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17/12/2009 | FRANCE | N°09DA00131

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 5 (ter), 17 décembre 2009, 09DA00131


Vu la requête, enregistrée le 28 janvier 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SARL JARDINERIE DE L'OISON, dont le siège est zone industrielle des Grands Prés, route du Pont de l'Arche à Saint Pierre les Elbeuf (76320), par Me Farcy, avocat ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0501229-0503116 du 30 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été récl

amés pour la période du 1er octobre 2002 au 30 septembre 2003, ainsi que l...

Vu la requête, enregistrée le 28 janvier 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SARL JARDINERIE DE L'OISON, dont le siège est zone industrielle des Grands Prés, route du Pont de l'Arche à Saint Pierre les Elbeuf (76320), par Me Farcy, avocat ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0501229-0503116 du 30 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2002 au 30 septembre 2003, ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de la contribution supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001, 2002 et 2003 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que les deux entités situées à Saint Pierre les Elbeuf ont opté pour un système de porte monnaie électronique et de ticket Leclerc ; qu'il s'agit d'opérations croisées qui se compensent ; que ces pratiques créent une synergie dans la zone commerciale et sont destinées à générer du chiffre d'affaires dans les deux entreprises ; que la ventilation est impossible en raison du système informatique gérant le fonctionnement de la carte Leclerc ; que la prise en charge de la réduction émise par l'hypermarché doit être considérée comme un rabais accordé par la requérante, déductible de ses résultats ;

- qu'il s'agit en réalité de ristournes pratiquées sur des achats ; que les ristournes accordées aux clients de la jardinerie doivent être déduites de la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée emportant une réduction de la taxe sur la valeur ajoutée collectée ; que les juges du fond ont appliqué la règle comptable préconisée pour l'enregistrement des bons de réduction dans les rapports fabricants-détaillants ; que pourtant les relations entre la requérante et l'hypermarché ne sont pas comparables à celles qui existent entre un fabricant et un détaillant ; qu'elle remplissait les conditions fixées par l'article 267 II-1° du code général des impôts ;

- qu'elle est fondée à invoquer la documentation administrative 3E-2121 du 2 novembre 1996 dès lors qu'elle pratique deux taux de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'il est matériellement impossible d'affecter la ristourne à la valeur d'un article spécifique ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 avril 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; il conclut au rejet de la requête et fait valoir :

- qu'en réalité, la charge de publicité comptabilisée par la société ne correspond pas à une charge effective mais à une minoration de recettes qui doit être justifiée ; qu'en s'abstenant de demander à l'hypermarché le remboursement des bons émis par ce dernier mais utilisés à la jardinerie, cette dernière a supporté une charge relevant de l'hypermarché ; que le caractère normal d'un avantage consenti ne peut être apprécié qu'en fonction de l'intérêt propre de la société concernée ; que dans la mesure où l'origine des tickets utilisés ne peut être déterminée avec exactitude, la preuve de l'intérêt de la requérante à consentir des réductions à hauteur du montant comptabilisé n'est pas apportée ;

- que la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée ne peut être minorée que pour la part hors taxe des réductions imputées sur son chiffre d'affaires provenant de tickets émis par elle ; que toutefois, dans la mesure où l'origine des tickets utilisés ne peut être déterminée avec exactitude, la preuve de l'intérêt propre de la requérante à consentir des réductions à hauteur du montant comptabilisé n'est pas apportée ;

- que les méthodes empiriques ne sont pas applicables puisque l'entreprise connait les recettes afférentes aux différentes catégories de produits ; que la requérante connait avec précision le taux de taxe sur la valeur ajoutée applicable à chaque produit vendu ; qu'elle ne peut utilement invoquer la doctrine administrative 3E 2122 du 2 novembre 1996 ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 juillet 2009, présenté pour la SARL JARDINERIE DE L'OISON ; elle soutient en outre :

- qu'il n'existe aucune relation fabriquant-détaillant entre la requérante et l'hypermarché ; que l'administration ne peut pas appliquer les règles relatives aux bons de réduction accordés par un fabricant ; que les bons de déduction ne minorent pas l'impôt sur les sociétés dû par les structures ; que le trésor n'est pas lésé par le système mis en place ;

- qu'il est matériellement impossible d'affecter la ristourne à la valeur d'un article spécifique ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 septembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Corinne Baes Honoré, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Farcy, pour la SARL JARDINERIE DE L'OISON ;

Considérant que la SARL JARDINERIE DE L'OISON, qui exerce une activité de jardinerie, animalerie et toilettage sous l'enseigne Leclerc , est détenue à 100 % par la SAS Elbeuf Distribution, exploitant l'hypermarché Leclerc situé sur le même site à Saint Pierre les Elbeuf ; qu'au cours de l'année 2004, la SARL JARDINERIE DE L'OISON a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2000 au 30 septembre 2003 ; que la requérante demande à la Cour d'annuler le jugement du 30 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2002 au 30 septembre 2003, ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de la contribution supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001, 2002 et 2003 ;

Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions :

S'agissant de l'impôt sur les sociétés :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature ... ; que si en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant que la société requérante et l'hypermarché Leclerc ont offert à leurs clientèles un système de carte Leclerc permettant de cumuler les crédits obtenus par les clients dans les deux magasins, ainsi que le ticket Leclerc , remis aux clients lors de l'achat de produits et servant de moyen de paiement dans ces deux mêmes magasins ; que la requérante a déduit au titre des frais de publicité, les sommes acquises par les clients au moyen des deux systèmes précédemment décrits et prises en compte au moment du règlement ; que toutefois, dès lors que le système informatique ne permettait pas de savoir si les tickets utilisés à la jardinerie et par suite comptabilisés par cette dernière, avaient été émis par l'une ou l'autre des sociétés, l'administration a remis en cause la déduction des charges en cause en raison de l'absence de justifications suffisantes et de l'absence d'intérêt pour la requérante ;

Considérant que la SARL JARDINERIE DE L'OISON soutient que le dispositif mis en place fidélise l'ensemble de la clientèle des deux sociétés appartenant au même groupe ; que toutefois, lorsqu'elle déduit en charge une somme correspondant à un ticket de réduction émis par l'hypermarché, l'intérêt propre à consentir cette réduction n'est pas établi par la requérante puisque le bon a été émis par une autre société ; que si la SARL JARDINERIE DE L'OISON prétend que ces opérations se compensent avec celles qui consistent, pour elle, à délivrer des tickets qui seront utilisés dans l'hypermarché, il n'est nullement établi qu'il y aurait un strict équilibre entre ces opérations croisées ; qu'enfin, la circonstance selon laquelle il serait techniquement impossible de ventiler les réductions accordées selon l'origine de l'émetteur, est sans incidence sur le bien-fondé du redressement ; qu'est également inopérant, le moyen tiré de ce que le Trésor ne serait pas lésé par le dispositif en litige au motif qu'un même bon de réduction générait une taxe sur la valeur ajoutée collectée au niveau des deux structures ; que par suite, c'est à bon droit que les sommes correspondant aux charges de publicité ont été réintégrées aux résultats des exercices vérifiés, comme ne présentant pas le caractère de charges déductibles au sens des dispositions précitées de l'article 39-1 1° du code général des impôts ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :

Sur le terrain de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. ; qu'aux termes de l'article 266 du code général des impôts : 1. La base d'imposition est constituée : a) pour les livraisons de biens et les prestations de service, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de la livraison ou de la prestation ; qu'aux termes de l'article 267 du même code : II Ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition : 1° Les escomptes de caisse, remises, rabais, ristournes et autres réductions de prix consenties directement aux clients ;

Considérant que le vérificateur a procédé à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée opérée par la requérante au titre des dépenses de publicité tickets Leclerc et porte-monnaie électronique au taux de 12,90 %, en raison de l'absence de justification suffisante quant à la réalité et à l'engagement de la dépense dans l'intérêt de la société ; que la SARL JARDINERIE DE L'OISON soutient que les réductions accordées aux clients doivent être analysées comme des ristournes, qui par suite, doivent être déduites de la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant que seuls les tickets de réduction émis par la jardinerie, et non ceux émis par l'hypermarché, peuvent être regardés comme constituant une remise de prix au sens des dispositions précitées du II de l'article 267 du code général des impôts ; que la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée ne peut être minorée que pour la part de réductions imputées sur son chiffre d'affaires, provenant des tickets émis par elle ; que toutefois, dès lors que le système informatique ne permet pas de ventiler les remises accordées selon leur origine, la requérante ne justifie pas du montant des remises ouvrant droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article 267 précité ;

Sur le terrain de la doctrine :

Considérant que pour justifier le taux de taxe sur la valeur ajoutée de 12,9 % appliqué, la requérante invoque les dispositions de la doctrine D. adm. 3 E-212 n° 1 à 3, 2 novembre 1996 ; que ce moyen est en tout état de cause sans objet dès lors que l'administration a procédé au rappel correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SARL JARDINERIE DE L'OISON la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL JARDINERIE DE L'OISON est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL JARDINERIE DE L'OISON et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°09DA00131


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 5 (ter)
Numéro d'arrêt : 09DA00131
Date de la décision : 17/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Schilte
Rapporteur ?: Mme Corinne Baes Honoré
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SELARL GUY FARCY-OLIVIER HORRIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-12-17;09da00131 ?
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