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08/09/2014 | FRANCE | N°14DA00110

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 08 septembre 2014, 14DA00110


Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014, présentée par le préfet de la Seine-Maritime qui demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 1303328 du 10 décembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de M. D... E..., son arrêté du 5 décembre 2013 en tant qu'il lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. E...devant le tribunal administratif de Rouen ;

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Vu les ...

Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014, présentée par le préfet de la Seine-Maritime qui demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 1303328 du 10 décembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de M. D... E..., son arrêté du 5 décembre 2013 en tant qu'il lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. E...devant le tribunal administratif de Rouen ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre ;

1. Considérant que, par deux arrêtés du 5 décembre 2013, le préfet de la Seine-Maritime a pris à l'encontre de M. E...une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a ordonné son placement en rétention administrative pour une durée de cinq jours ; que, par un jugement du 10 décembre 2013, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé la décision qui n'a pas assorti l'obligation de quitter le territoire d'un délai de départ volontaire ainsi que l'arrêté plaçant l'intéressé en rétention administrative ; que le préfet de la Seine-Maritime ne relève appel de ce jugement qu'en tant qu'il a annulé la décision refusant d'accorder à l'intéressé un délai de départ volontaire ; que, par la voie de l'appel incident, M. E...demande l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi ;

Sur l'appel incident de M.E... :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.E..., ressortissant tunisien né le 3 juin 1981, a déclaré être entré en France au cours de l'année 2009 ; qu'il s'est ensuite maintenu irrégulièrement sur le territoire français et a fait l'objet de deux obligations de quitter le territoire français qu'il n'a pas exécutées ; qu'il est célibataire et sans enfant à charge ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'il soutient, M. E...aurait des attaches familiales en France alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa mère, ses quatre soeurs et son frère et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge d'au moins vingt-huit ans ; que, bien qu'il réside dans un centre d'hébergement et de réinsertion depuis le mois d'octobre 2012 où il participe à des activités d'adaptation à la vie active pour lesquelles il perçoit une contribution financière modeste dénommée " pécule ", l'insertion dont il fait état ne permet pas de justifier son intégration dans la société française ; que, compte tenu des conditions du séjour de l'intéressé et en dépit de sa durée, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision attaquée a été prise ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

4. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que l'intéressé n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait privée de base légale ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ;

Sur l'appel principal du préfet de la Seine-Maritime :

6. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;

7. Considérant que, pour refuser l'octroi d'un délai de départ volontaire à M.E..., le préfet de la Seine-Maritime, après avoir visé les dispositions du d) et du f) de l'article précité, s'est fondé sur la double circonstance que l'intéressé n'aurait pas exécuté une précédente mesure d'éloignement et qu'il ne disposerait pas de garanties de représentation suffisantes ; qu'il ressort effectivement des pièces du dossier que M. E...s'est précédemment soustrait à l'exécution de deux obligations de quitter le territoire français les 26 octobre 2009 et 26 mars 2012 ; qu'ainsi et en tout état de cause, le préfet aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur le seul motif tiré du d) qui repose sur la situation existante à la date de la décision attaquée ; qu'en outre et en dépit de sa résidence au foyer d'hébergement dans les conditions mentionnées au point 2, l'intéressé ne justifie pas, eu égard à son comportement d'ensemble, de garanties de représentation suffisantes au regard des dispositions du f) de l'article précité ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen, pour annuler sa décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire à l'intéressé, a retenu le moyen tiré de l'erreur dans l'appréciation des garanties de représentation que présentait M. E... ;

8. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés à l'encontre du refus d'octroi d'un délai de départ volontaire devant la juridiction administrative par M.E... ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que M. E...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour soutenir que le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire serait privé de base légale ;

10. Considérant que, par un arrêté préfectoral du 3 septembre 2013, régulièrement publié au recueil des actes du 4 septembre 2013, le préfet de la Seine-Maritime a donné délégation à Mme C...A..., chef du service de l'immigration et de l'intégration, aux fins de signer la décision attaquée ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait et doit être écarté ;

11. Considérant que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'acte attaqué manque en fait et doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire ;

Sur les conclusions présentées à fin d'injonction sous astreinte :

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M. E...doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme de 1 000 euros que Me B...F..., conseil de M.E..., demande à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement en date du 10 décembre 2013 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. E...tendant à l'annulation du refus d'octroi d'un délai de départ volontaire devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées en cause d'appel par M. E...sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. D...E...et à Me B...F....

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00110
Date de la décision : 08/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Delesalle
Avocat(s) : SELARL CONIL ROPERS GOURLAIN-PARENTY ROGOWSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-09-08;14da00110 ?
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