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12/01/2010 | FRANCE | N°09DA01197

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 12 janvier 2010, 09DA01197


Vu la requête, enregistrée le 7 août 2009 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée par la production de l'original le 12 août 2009, présentée pour M. Boualem A, demeurant ..., par Me Thiéffry ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900021 du 2 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2008 du préfet du Nord qui lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de de

stination, à ce qu'il soit enjoint audit préfet de lui délivrer un titre de sé...

Vu la requête, enregistrée le 7 août 2009 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée par la production de l'original le 12 août 2009, présentée pour M. Boualem A, demeurant ..., par Me Thiéffry ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900021 du 2 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2008 du préfet du Nord qui lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, à ce qu'il soit enjoint audit préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours suivant la notification du jugement ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à la condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande de titre de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à venir ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 344,16 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que, concernant le refus de titre de séjour, le préfet du Nord a porté atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale, a commis une erreur manifeste d'appréciation susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle, a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles 6-5° et 6-7° de l'accord franco-algérien ; qu'il démontre une volonté réelle d'intégration sociale et professionnelle depuis son arrivée ; qu'il a respecté les visas de court séjour qui lui ont été accordés pour rendre visite à sa famille installée en France ; qu'il y a donc séjourné à de nombreuses reprises ; qu'il maîtrise la langue française ; qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche en boulangerie, secteur en pénurie de main-d'oeuvre ; qu'il a quitté son pays dans le cadre d'une rupture conjugale douloureuse en raison du harcèlement de sa belle-famille ; qu'il est désormais divorcé et parvient à se reconstruire grâce au soutien de sa famille qui réside en France, à savoir sa soeur, ses oncles et tantes ainsi que sa cousine ; qu'il doit assumer le soutien matériel de ses parents, âgés et malades, de ses trois enfants et d'une partie de ses frères et soeurs vivant en Algérie ; que, dans ce contexte, aucune vie privée et familiale n'est possible dans son pays d'origine ; qu'il est, par ailleurs, atteint de douleurs thoraciques ; qu'il souffre d'affections cardiaques et rhumatologiques et que ni le suivi dont il bénéficie, ni à terme, les soins nécessaires, ne pourront être dispensés en Algérie ; qu'il bénéficie d'une prise en charge à 100 % pour affection de longue durée par l'assurance maladie ; que la décision d'obligation de quitter le territoire manque de base légale ; que les dispositions des articles L. 511-4, R. 511-1 et R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont applicables aux algériens ; que le préfet aurait donc dû recueillir l'avis du médecin inspecteur de la santé publique avant de prendre sa décision l'obligeant à quitter le territoire, compte tenu de la demande de maintien au séjour formulée en ce sens ; qu'il a informé le préfet de son état de santé par différents certificats médicaux ; qu'il réside habituellement en France et peut se prévaloir des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il appartient à l'administration et non à lui d'apporter la preuve qu'il peut bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ; que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a commis une erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le pays de destination manque de base légale ; que, concernant les frais irrépétibles, la somme allouée à son conseil doit correspondre à l'ensemble de la défense et non se limiter à l'indemnisation forfaitaire prévue dans le cadre de l'aide juridictionnelle ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du 2 juin 2009 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. A ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 septembre 2009, présenté par le préfet du Nord ; il conclut au rejet de la requête aux motifs que, concernant le refus de séjour, le requérant ne produit aucune pièce de nature à établir la réalité de son intégration dans la société française et le fait qu'il ait noué des relations sociales, amicales et professionnelles en France ; qu'il a la quasi-totalité de ses attaches familiales en Algérie ; qu'il est entré en France à l'âge de 44 ans sous couvert d'un visa de court séjour et qu'il avait séjourné en France 4 mois et 8 jours au moment de la décision en litige ; qu'il n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien ; que, dès lors, l'obligation de quitter le territoire n'est pas dépourvue de base légale ; que le requérant n'a pas sollicité son admission au séjour en invoquant son état de santé et ne peut se prévaloir des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'établit pas que le défaut de prise en charge médicale pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il ne conteste pas être de nationalité algérienne ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, de nationalité algérienne, né le 8 mai 1964 à Alger, est entré en France le 20 juillet 2008 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de circulation Schengen , valable 30 jours, portant la mention non professionnel ; qu'il a sollicité le 20 octobre 2008 la délivrance d'un certificat de résidence ; que, par arrêté du 28 novembre 2008 du préfet du Nord, M. A a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire et fixant le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il est légalement admissible comme pays de destination ; que l'intéressé relève appel du jugement du 2 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à l'annulation dudit arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ; que M. A ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article précité dès lors qu'il n'a pas formé une demande de titre de séjour sur leur fondement ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance desdites stipulations, doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5° Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est entré en France le 20 juillet 2008 à l'âge de 44 ans muni d'un visa de 30 jours, qu'il n'est pas isolé en Algérie où vivent ses trois enfants ainsi que ses parents, huit frères et cinq soeurs ; que, nonobstant le fait qu'il s'exprime en français, que plusieurs membres de sa famille résident en France et qu'il dispose d'une promesse d'embauche, M. A n'est pas fondé à soutenir, compte tenu de ces circonstances et de la durée du séjour, que l'arrêté attaqué porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et aurait ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ces circonstances ne sont pas de nature à faire regarder ladite décision comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la situation personnelle de M. A ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que, d'une part, M. A n'établit pas avoir porté son état de santé à la connaissance du préfet et, d'autre part, il ne peut être regardé comme résidant habituellement en France ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait dû consulter le médecin inspecteur de la santé publique avant d'assortir sa décision de refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement de la décision de refus de séjour serait dépourvue de base légale, méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la demande d'annulation de cette décision doit être écartée ;

En ce qui concerne le pays de destination :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination par la voie de l'exception d'illégalité de la décision de refus de séjour ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2008 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le rejet des conclusions à fin d'annulation entraîne, par voie de conséquence, celui des conclusions à fin d'injonction ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A demande au titre de ces dispositions ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. A doit être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Boualem A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 09DA01197
Date de la décision : 12/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Kimmerlin
Rapporteur ?: M. Michel (AC) Durand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : AVOCATS DU 37

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-01-12;09da01197 ?
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