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15/11/2007 | FRANCE | N°07DA00713

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 15 novembre 2007, 07DA00713


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 mai 2007 et 16 juillet 2007, au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentés pour Mme Néné X, demeurant ..., par l'Association d'avocats Joseph, Tillie, Califano, Ducrocq ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0407446, en date du 29 mars 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du préfet du Pas-de-Calais du 5 novembre 2004 refusant de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part, à ce q

u'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un ...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 mai 2007 et 16 juillet 2007, au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentés pour Mme Néné X, demeurant ..., par l'Association d'avocats Joseph, Tillie, Califano, Ducrocq ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0407446, en date du 29 mars 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du préfet du Pas-de-Calais du 5 novembre 2004 refusant de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation et, enfin, à la condamnation de l'état à lui verser la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet, dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à venir, de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire, de lui délivrer une carte de séjour et, à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la décision attaquée émane d'une autorité incompétente et n'est pas suffisamment motivée ; que le préfet devait, avant de statuer sur sa demande, saisir la commission départementale du titre de séjour ; qu'en écartant le moyen tiré de la méconnaissance de l'article
15-2° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le tribunal administratif a répondu à un moyen qui n'était soulevé par aucune des parties ; qu'au moment de sa demande de titre de séjour le
9 octobre 2004, elle était en situation régulière sur le sol national ; que son mari est décédé et que ses deux enfants ont quitté leur pays d'origine ; que, compte tenu de son âge et de ses problèmes de santé, elle ne peut exercer aucune activité professionnelle et qu'elle est totalement dépendante de sa fille résidant en France ; qu'elle est dépourvue d'attaches en Guinée et que, lorsqu'elle était seule dans son pays d'origine, ses enfants lui adressaient des mandats afin qu'elle puisse subvenir à ses besoins ; qu'elle a donc la qualité d'ascendant à charge et remplit les conditions prévues à l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 lui permettant la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ; que ses liens familiaux et personnels en France sont extrêmement forts ; qu'en refusant de l'admettre au séjour, le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que la décision attaquée est donc contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi qu'aux dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance précitée ; qu'en se contentant de rappeler la mention d'ascendant non à charge portée sur son visa, sans vérifier si elle remplissait les conditions de délivrance d'une carte de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article
12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet a commis une erreur de droit ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance du 23 mai 2007 portant clôture de l'instruction au 23 juillet 2007 ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 juin 2007, présenté par le préfet du Pas-de-Calais, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que M. Patrick Y était bien compétent pour signer la décision attaquée ; qu'il n'était pas tenu de soumettre le cas de Mme X à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande dès lors qu'elle n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que la décision attaquée qui énonce de manière précise et circonstanciée les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde est suffisamment motivée ; que le tribunal administratif n'a pas soulevé un moyen d'office ; que lors de sa demande de titre de séjour, Mme X ne se trouvait plus en situation régulière ; que Mme X ne justifie pas être isolée dans son pays d'origine ; qu'elle ne justifie pas d'avoir aucune ressource en Guinée ; que si la fille de Mme X et son beau-fils résident en France, son fils réside au Canada ; que si la requérante pouvait prétendre obtenir un titre de séjour en qualité d'ascendant à charge, il lui appartenait alors de faire valoir ce droit auprès des autorités consulaires en Guinée afin d'être en conformité avec la législation française ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 juillet 2007, présenté pour Mme X, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et soutient, en outre, que si le préfet du Pas-de-Calais insiste sur le fait que l'ambassadeur de France à Conakry a cru bon d'ajouter sur le visa la mention « ascendant non à charge », il lui appartenait d'en tirer toutes les conséquences aussi longtemps que cet acte n'a pas été ni retiré ni abrogé ; que le visa de Mme X n'a été ni retiré ni abrogé ; que le fait que Mme X n'ait pas fait état de ce qu'elle était à charge, n'est pas au nombre des motifs de nature à justifier légalement un refus de titre de séjour au titre de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et portant création de l'Office national d'immigration ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 octobre 2007 à laquelle siégeaient
M. Marc Estève, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et
M. Albert Lequien, premier conseiller :

- le rapport de M. Albert Lequien, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : « Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (…) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant a moins de vingt-et-un ans ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de la décision attaquée, que, pour refuser à Mme X, de nationalité guinéenne, le titre de séjour qu'elle sollicitait, le préfet s'est fondé sur la seule circonstance qu'elle était entrée en France le 3 janvier 2004 sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de court séjour portant la mention « ascendant non à charge » ; que l'apposition, sur le visa délivré à la requérante par les autorités consulaires françaises à Conakry, de la mention « ascendant non à charge » n'était pas à elle seule de nature à faire regarder l'intéressée comme n'étant pas à la charge de sa fille de nationalité française au sens des dispositions précitées ; que, dès lors, en s'estimant lié par l'appréciation portée par les autorités consulaires françaises en Guinée, le préfet a méconnu sa propre compétence ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 novembre 2004 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé » ;

Considérant que l'annulation par le présent arrêt de la décision attaquée du préfet du
Pas-de-calais du 5 novembre 2004 ne confère pas à Mme X un droit à la délivrance d'un titre de séjour mais implique seulement pour le préfet de réexaminer la situation de Mme X en vue de répondre à sa demande de titre de séjour ;


Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme X et non compris dans les dépens ;



DÉCIDE :



Article 1er : Le jugement n° 0407446, en date du 29 mars 2007, du Tribunal administratif de Lille et la décision du préfet du Pas-de-Calais, en date du 5 novembre 2004, sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Mme X la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Néné X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement et au préfet du Pas-de-Calais.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA00713
Date de la décision : 15/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Estève
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : ASSOCIATION D'AVOCATS JOSEPH TILLIE CALIFANO DUCROCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-11-15;07da00713 ?
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