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10/06/2010 | FRANCE | N°09DA01675

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 10 juin 2010, 09DA01675


Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Philippe A, demeurant ..., par Me Denecker, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0803200-0803201 du 3 novembre 2009 par lequel le vice-président désigné du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales des 18 mars 2005 et 10 juin 2006 lui retirant respectivement un et trois points de son permis de conduire et

l'a condamné à payer une amende de 500 euros au titre des dispositio...

Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Philippe A, demeurant ..., par Me Denecker, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0803200-0803201 du 3 novembre 2009 par lequel le vice-président désigné du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales des 18 mars 2005 et 10 juin 2006 lui retirant respectivement un et trois points de son permis de conduire et l'a condamné à payer une amende de 500 euros au titre des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler lesdites décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre mer et des collectivités territoriales ;

3°) d'enjoindre audit ministre de réaffecter quatre points à son permis de conduire en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'il n'a pas réglé les amendes forfaitaires, ni fait l'objet de procédures d'exécution à la suite des infractions litigieuses ; que le ministre ne justifie pas du paiement des amendes, ni de l'émission de titres exécutoires et que la réalité des infractions n'est pas établie, en application de l'article L. 223-1 du code de la route ; qu'il a été destinataire d'une information erronée, les formulaires utilisés par l'administration mentionnant que le contrevenant ne peut obtenir copie des informations relatives à son permis de conduire en méconnaissance de l'article L. 225-3 du code de la route et de l'article 4 de la loi du 17 juillet 1978 ; que, par ailleurs, lesdits formulaires ne citent pas les articles L. 225-1 à L. 225-9 du code de la route et ne précisent pas que le traitement automatisé porte également sur les reconstitutions de points ; que la procédure de quittance de paiement appliquée lors de l'infraction relevée le 18 mars 2005 et ayant conduit au retrait d'un point est irrégulière dès lors qu'il n'a été destinataire de l'information exigée par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route qu'après avoir payé l'amende afférente à l'infraction précitée au moment de la délivrance de la quittance de paiement ; que s'agissant de la décision de retrait de trois points relative à l'infraction survenue le 10 juin 2006, il n'a jamais été invité à signer le procès-verbal versé aux débats par le ministre, ni à reconnaitre les faits, et aucun exemplaire de ce procès-verbal ne lui a été remis ; que dans la mesure où les dispositions des articles L. 2123-3 et R. 223-3 du code de la route sont soumises à l'interprétation des juges, l'amende pour procédure abusive ne trouve pas à s'appliquer ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2010, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que M. A n'apporte aucun élément de fait ou de droit nouveau ; que l'intéressé confirme abusivement ses arguments tirés du défaut d'information préalable aux retraits de points, de la non imputabilité des infractions et de leur absence de réalité ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mars 2010, présenté pour M. A, concluant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gérard Gayet, président de chambre, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que la requête de M. Philippe A est dirigée contre le jugement nos 0803200-0803201 du 3 novembre 2009 par lequel le vice-président désigné du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales des 18 mars 2005 et 10 juin 2006, lui retirant respectivement un et trois points de son permis de conduire, et l'a condamné à payer une amende de 500 euros au titre des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le retrait d'un point consécutif à l'infraction du 18 mars 2005 :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ; qu'il résulte de ces mêmes dispositions que l'établissement de la réalité de l'infraction entraîne la réduction de plein droit du nombre de points dont est affecté le permis de conduire de l'intéressé ; qu'aux termes de l'article L. 223-3 du code de la route : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9 (...). Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès ;

Considérant que l'information préalable, prévue aux articles précités du code de la route, constitue une formalité substantielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre d'en contester la réalité et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; que cette information requise conditionne la régularité de la procédure suivie et partant, la légalité du retrait de points ; que si une quittance sur laquelle figure la mention des conséquences du paiement de l'amende forfaitaire sur la reconnaissance de la réalité de l'infraction peut valablement informer l'automobiliste verbalisé, c'est à la condition qu'un exemplaire de ce document lui ait été remis avant paiement ;

Considérant qu'en ce qui concerne l'infraction susmentionnée, M. A soutient n'avoir été mis en possession de la quittance de paiement sur laquelle figurent les informations substantielles susrappelées, qu'après avoir acquitté le montant de l'amende forfaitaire entre les mains de l'agent verbalisateur et, ainsi, de n'avoir pas pu prendre conscience de l'importance que revêtait le paiement sur le retrait de points ; qu'il doit donc être regardé comme ayant été placé dans l'impossibilité de faire le choix, en connaissance de cause, d'acquitter ou non l'amende forfaitaire ; qu'ainsi, l'information n'ayant pas été préalable au paiement de l'amende, la procédure est irrégulière comme entachée d'un vice substantiel ; que, par suite, la décision de retrait d'un point consécutive à l'infraction relevée le 18 mars 2005 doit être annulée ;

En ce qui concerne le retrait de trois points consécutif à l'infraction du 10 juin 2006 :

Considérant que le ministre de l'intérieur a produit le procès-verbal de contravention dressé à l'occasion de l'infraction constatée le 10 juin 2006 à 18h30 ; que ce procès-verbal n'est pas signé par M. A et ne porte pas la mention selon laquelle il aurait refusé de signer ; que la circonstance que l'état civil, l'adresse et le numéro de permis du contrevenant figurent sur le second volet du procès-verbal produit ne suffit pas à établir que l'intéressé a reçu, lors de la constatation de cette infraction, l'information préalable requise par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; qu'ainsi, faute pour l'administration de démontrer que le requérant a bien été mis en possession du procès-verbal d'infraction et été destinataire de l'information préalable prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, le retrait de trois points consécutif à cette infraction doit être regardé comme intervenu au terme d'une procédure irrégulière et, par suite, comme entaché d'illégalité ;

Sur l'amende pour recours abusif :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros ; que, dès lors que la Cour annule, par le présent arrêt, les décisions de retrait de points du ministre de l'intérieur à l'encontre de M. A, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé abusif le recours de celui-ci ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le vice-président désigné du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales des 18 mars 2005 et 10 juin 2006, lui retirant respectivement un et trois points de son permis de conduire, et l'a condamné à payer une amende de 500 euros au titre des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que l'administration ayant retiré irrégulièrement quatre points affectés au permis de conduire de M. A, le présent arrêt implique que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales réaffecte quatre points au capital du permis de conduire de celui-ci ;

Sur les conclusions à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement nos 0803200-0803201 du 3 novembre 2009 du Tribunal administratif de Lille et les décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales des 18 mars 2005 et 10 juin 2006, prononçant respectivement un retrait d'un et trois points du permis de conduire de M. A sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de restituer quatre points au permis de conduire de M. A.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Philippe A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Copie sera adressée au directeur régional des finances publiques du Nord/Pas-de-Calais et du département du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA01675
Date de la décision : 10/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: M. Gérard Gayet
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS COCHET DENECKER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-06-10;09da01675 ?
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