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26/01/2016 | FRANCE | N°14DA02015

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 26 janvier 2016, 14DA02015


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1106971 du 23 octobre 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa

demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2014...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1106971 du 23 octobre 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2014, M.B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 octobre 2014 du tribunal administratif de Lille ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration ne justifie pas du caractère irrégulier de sa comptabilité ;

- la méthode de reconstitution des recettes est radicalement viciée dans son principe et conduit à des résultats disproportionnés au regard de l'activité de l'entreprise ;

- l'application des majorations pour absence de bonne foi n'est pas justifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en ce qui concerne les contributions sociales dès lors qu'aucune contribution sociale supplémentaire n'a été mise en recouvrement ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 de l'établissement de restauration rapide de type " kebab " dénommé le " Babylone Food " qu'exploite M. B...à Villeneuve d'Ascq, l'administration, après avoir constaté que la comptabilité présentée était dépourvue de toute valeur probante, a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires et des bénéfices industriels et commerciaux réalisés et a mis à sa charge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 ainsi que des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu au titre des années 2005 à 2007 et des pénalités y afférentes ; que M. B... relève appel du jugement du 23 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur les conclusions tendant à la décharge des contributions sociales :

2. Considérant que, si M. B... demande la décharge des contributions sociales au titre des années 2005 à 2007, il est contant qu'aucune contribution sociale n'a été mise à sa charge pour ces années ; que par suite, ces conclusions sont irrecevables comme dépourvues d'objet ;

Sur le surplus des conclusions tendant à la décharge des impositions contestées :

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant de la valeur probante de la comptabilité et de la charge de la preuve :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour l'ensemble de la période vérifiée, M. B...a enregistré ses recettes globalement en fin de journée ; qu'il n'a pas pu produire au vérificateur de pièces justificatives de ces recettes alors qu'il n'est pas contesté qu'il possédait une caisse enregistreuse ; que, dans ces conditions et malgré la modicité de la plupart des ventes, la comptabilité était dénuée de toute valeur probante ainsi que l'a relevé la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires dans son avis du 3 décembre 2010 ; que si l'intéressé se prévaut des dispositions du 3° de l'article 286 du code général des impôts aux termes desquelles il serait autorisé à procéder, en fin de journée, à un enregistrement global de ses recettes au comptant d'un montant unitaire inférieur à 76 euros, ces dispositions ne dispensaient pas pour autant le requérant d'être en mesure de conserver, ainsi que le rappellent les dispositions de l'article 54 du code précité, des pièces justificatives de recettes de nature à établir la consistance des recettes portées dans les écritures comptables ;

4. Considérant que la comptabilité présentée n'étant pas probante et les redressements retenus étant par ailleurs conformes à l'avis de l'organisme paritaire mentionné au point précédent, il appartient au contribuable, en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, d'établir la preuve de l'exagération des impositions contestées au titre des années 2006 et 2007 ; que s'agissant de l'année 2005, en l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et compte tenu du refus du requérant des redressements qui lui ont été notifiés selon la procédure prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, l'administration conserve la charge d'établir le bien-fondé des rectifications apportées aux résultats déclarés par M.B... ;

S'agissant de la reconstitution de recettes :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour reconstituer le chiffre d'affaires de M. B..., le service s'est fondé sur les factures d'achats des viandes " kebab " produites par le contribuable et celles de son fournisseur, la société El Ryan, obtenues par l'administration dans le cadre de l'assistance administrative avec les autorités fiscales allemandes ainsi que sur les factures d'achats de boissons et de pain auprès d'autres fournisseurs en tenant compte des ventes de viandes " kebab " sous forme de pains avec ou sans frites, en formule ou en assiettes, des ventes d'autres sandwichs avec ou sans frites ou avec formule et des ventes de boissons fraiches seules ou avec formule ; qu'un prix de vente moyen déterminé à partir des prix proposés par la carte du restaurant a été attribué à ces trois types de produits ; que le vérificateur a ensuite tenu compte des pertes de viandes dues à la cuisson ainsi que du poids moyen du kebab servi selon la répartition communiquée par le requérant entre les ventes sous forme de sandwichs et celles sous forme d'assiettes ; que les recettes des hamburgers ont été, de même, distinguées en fonction de la vente de ce produit seul ou en formule boisson comprise ; que s'agissant des ventes de boissons et selon les indications données par M. B...lui-même, n'ont été valorisées que les ventes de boissons vendues seules sous des conditionnements de 50 cl, 150 cl et 2 litres ainsi que 30 % des ventes de canettes de 33 cl, le solde, soit 70 %, étant considéré comme vendu avec les formules ; que cette méthode de reconstitution des recettes, qui tient compte des conditions d'exploitation de l'entreprise de M. B..., n'est ni radicalement viciée dans son principe, ni excessivement sommaire ; que le requérant, qui ne peut se prévaloir de sa comptabilité irrégulière, ne propose pas d'autre méthode susceptible de parvenir à une meilleure approximation des résultats ;

