La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/10/2012 | FRANCE | N°11DA01795

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 16 octobre 2012, 11DA01795


Vu, I, sous le n° 11DA01795, la requête enregistrée le 30 novembre 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour l'UNION DEPARTEMENTALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES (UDAF) DE LA SOMME, dont le siège social est situé 10 rue Haute des Tanneurs à Amiens (80010), par Me Bouquet, avocat ; elle demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement avant dire droit n° 0903048 du tribunal administratif d'Amiens du 20 mai 2010 ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens à lui verser une provision de 5 000 euros et de désigner un expert

pour déterminer la nature et l'étendue des préjudices subis par M. Michel...

Vu, I, sous le n° 11DA01795, la requête enregistrée le 30 novembre 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour l'UNION DEPARTEMENTALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES (UDAF) DE LA SOMME, dont le siège social est situé 10 rue Haute des Tanneurs à Amiens (80010), par Me Bouquet, avocat ; elle demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement avant dire droit n° 0903048 du tribunal administratif d'Amiens du 20 mai 2010 ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens à lui verser une provision de 5 000 euros et de désigner un expert pour déterminer la nature et l'étendue des préjudices subis par M. Michel A ;

3°) subsidiairement, d'annuler le procès-verbal de carence établi par l'expert ainsi que le jugement au fond rendu le 29 septembre 2011 par le tribunal administratif d'Amiens et de désigner un expert qui s'adjoindra un sapiteur pour répondre aux questions posées par le jugement du 20 mai 2010 ;

4°) en tout état de cause, de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens à lui verser une provision de 5 000 euros ;

5°) en tout état de cause, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire d'Amiens la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu, II, sous le n° 11DA01820, la requête, enregistrée le 5 décembre 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME, dont le siège social est situé 8 place Louis Sellier à Amiens cedex 1 (80021), par Me de la Royère, avocat ; elle demande à la cour :

1°) au cas où la responsabilité du centre hospitalier universitaire d'Amiens serait reconnue, de le condamner à lui verser une somme de 151 474 euros, outre 981 euros d'indemnité forfaitaire de gestion ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens à lui verser une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) de rejeter les conclusions formées par les parties à son encontre ;

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Perrine Hamon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- et les observations de Me Bouquet, avocat, pour l'UDAF DE LA SOMME, de Me Gandet, avocat, pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME, de Me Aubourg, avocat, pour le centre hospitalier universitaire d'Amiens ;

Considérant que les requêtes susvisées n° 11DA01795 et n° 11DA01820 de l'UNION DEPARTEMENTALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES DE LA SOMME et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par un seul arrêt ;

Considérant que M. A, né en 1957, a été placé sous tutelle d'Etat par jugement du tribunal d'instance d'Amiens du 29 mai 1998, lequel a confié cette tutelle à l'UNION DEPARTEMENTALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES (UDAF) DE LA SOMME ; que M. A a été admis au service des urgences du centre hospitalier universitaire d'Amiens dans la nuit du 2 au 3 janvier 2005 pour état d'imprégnation alcoolique agité ; qu'il y a été placé dans une salle de dégrisement où il a été installé sur un brancard avec, compte tenu de son agitation, la pose de bracelets de contention aux poignets ; qu'aux alentours de 2h30, le brancard de M. A a été découvert en feu par le personnel soignant, M. A souffrant de brûlures sur plus de 60 % de sa surface corporelle ; que l'UDAF DE LA SOMME, agissant en qualité de tuteur de M. A, a demandé au centre hospitalier universitaire d'Amiens d'indemniser M. A à raison des préjudices résultant de cet accident qu'il impute à une faute de l'établissement ; que, par jugement avant dire droit du 20 mai 2010, le tribunal administratif d'Amiens, saisi par l'UDAF DE LA SOMME suite au refus implicite du centre hospitalier, a, d'une part, rejeté la demande de provision présentée par l'UDAF et, d'autre part, ordonné une expertise aux fins de déterminer si des fautes ont été commises lors de l'incendie survenu dans la nuit du 2 au 3 janvier 2005 et d'évaluer la nature et l'étendue des préjudices subis par M. A ; que l'UDAF DE LA SOMME relève appel de ce jugement avant dire droit ainsi que du jugement du 29 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande indemnitaire ; que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME demande la condamnation du centre hospitalier universitaire d'Amiens à lui rembourser les débours exposés pour les soins de M. A engendrés par l'accident ;

