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25/11/2014 | FRANCE | N°13DA02145

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 25 novembre 2014, 13DA02145


Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2013, présentée par le préfet du Nord qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102620 du 3 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à verser à M. A...D...une indemnité de 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 octobre 2010, en réparation des préjudices causés par son éloignement du territoire français et la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de fixer à de plus justes proportions le montant d

e l'indemnité accordée à M. D...;

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Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2013, présentée par le préfet du Nord qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102620 du 3 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à verser à M. A...D...une indemnité de 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 octobre 2010, en réparation des préjudices causés par son éloignement du territoire français et la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de fixer à de plus justes proportions le montant de l'indemnité accordée à M. D...;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- les observations de Me Norbert Clément, avocat de M.D... ;

1. Considérant que M.D..., ressortissant algérien né le 7 juillet 1983, est entré en France le 13 avril 2003 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa " Etats Schengen " de type C ; que, suite à son mariage, le 29 octobre 2005, avec une ressortissante française, il a obtenu un certificat de résidence valable du 7 février 2006 au 6 février 2007, dont il a sollicité le renouvellement le 1er mars 2007 ; que, séparé de son épouse depuis le début de l'année 2009, il a fait l'objet, le 19 mai 2009, d'un arrêté de reconduite à la frontière dont il a vainement contesté la légalité devant le tribunal administratif de Lille ; que, le 3 juin 2009, il a été éloigné à destination de son pays d'origine ; que, par un arrêt du 11 mai 2010, la Cour de céans a annulé l'arrêté du préfet du Nord du 19 mai 2009 portant reconduite à la frontière ; que M.D..., revenu en France le 8 juin 2010, a sollicité du préfet du Nord une indemnité de 18 668,50 euros en réparation de ses préjudices ; que, par jugement du 3 décembre 2013, le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à verser à M. D... une indemnité de 5 000 euros ; que le préfet du Nord forme appel de ce jugement ; que, par la voie de l'appel incident, M. D...demande à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 10 000 euros ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière du 19 mai 2009 a été annulé au motif que le préfet n'avait pas procédé à un examen suffisant de la situation de M.D..., lequel est, dès lors, fondé à demander l'indemnisation des préjudices directs et certains résultant de l'illégalité fautive de cet arrêté et de sa mise à exécution ;

Sur les préjudices :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M.D..., qui a pu se faire représenter par son avocat alors qu'il se trouvait en Algérie, n'établit pas que son absence dans le cadre de la procédure de divorce engagée en France lui aurait causé un préjudice ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, si M. D...fait valoir qu'il entretenait une relation avec Mme C...B..., ressortissante allemande, lorsqu'il a été reconduit en Algérie, il n'établit pas l'effectivité de leur vie commune à la date de la mesure d'éloignement ; qu'il a seulement indiqué dans ses écritures qu'il se rendait " presque tous les week-ends " en Allemagne pour lui rendre visite et que cela était devenu plus difficile pendant son séjour en Algérie ; qu'il est toutefois constant que Mme B...s'est rendue en Algérie pendant trois semaines durant cette période ; qu'enfin, il ressort de la déclaration de vie commune effectuée le 23 août 2010, que celle-ci n'a débuté que le 1er août 2010, après l'installation de Mme B...en France ; que, dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation du préjudice de M. D...résultant de la séparation d'avec MmeB..., en l'évaluant à une somme symbolique d'un euro ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. D...est fondé à demander l'indemnisation des frais de transport et de visa qu'il a exposés pour revenir sur le sol français, qui sont directement imputables à la mesure d'éloignement illégale dont il a fait l'objet ; que, compte tenu des pièces produites par M.D..., il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 500 euros ;

6. Considérant qu'il sera fait une juste appréciation de l'ensemble de ces préjudices en allouant à M. D...une somme de 501 euros ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de ramener à 501 euros le montant de l'indemnité due par l'Etat à M. D...et de réformer en ce sens le jugement attaqué du tribunal administratif de Lille ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

9. Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. D...doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 5 000 euros, que l'Etat a été condamné à verser à M. D...par jugement du 3 décembre 2013, est ramenée à 501 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1102620 du tribunal administratif de Lille du 3 décembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de M. D...sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...D....

Copie sera adressée au préfet du Nord.

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