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04/06/2008 | FRANCE | N°07DA01302

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 04 juin 2008, 07DA01302


Vu la requête, enregistrée le 14 août 2007 par télécopie et régularisée par la réception de l'original le 16 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE GOUVIEUX, représentée par son maire dûment habilité, par la SELARL Genesis Avocats ; elle demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0503010, en date du 19 juin 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de M. et Mme Vinvent X, annulé la délibération, en date du 28 septembre 2005, par laquelle le conseil municipal de la commune a autoris

é la vente de parcelles situées au lieudit « La Motte Louvet » et mis à sa...

Vu la requête, enregistrée le 14 août 2007 par télécopie et régularisée par la réception de l'original le 16 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE GOUVIEUX, représentée par son maire dûment habilité, par la SELARL Genesis Avocats ; elle demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0503010, en date du 19 juin 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de M. et Mme Vinvent X, annulé la délibération, en date du 28 septembre 2005, par laquelle le conseil municipal de la commune a autorisé la vente de parcelles situées au lieudit « La Motte Louvet » et mis à sa charge la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme X ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme X la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement est irrégulier dans la mesure où il a méconnu le caractère contradictoire de la procédure consacré notamment par l'article L. 5 du code de justice administrative ; qu'en effet, le dernier mémoire produit avant l'audience par M. et Mme X, qui ne lui a pas été communiqué, contenait un moyen nouveau de légalité externe sur lequel le Tribunal s'est fondé pour prononcer l'annulation critiquée ; que c'est également à tort que le Tribunal a admis la recevabilité de la requête ; que les demandeurs n'ont pas qualité leur donnant intérêt pour agir ; que le Tribunal s'est livré à une extrapolation en considérant qu'ils invoquaient leur qualité de contribuable communal alors qu'ils avaient seulement indiqué qu'ils résidaient dans la commune ; que le jugement encourt également la censure pour avoir été au-delà de ce qui était soutenu ; qu'en tout état de cause, la qualité de contribuable communal ne leur confère pas, en l'espèce, un intérêt pour agir dès lors que la décision n'a pas de répercussion négative sur les finances communales puisqu'elle rend possible une recette et non une dépense ; que la délibération litigieuse n'affecte les requérants ni de façon directe, ni de façon certaine, ni dans des conditions suffisamment spéciales pour qu'un intérêt pour agir leur soit reconnu comme habitant de la commune ; qu'à titre subsidiaire, que le défaut allégué lors de la notification de l'ordre du jour du conseil municipal n'est pas avéré ; que cela ne se déduit pas du nombre de conseillers présents et des pouvoirs donnés ; que l'ordre du jour a été précisé et comporte le sujet de la vente des lots de

« La Motte Louvet » ; qu'à cette convocation était jointe une note de synthèse ainsi qu'un dossier permettant aux conseillers municipaux d'être informés ; que l'acheminement se fait au domicile des conseillers municipaux par un agent communal spécialement affecté à cette tâche ; qu'ils ont été convoqués le 22 septembre pour une réunion du 28, soit dans les formes et délais requis par l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ; que c'est donc à tort que le Tribunal a retenu ce motif d'annulation ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 4 de la loi du

12 avril 2000 doit être écarté dans la mesure où une délibération de conseil municipal n'est pas au nombre des décisions visées par cette disposition ; que la délibération ne concerne pas les époux X ; qu'en tout état de cause, l'autorité signataire est identifiable ; que le lotissement de « La Motte Louvet » existe depuis 1995, soit antérieurement à l'adoption de la charte du parc naturel régional Oise-Pays de France intervenue le 13 janvier 2004 ; qu'en outre, ce lotissement se situe au sud de la commune, au sein de la zone violette (tissu bâti) ; que ces parcelles sont classées au sein du plan local d'urbanisme en zone UCe, secteur d'habitat pavillonnaire ; qu'il n'y a aucune incompatibilité avec le plan local d'urbanisme et la charte du parc naturel régional ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire de production de pièces, enregistré le 30 août 2007, pour la COMMUNE DE GOUVIEUX ;