Sur le jugement avant dire droit du 20 mai 2010 :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-6 du code de justice administrative : " Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 811-2, le délai d'appel contre un jugement avant-dire-droit, qu'il tranche ou non une question au principal, court jusqu'à l'expiration du délai d'appel contre le jugement qui règle définitivement le fond du litige. " ;

Considérant que l'état d'instruction du dossier ne permettait aux premiers juges de statuer ni sur le principe de la responsabilité du centre hospitalier universitaire d'Amiens, ni sur les droits à réparation de l'UDAF DE LA SOMME et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME ; que c'est dès lors à bon droit que, par jugement en date du 20 mai 2010, le tribunal a ordonné, avant dire droit, une expertise aux fins de déterminer les conditions dans lesquelles M. A avait été pris en charge dans la nuit du 2 au 3 janvier 2005, et d'évaluer la nature et l'étendue des préjudices résultant de ses brûlures ; que les conclusions de l'UDAF DE LA SOMME tendant à l'annulation de ce jugement avant dire droit doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les conclusions indemnitaires de l'UDAF DE LA SOMME et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si l'expert désigné par le tribunal administratif d'Amiens a déposé, le 15 avril 2011, un rapport de carence faisant valoir qu'il n'avait pas reçu transmission par l'UDAF DE LA SOMME de l'intégralité du dossier médical de M. A, et que M. A et l'UDAF ne s'étaient pas présentés à la réunion d'expertise convoquée le 28 mars 2011 aux fins d'examiner M. A, l'UDAF a toutefois justifié, par la production d'un certificat médical transmis à l'expert avant la date de cette réunion, que M. A ne pouvait se déplacer et qu'il pouvait être examiné par l'expert sur son lieu d'hospitalisation à Amiens ; que, dans ces conditions, l'UDAF DE LA SOMME est fondée à soutenir que le constat de carence établi par l'expert n'est pas exclusivement imputable à son manque de diligences, et à demander l'annulation du jugement qui a rejeté sa demande sur le fondement de cette carence ;

Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par l'UDAF DE LA SOMME et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME tant devant le tribunal administratif d'Amiens que devant la cour ;

Considérant que l'état de l'instruction ne permet toujours pas à la cour de statuer sur le principe de la responsabilité du centre hospitalier universitaire d'Amiens, ni sur les droits à réparation de l'UDAF DE LA SOMME et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME ; qu'il y a lieu, dès lors, d'ordonner avant dire droit une nouvelle expertise aux fins ci-après décrites ;

Sur les frais de l'expertise :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 40 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 : " L'aide juridictionnelle concerne tous les frais afférents aux instances, procédures ou actes pour lesquels elle a été accordée. Le bénéficiaire de l'aide est dispensé du paiement, de l'avance ou de la consignation de ces frais. Les frais occasionnés par les mesures d'instruction sont avancés par l'Etat (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article 42 de la même loi : " Lorsque le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle est condamné aux dépens ou perd son procès, il supporte exclusivement la charge des dépens effectivement exposés par son adversaire, sans préjudice de l'application éventuelle des dispositions de l'article 75. Le juge peut toutefois, même d'office, laisser une partie des dépens à la charge de l'Etat. Dans le même cas, le juge peut mettre à la charge du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle, demandeur au procès, le remboursement d'une fraction des sommes exposées par l'Etat autres que la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle des avocats et des officiers publics et ministériels. " ; qu'aux termes des dispositions de l'article 119 du décret susvisé du 19 décembre 1991 rendu applicables aux juridictions administratives par les dispositions de l'article 132 du même décret : " Les rémunérations afférentes aux constatations, consultations et expertises ainsi que les acomptes accordés par le juge sur justification des avances faites par l'expert, les indemnités allouées aux témoins, les frais de transport lorsque ces frais entrent dans les dépens, les frais d'affranchissement exposés à l'occasion des correspondances postales expressément prévues par la loi lorsqu'ils sont à la charge des parties, les droits d'enregistrement et les taxes assimilées, les redevances de greffe et, en général, tous les frais dus à des tiers sont avancés par l'Etat (...) " ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que, lorsque des frais d'expertise sont mis par une décision juridictionnelle à la charge d'une partie à laquelle un bureau d'aide juridictionnelle a décidé d'accorder le bénéfice d'une aide totale, l'Etat est substitué à cette partie pour le paiement à l'expert de ses honoraires, sans qu'il soit nécessaire que le dispositif du jugement le désigne comme redevable de ces frais ; qu'il y a lieu dès lors, de mettre les frais de l'expertise ordonnée par le présent arrêt à la charge de l'Etat, également redevable des frais de l'expertise ordonnée par le jugement avant dire droit du 20 mai 2010, dès lors que l'UDAF bénéficie pour l'instance d'appel comme pour la première instance de l'aide juridictionnelle totale ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, qu'en l'état de l'instruction, il y a lieu de réserver toute décision sur les conclusions sur lesquelles il n'est pas statué par le présent arrêt ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0903048 du tribunal administratif d'Amiens du 29 septembre 2011 est annulé.

