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11/06/2015 | FRANCE | N°14DA00258

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 11 juin 2015, 14DA00258


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...et M. D...ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 13 avril 2012 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a défini, notamment, les seuils en cas de sécheresse dans le département de la Seine-Maritime et les limites ou interdictions provisoires des usages de l'eau.

Par un jugement n° 1201773 du 12 décembre 2013, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, et un mémoire, enregistrés les

10 février 2014 et 19 mai 2015, M. A...C...et M. B...D..., représentés par la SCP Descamps, Pe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...et M. D...ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 13 avril 2012 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a défini, notamment, les seuils en cas de sécheresse dans le département de la Seine-Maritime et les limites ou interdictions provisoires des usages de l'eau.

Par un jugement n° 1201773 du 12 décembre 2013, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, et un mémoire, enregistrés les 10 février 2014 et 19 mai 2015, M. A...C...et M. B...D..., représentés par la SCP Descamps, Perissère, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'arrêté du 17 décembre 2007 portant approbation de la convention type relative à la coopération de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques avec les services départementaux de l'Etat ;

- l'arrêté du 20 novembre 2009 portant approbation du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) du bassin Seine-Normandie ;

- l'arrêté du 3 avril 2012 du préfet de la région Ile-de-France ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Michel Riou, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Perrine Hamon, rapporteur public.

1. Considérant que, par un arrêté du 13 avril 2012, le préfet de la Seine-Maritime a fixé, sur le fondement du code de l'environnement, des seuils en cas de sécheresse dans ce département ainsi que les mesures coordonnées de surveillance, de limitations ou d'interdictions provisoires des usages de l'eau ; que l'arrêté comporte l'installation d'un comité de suivi de la sécheresse sur le département et définit pour chaque zone d'alerte des mesures progressives de restriction ou d'interdiction provisoire des usages de l'eau en fonction de quatre seuils (vigilance ; alerte ; alerte renforcé ; crise) ; que, sur la base de la définition des zones d'alerte arrêtée le 3 avril 2012 par le préfet de la région Ile-de-France, préfet coordonnateur du bassin Seine-Normandie, les rivières du département de la Seine-Maritime sont réparties entre les zones 2 et 3, cette dernière regroupant les rivières de la Saâne, de la Vienne, de La Scie, de La Varenne et de L'Arques ; que, pour chaque zone, une station hydrométrique en rivière et un piézomètre destinés au suivi sont mis en place ; que les restrictions progressives d'activité concernent notamment les activités nautiques ; que M.C..., moniteur de canoë-kayak, et M.D..., loueur de canoë-kayak, en particulier sur la rivière La Scie, relèvent appel du jugement qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 avril 2012 du préfet de la Seine-Maritime ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 211-3 du code de l'environnement, dans sa version applicable à la date de l'arrêté litigieux : " I.-En complément des règles générales mentionnées à l'article L. 211-2, des prescriptions nationales ou particulières à certaines parties du territoire sont fixées par décret en Conseil d'Etat afin d'assurer la protection des principes mentionnés à l'article L. 211-1. II.-Ces décrets déterminent en particulier les conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut : / 1° Prendre des mesures de limitation ou de suspension provisoire des usages de l'eau, pour faire face à une menace ou aux conséquences d'accidents, de sécheresse, d'inondations ou à un risque de pénurie ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 211-66 du même code : " Les mesures générales ou particulières prévues par le 1° du II de l'article L. 211-3 pour faire face à une menace ou aux conséquences (...) de sécheresse, (...) sont prescrites par arrêté du préfet du département (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 214-12 du même code : " En l'absence de schéma d'aménagement et de gestion des eaux approuvé, la circulation sur les cours d'eau des engins nautiques de loisir non motorisés s'effectue librement dans le respect des lois et règlements de police et des droits des riverains. Le préfet peut, après concertation avec les parties concernées, réglementer sur des cours d'eau ou parties de cours d'eau non domaniaux la circulation des engins nautiques de loisir non motorisés ou la pratique du tourisme, des loisirs et des sports nautiques afin d'assurer la protection des principes mentionnés à l'article L. 211-1 (...) " ;

4. Considérant que, compte tenu de son objet et de ses dispositions rappelés au point 1 et alors même qu'il prévoit des restrictions progressives des activités nautiques en cas de franchissement de seuils de débit des cours d'eau, l'arrêté préfectoral en litige ne constitue pas une réglementation permanente de la circulation des engins nautiques de loisir non motorisés au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 214-12 du code de l'environnement ; que, par suite, le préfet n'a pas entaché sa décision d'un vice de procédure en ne procédant pas à la concertation préalable prévue par ces dispositions ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 211-67 du code de l'environnement : " Le préfet du département (...) peu[t] désigner, par arrêté, une zone d'alerte, pour un sous-bassin, bassin ou groupement de bassins correspondant à une unité hydrographique cohérente, dans laquelle ils sont susceptibles de prescrire les mesures mentionnées à l'article R. 211-66. / (...) / Ils constatent par arrêté le franchissement des seuils entraînant la mise en oeuvre des mesures envisagées " ;