6. Considérant que, si M. B...fait valoir que le raisonnement de l'administration est incorrect dès lors que les factures de son fournisseur allemand obtenues dans le cadre de l'assistance administrative franco-allemande ne reflèteraient pas la réalité des livraisons de viande effectivement reçues en l'absence de bons de transport correspondant à ces livraisons, cette seule circonstance n'est toutefois pas de nature à démontrer le caractère fictif des factures émises par ce fournisseur alors que le requérant est demeuré dans l'incapacité de produire lui-même de tels documents à l'appui des factures qui avaient été, à la différence des précédentes, enregistrées en comptabilité ; qu'il ne saurait davantage invoquer, de manière pertinente, l'absence de sa signature ou de cachet de l'entreprise sur les factures de son fournisseur allemand qui ont été réglées en espèces et n'ont fait l'objet d'aucun enregistrement comptable ; que si l'intéressé prétend que, pour l'exercice 2005, le prix moyen unitaire d'achat pratiqué par ce fournisseur était de 3,51 euros le kilo, différent de celui compris entre 2,7 et 2,9 euros le kilo mentionné sur les factures en cause et qu'il n'a jamais bénéficié de prix inférieurs à celui qu'il allègue de la part de ce fournisseur, il résulte toutefois de l'instruction que le vérificateur a identifié, parmi les factures effectivement comptabilisées émises par la société El Ryan, la pratique de prix pouvant s'élever à 2,70 euros le kilo ; qu'enfin, si M. B...fait valoir, s'agissant des exercices 2006 et 2007, que les commandes de viande comptabilisées sont constantes d'une année sur l'autre et ne laissent apparaître aucune disproportion notamment en raison de la période des vacances de l'université de Lille III dont son établissement est proche, l'administration relève toutefois qu'alors que cette période aurait dû se traduire par une baisse des commandes, il est au contraire constaté que les achats se sont élevés à 260 kilos et à 285 kilos ; que d'autres incohérences ont également été relevées à d'autres périodes des années concernées ; qu'enfin, si M. B...soutient que les factures d'achats de pain auprès de la boulangerie du Pile utilisées pour la reconstitution du chiffre d'affaires provenant de la vente de sandwichs, seraient erronées dès lors qu'elles mentionnent à tort qu'elles sont établies pour une période de 6 ou de 7 mois alors que la période concernée est l'année entière, l'administration fait toutefois valoir, sans être contredite, que le vérificateur a pris en considération l'annualité de la période y compris en tenant compte du mois de fermeture annuelle ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6, que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve tant de la réalité que du montant du chiffre d'affaires non déclaré par M. B...au titre de l'exercice 2005 ; que ce dernier n'établit pas, s'agissant des exercices 2006 et 2007, le caractère exagéré des bases d'imposition retenues par le service ;

Sur les pénalités :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

9. Considérant, ainsi qu'il a été dit, que M.B..., au cours des années en cause, enregistrait globalement les recettes en fin de journée sans pouvoir justifier de leur détail par des pièces comptables telles que fichiers de caisse ou bandes de caisse enregistreuse ; qu'il résulte en outre de l'instruction que ces pratiques comptables défectueuses étaient utilisées pour minorer les recettes ; que le montant des minorations de recettes qui ressortent de la reconstitution opérée par le service à partir des données propres à l'entreprise varie selon les exercices pour atteindre respectivement 65 %, 70 % et 43 % du chiffre d'affaires total déclaré pour les exercices 2005 à 2007 ; que ces faits mettent en évidence l'importance et le caractère répétitif des omissions constatées et traduisent, au cas d'espèce, la volonté délibérée de la part du requérant d'éluder une partie de l'impôt dû ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a assorti les rappels d'impôt contestés de la majoration de 40 % visée par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M.B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 12 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Michel Hoffmann, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Laurent Domingo, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 janvier 2016.

Le rapporteur,

Signé : M. LAVAIL DELLAPORTALe président de chambre,

Signé : M. C...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

Marie-Thérèse Lévèque

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N°14DA02015


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA02015
Date de la décision : 26/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : DRANCOURT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-01-26;14da02015 ?
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