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22/06/2015 | FRANCE | N°12DA00908

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 22 juin 2015, 12DA00908


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...F... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 24 février 2009 du président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime supprimant deux éléments de sa rémunération résultant des deux majorations de coefficients accordées en mars 1996 et janvier 1997 et de condamner cet établissement à lui verser une pension de retraite sur la base de la rémunération totale à laquelle il avait droit, sans déduction des éléments illégalement supprimés, une in

demnité de licenciement calculée conformément aux articles 44-1 et 39 alinéa 1 de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...F... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 24 février 2009 du président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime supprimant deux éléments de sa rémunération résultant des deux majorations de coefficients accordées en mars 1996 et janvier 1997 et de condamner cet établissement à lui verser une pension de retraite sur la base de la rémunération totale à laquelle il avait droit, sans déduction des éléments illégalement supprimés, une indemnité de licenciement calculée conformément aux articles 44-1 et 39 alinéa 1 de l'ancien statut, dans l'hypothèse où l'article 45 du nouveau statut ne serait pas applicable, une somme de 24 004,30 euros au titre des rémunérations non payées, une somme de 200 000 euros au titre des dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi à raison de l'illégalité des décisions de suspension et de révocation, du harcèlement moral dont il a fait l'objet, et des actions en justice qu'il avait engagées ainsi qu'à raison de son licenciement, une indemnité correspondant au montant annuel de pension de retraite non perçue et une somme de 395 063,72 euros en réparation des préjudices subis à raison de son licenciement.

Par un jugement nos 0902098-1001002 du 17 avril 2012, le tribunal administratif a enjoint à la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime de reconstituer les droits à pension de retraite de M. F...à compter de la date de son licenciement, a condamné la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime à verser à M. F...les sommes correspondant, d'une part, aux traitements qu'il aurait perçus jusqu'à l'âge légal de la retraite et, d'autre part, à l'indemnité de fin de carrière qu'il aurait perçue à la même date, a renvoyé M. F... devant cette chambre pour la liquidation de ces sommes ainsi que de 2 500 euros au titre du préjudice subi et rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 12DA00908 le 21 juin 2012, la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime, représentée par la Selarl Dmitroff C...Rose, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à reconstituer les droits à pension de M. F...à compter de la date de son éviction, à lui verser les sommes correspondant, d'une part aux traitements qu'il aurait perçus jusqu'à l'âge légal de la retraite et, d'autre part, à l'indemnité de fin de carrière qu'il aurait perçue à la même date, l'a renvoyé devant elle pour qu'il soit procédé à la liquidation de ces sommes ainsi que de 2 500 euros en réparation du préjudice subi.

2°) de mettre à la charge de M. F...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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II. Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 12DA00943 les 26 juin et 7 septembre 2012, le 24 mai 2013 et le 17 février 2014, M. B...F..., représenté par la SCP Guillaume et AntoineE..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 24 février 2009 du président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime supprimant pour l'avenir deux éléments de sa rémunération, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux du 7 avril 2009 et celle révélée par son bulletin de paie de février 2009 ;

3°) de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime à lui verser une pension de retraite sur la base de la rémunération totale sans déduction des éléments illégalement supprimés, au paiement de la somme de 24 004,30 euros au titre des rémunérations non payées, au paiement de la somme de 167 575,81 euros au titre de l'indemnité de licenciement, au paiement de la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

4°) de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime, dans l'hypothèse où son licenciement fondé sur les dispositions de l'article 45 du statut des personnels des chambres de métiers serait considéré comme illégal, au versement d'une somme de 317 184,85 euros correspondant aux rémunérations non perçues entre le 16 octobre 2009 et le 2 juillet 2012 ;

5°) de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime au versement d'une somme, en application des articles 39 et 44-1 du statut, réparant le préjudice résultant du fait que ses indemnités de chômage ont été calculées sur la base d'un traitement n'intégrant pas les éléments de rémunération supprimés ;

6°) de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime à lui verser une indemnité correspondant au montant annuel de la pension perdue, réparant le préjudice né de l'absence de cotisation pour celle-ci ;

7°) de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime à lui verser une indemnité de 2 709 euros correspondant à l'indemnité de fin de carrière ;

