La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2009 | FRANCE | N°08DA01991

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 22 septembre 2009, 08DA01991


Vu la requête, enregistrée le 9 décembre 2008 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée par la réception de l'original le 11 décembre 2008, présentée pour M. Mika A et Mme Milena C épouse A, demeurant ..., par Me En-Nih ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0804771-0804772 du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté, premièrement, la demande de M. A tendant à l'annulation des décisions du 19 juin 2008 par lesquelles le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre d

e séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fi...

Vu la requête, enregistrée le 9 décembre 2008 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée par la réception de l'original le 11 décembre 2008, présentée pour M. Mika A et Mme Milena C épouse A, demeurant ..., par Me En-Nih ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0804771-0804772 du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté, premièrement, la demande de M. A tendant à l'annulation des décisions du 19 juin 2008 par lesquelles le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination et, deuxièmement, la demande de Mme C tendant à l'annulation des décisions du 19 juin 2008 par lesquelles le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de leur délivrer une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent qu'ils appartiennent à la communauté des Roms ; que les décisions attaquées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation et violent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ils sont présents en France depuis juin 1992 ; que les différents documents versés au débat prouvent cette présence en France depuis plus de dix ans et, notamment, le certificat médical de leur ancien médecin traitant ; que l'état de santé de l'exposante nécessite sa présence en France ; que le préfet doit apporter la preuve de l'existence et de l'accessibilité du traitement dans le pays d'origine ; que, malgré leur appartenance à la communauté des Roms, ils manifestent une véritable volonté d'intégration en France ; qu'ils se sont sédentarisés dans le département du Nord, chez leur fils ; que leurs petits-enfants y sont scolarisés ; qu'ils n'ont plus aucune attache familiale en Serbie ; qu'en raison des nombreuses discriminations, notamment en ce qui concerne l'accès aux soins, à l'emploi et à la solidarité, dont sont victimes les Roms, il est évident que leur vie familiale ne pourra se recréer dans leur pays d'origine ; que le préfet se devait d'étudier le droit au séjour de la famille pour raisons humanitaires ; que leur enfant mineur est actuellement scolarisé en France ; que l'obligation de quitter le territoire est entachée d'un défaut de motivation ; qu'elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de l'état de santé de l'exposante ; que la mesure doit également être annulée par voie d'exception de l'illégalité du refus de titre de séjour ; qu'elle méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le pays de destination doit être également annulée par voie d'exception de l'illégalité du refus de titre de séjour ; qu'elle viole également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2009, présenté par le préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord ; le préfet conclut au rejet de la requête ; il soutient que les problèmes soulevés par les requérants ont été soulevés au sujet de leur appartenance à la communauté Rom et ont fait l'objet d'un examen et d'une décision de rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Commission des recours des réfugiés ; qu'ils ne démontrent pas qu'ils sont isolés dans leur pays d'origine où réside leur famille ; que rien ne s'oppose à ce qu'ils puissent continuer à vivre ensemble hors de France ; que le refus de les admettre au séjour ne porte pas atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale en France ; que si le requérant déclare être entré en France pour la première fois le 6 juin 1997, sa dernière entrée connue date du 3 juillet 2005 et il ne justifie en aucun cas de sa présence ininterrompue sur le territoire français depuis 1997 ; qu'il a demandé le 18 août 2005 la délivrance d'une carte de séjour temporaire valable un an au titre de la vie privée et familiale sans autre précision et au titre de parent d'enfant mineur résidant en France ; que la demande au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été faite expressément et n'est donc pas recevable ; que le médecin inspecteur de la santé publique a estimé par trois fois dans ses avis successifs que si l'état de santé de la requérante nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, en revanche elle pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que la décision de refus de titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'obligation de quitter le territoire n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que la décision ne viole pas les dispositions de l'article L. 511-4-10° du même code en ce qui concerne la requérante ; que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ne pourra qu'être écarté ; que l'obligation de quitter le territoire ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté ; que les intéressés n'ont produit aucun élément nouveau ni en première instance, ni en appel, de nature à démontrer leurs craintes en cas de retour dans leur pays d'origine ; que la décision fixant le pays de renvoi ne viole pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ils n'ont pas sollicité le statut d'apatride auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 29 janvier 2009, présenté pour M. et Mme A, qui concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du 5 juin 2009 portant clôture de l'instruction au 23 juin 2009 à 16 heures 30 en application de l'article R 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 juin 2009, présenté pour M. et Mme A, par Me Laporte, avocat au barreau de Lille ; ils concluent aux mêmes fins que leur requête par les moyens suivants :

