La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/05/2010 | FRANCE | N°08DA00470

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 25 mai 2010, 08DA00470


Vu la requête, enregistrée le 14 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE CAMBRAI, représentée par son maire en exercice, par Me Delomez ; la COMMUNE DE CAMBRAI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0103742-0200970 du 8 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à condamner solidairement la SA AINF et la Compagnie Axa Global Risks à lui payer une somme d'un montant de 1 607 862,38 francs (245 117,04 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2001 en rép

aration du préjudice financier résultant du changement de consistance...

Vu la requête, enregistrée le 14 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE CAMBRAI, représentée par son maire en exercice, par Me Delomez ; la COMMUNE DE CAMBRAI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0103742-0200970 du 8 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à condamner solidairement la SA AINF et la Compagnie Axa Global Risks à lui payer une somme d'un montant de 1 607 862,38 francs (245 117,04 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2001 en réparation du préjudice financier résultant du changement de consistance des travaux et à l'indemniser de tout autre frais en relation avec le retard du chantier dont la société est responsable ainsi qu'une somme de 15 000 francs (2 286,74 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la SA AINF à payer à la COMMUNE DE CAMBRAI une somme de 172 162,45 euros hors taxes en réparation du préjudice correspondant au montant des subventions dont elle n'a pu bénéficier au titre du chantier de réhabilitation du théâtre avec intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2001 ainsi que la TVA applicable au jour du règlement ainsi qu'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La COMMUNE DE CAMBRAI soutient que la maîtrise d'ouvrage du chantier de réhabilitation du théâtre a été déléguée à la société SCIC associée au bureau de contrôle AINF ; que celui-ci a validé la technique proposée par le bureau d'études OTH pour la réalisation des fondations dans un rapport en date du 24 janvier 2000 ; que, toutefois, dans un avis du 5 mars 2001, la SA AINF a remis en cause cette technique de fondations en faisant valoir un tassement de 6 centimètres au lieu des 3 centimètres initialement pris en compte ; que du fait de risques d'effondrement avancés par la SA AINF, la commune de Cambrai a suivi les préconisations de l'expert ; que le revirement soudain de l'expert technique traduit une erreur d'appréciation dans la phase de conception qui est à l'origine d'un préjudice de 172 162,45 euros du fait que le surcoût n'a pas pu être pris en compte dans le calcul des subventions ; que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les subventions étaient allouées sur des montant plafonds et non sur la base d'un pourcentage du montant des travaux ; que ce mode de calcul résulte des dispositions du décret n° 99-1060 du 16 décembre 1999 ; que l'AINF a disposé des documents et études lui permettant d'accomplir sa mission et malgré l'obligation de moyen qui lui incombait en vertu de l'article 5 de la convention de contrôle technique, les erreurs grossières commises en phase de conception puis corrigées en phase de construction constituent des fautes qui engagent sa responsabilité ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 18 juin 2008 et régularisé par la production de l'original le 23 juin 2008, présenté pour la SA Socotec Industries venant aux droits de l'AINF, dont le siège est Les Quadrants à Saint Quentin en Yvelines cedex (78182) et pour la Compagnie Axa Courtage Iard venant aux droits de la Compagnie Axa Global Risks, dont le siège est 26 rue Drouot à Paris (75009), par Me Aberlen ; elles concluent au rejet de la requête et à la condamnation de la COMMUNE DE CAMBRAI à payer une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par les motifs que la COMMUNE DE CAMBRAI ne justifie pas d'un intérêt à agir résultant d'un préjudice indemnisable évalué en fonction des subventions hypothétiques de 172 162,45 euros qu'elle aurait pu percevoir à raison de travaux supplémentaires par rapport au projet initial ; que ce n'est qu'avec la production de la note de calcul numéro 3 que l'AINF a été en mesure d'apprécier l'erreur technique présidant à la construction de la poutre sur laquelle devaient être suspendus les planchers des gradins ainsi que les planchers existants ; qu'elle a ensuite proposé une solution permettant de résoudre le problème sans entraîner l'arrêt temporaire du chantier et a souligné que la solution alternative proposée par l'entreprise Bernard ne paraissait pas être la solution la plus économique ; que les réserves émises par l'organisme concernaient les conditions dans lesquelles la poutre de 19,30 mètres allait être reliée à l'ensemble de l'ouvrage et n'avaient pu être émises au moment de l'examen des plans généraux qui ne faisaient pas apparaître les détails d'exécution tels que les reports de charges ; que cette situation résultait d'une erreur de conception générale et d'une erreur de conception d'exécution dont le constat n'incombait pas à l'organisme en vertu de sa mission de contrôle limitée à la prévention des aléas techniques résultant du non-respect des dispositions réglementaires ou normatives ; que l'AINF n'a commis aucune erreur grossière lors de l'examen du dossier de conception dans la mesure où le principe de fondation adopté n'était pas incohérent pas plus que ne l'était la mise en place d'une poutre de 19,30 mètres de portée supportant le plancher des gradins et le plancher existant ; que l'organisme n'a donc commis aucune faute dans l'exécution de sa mission de contrôle ; que les conclusions dirigées contre Axa France assureur de l'organisme ont été portées devant une juridiction incompétente ; que l'AINF demande à être garantie des condamnations éventuellement prononcées contre elle par le maître d'oeuvre M. A, la société OTH, l'entreprise Bernard et la SCIC Développement ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 décembre 2008, présenté pour la SARL Iosis Nord, anciennement dénommée OTH Nord, dont le siège est 33 avenue de Flandres à Marcq en Baroeul cedex (59705), par Me Billemont ; elle conclut au rejet de la requête de la commune et de l'appel en garantie dirigé contre elle par l'AINF et à la condamnation de cette dernière à lui payer 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la COMMUNE DE CAMBRAI ne justifiait pas d'un préjudice lié au montant de la subvention versée par l'Etat ; qu'il en va de même en ce qui concerne les subventions versées par la Région Nord/Pas-de-Calais et par le FEDER ; que la société Iosis Nord n'est pas l'auteur de la note de calcul d'exécution ; qu'elle n'est pas concernée par les désaccords qui ont opposé tant les ingénieurs de l'AINF entre eux que ces derniers au BET Sigier ; qu'elle demande à être mise hors de cause ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 septembre 2009, présenté pour la COMMUNE DE CAMBRAI ; elle conclut aux mêmes fins que la requête et par les mêmes moyens et fait valoir en outre qu'elle est recevable à agir dès lors qu'elle justifie d'un intérêt à agir ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 11 mai 2010, présenté pour M. Vincent A, demeurant ..., par Me Broglin ; il demande la réouverture de l'instruction en conséquence de sa constitution d'avocat et joint le mémoire produit par lui en première instance par lequel il conclut au rejet de l'appel en garantie présenté par la SA AINF ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 92-1186 du 30 octobre 1992 relatif au cahier des clauses techniques générales applicable aux marchés de contrôle technique ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Delomez, pour la COMMUNE DE CAMBRAI, Me Silva, pour la société Socotec et la compagnie Axa et Me Laugier, pour la SARL Iosis Nord ;