8°) de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime à lui verser la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions de l'existence résultant de son licenciement illégal ;

9°) à titre subsidiaire de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime, dans l'hypothèse où son licenciement serait considéré comme légal, au versement d'une somme de 24 027,36 euros correspondant à son traitement, comprenant les éléments de rémunération illégalement supprimés, pour la période de février 2009 jusqu'au 16 octobre 2009 ;

10°) à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où l'article 45 du statut des personnels des chambres de métiers ne serait pas applicable, de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime, en application des articles 39, dernier alinéa, et 44-1 du statut, au versement d'une somme de 101 034,66 euros correspondant à l'indemnité de licenciement ;

11°) d'assortir les sommes demandées des intérêts capitalisés ;

12°) d'enjoindre à la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime d'intervenir auprès des organismes compétents pour qu'ils versent les pensions de retraite et indemnités de chômage auxquelles il estime avoir droit ;

13°) de mettre à la charge de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la décision du 13 novembre 2008 de la commission paritaire nationale 52 adoptant le statut des chambres de métiers et de l'artisanat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,

- et les observations de Me A...C..., représentant la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime, et de Me G...E..., représentant M. F....

1. Considérant que les requêtes susvisées de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime et de M. F... sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par un seul arrêt ;

2. Considérant que M. B...F..., recruté en qualité de secrétaire général par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime à compter du 23 janvier 1995 et titularisé à compter du 23 janvier 1996, a été rémunéré dès l'origine, sur la base d'un coefficient de 950 points majoré d'un supplément de 12 % puis à compter du mois de mars 1996, sur la base d'un coefficient de 1 116 points, et à compter du mois de janvier 1997, sur la base d'un coefficient de 1 339 points ; que par une décision du 2 mars 2007, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime a mis fin à ces trois éléments de la rémunération de M. F... constitués par le supplément de 12 % et les deux majorations de coefficient au motif de leur illégalité ; que M. F... a ensuite été suspendu de ses fonctions de secrétaire général le 20 mars 2007 ; qu'à l'issue d'une procédure disciplinaire, il a été révoqué le 17 juillet 2007 ; que par deux jugements du 10 juillet 2008 devenus définitifs, le tribunal administratif de Rouen a, d'une part, annulé les décisions du 2 mars 2007 et 20 mars 2007 au motif que, s'agissant de mesures prises en considération de la personne, M. F... devait pouvoir présenter des observations préalablement à la prise de ces décisions et, d'autre part, a annulé les décisions de suspension et de révocation comme fondées sur des faits non établis de concussion en dépit de l'illégalité de la perception depuis plus de dix ans de deux éléments de sa rémunération constitués par les majorations de coefficient ;

3. Considérant que par une décision du 24 février 2009, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime a supprimé pour l'avenir ces deux éléments de la rémunération de M. F... ; que par une décision du 15 avril 2009, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime a prononcé le licenciement de M. F... en application du second alinéa de l'article 45 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat alors applicable, avec effet au terme d'un délai de six mois ; que M. F... a perçu la somme de 42 706,29 euros au titre des indemnités de licenciement ; que la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 17 avril 2012 du tribunal administratif de Rouen en tant qu'il l'a condamnée à reconstituer les droits à pension de M. F... à compter de la date de son licenciement, à lui verser la somme correspondant aux traitements qu'il aurait perçus jusqu'à l'âge légal de la retraite et l'indemnité de fin de carrière qu'il aurait perçue à cette même date, l'a renvoyé devant elle pour qu'il soit procédé à la liquidation de la somme à laquelle il a droit et en tant qu'il l'a condamnée au versement d'une somme de 2 500 euros au titre des préjudices subis par M. F... ; que M. F... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 24 février 2009 supprimant les deux éléments de sa rémunération et celle rejetant son recours gracieux et en tant qu'il a limité à la somme de 2 500 euros l'indemnisation de ses préjudices ;

