente desdits appartements mais déduites ultérieurement des revenus fonciers perçus par les requérants ;

Considérant que le prix d'acquisition des biens litigieux devait comprendre le prix correspondant au prix des travaux de réparation et de rénovation convenus avant la vente et réalisés par le vendeur, alors même que ceux-ci auraient été exécutés postérieurement à la transaction ; qu'en l'absence d'autres dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation leur appartenant, l'administration était en droit de considérer que M. et Mme X n'étaient fondés qu'à déduire de leur revenu foncier la déduction forfaire de 10 % prévue à l'article 31.I. 1° susrappelé du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable et que, dès lors, les consorts X ne pouvaient, compte tenu du montant de cette déduction forfaitaire, ni justifier en 1994 de l'existence d'un déficit foncier susceptible de venir en diminution de leur revenu global, ni demander, en conséquence, un report dudit déficit foncier sur leur revenu de l'année 1996 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions de M. et Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. et Mme X la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jean-Pierre X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2005, à laquelle siégeaient :

- M. Gipoulon, président de chambre,

- Mme Signerin-Icre, président-assesseur,

- M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 31 mai 2005.

Le rapporteur,

Signé : O. MESMIN D'ESTIENNE

Le président de chambre,

Signé : J.F. GIPOULON

Le greffier,

Signé : G. VANDENBERGHE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

Guillaume VANDENBERGHE

N°03DA00498 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 03DA00498
Date de la décision : 31/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gipoulon
Rapporteur ?: M. Olivier Mesmin d'Estienne
Rapporteur public ?: M. Paganel
Avocat(s) : CABINET DURAND

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-05-31;03da00498 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award