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02/10/2007 | FRANCE | N°06DA01676

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 02 octobre 2007, 06DA01676


Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société à responsabilité limitée BEST, dont le siège est
10 rue Jacques Prévert à Villeneuve d'Ascq (59650), par Me Desurmont ; la société BEST demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500346 du 12 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au ti

tre des exercices clos en 2000 et 2001, ainsi que des pénalités y afférentes ;

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Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société à responsabilité limitée BEST, dont le siège est
10 rue Jacques Prévert à Villeneuve d'Ascq (59650), par Me Desurmont ; la société BEST demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500346 du 12 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2000 et 2001, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Elle soutient que les opérations financières entre elle-même et les sociétés du groupe coiffé par la société Holding Buisine Financière sont normales et sont justifiées par la politique de développement du groupe et que, d'ailleurs, le montant du prêt qualifié en distribution devait être consenti à la société mère qui seule pouvait en faire bénéficier une autre société du groupe en difficulté ; que la transcription comptable de cette situation de fait n'est que virtuelle ; que la participation aux frais de promotion est justifiée par la mise en place d'un nouveau concept de restauration et d'aménagement de restaurant qui était destiné à être développé par un réseau de franchisés ; que la requalification du prêt précité en revenus distribués n'étant pas fondée, la provision pour dépréciation était justifiée ; que la mauvaise foi n'est pas établie dès lors que les décisions remises en cause sur le terrain de l'acte anormal de gestion ne procèdent pas d'une intention d'éluder l'impôt mais de l'usage d'un pouvoir de gestion financière au sein d'un même groupe ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que dans les conditions où le prêt de 3 200 000 francs a été consenti à la société mère, cette avance anormale est une distribution qui s'oppose à la constatation d'une provision pour dépréciation ; que les charges de participations promotionnelles ne sont pas justifiées et pouvaient être réintégrées dans les résultats de la contribuable ; que la mauvaise foi est établie par la fréquence et l'importance des actes anormaux de gestion ainsi que par leurs diverses natures qui montrent le caractère volontaire d'un dispositif de trésorerie mis en place au niveau du groupe au détriment de la société BEST ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :

- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;


Sur les droits :
Considérant, en premier lieu, que le 2 janvier 2000, la société BEST, spécialisée dans l'agencement de locaux commerciaux, a consenti à sa société mère, la société Holding Buisine Financière, un prêt de 3 200 000 francs ; qu'à la clôture de l'exercice 1999, la société BEST disposait à l'égard de la société Masséna Les Halles, qui lui est juridiquement étrangère bien qu'étant détenue par la société Holding Buisine Financière Restauration elle-même filiale de la société Holding Buisine Financière mentionnée ci-dessus, une créance d'un montant total de
3 216 499 francs aux titres de prix de travaux d'agencement et d'avances de fonds ; que la somme prêtée à la société Holding Buisine Financière a, à son tour, été prêtée par elle à sa filiale Holding Buisine Financière Restauration qui l'a elle-même prêtée à la société Masséna Les Halles afin de lui permettre de solder sa dette à l'égard de la contribuable ; que si cette dernière soutient qu'elle avait un intérêt économique propre à participer, grâce à son activité d'agencement, au développement de l'ensemble du groupe, et notamment de ses sociétés exploitant des restaurants sous un nouveau concept de décoration, cette explication qui serait éventuellement de nature à justifier l'abandon de créance détenue sur la seule société Masséna Les Halles ne permet pas de regarder comme normal l'octroi d'une avance supplémentaire à la société mère ; qu'en effet, hormis une présentation générale sur la stratégie de développement du groupe, la société BEST n'apporte pas de contradiction sérieuse à l'administration qui fait valoir que le contrat conclu entre la société BEST et sa société mère était dépourvu de date certaine, qu'il ne comportait aucun échéancier de remboursement, qu'il ne stipulait aucun remboursement d'intérêt au cours de la première année, qu'il n'a pas été approuvé par les associés et qu'il n'a fait l'objet d'aucune exécution de la part de la société emprunteuse ; que ces conditions, contrairement à ce que soutient la contribuable, ne traduisent pas un simple jeu d'écritures mais révèlent une renonciation anormale aux recettes que la société BEST était en droit de retirer du prêt consenti à la société Holding Buisine Financière ; que dès lors que le service établit le caractère anormal de l'acte de gestion en cause, il était en droit, sans qu'il fût d'ailleurs nécessaire de qualifier le prêt en litige de distribution de bénéfices, de remettre en cause la provision constituée en 2001 par la société BEST en vue de faire face à la perte, à concurrence de la somme de 1 400 000 francs, de la créance qu'elle détenait à l'égard de la société Holding Buisine Financière ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la société BEST soutenait au cours du contrôle fiscal que la provision passée en 2001, relative à une créance globale de 134 255 francs était en réalité destinée à faire face à la dépréciation du compte courant de la société Masséna Les Halles ouvert dans sa comptabilité, il résulte de la notification de redressement, non contestée sur ce point, que la provision en litige correspond à deux créances détenues à l'encontre de la société Holding Buisine Financière Restauration ; que la contribuable, qui se borne à se prévaloir, comme précédemment, de la politique de développement à l'échelle du groupe, n'est pas fondée à soutenir que les opérations intra groupe ayant fait l'objet du redressement sont financièrement neutres ; que, par suite, l'administration était en droit de s'opposer à la provision en litige dès lors que le risque de dépréciation qui la motivait concernait des créances détenues à l'égard de sociétés juridiquement étrangères et que l'opération n'était pas justifiée par l'intérêt propre de la contribuable ;

Considérant, en dernier lieu, que la société Masséna Les Halles et la société Eurasport, toutes deux filiales de la société Holding Buisine Financière Restauration, ont facturé à la société BEST au cours de l'année 2000 les sommes de 400 000 et 300 000 francs à titre, respectivement, de « participation forfaitaire aux travaux » et de « participation commerciale sur vitrine technologique » ; que si la société BEST soutient qu'elle avait intérêt à mettre en valeur ses travaux d'agencement afin de contribuer au développement d'un réseau de restaurants franchisés partageant le même concept d'aménagement, elle ne conteste pas qu'elle n'a versé aucune participation à ses autres clients alors que les travaux qu'elle réalise pour leur compte lui procurent une promotion comparable, que le tarif qu'elle acquitte repose sur un taux forfaitaire qui ne tient pas compte du coût de certains aménagements et qu'elle n'a effectué aucun travail d'agencement pour le compte de la société Eurasport ; que les participations payées par la société BEST aux deux sociétés susmentionnées, juridiquement étrangères, n'étant pas justifiées par l'intérêt de l'entreprise, l'administration était en droit de refuser leur déduction au titre des charges de l'exercice 2000 ;


Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : « 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (…) » ;
Considérant que l'administration fait valoir que par leur fréquence, les actes anormaux de gestion accomplis par la société BEST sous la forme notamment d'avance de fonds ou de prestations non rémunérées, d'abandon de créance et de prises en charge de factures non justifiées révèlent la mise en place d'un transfert de trésorerie à son détriment et au bénéfice de sociétés gérées par le même dirigeant ; que, ce faisant, l'administration établit la mauvaise foi de la contribuable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société BEST n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;


Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme demandée par la société BEST au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société à responsabilité limitée BEST est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée BEST et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°06DA01676


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06DA01676
Date de la décision : 02/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Patrick Minne
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : SCP AVOCATS DU NOUVEAU SIECLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-10-02;06da01676 ?
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