Sur la régularité du jugement :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 212-1 du code de justice administrative : " Les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel peuvent être appelés à donner leur avis sur les questions qui leur sont soumises par les préfets. / Les questions relevant des attributions des préfets de région de la métropole sont soumises par ces derniers à la cour administrative d'appel, les autres au tribunal administratif " ; qu'il résulte de l'instruction qu'en application de ces dispositions, un avis a été rendu par le tribunal administratif de Rouen le 18 septembre 2008, à la demande du préfet de la Seine-Maritime, destiné à éclairer les modalités d'exécution des jugements du 10 juillet 2008 de ce tribunal quant à la mise en oeuvre de la suppression pour l'avenir de deux éléments de rémunération de M. F... ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Gilles Armand, rapporteur public ayant conclu lors du jugement dont M. F... relève appel, a été nommé au tribunal administratif de Rouen à compter du 1er octobre 2008, par un arrêté du 24 juin 2008 du vice-président du Conseil d'Etat, publié au Journal officiel du 10 juillet 2008 ; que Mme Jenny Grand d'Esnon, présidente de la formation de jugement, y a été nommée à compter du 1er septembre 2010, par un décret du 13 juillet 2010 du président de la République publié au Journal officiel du 16 juillet 2010 ; que M. Cyrille Leduc, rapporteur, y a été nommé à compter du 1er janvier 2010, par un arrêté du 17 juin 2009 de la garde des sceaux, publié au Journal officiel du 25 juin 2009 ; que Mme D...H..., membre de la formation de jugement, y a été nommée à compter du 1er avril 2009, par un arrêté du 5 janvier 2009 du vice-président du Conseil d'Etat, publié au Journal officiel du 16 janvier 2009 ; que dès lors, le moyen de M. F..., tiré de la composition irrégulière de la formation ayant rendu le jugement du 17 avril 2012 à raison de la participation possible de ses membres à l'avis donné au préfet de la Seine-Maritime le 18 septembre 2008, doit être écarté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions du 24 février 2009 et du rejet implicite du recours gracieux :

6. Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 29 avril 2009, et reprises au 1° du I de l'article 6 de cette loi : " I. Ne sont pas communicables : 1° Les avis du Conseil d'Etat et des juridictions administratives, (...) " ; que dès lors, M. F... n'est pas fondé à soutenir que l'avis du 18 septembre 2008 du tribunal administratif de Rouen devait lui être communiqué afin qu'il puisse en contester le contenu ou présenter ses observations ;

7. Considérant d'autre part, que si M. F... soutient que les dispositions précitées de la loi du 17 juillet 1978 méconnaissent les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit au procès équitable, ces dispositions n'ont ni pour objet, ni pour effet de dispenser l'autorité administrative appelée à prendre la décision en cause du respect des obligations de motivation et de contradiction prévues par les dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public et de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ; que les avis rendus par les juridictions administratives à l'autorité préfectorale sont purement consultatifs, sans autorité et ne la lie pas ; que s'agissant d'un avis simple, le principe du contradictoire n'est pas nécessaire ; que dès lors, le moyen de M. F... tiré de la contradiction entre ces dispositions et les stipulations précitées doit être écarté ;

8. Considérant qu'eu égard au respect qui s'attache à l'autorité de la chose jugée, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime était tenu d'exécuter le jugement du 10 juillet 2008 du tribunal administratif de Rouen devenu définitif, constatant l'illégalité des deux éléments de la rémunération de M. F..., constitués par les majorations de traitement dont il avait fait l'objet en janvier 1996 puis en mars 1997, intervenues en dehors de tout avancement d'échelon dans les conditions prévues par l'article 17 du statut du personnel administratif des chambres de métiers ; que dès lors, M. F... ne peut utilement soutenir que le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime aurait méconnu sa compétence en exécutant ce jugement ;

9. Considérant que pour procéder à l'abrogation des deux éléments illégaux de la rémunération du requérant par la décision contestée, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime, eu égard aux motifs du jugement du 10 juillet 2008 du tribunal administratif de Rouen, s'est borné à en tirer toutes les conséquences ; que par suite, est inopérant le moyen tiré de l'absence de motivation de la lettre du 26 janvier 2009 et de la décision du 24 février 2009 au sens de la loi du 11 juillet 1979 ;

