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27/05/2010 | FRANCE | N°08DA01084

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 27 mai 2010, 08DA01084


Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 11 et 21 juillet 2008 et 25 août de la même année au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentés pour Mme Noëlle A, demeurant ..., par Me Foutry, avocat ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0500016-0501541 du 7 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté, d'une part, sa demande d'annulation des décisions du ministre de la défense prononçant, le 8 septembre 2004, son licenciement en fin de stage et rejetant, le 21 janvier 2005, son recours gracieux con

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Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 11 et 21 juillet 2008 et 25 août de la même année au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentés pour Mme Noëlle A, demeurant ..., par Me Foutry, avocat ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0500016-0501541 du 7 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté, d'une part, sa demande d'annulation des décisions du ministre de la défense prononçant, le 8 septembre 2004, son licenciement en fin de stage et rejetant, le 21 janvier 2005, son recours gracieux contre cette décision et, d'autre part, ses conclusions visant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 100 000 euros en réparation des préjudices que lui auraient causé ces décisions ;

2°) d'annuler les décisions du ministre de la défense des 8 septembre 2004 et 21 janvier 2005 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 100 000 euros en réparation des préjudices financiers et moraux en résultant ;

3°) de condamner ce dernier à verser à son conseil la somme de 2 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Elle soutient que si la décision prononçant son licenciement a été adoptée après consultation de la commission administrative paritaire locale, le 4 août 2004, elle n'a jamais eu connaissance de cet avis, au demeurant partial dès lors que son supérieur hiérarchique était présent lors de la réunion de la commission ; qu'en outre, elle n'a pas pu consulter son dossier préalablement au prononcé de son licenciement alors même que cette décision, si elle ne constitue pas une sanction, a été prise en considération de sa personne ; qu'ainsi la décision du 8 septembre 2004 est entachée de vices de procédure ; qu'elle est de plus, en l'absence de motivation, entachée d'un vice de forme ; qu'en ce qui concerne la légalité interne de la décision initiale attaquée, l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, des griefs retenus à son encontre ; que ses qualités professionnelles et son sens du service public sont attestés par les soutiens exprimés tant dans une pétition que dans les attestations de ces collègues ; que d'ailleurs, l'administration ne saurait lui reprocher des insuffisances qu'elle a contribué à créer en ne lui fournissant pas de formation ; qu'ainsi, son licenciement est entaché d'erreurs de faits et empreint d'une erreur manifeste d'appréciation de ses qualités professionnelles ; qu'elle n'a d'ailleurs pas bénéficié d'un changement d'affectation lors de sa seconde période de stage dès lors qu'elle a conservé le même supérieur hiérarchique ; qu'il résulte de ce qui précède que l'administration a voulu l'évincer et a ainsi entaché sa décision de licenciement d'un détournement de pouvoir ; que n'ayant que peu de chance de retrouver un emploi et compte tenu de son âge, elle est fondée à solliciter l'allocation d'une somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai, en date du 1er septembre 2008, admettant Mme A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la lettre du 26 mars 2009 par laquelle le président de la troisième chambre a, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, mis en demeure le ministre de la défense de produire dans un délai d'un mois ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 21 avril 2010 et régularisé par production de l'original le 30 avril de la même année, présenté par le ministre de la défense qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que les conclusions indemnitaires de Mme A qui a omis de présenter une demande préalable sont à titre principal irrecevables et, subsidiairement, non fondées ; que l'avis de la commission administrative paritaire locale, qui n'est pas entaché de partialité, n'avait pas à être communiqué à la requérante ; qu'il n'avait pas, avant de se prononcer, à communiquer à Mme A son dossier, ni d'ailleurs à motiver la décision refusant sa titularisation ; que les appréciations portées sur la valeur professionnelle de la requérante établissent ses difficultés à assimiler des connaissances fondamentales, son comportement inadapté à son environnement professionnel ainsi que sa façon mécanique d'exécuter les tâches qui ont pu lui être confiées ; que ce dernier comportement, a conduit l'intéressée, lors de son renouvellement de stage, à commettre des erreurs qui se sont avérées préjudiciables pour le service ; que contrairement à ce qu'affirme Mme A, elle a bénéficié d'une formation à ses fonctions d'adjoint administration ; que les attestations de ses collègues sont dépourvues de valeur probante dans le cadre du présent litige ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 mai 2010, présenté pour Mme A qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 91-647 modifiée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 modifié du 19 décembre 1991 en portant application ;

Vu le décret n° 90-713 du 1er août 1990 relatif aux dispositions statutaires communes applicables aux corps d'adjoints administratifs des administrations de l'Etat ;

Vu le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Xavier Larue, conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Foutry, pour Mme A ;

Considérant que Mme Noëlle A, lauréate du concours externe d'adjoints administratifs du ministère de la défense ouvert le 12 mars 2002, a été nommée fonctionnaire stagiaire au Centre territorial d'administration et de comptabilité de Lille le 10 février 2003 ; qu'à l'issue de son stage où elle a d'abord exercé des fonctions de traitant ressources humaines avant d'être affectée, le 1er septembre 2003, au bureau du courrier du centre, elle a été autorisée, après avis de la commission administrative paritaire locale compétente, en date du 9 février 2004, à accomplir, à compter du 11 du même mois, une seconde période de stage de six mois ; qu'elle relève appel du jugement nos 0500016-0501541 du 7 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté, d'une part, sa demande d'annulation des décisions du ministre de la défense prononçant, le 8 septembre 2004, son licenciement en fin de stage et rejetant, le 21 janvier 2005, son recours gracieux contre cette décision et, d'autre part, ses conclusions visant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 100 000 euros en réparation des préjudices que lui auraient causé ces décisions ;