6. Considérant que ni le regroupement des rivières en zones d'alerte, compte tenu de leur proximité hydrographique, notamment dans la zone d'alerte 3, ni le choix de la station hydrométrique de référence, en amont de l'un des cours d'eau regroupés dans la zone d'alerte en cause, ne reposent sur une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 213-12-14 du code de l'environnement, dans sa version applicable à l'arrêté litigieux : " (...) La coopération de l'office et de ses échelons territoriaux avec les directions régionales de l'environnement, les services chargés de la police de l'eau et les agences de l'eau pour la réalisation des missions incombant à l'établissement public fait l'objet de conventions passées entre l'office, les préfets intéressés et les agences de l'eau, conformes à une convention type fixée par arrêté du ministre chargé de l'environnement " ;

8. Considérant, en premier lieu, que la convention signée le 6 octobre 2009 entre les services départementaux de l'Etat, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA) a été prise conformément à l'arrêté du ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables du 17 décembre 2007 fixant une convention type ; que cette convention du 6 octobre 2009 a pour objet, notamment, de mettre en place une coopération entre l'ONEMA et les services départementaux de l'Etat ; qu'elle vise, en particulier, la police de l'eau et prévoit que l'ONEMA émet des avis techniques et apporte un appui technique à la police de l'eau et de la nature de la direction départementale des territoires (DDT) ; que, par suite, l'arrêté attaqué a pu légalement prévoir que l'ONEMA procède au relevé des étiages et observe les évolutions des caractéristiques de l'écoulement des eaux pour permettre au préfet de prendre, si nécessaire, des mesures d'interdiction des activités nautiques non motorisés selon les modalités définies par l'arrêté ;

9. Considérant, en second lieu, que les dispositions précitées de l'article R. 213-12-14 du code de l'environnement et l'arrêté du 17 décembre 2007 du ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables n'imposent pas l'établissement d'une convention pour la mise en place d'un observatoire national des étiages (réseau ONDE) ; que, par suite, l'absence de convention spécifique entre l'ONEMA et les services de l'Etat pour la mise en place de ce réseau d'informations sur les débits des cours d'eau, en remplacement de réseaux existants, ne faisait pas, en tout état de cause, obstacle à l'intervention de l'ONEMA pour l'information du préfet dans les conditions définies par l'arrêté attaqué ;

10. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 211-1 du code de l'environnement : " La gestion équilibrée doit permettre en priorité de satisfaire les exigences de la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l'alimentation en eau potable de la population. Elle doit également permettre de satisfaire ou concilier, lors des différents usages, activités ou travaux, les exigences : / 1° De la vie biologique du milieu récepteur, et spécialement de la faune piscicole et conchylicole ; / 2° De la conservation et du libre écoulement des eaux et de la protection contre les inondations ; / 3° De l'agriculture, des pêches et des cultures marines, de la pêche en eau douce, de l'industrie, de la production d'énergie, en particulier pour assurer la sécurité du système électrique, des transports, du tourisme, de la protection des sites, des loisirs et des sports nautiques ainsi que de toutes autres activités humaines légalement exercées " ;

11. Considérant que l'arrêté attaqué prévoit, dans son article 6, que, dans le cas du dépassement du seuil de vigilance qu'il définit, les activités nautiques pourront être interdites " après observation par l'ONEMA de l'évolution des faciès d'écoulement " du cours d'eau concerné ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas de l'avis technique de l'ONEMA du 11 juin 2010, relatif au tirant d'eau minimal pour l'ensemble des activités nautiques, motorisées ou non, que cet organisme ne disposerait pas des informations et des moyens nécessaires à l'observation prévue par ces dispositions ; qu'en tout état de cause, les résultats de cette observation ne lient pas le préfet quant aux mesures à prendre pour assurer la protection de la ressource en eau et à l'appréciation qu'il doit porter, en application de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, sur la conciliation de cette protection avec notamment les activités nautiques ;

12. Considérant qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction, et notamment de l'avis technique émis par l'ONEMA, que l'activité de canoë-kayak est susceptible d'entraîner des perturbations de la faune piscicole ; que, par suite, et alors même que cette activité est, par elle-même, sans influence sur le débit d'eau et ne rejette pas d'effluents, le préfet a pu légalement se fonder sur les dispositions précitées des articles L. 211-3 et R. 211-66 du code de l'environnement, citées au point 2, pour prévoir la restriction de cette activité en cas de sécheresse afin d'assurer la conciliation visée par les dispositions de l'article L. 211-1 du même code citées au point 10 ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 212-1 du code de l'environnement : " (...) / XI. Les programmes et les décisions administratives dans le domaine de l'eau doivent être compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux / (...) " ; que la directive B7 du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) du bassin de Seine-Normandie, approuvé par arrêté du 20 novembre 2009, tend à favoriser les loisirs aquatiques dans le respect des équilibres naturels ;

14. Considérant que si l'arrêté attaqué veille à ce que les activités nautiques, qui font partie des loisirs aquatiques, respectent, dans les périodes de sécheresse, les équilibres naturels des cours d'eau, il n'est pas, de ce fait, incompatible avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...et M. D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...et M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., à M. B...D...et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

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N°14DA00258 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00258
Date de la décision : 11/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

27-02-05 Eaux. Ouvrages. Mesures prises pour assurer le libre écoulement des eaux.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Jean-Michel Riou
Rapporteur public ?: Mme Hamon
Avocat(s) : SCP DESCAMPS PERISSERE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-06-11;14da00258 ?
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