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24/09/2008 | FRANCE | N°07DA01808

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 24 septembre 2008, 07DA01808


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 et 28 décembre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentés pour M. Jean-Claude X, demeurant ..., par Me Henry-Biabaud Clair ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501091 du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 février 2005 par laquelle le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 9 septembre 2004 refusant

d'accorder au centre technique des industries mécaniques (CETIM) l'au...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 et 28 décembre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentés pour M. Jean-Claude X, demeurant ..., par Me Henry-Biabaud Clair ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501091 du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 février 2005 par laquelle le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 9 septembre 2004 refusant d'accorder au centre technique des industries mécaniques (CETIM) l'autorisation de le licencier pour faute et a accordé cette autorisation ;

2°) d'annuler ladite décision du 28 février 2005 ;

3°) de condamner le centre technique des industries mécaniques (CETIM) à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que la décision ministérielle en litige est insuffisamment motivée ; qu'elle se borne à mentionner l'absence de lien entre la demande d'autorisation de licenciement présentée à son encontre et l'exercice de ses mandats syndicaux, sans autre précision ; qu'il en est de même du reproche relatif au dénigrement ;

- que le ministre a commis une erreur de fait et une erreur de droit en estimant qu'il n'y avait pas de lien entre la demande d'autorisation de licenciement présentée et l'exercice de ses mandats syndicaux ; que le dénigrement qui est invoqué par le centre technique des industries mécaniques (CETIM) s'inscrit dans le cadre de son activité syndicale ; qu'il a fait l'objet d'une rétrogradation qui a pour origine sa désignation en qualité de délégué syndical faite le 10 avril 2004 ; que, contrairement à ce qu'a précisé le ministre, ce n'est pas suite à l'entretien d'évaluation du 8 mars 2004 que son employeur lui a proposé un poste de chargé d'affaires, cette proposition ne lui ayant été faite que le 15 juin 2004 ;

- que la modification de ses fonctions constituait une modification de son contrat de travail et non une simple modification de ses conditions de travail ; que les nouvelles fonctions qui lui ont été proposées étaient différentes et ne correspondaient pas à un emploi de cadre ; que son refus d'accepter une modification unilatérale de son contrat de travail et qui aboutissait à une rétrogradation ne constitue pas une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance du 8 janvier 2008 portant clôture de l'instruction au 8 avril 2008 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 31 mars 2008 et régularisé par la production de l'original le 7 avril 2008, présenté par le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité qui conclut au rejet de la requête ; il soutient ne pas avoir d'autres observations à formuler que celles produites devant les premiers juges ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 7 avril 2008 et régularisé par la production de l'original le 10 avril 2008, présenté pour le centre technique des industries mécaniques (CETIM), dont le siège social est 52 avenue Félix Louait BP 80067 à Senlis (60304) cedex, par la SELARL Lafarge associés ; il conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. X à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient :

- à titre principal, que la requête sommaire de M. X est irrecevable car ne comportant l'exposé d'aucun moyen, ni conclusions ; que les moyens soulevés dans son mémoire complémentaire du 28 décembre 2007 ont été présentés après l'expiration du délai de recours contentieux ;

- à titre subsidiaire, que M. X se borne à reproduire ses moyens et conclusions qu'il a produits en première instance sans développer de moyen d'appel ;

- que la décision ministérielle en litige est suffisamment motivée tant en ce qui concerne l'absence de lien entre la demande de licenciement présentée et l'exercice des mandats syndicaux de M. X que du dénigrement ;

- sur le fond, que la demande de licenciement présentée à l'encontre de M. X est sans lien avec son mandat de délégué syndical ; que le ministre n'a commis aucune erreur d'appréciation en accordant l'autorisation de licenciement demandée ; que les nouvelles missions proposées à l'intéressé ne constituent pas une modification de son contrat de travail ; que celles-ci ne sortaient pas du périmètre des fonctions d'ingénieur « III C » qui correspondaient à celles de M. X ; que ses conditions de rémunération, le coefficient, le niveau et les conditions générales de travail de l'intéressé étaient inchangées, comme l'a d'ailleurs estimé le conseil de Prud'hommes de Creil dans une ordonnance de référé du 7 décembre 2004 ; que le refus de M. X d'accepter une simple modification de ses conditions de travail, qui ne comportait aucune incidence sur l'exercice de son mandat, constitue une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré par télécopie le 7 avril 2008 et régularisé par la production de l'original le 18 avril 2008, présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que le centre technique des industries mécaniques (CETIM) entretient une confusion entre la fonction de délégué régional, qui est une fonction de cadre « III B » alors que la fonction de chargé d'affaires auprès du délégué régional, qui lui a été proposée, est une fonction exercée par des salariés non-cadres ou par des cadres de niveau débutants ;