Sur la légalité de la décision du 8 septembre 2004 :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant qu'un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire ; qu'il en résulte qu'alors même que la décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne, cette décision, lorsqu'elle n'a pas un caractère disciplinaire, n'est ni au nombre des décisions qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier, ni au nombre de celles qui doivent être motivées en application de la loi du 11 juillet 1979, et n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements ; qu'il suit de là que Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée du 8 septembre 2004, dont elle admet qu'elle ne saurait être qualifiée de sanction, serait insuffisamment motivée ou entachée d'un vice de procédure à raison du non-respect, préalablement à son édiction, de la formalité de communication de son dossier ; qu'en outre, aucun texte législatif ou règlementaire n'impose ni que la prolongation du stage d'un fonctionnaire stagiaire s'effectue sous l'autorité d'un nouveau supérieur hiérarchique, ni qu'avant le prononcé de la décision prononçant son licenciement, lui soit communiqué l'avis requis de la commission administrative paritaire locale compétente ; qu'enfin, si Mme A doit être regardée comme ayant entendu se prévaloir de l'irrégularité de cet avis au motif qu'il serait entaché de partialité, elle ne l'établit pas ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision du 8 septembre 2004 est entachée d'une illégalité externe ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de son rapport de fin de stage du 7 janvier 2004 ainsi que de sa fiche de notation pour l'année 2003 qui ne comporte aucune observation formulée par l'intéressée, que, durant les six mois où elle a exercé comme traitant ressources humaines , Mme A a notamment eu des difficultés à assimiler les connaissances de base nécessaires à ses fonctions et supportait mal d'être interrompue dans son travail par les personnels en quête de renseignements ; qu'elle admet d'ailleurs ces circonstances dans les commentaires qu'elle a formulés, pour les besoins de la cause, sur le rapport de stage du 7 janvier 2004 ; qu'à cet égard, ni les attestations de 7 de ces 207 collègues du personnel civil du centre qui font état de sa disponibilité, de sa diligence et, plus rarement, de sa rigueur dans ses fonctions aux ressources humaines, ni la pétition signée par 143 de ses collègues, qui, sans attester des compétences professionnelles de Mme A, se borne à souligner que cette dernière n'aurait pas bénéficié d'une chance réelle d'intégration en l'absence de changement de hiérarchie lors de la prolongation de son stage, ne sont de nature à apporter la preuve contraire ; qu'il ressort également des pièces du dossier et notamment des rapports de fin de stage du 7 janvier et 24 juin 2004 ainsi que de ses fiches de notation pour les années 2003 et 2004, que Mme A a fait preuve d'un manque d'investissement en se livrant à une exécution mécanique des tâches qui lui étaient confiées au bureau courrier du centre territorial d'administration et de comptabilité ; qu'il en est résulté des erreurs dans la datation de courriers au départ ; qu'en outre, elle a eu des difficultés à s'intégrer au sein du bureau et acceptait mal les remarques de sa chef d'atelier ; que les commentaires de l'intéressée sur son second rapport de stage, où elle reconnait avoir suivi un stage d'adaptation aux fonctions d'adjoint administratif entre le 24 novembre et le 5 décembre 2003, confirment, d'une part, son manque d'investissement générateur d'erreurs, puisqu'elle laisse entendre que, les jours où elle n'effectuait pas elle-même la mise à jour de la machine à dater, elle ne procédait pas à la vérification des dates qu'elle apposait sur les courriers, et, d'autre part, ses problèmes d'intégration au sein du bureau du courrier ainsi que son refus d'accepter les remarques de sa chef d'atelier ; qu'il ressort en outre des écrits de la requérante, qu'elle admet avoir rencontré des difficultés dans ses nouvelles fonctions et ce, alors même que, comme l'indique son notateur, il aurait été difficile de lui trouver des tâches plus simples au sein du centre territorial d'administration et de comptabilité ; que Mme A n'administre pas la preuve contraire en se bornant à produire les témoignages de deux de ses collègues n'appartenant pas au même bureau, qui attestent de la qualité de son travail au service courrier, et la pétition déjà mentionnée ; qu'il suit de là que Mme A ne peut pas soutenir que le ministre de la défense se serait fondé sur des faits matériellement inexacts ou qu'il aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation portée sur ses aptitudes professionnelles ;

Considérant, en second lieu, que Mme A se borne à soutenir que la décision attaquée avait pour seul but de l'évincer du service alors même qu'il ressort des pièces du dossier qu'il aurait été loisible au ministre de prononcer son licenciement sans lui permettre de prolonger son stage ; que le détournement de pouvoir allégué n'est ainsi pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est fondée ni à solliciter l'annulation de la décision du 8 septembre 2004, ni à demander, par voie de conséquence, l'annulation de la décision du 25 janvier 2005 ayant rejeté son recours gracieux contre cette décision ; qu'en l'absence d'illégalité de nature à engager la responsabilité de l'Etat, ses conclusions indemnitaires ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ; qu'il suit de là que Mme A n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande d'annulation des décisions du ministre de la défense des 8 septembre 2004 et 21 janvier 2005 ainsi que ses conclusions visant à mettre à la charge de l'Etat une somme de 100 000 euros en réparation des préjudices que lui auraient causé ces décisions ;

Sur l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; que l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 dispose que : (...) En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Si le juge fait droit à sa demande, l'avocat dispose d'un délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée pour recouvrer la somme qui lui a été allouée. S'il recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. Si, à l'issue du délai de douze mois mentionné au troisième alinéa, l'avocat n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, il est réputé avoir renoncé à celle-ci (...) ;

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme sollicitée par le conseil de Mme A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Noëlle A ainsi qu'au ministre de la défense.

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N°08DA01084


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA01084
Date de la décision : 27/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: M. Xavier Larue
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : FOUTRY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-05-27;08da01084 ?
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