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08/02/2011 | FRANCE | N°09DA00725

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 08 février 2011, 09DA00725


Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Francis A, demeurant ..., par Me Pigniez ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707723 en date du 12 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2004 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de

condamner l'Etat au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article ...

Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Francis A, demeurant ..., par Me Pigniez ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707723 en date du 12 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2004 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de condamner l'Etat au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent que la SCI du Pelinghem, qui avait souscrit un crédit bail immobilier, était titulaire d'un droit portant sur un immeuble au sens de l'article 150 UB du code général des impôts, qui ne distingue pas entre droits personnels et droits réels, et constituait dès lors une société à prépondérance immobilière au sens dudit article ; que les articles 634 et suivants du code général des impôts et les articles 39 duodecies A1, A4 et A6 du même code, la jurisprudence de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation et l'instruction administrative du 4 avril 2008 confirment que le titulaire d'un crédit bail immobilier est titulaire d'un droit sur l'immeuble concerné ; qu'une interprétation de l'article 150 UB du code général des impôts excluant les crédits preneurs ne saurait, dès lors, être admise et serait contraire au principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt, les contribuables étant traités différemment selon qu'ils acquièrent un immeuble en le finançant par l'emprunt ou par le recours à la formule du crédit bail immobilier ; que le crédit bail immobilier, dont il doit être tenu compte pour l'appréciation de la prépondérance immobilière d'une société, doit, selon l'article 150 UB du code général des impôts, être évalué à sa valeur réelle et non à sa valeur comptable ; qu'en retenant la valeur réelle du crédit bail souscrit par la SCI du Pelinghem, soit 399 998 euros, 433 332 euros et 466 666 euros au titre respectivement des exercices clos en 2001, 2002 et 2003, l'actif immobilisé de cette société apparaît constitué à plus de 50 % de droits portant sur des immeubles ; que la cession des parts de cette SCI, à prépondérance immobilière, entrait donc dans le champ d'application de l'article 150 UB du code général des impôts ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que, conformément à l'article 74 SB de l'annexe II au code général des impôts, une société ne peut être considérée comme à prépondérance immobilière que si elle possède un actif constitué, à la clôture des trois exercices précédant la cession, pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles ou des droits portant sur des immeubles ; qu'à la clôture des trois exercices précédant la cession, l'actif de la SCI du Pelinghem ne comportait ni immeubles, ni droits sur des immeubles ; que la valeur du crédit-bail immobilier souscrit par la SCI n'avait pas à être prise en compte, dès lors que les droits du crédit preneur demeurent de nature mobilière tant qu'il n'acquiert pas la propriété de l'immeuble ; que les dispositions du code général des impôts et la jurisprudence, dont se prévalent les requérants, ne sont pas transposables lorsqu'est en cause l'application de l'article 150 UB du code général des impôts ; que la valeur, réelle ou comptable, d'un crédit bail immobilier n'a donc pas à figurer au numérateur pour l'appréciation de la prépondérance d'une société ; que l'administration était dès lors fondée à refuser l'application du régime d'imposition prévu à l'article 150 UB du code général des impôts pour imposer la plus value générée par la cession des parts de la SCI du Pelinghem sur le fondement de l'article 150-0 A du même code ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 8 octobre 2009, présenté pour M. et Mme A qui concluent aux mêmes fins que leur requête ; ils soutiennent, en outre, que l'intention constante du législateur, telle que se manifestant dans les dispositions des articles 39 duodecies A1 et suivants, 39-10, 150 UB, 151 septies B et 219 I a sexies 0 bis du code général des impôts, est de placer le titulaire d'un crédit bail immobilier dans une situation analogue à celle dans laquelle il se trouverait s'il avait été propriétaire du bien dès la conclusion du crédit-bail ; que l'interprétation faite par l'administration de l'article 150 UB méconnaît, ainsi, l'intention du législateur ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 octobre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui reprend les conclusions de son précédent mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu la loi organique n° 2009-523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 2003-1311 du 31 décembre 2003 portant loi de finances pour 2004 ;

Vu la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 portant loi de finances rectificative pour 2004 ;

Vu la loi n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution ;

Vu le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 portant application de la loi n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Vladan Marjanovic, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. et Mme A relèvent appel du jugement, en date du 12 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2004 à raison de l'imposition, sur le fondement de l'article 150-0 A du code général des impôts, de la plus-value générée par la cession de 98 des 100 parts composant le capital social de la SCI du Pelinghem, dont ils étaient associés ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Au regard de la loi fiscale :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : I. - 1. Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que de l'article 150 UB, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 15 000 euros par an ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 150 U du même code, dans sa rédaction applicable du 1er janvier au 31 décembre 2004, issue de l'article 10 de la loi susvisée du 31 décembre 2003 portant loi de finances pour 2004 : I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH ; que le I de l'article 150 UB du même code dispose que : Les gains nets retirés de cessions à titre onéreux de droits sociaux de sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits portant sur ces biens, sont soumis exclusivement au régime d'imposition prévu au I et au 1° du II de l'article 150 U ; que le IV de l'article 10 de la loi de finances pour 2004 précise que les dispositions précitées de l'article 150 UB s'appliquent aux gains nets tirés de cessions à titre onéreux de valeurs mobilières et de droits sociaux de sociétés non cotées soumises à l'impôt sur les sociétés dont l'actif satisfait aux conditions prévues au I dudit article, acquis avant le 21 novembre 2003 et cédés entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2004 ; qu'enfin, le I de l'article 150 VC du code général des impôts dispose que : La plus-value brute réalisée sur les biens ou droits mentionnés aux articles 150 U et 150 UB est réduite d'un abattement de 10 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième ;

