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30/07/2009 | FRANCE | N°09DA00660

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 30 juillet 2009, 09DA00660


Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2009 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée le même jour par courrier original, présentée pour le PREFET DU LOIRET, par Me de Villèle ; le préfet demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900690, en date du 16 mars 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté en date du 11 mars 2009 prononçant la reconduite à la frontière de M. Alassane A ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant

le président du Tribunal administratif de Rouen ;

3°) de mettre une somme de 800 e...

Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2009 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée le même jour par courrier original, présentée pour le PREFET DU LOIRET, par Me de Villèle ; le préfet demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900690, en date du 16 mars 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté en date du 11 mars 2009 prononçant la reconduite à la frontière de M. Alassane A ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le président du Tribunal administratif de Rouen ;

3°) de mettre une somme de 800 euros à la charge de M. A sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet soutient :

- que, pour prononcer l'annulation de l'arrêté en litige, le premier juge a estimé à tort que les dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avaient, en l'espèce, été méconnues ; qu'en effet, M. A n'a fait connaître son intention de solliciter le bénéfice du statut de réfugié que postérieurement à la date à laquelle ledit arrêté a été pris ; qu'il a ainsi déclaré au cours de l'audition qui a suivi son interpellation n'avoir entrepris aucune démarche afin de régulariser sa situation administrative et n'a donné aucune précision quant à la nature des menaces qu'il alléguait encourir en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il n'a présenté aucun document au soutien de ces dernières allégations ; qu'à aucun moment au cours de sa garde à vue, ni avant son entrevue avec son avocat, ni après, M. A n'a indiqué avoir l'intention de demander l'asile politique en France ; que ce n'est que le 16 mars 2009 que M. A a manifesté son souhait auprès de la CIMADE de déposer une demande de statut de réfugié à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que cette demande, qui s'avère postérieure à la date à laquelle l'arrêté de reconduite à la frontière en litige a été pris, a été considérée comme ayant été présentée dans le seul but de faire échec à cette mesure d'éloignement, de sorte que l'admission au séjour de l'intéressé à ce titre a été refusée ; que la jurisprudence invoquée à cet égard par M. A en première instance est sans pertinence ; qu'en revanche, le Conseil d'Etat a écarté, dans une hypothèse proche, les prétentions de l'intéressé ;

- que l'autre moyen invoqué par M. A devant le premier juge n'est pas fondé ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué a été signé par une autorité légalement habilitée par une délégation de signature régulièrement publiée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 27 avril 2009 par laquelle le président de la Cour fixe la clôture de l'instruction au 10 juin 2009 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique le rapport de M. André Schilte, président de la Cour, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l 'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) II - L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ; qu'aux termes de l'article L. 741-4 du même code : Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 2o L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la convention de Genève susmentionnée ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr (...) ; 3o La présence en France de l'étranger constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat ; 4o La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne (...) ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile . Le I de l'article L. 511-1 est alors applicable ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2o à 4o de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) ;

Considérant que le droit constitutionnel d'asile a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que ce droit implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ; que ce n'est que si sa demande peut être regardée comme relevant de l'un des cas limitativement énumérés à l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité que son admission au séjour peut être refusée, l'intéressé conservant toutefois le droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides sur sa demande ;

Considérant que, pour annuler, par le jugement attaqué, en date du 16 mars 2009, l'arrêté du 11 mars 2009 par lequel le PREFET DU LOIRET a décidé de reconduire M. A, ressortissant guinéen, né le 10 décembre 1978, à la frontière, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a estimé qu'alors que M. A devait être regardé comme ayant manifesté l'intention, dès l'audition qui a suivi son interpellation, de demander l'asile politique, et que cette démarche, compte tenu des éléments avancés par l'intéressé et de son arrivée très récente en France, n'était pas susceptible d'être considérée comme un recours abusif aux procédures d'asile, il aurait dû être admis au séjour dans l'attente de l'examen de sa demande d'asile et ne pouvait faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière ; que le PREFET DU LOIRET forme appel de ce jugement ;

Considérant que M. A, qui a déclaré être entré en France le 9 mars 2009, n'a pas été en mesure de justifier d'une entrée régulière, ni de la possession d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il était ainsi dans le cas visé par les dispositions précitées de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorisant le PREFET DU LOIRET à décider, par l'arrêté attaqué, qu'il serait reconduit à la frontière ;

Considérant qu'au cours de l'audition qui a suivi son interpellation le 10 mars 2009, soit le lendemain de son entrée sur le territoire, M. A a notamment déclaré qu'ancien responsable du parti politique LPG, il était en danger en Guinée depuis la répression par les autorités des grèves de janvier 2007, qu'il avait été emprisonné durant neuf mois à Conakry et que, bien que n'ayant fait jusqu'alors aucune démarche en vue d'obtenir une admission au séjour, il avait l'intention d'engager de telles démarches et de demeurer en France ; qu'il a ainsi manifesté son intention de demander l'asile politique ; qu'il a réitéré ces allégations dans la demande qu'il a rédigée le 16 mars 2009 à cet effet ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment du caractère très récent de son entrée en France, que la demande d'asile de M. A ait eu manifestement pour seul objet de faire échec, dans un but dilatoire, à la mesure de reconduite à la frontière en litige ; que M. A devait donc être autorisé à séjourner en France jusqu'à ce qu'il ait été statué sur cette demande ; que l'arrêté du PREFET DU LOIRET, qui a prononcé sa reconduite immédiate à la frontière, est, dès lors, entaché d'excès de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU LOIRET n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 11 mars 2009 prononçant la reconduite à la frontière de M. A ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que lesdites dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, la somme que le PREFET DU LOIRET demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DU LOIRET est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à M. Alassane A.

Copie sera transmise au PREFET DU LOIRET.

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N°09DA00660 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 09DA00660
Date de la décision : 30/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. André Schilte
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : DE VILLELE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-07-30;09da00660 ?
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