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06/07/2006 | FRANCE | N°05DA01116

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation a 3 (bis), 06 juillet 2006, 05DA01116


Vu la requête, enregistrée le 29 août 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Christian X, demeurant ..., par Me Goldnadel ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302250 en date du 30 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du

16 septembre 2003 par laquelle le garde des Sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande de nomination en tant que notaire en remplacement de Me Z, associé unique de la société civile professionnelle

« Henri Z, notaire associé », à Breuilpont ;

2°) d'annuler cette décision...

Vu la requête, enregistrée le 29 août 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Christian X, demeurant ..., par Me Goldnadel ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302250 en date du 30 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du

16 septembre 2003 par laquelle le garde des Sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande de nomination en tant que notaire en remplacement de Me Z, associé unique de la société civile professionnelle « Henri Z, notaire associé », à Breuilpont ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision est entachée d'un vice de forme dès lors qu'elle n'est pas signée par le récipiendaire de la délégation de pouvoirs ; que la décision est fondée sur plusieurs évènements qui lui sont opposés et qui ne relèvent pas seulement de ses pratiques professionnelles mais aussi de circonstances liées à sa personne ; que cependant, il n'a jamais été en mesure de présenter ses observations ; que dès lors, la décision est entachée d'un vice de procédure ; que la décision est illégalement fondée sur des faits amnistiés et viole ainsi les dispositions de la loi du

3 août 1995 sur l'amnistie ; que la décision est fondée sur des faits inexacts, qui, en tout état de cause, ne faisaient l'objet que d'une enquête policière ; que le but recherché par les instances régionales était de supprimer l'étude ou d'en faire un bureau annexe d'une autre étude ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 14 avril 2006 et régularisé par la production de l'original le 19 avril 2006, présenté par le garde des Sceaux, ministre de la justice, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que M. Y a reçu délégation de signature au nom du garde des Sceaux, ministre de la justice ; que, dans la mesure où il résulte de l'ampliation certifiée conforme à l'original que la décision attaquée porte la signature de l'autorité compétente, l'absence de signature sur ladite ampliation est sans influence sur la légalité de la décision ; que la décision du ministre est fondée sur les avis défavorables des autorités judiciaires et des instances professionnelles ; qu'aucune obligation n'est faite à l'autorité de tutelle de communiquer ces avis ; que les griefs relatifs au comportement de M. X ne sont pas d'ordre subjectif mais reposent sur des pratiques professionnelles contraires à la déontologie dûment constatées par des inspecteurs habilités ; qu'aucune disposition légale ou réglementaire instituant une procédure contradictoire n'oblige le garde des Sceaux à informer un requérant des raisons pour lesquelles il n'entend pas donner une suite favorable à sa demande ; qu'au vu des dispositions de la loi du

12 avril 2000, il est constant qu'une demande ayant été formée par le requérant, le garde des Sceaux n'avait pas à solliciter ses observations ; que la procédure suivie est conforme aux dispositions du décret du 5 juillet 1973 modifié relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire ; qu'en rejetant la demande de M. X au motif qu'il ne remplissait pas la profession de notaire, le garde des Sceaux n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 mai 2006, présenté pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 16 juin 2006 et régularisé par la production de l'original le 18 juin 2006, présenté par le garde des Sceaux, ministre de la justice, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 modifié relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire ;

Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 juin 2006 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

Mme Agnès Eliot, conseiller :

- le rapport de Mme Agnès Eliot, conseiller ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 susvisé : « Nul ne peut être notaire s'il ne remplit les conditions suivantes : 1° Etre français ; 2° N'avoir pas été l'auteur de faits ayant donné lieu à condamnation pénale pour agissements contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs ; 3° N'avoir pas été l'auteur d'agissements de même nature ayant donné lieu à mise à la retraite d'office ou à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation, retrait d'agrément ou d'autorisation ; (…) » ; qu'aux termes de l'article 47 du même décret : « Le procureur de la République recueille l'avis motivé de la chambre des notaires sur la moralité et sur les capacités professionnelles de l'intéressé ainsi que sur ses possibilités financières au regard des engagements contractés. La chambre recueille, s'il y a lieu, tous renseignements utiles auprès, notamment, d'une autre chambre ou d'un conseil régional, du centre de formation professionnelle ou de l'école de notariat. Si, quarante-cinq jours après sa saisine par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la chambre n'a pas adressé au procureur de la République l'avis qui lui a été demandé, elle est réputée avoir émis un avis favorable et il est passé outre » ;

Considérant que, par la décision contestée, en date du 16 septembre 2003 le garde des Sceaux, ministre de la justice a refusé de prononcer la nomination, en qualité de notaire, de

M. Christian X en remplacement de Me Z, associé unique de la société civile professionnelle du même nom située à Breuilpont, (Eure) ; que cette décision, qui énonce à l'encontre de M. X un ensemble de griefs, est fondée sur le motif tiré de ce que l'intéressé ne « remplit plus les conditions de moralité nécessaire à l'accès à la profession de notaire » ; qu'ainsi si cette décision fait suite à une demande de M. X, elle a été prise en considération de sa personne et ne pouvait dès lors intervenir qu'après que celui-ci eût été mis en mesure de présenter ses observations sur les faits qui lui étaient reprochés ; que si le ministre fait valoir que M. X était présent lors des inspections dont les rapports ont été utilisés pour rejeter sa demande de nomination et qu'il a notamment été entendu s'agissant du remboursement, non justifié, par l'office notarial de deux billets de train, ces circonstances n'établissent pas que

M. X a été informé de l'ensemble des griefs retenus à son encontre par l'autorité administrative pour prendre la décision attaquée et aurait disposé d'un délai suffisant pour y répondre ; que par suite, M. X est fondé à soutenir que la décision du garde des Sceaux, ministre de la justice est entachée d'irrégularité et que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande d'annulation de celle-ci ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'affaire, il n'y a pas lieu de condamner l'Etat à verser à M. X une somme au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Rouen en date du 30 juin 2005 et la décision du garde des Sceaux, ministre de la justice, en date du 16 septembre 2003 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. X au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Christian X et au garde des Sceaux, ministre de la justice.

Copie sera transmise au préfet de l'Eure.

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N°05DA01116


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation a 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 05DA01116
Date de la décision : 06/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: Mme Agnès Eliot
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : GOLDNADEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-07-06;05da01116 ?
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