Considérant que M. et Mme A, qui détenaient à parts égales la totalité des 100 parts composant le capital social de la SCI du Pelinghem, créée le 5 juin 1989 et ayant opté en faveur de son assujettissement à l'impôt sur les sociétés, ont cédé, pour le prix de 600 000 euros, 98 de ces parts à la SA Société des magasins Casteleyn-Somag , par acte sous seing privé en date du 13 décembre 2004 ; qu'après les avoir mis en demeure de déclarer la plus-value, d'un montant non contesté de 598 506 euros, générée par la cession de ces droits sociaux, l'administration, suivant la procédure de rectification contradictoire, a informé M. et Mme A de ce que ladite plus-value serait soumise à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales par application des dispositions précitées de l'article 150-0 A du code général des impôts ; que M. et Mme A persistent à contester cette imposition en soutenant que la plus-value litigieuse, générée par la cession de parts d'une société à prépondérance immobilière, entrait dans le champ d'application des dispositions de l'article 150 UB du code général des impôts précité ;

Considérant que l'article 50 de la loi susvisée du 30 décembre 2004, reprenant les dispositions de l'article 74 SB de l'annexe II au code général des impôts, a complété l'article 150 UB en précisant que : Pour l'application de cette disposition, sont considérées comme sociétés à prépondérance immobilière les sociétés dont l'actif est, à la clôture des trois exercices qui précèdent la cession, constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles ou des droits portant sur des immeubles, non affectés par ces sociétés à leur propre exploitation industrielle, commerciale, agricole ou à l'exercice d'une profession non commerciale ; qu'il résulte de ces dispositions que l'actif à prendre en compte pour la qualification de société à prépondérance immobilière est constitué par l'actif comptable de la société ;

Considérant que si une convention de crédit-bail immobilier, qui permet l'acquisition d'un immeuble par le crédit-preneur en le plaçant, après levée de l'option, dans une situation identique à celle qui aurait été la sienne en cas d'acquisition directe, peut, eu égard à ses particularités, être regardée comme conférant à l'intéressé un droit réel sur l'immeuble concerné, le plan comptable général prévoit que les biens pris en crédit bail ne sont pas inscrits à l'actif, que les redevances de crédit bail sont portées en charge et que ce n'est qu'au moment de la levée de l'option d'achat que l'immeuble est comptabilisé au bilan pour son coût d'acquisition ; que, dès lors, l'immeuble pris en crédit bail en 1990 par la SCI du Pelinghem ne figurait pas et ne pouvait d'ailleurs pas figurer à l'actif de cette société avant le 17 novembre 2005, date à laquelle elle a levé l'option d'achat que lui avait consentie le crédit bailleur ; qu'il n'est ni établi, ni même allégué, qu'à la date du 13 décembre 2004, à laquelle a eu lieu la cession de parts litigieuse, l'actif comptable de cette société comportait d'autres immeubles ou droits sur des immeubles ; qu'ainsi, ladite société ne pouvait être regardée comme une société à prépondérance immobilière au sens des dispositions de l'article 150 UB du code général des impôts précité ; que, dès lors, sans que M. et Mme A puissent utilement se prévaloir des effets attachés aux conventions de crédit bail immobilier par la jurisprudence judiciaire ou par d'autres dispositions du code général des impôts, c'est à bon droit que l'administration a refusé de soumettre la plus-value générée par la cession des parts de la société en cause au régime d'imposition des plus-values immobilières défini aux articles 150 U et suivants du code général des impôts ; que le service s'étant, à cet égard, borné à appliquer les critères posés par l'article 150 UB dudit code, M. et Mme A ne peuvent utilement soutenir que l'interprétation faite par l'administration desdites dispositions méconnaîtrait le principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt ; que si les requérants ont entendu soutenir que les dispositions législatives concernées seraient, par elles-mêmes, contraires au principe constitutionnel dont s'agit, ce moyen, qui n'a pas été présenté, après le 1er mars 2010, selon les modalités prévues à l'article 7 du décret susvisé du 16 février 2010 est, en tout état de cause, irrecevable ;

Au regard de la doctrine administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration./ Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ;

Considérant que, pour contester les impositions mises à leur charge au titre de l'année 2004, M. et Mme A ne sont pas fondés à se prévaloir de l'interprétation donnée par une instruction du 4 avril 2008, postérieure auxdites impositions, d'une disposition au demeurant différente de celle dont ils revendiquent le bénéfice ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2004 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme A doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Francis A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat,

porte-parole du Gouvernement.

Copie sera adressée au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.

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N°09DA00725


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA00725
Date de la décision : 08/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Vladan Marjanovic
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : SELARL LEGIS CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-02-08;09da00725 ?
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