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28/01/2016 | FRANCE | N°14DA00475

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 28 janvier 2016, 14DA00475


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 avril 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 31 octobre 2012 refusant d'accorder à la SAS Etablissements Sepieter l'autorisation de le licencier pour motif disciplinaire et a accordé l'autorisation sollicitée ;

Par un jugement n° 1303951 du 22 janvier 2014, le tribunal administr

atif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 avril 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 31 octobre 2012 refusant d'accorder à la SAS Etablissements Sepieter l'autorisation de le licencier pour motif disciplinaire et a accordé l'autorisation sollicitée ;

Par un jugement n° 1303951 du 22 janvier 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 mars 2014, M.A..., représenté par Me E... F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 janvier 2014 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 avril 2013 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 440 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure suivie méconnaît l'article R. 2421-14 du code du travail ;

- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis ;

- en application de l'article L. 1235-1 du code du travail, le doute quant à l'existence d'une faute doit profiter au salarié ;

- le ministre ne pouvait retenir des sanctions de plus de trois ans pour fonder sa décision, ni sur l'existence de sanctions antérieures relatives à des faits similaires dès lors qu'il les avait contestées ou encore sur la circonstance qu'il n'avait pas exprimé de regrets ;

- la décision de licenciement est en lien avec les mandats qu'il détient.

Par un mémoire, enregistré le 14 mars 2014, le syndicat Confédération générale du travail - Force ouvrière livre et industrie annexes de la métropole Nord, représenté par Me E...F..., intervient au soutien des conclusions de la requête et demande qu'une somme de 1 440 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il reprend les moyens développés par M.A....

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2014, la SAS Etablissement Sepieter, représentée par Me B...C..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge solidaire de M. A...et du syndicat Confédération générale du travail - Force ouvrière livre et industrie annexes de la métropole Nord.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,

- et les observations de Me E...F..., représentant M. D...A....

Sur l'intervention du syndicat Confédération générale du travail - Force ouvrière livre et industrie annexes de la métropole Nord :

1. Considérant que le syndicat Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO) livre et industrie annexes de la métropole Nord a intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; que, par suite, l'intervention de ce syndicat est recevable ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-14 du code du travail : " En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail. / La consultation du comité d'entreprise a lieu dans un délai de dix jours à compter de la date de mise à pied. / La demande d'autorisation de licenciement est présentée dans les quarante-huit heures suivant la délibération du comité d'entreprise (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., employé en qualité de conducteur de presse d'imprimerie offset 4 couleurs par la SAS Etablissements Sepieter, société spécialisée dans la fabrication d'enveloppes et d'articles de papèterie, et titulaire du mandat de membre de la délégation unique du personnel et de celui de membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), a fait l'objet d'une mise à pied à compter du 20 septembre 2012 ; que le comité d'entreprise n'a été consulté que le 4 octobre 2012 et l'inspecteur du travail n'a été saisi de la demande d'autorisation de licenciement que le 9 octobre 2012 ; que si les délais de dix jours et de quarante-huit heures prévus par les dispositions du code du travail citées au point précédent respectivement pour la saisine du comité d'entreprise et la présentation de la demande d'autorisation de licenciement, n'ont pas été respectés, les dépassements constatés, limités dans un cas à quatre jours et dans l'autre à soixante-douze heures, ne sont pas excessifs et ne sont donc pas de nature à vicier la procédure ;

4. Considérant, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; que selon l'article L. 1235-1 du code du travail, relatif au contrôle des motifs du licenciement invoqués par l'employeur, si un doute subsiste, il profite au salarié ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le 18 septembre 2012 M. A...a tenu devant un chef d'atelier de l'entreprise Sepieter, et en présence d'un employé de la société Capelle, chargé de la maintenance des machines de l'entreprise, des propos injurieux et a proféré des menaces d'agression physique visant l'un de ses collègues ; que M. A...ne rapporte aucun élément de nature à contredire la relation de ces faits, telle qu'elle est attestée par ces deux personnes et sur laquelle le ministre s'est fondé pour prendre la décision en litige ; que la circonstance que le chef d'atelier de la SAS Etablissements Sepieter ait été entendu par le CHSCT le 2 décembre 2011 pour des faits de harcèlement et que l'entreprise Capelle soit intervenue sur une machine de la SAS Etablissements Sepieter, placée sous scellés en raison d'une enquête menée suite à un accident du travail, ne permet pas de remettre en cause les attestations précitées et la matérialité des faits telle qu'elle vient d'être rappelée ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1332-5 du code du travail : " Aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction " ;

7. Considérant que c'est sans méconnaître les dispositions citées au point précédent que le ministre a notamment fondé sa décision sur l'existence d'une mise à pied de trois jours infligée à l'intéressé le 17 mai 2010, pour des faits similaires, dès lors que cette sanction avait été prise depuis moins de trois ans, au jour de l'engagement des poursuites disciplinaires relatives à la procédure en cause, soit en l'espèce le 20 septembre 2012 ;

8. Considérant que la seule circonstance que M. A...ait contesté les sanctions antérieures qui lui ont été infligées pour des faits similaires ne permet pas de retenir qu'un doute subsiste quant à la matérialité des faits qu'elles répriment ; qu'il ne peut, par suite, utilement soutenir que ce doute doit, en application de l'article L. 1235-1 du code du travail cité au point 4, profiter au salarié et que, dès lors, le ministre ne pouvait se fonder sur l'existence de ces sanctions ; qu'au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces sanctions antérieures auraient été annulées par le juge compétent ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les faits reprochés au requérant, rappelés aux points 5, 7 et 8, alors d'ailleurs que le ministre de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a aussi retenu à son encontre " l'absence de regret exprimé ", sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

10. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la SAS Etablissements Sepieter licencierait en priorité les salariés protégés comme le soutient le requérant ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que, pour ce motif, la décision de le licencier serait en lien avec les mandats qu'il détient ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la SAS Etablissement Sepieter, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A...et, en tout état de cause, le syndicat CGT-FO livre et industrie annexes de la métropole Nord qui a la qualité d'intervenant, demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la SAS Etablissement Sepieter présentées sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention du syndicat Confédération générale du travail - Force ouvrière livre et industrie annexes de la métropole Nord est admise.

Article 2 : La requête de M. A...est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la SAS Etablissement Sepieter présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions du syndicat Confédération générale du travail - Force ouvrière livre et industrie annexes de la métropole Nord présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., au syndicat CGT-FO livre et industrie annexes de la métropole Nord, à la société Etablissements Sepieter et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience publique du 14 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 janvier 2016.

Le rapporteur,

Signé : O. NIZETLe président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINI

Le greffier,

Signé : B. LEFORT

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier

Béatrice Lefort

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N°14DA00475


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00475
Date de la décision : 28/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SCM DELARUE-CHIROLA-DOLLER

Origine de la décision
Date de l'import : 13/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-01-28;14da00475 ?
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