- M. Guillaume D, secrétaire général adjoint de la préfecture du Nord, n'était pas compétent pour signer les arrêtés attaqués au nom du préfet du Nord dans la mesure où la délégation de signature qui lui a été donnée par ce dernier résulte de l'application de l'article 38 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 alors que, s'agissant d'arrêtés entrant dans l'exercice d'une compétence résultant d'un texte législatif, seule une délégation de signature donnée en vertu d'une disposition législative pouvait légalement fonder sa compétence ; il ne ressort pas de l'exemplaire de l'arrêté n° 1174 publié le 16 mai 2008 portant délégation de signature à M. D, produit par le préfet du Nord, que cet arrêté a été effectivement signé par le préfet ; la délégation de signature portant sur la signature de tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents donnée à M. D est irrégulière en raison de son caractère général ; cette délégation est limitée aux jours non ouvrables, soit les samedi, dimanche et jours fériés, alors que les arrêtés attaqués ont été signés le jeudi 19 juin 2008 ;

- le préfet du Nord qui a visé l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans en rappeler la teneur dans la décision rejetant leur demande de titre de séjour et leur enjoignant de quitter le territoire a insuffisamment motivé les arrêtés notifiés le 19 juin 2008 dans la mesure où seul le rappel des dispositions contenues dans cet article fonde la possibilité offerte par l'article L. 511-1-I de ne pas motiver la décision enjoignant de quitter le territoire ;

- l'arrêté concernant Mme A a été pris en violation des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où le préfet s'est fondé sur les deux avis émis par le médecin inspecteur de la santé publique les 11 octobre 2007 et 27 mars 2008, desquels il ressort que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle peut bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine alors qu'elle est atteinte d'une maladie athéromateuse dont le traitement ne peut se limiter, ainsi qu'a considéré le tribunal administratif, à la prise de médicaments, à l'arrêt du tabagisme et à une meilleure hygiène de vie mais qui, au contraire, doit faire l'objet d'un suivi cardiologique régulier attesté par une hospitalisation en urgence et dont elle ne sera pas en mesure de bénéficier dans son pays d'origine compte tenu à la fois des discriminations, dont sont victimes notamment en matière de santé les membres de la communauté Rom dans ce pays, que des carences affectant les capacités du système de santé serbe ; les avis du médecin inspecteur de la santé publique reposent sur l'examen du seul dossier médical de Mme A et ne sont pas émis au vu du rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier prévu par l'article L. 311-11-11° selon les conditions prescrites par les articles 3 et 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946, modifié, qui prévoient que le médecin inspecteur de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales ne peut statuer que s'il dispose d'un rapport établi par un médecin agréé au vu du dossier médical de l'intéressé ; aucun élément du dossier ne justifie de la possibilité effective de bénéficier dans le pays d'origine du traitement requis contrairement aux dispositions de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que le médecin inspecteur de la santé publique statue également au vu des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressée alors qu'il ressort des avis que le médecin inspecteur s'est borné à cocher des cases sur un imprimé ; le préfet du Nord reconnaît l'existence de difficultés sanitaires en ex Yougoslavie mais n'apporte aucun élément établissant que Mme A pourra bénéficier de soins appropriés alors qu'il appartient à l'administration de démontrer qu'il existe des possibilités de traitement approprié dans le pays d'origine ;

- les décisions de refus de titre de séjour ont été prises en violation des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car, dans l'hypothèse où l'état de santé de Mme A justifierait son maintien en France, son conjoint ne pourrait être éloigné sans qu'il soit porté atteinte au respect de sa vie familiale et que les époux A attestent de leur arrivée en France depuis 1992 et qu'ils justifient une présence depuis plus de 10 ans ; la cellule familiale que forment les époux A et leurs enfants a fait preuve d'une véritable démarche d'intégration ; leurs enfants et leurs petits-enfants sont installés en France ; ils ne pourraient se réinstaller en Serbie, pays qu'ils ont quitté depuis plus de 10 ans et où ils seraient exposés à des discriminations en ce qui concerne l'accès au logement et à la santé ;