Article 2 : Il est ordonné, avant de statuer sur la demande de l'UDAF DE LA SOMME, une expertise, confiée, d'une part, à un expert en sécurité incendie et, d'autre part, à un médecin, à l'effet :

- de se faire communiquer toutes pièces nécessaires à l'exercice de sa mission, dont notamment le dossier médical complet de M. A ;

- de réunir tous les éléments devant permettre de déterminer si des fautes dans l'organisation ou le fonctionnement du service ont été commises lors de l'incendie survenu dans la nuit du 2 au 3 janvier 2005 en indiquant, notamment, d'une part, si le système d'alarme incendie s'est déclenché et, si oui, à quel moment, d'autre part, si le patient disposait d'une sonnette d'alarme à proximité, accessible malgré les bracelets de contention dont il était entravé et en précisant, enfin, les modalités d'intervention, sur place, des services de sécurité du centre hospitalier ;

- d'examiner M. A ;

- de décrire les lésions et affections imputables à l'incendie en cause, ainsi que les modalités de prise en charge médicale et les conditions de l'éventuelle reprise de l'autonomie ;

- de décrire les séquelles dont souffre M. A et de dire lesquelles sont en lien avec l'incendie en cause, en précisant si elles sont susceptibles d'amélioration ou d'aggravation ;

- de déterminer l'état de M. A avant l'accident et de rechercher si un état pathologique antérieur a eu une incidence sur l'apparition ou l'évolution des lésions et des séquelles ;

- de fixer la date de consolidation des blessures et, à défaut, d'indiquer dans quel délai M. A devra être à nouveau examiné en évaluant, si possible, l'importance prévisible de son préjudice ;

- de donner son avis sur la durée et le taux du déficit fonctionnel temporaire subi par M. A jusqu'à la date de consolidation, en indiquant si une aide temporaire a été nécessaire pendant tout ou partie de cette période, en précisant sa nature et son importance ;

- de donner son avis sur le taux du déficit fonctionnel permanent subi par M. A du fait des séquelles constatées, en précisant la nature et l'importance de l'atteinte à chacune des fonctions concernées, en indiquant les divers troubles liés auxdites séquelles et en indiquant si, et dans quelle mesure, l'assistance d'une tierce personne est nécessaire, en décrivant précisément ses besoins, notamment en matière d'appareillages et de soins ;

- de fixer, dans l'hypothèse où un état antérieur aurait déjà entraîné un déficit fonctionnel, la part du déficit fonctionnel ou permanent imputable à l'état antérieur et celle imputable au fait dommageable ;

- d'indiquer le cas échéant l'incidence professionnelle de ces séquelles ;

- de fournir tous éléments permettant d'apprécier la nature, l'intensité et la durée des souffrances endurées jusqu'à la consolidation, ainsi que du préjudice esthétique temporaire et permanent en lien avec cette faute, en estimant leur importance sur une échelle de 1 à 7 ;

- de donner son avis sur l'existence d'un éventuel préjudice d'agrément ou de tout autre préjudice ;

- de fournir au tribunal tous éléments utiles à la solution du litige ;

Article 3 : L'expertise sera menée contradictoirement entre l'UDAF DE LA SOMME pour M. A, le centre hospitalier universitaire d'Amiens et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME.

Article 4 : Les experts seront désignés par le président de la cour. Ils accompliront leur mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 5 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'UDAF DE LA SOMME pour M. Michel A, au centre hospitalier universitaire d'Amiens, à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME et à l'expert.

''

''

''

''

1

6

Nos11DA01795,11DA01820

3

N° "Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 11DA01795
Date de la décision : 16/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-02-02 Procédure. Instruction. Moyens d'investigation. Expertise.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail
Rapporteur ?: Mme Perrine Hamon
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SCP BOUQUET CHIVOT FAYEIN-BOURGOIS WADIER ; SCP BOUQUET CHIVOT FAYEIN-BOURGOIS WADIER ; DE LA ROYERE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-10-16;11da01795 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award