10. Considérant qu'une décision administrative accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage ; qu'en revanche, n'ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d'une décision prise antérieurement ; que le maintien indu du versement d'un avantage financier à un agent public, alors même que le bénéficiaire a informé l'ordonnateur qu'il ne remplit plus les conditions de l'octroi de cet avantage, n'a pas le caractère d'une décision accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation ; que dans ce cas, il appartient à l'administration de corriger cette erreur et de réclamer le reversement des sommes payées à tort, sans que l'agent intéressé puisse se prévaloir de droits acquis à l'encontre d'une telle demande de reversement ; que dès lors, et alors même que le rapport d'août 2008 du Contrôle général économique et financier relatif à la mission d'audit de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime avait constaté le caractère courant de la pratique consistant à accorder aux agents des chambres de métiers, y compris à ceux de la chambre de la Seine-Maritime, des augmentations de coefficients d'ancienneté sans fondement réel, M. F... n'est pas fondé à soutenir que par les décisions contestées, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime ne pouvait pas abroger les deux éléments illégaux de sa rémunération ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de M. F... à fin d'annulation doivent être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

12. Considérant que la décision du 15 avril 2009 avec effet au 16 octobre 2009, procédant au licenciement de M. F..., fondée sur les dispositions de l'article 45 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat alors applicable en vertu desquelles le licenciement d'un secrétaire général à la discrétion du président de la chambre de métiers et de l'artisanat s'effectue sans que ce dernier ait à invoquer un motif tiré de la capacité ou du comportement de cet agent et intervient après information du bureau, est devenu définitive faute d'avoir fait l'objet d'un recours en annulation ; que la circonstance que le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, par une décision n° 325782 du 26 octobre 2011, annulé ces dispositions, si elle a eu pour effet de priver ce licenciement de base légale, n'a pas eu pour effet de l'annuler ; qu'en se bornant, par les articles 2 et 3 du jugement attaqué, à condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime respectivement à reconstituer les droits à pension de M. F... et à lui verser une somme correspondant, d'une part, aux traitements qu'il aurait perçus jusqu'à l'âge légal de sa retraite et, d'autre part, à l'indemnité de fin de carrière qu'il aurait perçue à la même date et le renvoyer devant celle-ci afin qu'il soit procédé à la liquidation de la somme qui lui serait ainsi due alors qu'il n'était pas saisi de conclusions à fin d'injonction, le tribunal administratif de Rouen a méconnu les dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative ; que dès lors, la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a prononcé cette injonction et cette condamnation ;

13. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime devant le tribunal administratif de Rouen et la cour administrative d'appel ;

14. Considérant qu'ainsi qu'il l'a été dit au point 12, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé les dispositions de l'article 45 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat qui constituaient la base légale du licenciement de M. F... ; que cette annulation les a fait disparaître de l'ordonnancement juridique ; que dès lors, M. F... ne saurait, d'une part, demander le versement d'une indemnité telle que prévue par les dispositions de cet article 45 ; que cette annulation, d'autre part, n'a pas eu pour effet d'annuler le licenciement de M. F... qui est devenu définitif faute d'avoir été contesté dans le délai de recours contentieux ; que toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que M. F... invoque l'illégalité fautive de cette mesure à l'appui de ses conclusions à fin de dommages-intérêts ;

En ce qui concerne les différentes demandes indemnitaires de M. F... :

S'agissant de la fin de non-recevoir opposée par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime :

15. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par une demande du 11 décembre 2009, M. F... a présenté une demande préalable d'indemnisation devant la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime à raison des erreurs de calcul dans le montant des indemnités liées à son licenciement et du préjudice causé par les agissements de celle-ci constitués par sa suspension, sa révocation et les faits de harcèlement moral ; que dès lors, la fin de non-recevoir opposée par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime, tirée du défaut de liaison du contentieux du chef des conséquences de l'illégalité de son licenciement doit être accueillie ; que les conclusions de M. F... tendant au versement de la somme de 100 000 euros au titre de l'illégalité de son licenciement et de la somme de 317 184,85 euros au titre de l'indemnité due au titre des traitement pour la période du 16 octobre 2009, date d'effet de son licenciement, au 2 juillet 2012, date de son départ à la retraite par limite d'âge, doivent être rejetées ;