Vu l'ordonnance du 11 avril 2008 portant réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 5 septembre 2008 et régularisé par la production de l'original le 8 septembre 2008, présenté pour le centre technique des industries mécaniques (CETIM) qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 8 septembre 2008 et régularisé par la production de l'original le 11 septembre 2008, présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que le poste de chargé d'affaires auprès du délégué régional Ile de France qui lui a été proposé ne peut en aucun cas être lié à une réorganisation des actions régionales qui n'est intervenue qu'en 2006, soit postérieurement à la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 septembre 2008 à laquelle siégeaient Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, Mme Corinne Baes Honoré, premier conseiller et M. Xavier Larue, conseiller :

- le rapport de Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-rapporteur ;

- les observations de Me Bodin, pour le centre technique des industries mécaniques (CETIM) ;

- et les conclusions de M. Alain de Pontonx, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le centre technique des industries mécaniques (CETIM) a demandé à l'inspecteur du travail, le 2 juillet 2004, l'autorisation de licencier M. X, délégué syndical et délégué syndical central ; que, par une décision du 9 septembre 2004, l'inspecteur du travail a refusé de lui accorder cette autorisation ; que, par une décision du 28 février 2005, le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, saisi par la voie du recours hiérarchique, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et a accordé l'autorisation de licencier l'intéressé ; que M. X relève appel du jugement du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ladite décision du 28 février 2005 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, que si M. X reprend en appel, de manière identique, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision du 28 février 2005 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale en litige et du lien entre la demande de licenciement présentée avec ses mandats syndicaux et du dénigrement dont il aurait fait l'objet, déjà invoqués devant le Tribunal, il ressort des pièces du dossier que ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Considérant, en second lieu, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

Considérant que, pour demander l'autorisation de licencier M. X, embauché depuis le 16 juillet 1999 en qualité d'ingénieur « position III B » puis promu « III C », le centre technique des industries mécaniques (CETIM) a fait valoir que l'intéressé avait refusé un ajustement de ses missions, pourtant prévu dans son contrat de travail, et alors que celui-ci n'entraînait aucune modification d'éléments substantiels de ce dernier ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. X exerçait depuis le mois d'octobre 2002, la fonction de délégué à la valorisation des actions collectives rattaché au directeur général, chargé, notamment, de définir le programme annuel des actions collectives de valorisation ; que le centre technique des industries mécaniques (CETIM) a proposé à l'intéressé, après son entretien d'évaluation du 8 mars 2004, d'occuper les fonctions de « chargé d'affaires Ile de France » sous l'autorité du délégué régional ; que M. X se prévaut de ce qu'il serait désormais rattaché au niveau régional et fait valoir que la modification de ses fonctions constitue en réalité une modification de son contrat de travail aboutissant à une rétrogradation ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le coefficient, la rémunération ou les conditions de travail de l'intéressé auraient été modifiés ; qu'il n'est pas plus établi que les nouvelles missions, situées à un niveau plus opérationnel et de nature comparable à celles exercées antérieurement, notamment pour certaines actions de communication et de valorisation, ne correspondaient pas à sa qualification ni qu'elles seraient substantiellement différentes de celles objet du contrat de travail ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que la modification de fonctions qui lui a été proposée, constituait une modification substantielle de son contrat de travail ; que, par suite, le refus de M. X d'accepter cette modification sur ce fondement doit être regardé comme constituant une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ; que, dès lors, c'est à bon droit que le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a, après avoir annulé la décision de l'inspecteur du travail du 9 septembre 2004, par sa décision du 28 février 2005, accordé au centre technique des industries mécaniques (CETIM) l'autorisation de licencier M. X ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le centre technique des industries mécaniques (CETIM), que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 février 2005 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre technique des industries mécaniques (CETIM), qui n'est pas dans la présente instance, partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il n' y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. X le paiement au centre technique des industries mécaniques (CETIM) d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre technique des industries mécaniques (CETIM) tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Claude X, au centre technique des industries mécaniques (CETIM) et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA01808
Date de la décision : 24/09/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Mehl-Schouder
Rapporteur ?: Mme Marie-Christine Mehl-Schouder
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : HENRY-BIABAUD CLAIR

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-09-24;07da01808 ?
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