Considérant que, pour réhabiliter son théâtre municipal la COMMUNE DE CAMBRAI, maître d'ouvrage assisté de la SCIC Développement en qualité de maître d'ouvrage délégué, a confié la maîtrise d'oeuvre de l'opération au groupement constitué en particulier de M. Vincent A architecte et de la société Oth Nord bureau d'études techniques ; que la mission de contrôleur technique a été confiée à la SA AINF par un marché conclu le 23 juin 1999 ; que la COMMUNE DE CAMBRAI relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lille du 8 janvier 2008 rejetant sa demande tendant à la condamnation de la société Socotec venant aux droits de la SA AINF à l'indemniser du préjudice résultant de la présentation à l'appui de sa demande de subventions, d'un budget de travaux sous-évalué ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Socotec :

Considérant qu'à l'appui de sa demande de condamnation de la société AINF aux droits de laquelle vient la société Socotec, la COMMUNE DE CAMBRAI fait valoir que l'erreur commise par la société AINF a engendré un manque à gagner sur le montant des subventions qui lui étaient dues au titre de la réhabilitation du théâtre municipal ; qu'ainsi, elle justifie d'un intérêt à agir suffisant à l'appui des conclusions à fin d'indemnisation qu'elle présente à l'encontre de la société AINF ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par la société Socotec tirée de ce que la COMMUNE DE CAMBRAI est dépourvue d'intérêt à agir n'est pas fondée et ne peut qu'être écartée ;

Sur la responsabilité de la société AINF :

