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28/02/2008 | FRANCE | N°07DA01396

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 28 février 2008, 07DA01396


Vu la requête, enregistrée le 31 août 2007 par télécopie et régularisée par la réception de l'original le 3 septembre 2007, présentée pour Mme Ashe X, demeurant au ..., par la SELARL Eden Avocats ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701331, en date du 30 juillet 2007, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 12 avril 2007 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destinat

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Vu la requête, enregistrée le 31 août 2007 par télécopie et régularisée par la réception de l'original le 3 septembre 2007, présentée pour Mme Ashe X, demeurant au ..., par la SELARL Eden Avocats ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701331, en date du 30 juillet 2007, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 12 avril 2007 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination dans le cas où l'obligation précitée viendrait à être exécutée d'office, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Eure de réexaminer sa demande de titre de séjour sous astreinte et, enfin, à ce que soit mise à la charge du préfet de l'Eure une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler la décision attaquée ;

3°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 1 500 euros à la SELARL Eden Avocats en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, ou de lui verser la même somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en cas de rejet de sa demande d'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que la décision attaquée, en tant qu'elle porte refus de séjour, est entachée d'une erreur de droit, le préfet de l'Eure s'étant estimé lié par l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ; que cette décision a été prise en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, son état de santé nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut aurait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et aucun traitement adapté n'étant disponible au Nigeria ; que la décision attaquée, en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire français, est insuffisamment motivée en droit et en fait ; que cette décision est la conséquence d'une décision portant refus de séjour illégale ; que le jugement attaqué est irrégulier, le Tribunal administratif de Rouen n'ayant pas répondu au moyen tiré de l'illégalité de la décision fixant le pays de renvoi en raison de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision fixant le Nigeria comme pays de renvoi a été prise en méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles 3, 8 et 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu des risques de traitements inhumains et dégradants encourus en cas de retour au Nigeria et de la perte d'espoir de constituer une famille ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la décision, en date du 13 septembre 2007, du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme X ;

Vu l'ordonnance, en date du 17 septembre 2007, portant clôture de l'instruction au

19 novembre 2007 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2007, présenté par le préfet de l'Eure, qui demande à la Cour de rejeter la demande de Mme X ; il soutient que la requête en appel présentée par Mme X est irrecevable comme n'étant pas motivée conformément à l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que la décision attaquée a été prise après avoir apprécié l'ensemble de la situation personnelle et familiale de Mme X et n'est pas uniquement fondée sur l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ; que la décision attaquée n'a pas été prise en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision, en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire français, est suffisamment motivée en droit et fait ; que Mme X n'apporte aucun élément sur les menaces encourues en cas de retour au Nigeria ; que la circonstance selon laquelle Mme X suit un traitement contre la stérilité n'implique pas la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, concernant les moyens de première instance, l'avis du médecin inspecteur de la santé publique est produit ; que la décision portant refus de séjour est suffisamment motivée ; qu'il ne s'est pas estimé lié par l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ; que la décision portant refus de séjour n'a pas méconnu le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision portant obligation de quitter le territoire a été signée par une autorité compétente et est suffisamment motivée ; que la décision fixant le pays de renvoi n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2008 à laquelle siégeaient M. Marc Estève, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

Mme Agnès Eliot, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté en date du 12 avril 2007, le préfet de l'Eure a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme X, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ; que Mme X relève appel du jugement, en date du 30 juillet 2007, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 avril 2007 et à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Eure de réexaminer sa demande de titre de séjour ;

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

Considérant que la requête d'appel, qui ne constitue pas la reproduction littérale d'un mémoire de première instance mais analyse le jugement du Tribunal administratif et énonce également de nouveau de manière précise les critiques adressées à la décision dont l'annulation a été demandée au Tribunal administratif, répond aux exigences de motivation des requêtes d'appel prévues par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

Sur la légalité de la décision en tant qu'elle porte refus de séjour :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Eure se soit estimé lié par l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police » ;

Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter le moyen tiré de la violation du 11° de l'article L. 313-11 qui ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation présentée devant le Tribunal administratif ;

Sur la légalité de la décision en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire :

Considérant que si la motivation de la décision prescrivant l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que le refus est lui-même motivé, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, l'administration demeure, toutefois, tenue de rappeler les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire ; qu'en l'espèce, l'arrêté préfectoral attaqué, s'il est suffisamment motivé en fait, se borne à viser, en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans rappeler dans ses visas, ses motifs ou même son dispositif, les dispositions de ce code permettant de fonder cette mesure d'éloignement ; que, par ailleurs, la mention de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le corps des motifs de l'arrêté, lequel vise les cas dans lesquels un étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, ne satisfait pas l'obligation de motivation précédemment rappelée ; que la requérante est, dès lors, fondée à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'irrégularité et doit, par suite, être annulé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen d'irrégularité du jugement en tant qu'il a rejeté cette partie des conclusions de la demande, ni les autres moyens présentés à l'appui desdites conclusions, la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en tant qu'elle tend à l'annulation de la décision du préfet de l'Eure, contenue dans l'arrêté du 12 avril 2007, lui refusant un titre de séjour ; qu'en revanche, l'intéressée est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions prises le même jour par lesquelles le préfet de l'Eure l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le Nigeria comme pays de destination ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale devant le Tribunal de grande instance de Douai ; qu'ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; que, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SELARL Eden Avocats renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 750 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0701331, en date du 30 juillet 2007, du Tribunal administratif de Rouen est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme X tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Eure contenues dans l'arrêté du 12 avril 2007 portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination. Ces décisions sont également annulées.

Article 2 : Les conclusions présentées par Mme X tendant à l'annulation de la décision contenue dans l'arrêté en date du 12 avril 2007 par laquelle le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera à la SELARL Eden Avocats la somme de 750 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve que la SELARL renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Ashe X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Copie sera transmise au préfet de l'Eure.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA01396
Date de la décision : 28/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Estève
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-02-28;07da01396 ?
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