Quant aux autres demandes de M. F... :

16. Considérant que le rejet des conclusions d'annulation présentées par M. F... tendant à l'annulation de la décision du 24 février 2009 de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime abrogeant deux éléments de sa rémunération a pour conséquence le rejet de ses conclusions indemnitaires tendant à leur prise en compte dans le calcul de différentes sommes dont il demande le versement ; que doivent dès lors être rejetées ses conclusions tendant au versement de la somme de 24 027,36 euros, montant dans le dernier état de ses écritures, au titre de sommes dues à raison de son traitement jusqu'à la date d'effet de son licenciement, au versement d'une pension de retraite et d'une indemnité, au demeurant non chiffrée, du fait de l'absence de prise en compte de ces deux éléments de rémunération dans le calcul de ses allocations chômage ;

17. Considérant que les dispositions de l'article 44 de ce statut ne visent que les cas des licenciements pour suppression d'emploi, pour suppression de l'établissement, pour inaptitude physique et pour insuffisance professionnelle ; que celles de l'article 39 de ce statut sont relatives à la démission ; que M. F... ne peut dès lors utilement s'en prévaloir ; qu'il en est de même de l'invocation des dispositions de l'article 39 de l'ancien statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat abrogé à la date de la décision contestée ;

18. Considérant qu'aux termes de l'article 37 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat : " (...) Tout agent titulaire peut être admis à bénéficier de ses droits à la retraite dans les conditions du régime général d'assurance vieillesse de la sécurité sociale. / Il ne peut être maintenu en fonction au-delà de l'âge limite de soixante-cinq ans date anniversaire. / La demande d'admission à la retraite doit être adressée au président de l'établissement dans les conditions prévues à l'article 6, dans un délai de six mois avant la date fixée pour l'entrée en jouissance de la pension. (...) / Une indemnité de fin de carrière proportionnelle à la durée de service est versée aux agents ayant plus de dix ans de présence, égale à trente points d'indice par douze mois de présence limitée à trente ans (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que cette indemnité est versée aux agents en fonction dans une chambre de métiers au moment de leur départ en retraite ; que M. F... licencié plusieurs années avant son départ en retraite, ne peut utilement s'en prévaloir ;

19. Considérant que hors les cas prévus aux articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative, il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à l'administration ; que les conclusions de M. F... tendant à ce qu'il soit enjoint à la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime d'intervenir auprès des organismes de retraite afin de lui rétablir ses droits ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

20. Considérant que par le jugement du 10 juillet 2008 du tribunal administratif de Rouen, les décisions des 20 mars et 17 juillet 2007 par lesquelles le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime a suspendu pour faute grave M. F... de ses fonctions, puis l'a révoqué, ont été annulées au motif que la caractérisation des faits de concussion n'était pas établie ; que les conditions dans lesquelles cette suspension et cette sanction ont été prononcées ont entraîné pour M. F... un préjudice moral dont il sera fait une juste appréciation en lui allouant la somme de 6 000 euros ;

21. Considérant que M. F...ne justifie pas des frais de justice à raison desquels il demande la condamnation de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime à lui verser une somme de 40 000 euros ; que ces conclusions doivent dès lors être rejetées ;

22. Considérant que les conclusions de M. F... tendant au versement " d'une somme " au titre des frais bancaires, au demeurant non chiffrés, ne sont pas justifiées ;

Quant au harcèlement moral :

23. Considérant que par un arrêt de la chambre correctionnelle de cour d'appel de Rouen du 19 janvier 2012 passé en force de chose jugée, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime, en fonction au moment des différentes procédures dont a fait l'objet M. F..., a été condamné à 15 000 euros d'amende pour faute personnelle détachable du service constituée par des " comportements vindicatifs injustifiables, une hargne avérée " à l'égard de M. F... et " par des violations manifestes et parfaitement assumées des règlements et décisions de justice " et au versement d'une somme de 8 000 euros à la partie civile ; que M. F... demande la condamnation de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime à raison de la faute de cet établissement consulaire procédant de multiples brimades et mesures vexatoires ; que la condamnation prononcée définitivement par le juge pénal ne saurait avoir pour conséquence de priver la victime de ces agissements du droit de poursuivre directement la personne publique qui a la gestion du service incriminé, en vue de la réparation du préjudice dont elle a souffert ;