Considérant que la COMMUNE DE CAMBRAI reproche au contrôleur technique de la SA AINF d'avoir émis le 24 janvier 2000 au stade de l'examen des cahiers des clauses techniques particulières et des pièces graphiques, un avis favorable et sans réserve sur le projet alors qu'il a ensuite relevé en mars 2001 une faiblesse des fondations et des supports de la poutre en béton soutenant les gradins et le plancher, susceptible d'affecter gravement la solidité de l'édifice ; que cette situation a nécessité une reprise des fondations et des supports à l'endroit de cette poutre dont le coût s'est élevé à 239 584,73 euros ; que la COMMUNE DE CAMBRAI soutient qu'elle a, de ce fait, perdu une chance d'obtenir une subvention correspondant au coût réel du chantier, la SA AINF n'ayant pas détecté cette erreur de conception au stade de l'examen initial du dossier ; qu'elle demande en conséquence la condamnation de cet organisme de contrôle à lui payer une somme de 172 162,45 euros correspondant aux subventions qui, selon elle, lui auraient été accordées par l'Etat, la Région Nord/Pas-de-Calais et le FEDER si le surcoût dont s'agit avait été intégré dans le prix de base de l'opération ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la COMMUNE DE CAMBRAI a confié la mission de contrôle technique de l'opération de rénovation du théâtre municipal et de ses annexes à la SA AINF par convention du 23 juin 1999 qui incluait notamment les missions L et LE portant sur la solidité des ouvrages et des éléments indissociables et sur la solidité des éléments existants ; qu'en vertu des dispositions de l'article 10 du décret susvisé du 30 octobre 1992, la mission du contrôleur technique comporte cinq phases dont la première est constituée par le contrôle des éléments de conception et la seconde par celui des documents d'exécution ; que suivant les dispositions de l'article R. 111-40 du code de la construction et de l'habitation, lors de la phase de conception le contrôleur procède à l'examen critique de l'ensemble des dispositions techniques du projet et durant l'exécution des travaux, il s'assure de l'accomplissement des vérifications techniques incombant aux constructeurs ; que la SA AINF a émis le 24 janvier 2000 dans le rapport initial établi, au titre de la première phase, un avis favorable s'agissant des fondations de l'ouvrage ; que cet avis mentionne que lesdites fondations sont conformes aux normes NFP 06-001 et NPF 06-004 ; qu'ultérieurement et au vu des plans d'exécution, l'organisme de contrôle a émis en mars 2001 durant la deuxième phase de sa mission, un avis défavorable à la construction d'une poutre de 19,30 mètres de long destinée à supporter les gradins et la scène au motif que les supports et les fondations prévus ne pourraient supporter cette poutre sans entraîner des dommages à l'édifice ; qu'il résulte également de l'instruction, d'une part, que l'avis favorable du contrôleur a été émis à l'issue de la première phase du contrôle au vu des documents généraux du marché et notamment des plans mentionnés dans le rapport initial alors que les réserves ont été émises au vu de la note de calcul n° 3 du BET Sigier dans le cadre de la phase d'examen des documents d'exécution et, d'autre part, que les contre indications relevées par le contrôleur lors de cette phase de sa mission résultent de calculs extrêmement précis en considération de la répartition spécifique des masses sur une partie précise de la construction et de la flèche susceptible d'affecter la poutre de 19,30 mètres de longueur eu égard à sa hauteur de section inférieure à la moitié de sa portée ; que ces constats ne pouvaient être opérés au vu des seuls documents généraux durant la première phase de la mission de contrôle ; que par suite, la COMMUNE DE CAMBRAI n'est pas fondée à soutenir qu'en ne relevant pas à l'issue de la première phase de sa mission les contre indications formulées dans le cadre de la deuxième phase, la SA AINF aurait commis une faute dans l'exécution de sa mission générale de contrôle ; qu'ainsi la responsabilité de l'organisme de contrôle n'est pas susceptible d'être engagée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE CAMBRAI n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la SA AINF ;

Sur les appels en garantie par la société Socotec, de la société BET Oth devenue Iosis Nord, de M. Vincent A, de l'entreprise Bernard Construction et de la SCIC Développement :

Considérant qu'en l'absence de condamnation prononcée contre l'AINF SA, celle-ci n'est pas fondée à appeler en garantie la société Iosis Nord, M.Vincent BROSSY, l'entreprise Bernard Construction et la SCIC Développement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la condamnation de la COMMUNE DE CAMBRAI à payer des frais non compris dans les dépens à la société AXA Global Risks SA :

Considérant que la COMMUNE DE CAMBRAI dont les conclusions dirigées contre la société Axa Global Risks SA ont été rejetées, était la partie perdante ; qu'ainsi c'est à bon droit que le tribunal administratif a mis à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Socotec Industries, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamnée à verser à la COMMUNE DE CAMBRAI la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE CAMBRAI une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Socotec Industries sur le fondement des mêmes dispositions ;

Considérant, enfin, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce eu égard au rejet de l'appel en garantie formé contre la société Bet Oth devenue Iosis Nord, de mettre à la charge de la société Socotec une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens demandés par la société Iosis Nord ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE CAMBRAI est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE CAMBRAI versera à la société Socotec une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La société Socotec versera à la société Iosis Nord une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société Socotec est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE CAMBRAI, à la SA Socotec venant aux droits de l'AINF, à la Compagnie Axa Courtage Iard venant aux droits de la Compagnie Axa Global Risks, à la société SCIC Développement, à M. Vincent A, à la SARL Iosis Nord anciennement dénommée Oth Nord et à la société Bernard Construction.

''

''

''

''

2

N°08DA00470


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA00470
Date de la décision : 25/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Kimmerlin
Rapporteur ?: M. Michel Durand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : ROBIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-05-25;08da00470 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award