La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/10/2010 | FRANCE | N°10DA00427

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 14 octobre 2010, 10DA00427


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 7 avril 2010 et régularisée par la production de l'original le 12 avril 2010, présentée pour M. Jalal A, demeurant ..., par Me d'Hauteville ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903378 du 9 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 8 décembre 2009 par laquelle le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitte

r le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvo...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 7 avril 2010 et régularisée par la production de l'original le 12 avril 2010, présentée pour M. Jalal A, demeurant ..., par Me d'Hauteville ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903378 du 9 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 8 décembre 2009 par laquelle le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt de la Cour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de réexaminer sa demande dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt de la Cour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que la décision du préfet de l'Oise méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de la durée de sa vie commune avec une ressortissante française avec laquelle il s'est marié civilement le 17 juillet 2009 ; que c'est à tort que le préfet a estimé qu'il devait justifier de la détention d'un visa de long séjour pour se voir délivrer un titre de séjour, dès lors que l'article L. 313-11-7° du code précité n'impose pas cette exigence ; qu'enfin, la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2010, présenté par le préfet de l'Oise, qui conclut au rejet de la requête ; le préfet soutient que le requérant étant dépourvu de visa long séjour il ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en tant que conjoint de français ; que la demande de titre de séjour étant présentée sur le fondement de l'article L. 313-11-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'était pas tenu d'instruire la demande du requérant au regard des dispositions de l'article L. 313-11-7° du même code ; que le cas de l'intéressé est expressément exclu du champ d'application des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code précité ; qu'en tout état de cause, il n'a aucune famille proche sur le territoire français, n'a aucune attache ancienne à la France, n'a pas fait preuve d'une volonté d'intégration et n'entretient pas une communauté de vie ancienne avec son épouse ; que l'atteinte à sa vie privée et familiale n'est pas disproportionnée, la séparation nécessaire à la régularisation de sa situation sera de brève durée ; que sa décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas démontré e ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré par télécopie le 18 mai 2010 et régularisé par la production de l'original le 25 mai 2010, présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juin 2010, présenté par le préfet de l'Oise, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 23 septembre 2010 et confirmé par la production de l'original le 4 octobre 2010, présenté par le préfet de l'Oise, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller, les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, ressortissant marocain, né en 1980, et entré en France en 2004 selon ses déclarations, a épousé le 17 juillet 2009 une ressortissante française et a sollicité à ce titre la délivrance d'une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale ; que, par un arrêté en date du 8 décembre 2009, le préfet de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de son renvoi ; que M. A relève appel du jugement en date du 9 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A a épousé à Beauvais, le 17 juillet 2009, Mlle Cérifa B, ressortissante de nationalité française ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des attestations circonstanciées produites, et dont la valeur probante n'est pas contestée, que la vie commune entre les futurs époux a débuté dès le mois de décembre 2007 ; qu'il est établi, par des pièces nouvelles présentées en appel, que M. A et Mlle B se sont mariés religieusement le 27 janvier 2008 ; que, par suite, la décision du préfet de l'Oise rejetant la demande de titre de séjour présentée par M. A a ainsi porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus lui a été opposé et a, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2009 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que l'exécution d'un jugement prononçant l'annulation d'un refus de titre de séjour au motif que ce refus porte au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte excessive au regard des exigences de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, implique normalement que l'administration délivre le titre sollicité ou un titre présentant des garanties suffisantes au regard du droit que l'intéressé tire de l'article 8 de cette convention, sous réserve de changements dans les circonstances de droit et de fait depuis la date de la décision attaquée ; que, dans ces conditions, il y a lieu, en l'espèce, d'enjoindre au préfet de l'Oise de délivrer au requérant une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, sous réserve de changements dans les circonstances de droit et de fait ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, le versement à M. A d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif d'Amiens du 9 mars 2010 et la décision du 8 décembre 2009 du préfet de l'Oise sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Oise de délivrer à M. A une carte de séjour d'un an portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, sous réserve des changements intervenus dans les circonstances de droit ou de fait depuis la date de l'arrêté annulé.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jalal A, au préfet de l'Oise et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

''

''

''

''

N°10DA00427 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10DA00427
Date de la décision : 14/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mulsant
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guyau
Rapporteur public ?: M. Larue
Avocat(s) : D'HAUTEVILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-10-14;10da00427 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award