Vu le mémoire en défense et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 septembre 2007 et 17 janvier 2008, présentés pour M. et Mme Vincent X, demeurant ..., par la SCP Frison, Decramer et Associés ; ils demandent à la Cour, à titre principal, de rejeter la requête, à titre subsidiaire, de désigner un géomètre-expert afin de déterminer dans quelle zone de la carte du parc naturel régional sont situés les terrains concernés et, enfin, de mettre à la charge de la COMMUNE DE GOUVIEUX la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent que la COMMUNE DE GOUVIEUX n'a pas d'intérêt à agir et sa requête est donc irrecevable ; qu'ils s'en rapportent en ce qui concerne la prétendue irrégularité du jugement attaqué ; qu'ils ont intérêt à agir comme contribuable communal dans la mesure où, s'agissant d'une vente et non une simple mesure d'économie, la délibération a une incidence sur les finances communales et son patrimoine ; qu'en tant que résidents de la commune à proximité du parc naturel régional, la vente de parcelles situées dans ce parc et en secteurs « espaces boisés », porte atteinte à la qualité environnementale, au cadre de vie et à la valeur de leur patrimoine immobilier ; que la délibération est entachée d'illégalité externe car la procédure suivie n'a pas respecté les dispositions de l'article L. 2121-10 et de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ; qu'elle n'apporte pas la preuve du dépôt, le 22 septembre 2005, des convocations à la séance du conseil municipal au domicile des conseillers municipaux ; que la note de synthèse produite est insuffisante en ce qui concerne la question de la vente des terrains litigieux dans la mesure où elle ne précise pas que les parcelles sont situées en « espaces boisés » ; que la délibération du 28 septembre 2005 met en oeuvre la procédure de vente et conduit à offrir les terrains à la vente ; que l'objet de la délibération est incompatible avec les orientations de la charte du parc naturel régional et n'a été rendu possible que par l'adoption d'un plan local d'urbanisme illégal ; que le recours à un géomètre-expert permettra de préciser la situation des parcelles ; que le maire se fonde sur l'imprécision des pièces ; qu'une expertise contradictoire permettra de lever les doutes ; que le conseil municipal ne pouvait autoriser la vente qu'en s'assurant que les terrains resteraient entièrement boisés et vierges de toute construction comme l'exige la charte du parc naturel ; que compte tenu du prix de vente des terrains, ceux-ci sont vendus en état d'être construits ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2008, présenté pour M. et Mme X, qui concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 16 mai 2008 et régularisé par la réception de l'original le 19 mai 2008, présenté pour la COMMUNE DE GOUVIEUX, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que la circonstance qu'elle a repris une nouvelle délibération le 24 septembre 2007 concernant à nouveau la fixation de la procédure de vente des lots, ne rend pas sa requête enregistrée antérieurement contre le jugement prononçant l'annulation de sa précédente délibération ayant un objet identique, irrecevable ; que la requête d'appel n'a pas davantage perdu son objet, la commune conservant un intérêt à obtenir l'annulation du jugement qui annule une de ses délibérations ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 19 mai 2008, présenté pour M. et Mme X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution et la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2008 à laquelle siégeaient

M. Marc Estève, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

M. Albert Lequien, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- les observations de Me Cabillou, pour la COMMUNE DE GOUVIEUX, et de Me Peretti, pour M. et Mme X ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel et le non-lieu à statuer :

Considérant, en premier lieu, que les actions engagées par la COMMUNE DE GOUVIEUX à l'encontre de M. et Mme X devant le juge judiciaire ne sont pas, en tout état de cause, de nature à priver ladite commune de son droit à relever appel d'un jugement prononçant l'annulation d'une délibération prise par son conseil municipal ; que, par suite, M. et Mme X ne peuvent utilement faire état de la prétendue mauvaise foi de la COMMUNE DE GOUVIEUX pour contester son intérêt à faire appel ;