Vu l'ordonnance du 26 juin 2009 portant report de la clôture d'instruction au 20 juillet 2009 ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 juillet 2009, présenté pour M. et Mme A ; ils concluent aux mêmes fins que leur requête et par les mêmes moyens ; ils ajoutent que le Tribunal n'a pas tenu compte du dossier médical de Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, signée par la France le même jour, ensemble le premier protocole additionnel signé le 20 mars 1952, ratifiée par la France en application de la loi n° 73-1227 du 31 décembre 1973, et publiée au Journal Officiel par décret n° 74-360 du 3 mai 1974 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public et, les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Laporte, pour M. A et Mme C épouse A ;

Considérant que M. et Mme A, ressortissants serbes appartenant à la communauté des Roms, déclarent être entrés en France irrégulièrement en 1992 ; que M. A a sollicité le bénéfice de l'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides qui lui a été refusé par décision du 21 août 1997, laquelle a été confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 12 janvier 1998 ; que Mme A a sollicité le bénéfice de l'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides qui lui a été refusé par décision du 24 mars 2003, laquelle a été confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 15 janvier 2004 ; que le 29 février 2008, les époux A ont demandé pour chacun d'entre eux un titre de séjour mention vie privée et familiale , en invoquant son état de santé en ce qui concerne Mme A et en invoquant sa qualité de parent d'un enfant français mineur résidant en France en ce qui concerne M. A ; que, par deux arrêtés en date du 19 juin 2008, le préfet du Nord a refusé de les admettre au séjour en assortissant ses décisions d'une obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays dont ils ont la nationalité comme pays de destination ; que M. et Mme A relèvent appel du jugement en date du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a refusé de faire droit à leurs demandes d'annulation de ces arrêtés ;

Sur la compétence du signataire des arrêtés attaqués :

Considérant que les arrêtés du 19 juin 2008 ont été signés pour le préfet du Nord par M. Guillaume D, secrétaire général adjoint de la préfecture du Nord, en vertu d'une délégation de signature qui lui a été donnée par arrêté du préfet du Nord en date du 16 mai 2008 publié au recueil n° 15 des actes administratifs de la préfecture du Nord ; que la publication ainsi faite suffit à établir la réalité de cette délégation de signature ; que, par suite, M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que le préfet du Nord n'aurait pas effectivement délégué sa signature à M. D au motif que l'arrêté publié ne comporterait pas la signature du préfet du Nord ; que, par ailleurs, aux termes des dispositions de l'article 1er de cet arrêté, délégation de signature est donnée à M. Guillaume D, en qualité de secrétaire général adjoint de la préfecture du Nord, à l'effet de signer tous arrêtés, (...) relevant des attributions de la direction de la réglementation et des libertés publiques et de la direction de l'administration générale et de l'environnement ; qu'ainsi, les décisions attaquées relevant des attributions de la direction de la réglementation et des libertés publiques, M. D était habilité à les signer quel que soit le jour de la semaine à la différence des matières définies par l'article 3 de l'arrêté de délégation de signature relatif aux périodes de permanence pour lesquelles sa délégation de signature était limitée aux jours non ouvrables ; qu'enfin, si l'arrêté du 16 mai 2008 portant délégation de signature a été pris sur le fondement des dispositions du décret susvisé du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements, d'une part, le Gouvernement a pu légalement énoncer lesdites dispositions dès lors qu'elles ne sont pas au nombre de celles dont la Constitution réserve l'édiction au législateur et, d'autre part, les dispositions donnant compétence au représentant de l'Etat pour délivrer des titres de séjour et prendre des mesures d'éloignement sont de nature réglementaire ; que, par suite, l'appelant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité dudit décret, en soutenant que la délégation de signature en matière d'obligation de quitter le territoire français aurait dû être autorisée par un texte de valeur législative ; qu'en dernier lieu, dans les termes où elle est rédigée, la délégation de signature dont justifiait M. D pour prendre la décision litigieuse était définie avec une précision suffisante ; qu'il résulte de tout ce qui précède, que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité des décisions de refus de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur (...) ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin inspecteur de la santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales d'émettre un avis, pris sur le fondement d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour respecter les prescriptions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les documents soumis à l'appréciation du préfet doivent comporter l'avis du médecin inspecteur de la santé publique et doivent être établis de manière telle que, lorsqu'il statue sur la demande de titre de séjour, le préfet puisse vérifier que l'avis au regard duquel il se prononce a bien été rendu par le médecin inspecteur de la santé publique compétent, qu'il précise si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces produites par Mme A que le préfet du Nord a pris l'arrêté attaqué au vu d'un avis du médecin inspecteur de la santé publique émis après consultation de documents médicaux comportant au moins un rapport rédigé par le chef de clinique du service de médecine vasculaire et hypertension artérielle du Centre hospitalier régional de Lille ; que, par suite, le moyen tiré par Mme A de ce que la décision attaquée aurait été rendue à l'issue d'une procédure irrégulière manque en fait ;