24. Considérant qu'il résulte de l'instruction et des constatations de fait de l'arrêt susindiqué, lesquelles sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée, que les organes de contrôle de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime n'ont pas joué leur rôle de contrôle et que son président, aux fonctions duquel le préfet de la Seine-Maritime a mis fin par un arrêté du 13 mai 2009, a pu prendre à l'égard de M. F... les sanctions les plus graves ; qu'il est constant, qu'ainsi que le relève l'arrêt de la cour d'appel, que cette autorité a refusé d'exécuter le jugement ordonnant la réintégration de M. F...à la suite de l'annulation des décisions prononçant sa suspension et sa révocation ; qu'à la suite de sa réintégration, une nouvelle procédure de suspension et de révocation a été engagée puis finalement abandonnée ; que le bureau de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime avait autorisé la mise à pied de M. F... par une décision du 25 janvier 2006 et l'engagement des procédures disciplinaires ; que ce bureau avait approuvé le 7 novembre 2007 un projet de délibération soumis à l'assemblée générale de la compagnie consulaire modifiant son règlement intérieur de manière à faire obstacle à la reprise des fonctions de M. F... alors qu'une ordonnance de référé du tribunal administratif de Rouen du 29 août 2007 avait suspendu la révocation dont il avait fait l'objet et avait enjoint à la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime de réexaminer la situation de son secrétaire général pour le placer dans une situation régulière ; que le 19 novembre 2007, ce bureau, à la majorité de ses membres, a fait connaître, au préfet de la Seine-Maritime qu'il ne souhaitait pas la réintégration de M. F... dans ses fonctions ; que la circonstance que ce bureau ait limité la mission de son président quant à l'engagement d'une procédure disciplinaire pour insuffisance professionnelle à l'encontre de M. F... et ait émis des réserves sur le changement de stratégie contentieuse orientée vers une action pénale alors qu'une plainte pénale nominative avait finalement été déposée au nom de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime le 6 février 2008, n'est dès lors pas de nature à exonérer cette compagnie consulaire de sa responsabilité ; qu'eu égard à ces agissements qui caractérisent un harcèlement moral à l'encontre de M.F..., il y a dès lors lieu de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation du préjudice ainsi subi ;

25. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen l'a condamnée, par ses articles 2 et 3, à verser à M. F... une somme correspondant d'une part aux traitements qu'il aurait perçus jusqu'à l'âge légal de la retraite et, d'autre part, à l'indemnité de fin de carrière qu'il aurait perçue à la même date et l'a renvoyé devant elle afin qu'il soit procédé au calcul de cette somme ; que M. F... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a limité à la somme de 2 500 euros l'indemnisation de ses préjudices ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

26. Considérant que M. F... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 21 000 euros à compter du 16 décembre 2009, date de réception de sa demande par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime ; que la capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois le 26 juin 2012 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, par application des dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à la date du 16 décembre 2010 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

27. Considérant qu'en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. F... ni à celles de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-maritime présentées au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du 17 avril 2012 du tribunal administratif de Rouen sont annulés.

Article 2 : La somme que la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime a été condamnée à verser à M. F... est portée de la somme de 2 500 euros à la somme de 6 000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2009. Les intérêts échus à la date du 16 décembre 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime est condamnée à verser à M. F... la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice né du harcèlement moral dont il a été victime avec intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2009. Les intérêts échus à la date du 16 décembre 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 4 : Le jugement du 17 avril 2012 du tribunal administratif de Rouen en ses articles 4 et 5 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. F... et de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...F... et à la chambre de métiers et de l'artisanat de la Seine-Maritime.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

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Nos12DA00908,12DA00943

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N° "Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA00908
Date de la décision : 22/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-06 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: Mme Perrine Hamon
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SELARL DMITROFF PIMONT ROSE ; SELARL DMITROFF PIMONT ROSE ; SELARL DMITROFF PIMONT ROSE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-06-22;12da00908 ?
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