Considérant, en second lieu, que la circonstance que, tirant les conséquences de l'annulation, par le jugement du 19 juin 2007 du Tribunal administratif d'Amiens, de sa délibération du

28 septembre 2005 pour un motif tiré d'un vice de procédure dont elle était entachée, la COMMUNE DE GOUVIEUX a adopté, le 24 septembre 2007, une nouvelle délibération ayant un objet identique, après une nouvelle convocation des membres du conseil municipal, ne rend pas sa requête d'appel contre ledit jugement sans objet dès lors de l'intervention de la nouvelle délibération du

24 septembre 2007 n'a pas eu pour objet et encore moins pour effet de retirer la précédente délibération du 28 septembre 2005 ; que, par suite, la requête n'est pas irrecevable dès lors qu'en tout état de cause, la nouvelle délibération est postérieure à la date d'enregistrement de la requête devant la Cour, le 14 août 2007 ; qu'il n'appartient pas davantage au juge d'appel de prononcer un non-lieu sur les conclusions dont il a été saisi par la COMMUNE DE GOUVIEUX du fait de l'intervention de la nouvelle délibération communale ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : « L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence » ; qu'en vertu du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du même code : « les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux » ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de la fiche requête, confirmée par la fiche télématique « Sagace », que le dernier mémoire produit par M. et Mme X et enregistré au greffe du Tribunal le 30 avril 2007 a fait l'objet le 3 mai 2007 d'une mesure dite « information réception mémoire ou pièce (affaire enrôlée) » mais n'a pas été communiqué à la commune par la juridiction alors qu'il contenait un moyen nouveau de légalité externe que le Tribunal a d'ailleurs retenu pour prononcer l'annulation de la délibération attaquée ; que, dans ces conditions, le jugement du 19 juin 2007 a été rendu en méconnaissance des dispositions susrappelées du code de justice administrative et doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme X devant le Tribunal administratif d'Amiens ;

Considérant que M. et Mme X n'avaient, en première instance, entendu se prévaloir, comme résidents de la COMMUNE DE GOUVIEUX, que de l'intérêt à agir, né d'une atteinte à leur droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé protégé par l'article 1er de la Charte de l'environnement de 2004 inséré dans le Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 par la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 ainsi que de leur devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement résultant de l'article 2 de ladite Charte ; que, toutefois, pas plus en première instance qu'en cause d'appel, les intéressés n'ont fourni d'éléments de nature à vérifier le caractère direct et certain de leur intérêt compte tenu notamment de l'objet de la délibération attaquée qui se borne à prévoir les modalités de vente de parcelles communales constituant cinq lots et ce, nonobstant leur développement lié au classement des parcelles en cause en « espaces boisés » sur la carte annexée à la charte du parc naturel régional Oise-Pays de France et leur critique du classement de ces parcelles en « secteur bâti » au plan local d'urbanisme ;

Considérant que si M. et Mme X se prévalent également désormais de leur qualité de contribuable communal, il est constant que la délibération litigieuse qui fixe les modalités de mise en vente de terrains appartenant au domaine privé de la commune pour un prix répondant aux conditions du marché ne peut avoir pour effet que d'alléger les charges des contribuables et d'augmenter les recettes communales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, faute pour M. et Mme X d'invoquer un intérêt pertinent leur donnant qualité pour agir, leur demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal du 28 septembre 2005 fixant les modalités de mise en vente de cinq lots de terrain au lieudit « La Motte Louvet » n'est pas recevable et ne peut qu'être rejetée ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à leur charge le paiement à la COMMUNE DE GOUVIEUX de la somme de 1 500 euros au titre des frais que celle-ci a exposés tant en première instance qu'en appel et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0503010, en date du 19 juin 2007, du Tribunal administratif d'Amiens est annulé et la demande de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : M. et Mme X verseront à la COMMUNE DE GOUVIEUX la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE GOUVIEUX et à M. et Mme Vincent X.

Copie sera transmise au préfet de l'Oise.

N°07DA01302 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA01302
Date de la décision : 04/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Estève
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SELARL GENESIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-06-04;07da01302 ?
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