Considérant que Mme A, qui est atteinte de quatre facteurs de risque cardio-vasculaire à savoir hypertension artérielle, obésité, tabagisme et sédentarité, soutient que son état de santé nécessite un suivi médical qui ne peut être assuré dans son pays d'origine ; que si les avis du médecin inspecteur de la santé publique en date des 29 septembre 2005, 11 octobre 2007 et 27 mars 2008 font apparaître que son état de santé nécessite une prise en charge avec suivi cardiologique régulier, dont le défaut pourrait entraîner des conséquences graves, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que si M. et Mme A font valoir qu'ils vivent en France depuis 1992, ils ne l'établissent pas par la seule production de l'attestation d'un médecin d'Aulnay-sous-Bois déclarant avoir reçu Mme A en consultation entre juin 1992 et avril 2004 ; qu'ils invoquent également la présence en France d'un enfant mineur scolarisé et de nationalité française mais ne la justifie pas en se bornant à produire un certificat de scolarité et une attestation d'une assistante sociale de 2006, et relative à un enfant portant le même patronyme ; qu'enfin, si les intéressés font valoir qu'ils ont quatre enfants majeurs en France, ils ne démontrent pas être dépourvus d'attaches familiales en Serbie ; qu'ainsi, eu égard aux conditions de séjour en France de M. et Mme A, les arrêtés du 19 juin 2008 du préfet du Nord n'ont pas porté aux droits des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces mesures ont été prises et n'ont donc pas violé les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que si, d'une part, M. et Mme A font valoir que leurs petits enfants sont scolarisés et que, d'autre part, ils ont fait des démarches auprès de l'administration fiscale et de La Poste, ces éléments, à les supposer exacts, ne sont pas de nature, à eux seuls, à démontrer que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur leur situation personnelle ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ;

Considérant que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que si les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent à l'administration de délivrer une carte de séjour vie privée et familiale à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, il ressort des termes mêmes de cet article et, notamment, de ce qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour, que le législateur n'a pas entendu déroger à la règle rappelée ci-dessus, ni imposer à l'administration, saisie d'une demande d'une carte de séjour, quel qu'en soit le fondement, d'examiner d'office si l'étranger remplit les conditions prévues par cet article ; qu'il en résulte qu'un étranger ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre d'un refus opposé à une demande de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur le fondement de cet article ; qu'il ressort des pièces du dossier que les demandes de titre de séjour effectuées par M. et Mme A n'ont pas été présentées sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait méconnu leur droit à disposer d'un titre de séjour sur un tel fondement doit être écarté ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 20 novembre 2007 : (...) L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation (...) ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale résultant de l'illégalité des décisions de refus de séjour ne peut qu'être rejeté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, le moyen tiré de l'état de santé de Mme A n'est pas fondé ;

Considérant, en dernier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, il n'est pas établi que les décisions faisant obligation à M. et Mme A de quitter le territoire français auraient été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou seraient entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur leur situation personnelle ;

Sur la légalité des décisions fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que si M. et Mme A, qui ont vu leurs demandes d'asile politique rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et ces décisions confirmées par la Commission des recours des réfugiés, font valoir qu'ils ne pourraient retourner en Serbie en raison de leur simple appartenance à la communauté des Roms, ils n'apportent aucune précision à l'appui de cette affirmation ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet du Nord aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être rejeté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que l'article L. 911-1 du code de justice administrative dispose que : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. et Mme A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer, sous astreinte, à M. et Mme A un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme A au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mika A, à Mme Milena C épouse A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

''

''

''

''

N°08DA01991 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA01991
Date de la décision : 22/09/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Kimmerlin
Rapporteur ?: M. Michel Durand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : LEBAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-09-22;08da01991 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award