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07/07/2016 | FRANCE | N°15DA02098

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 07 juillet 2016, 15DA02098


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 4 mars 2015 par lequel la préfète du Pas-de-Calais a refusé de lui accorder la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, à la préfète du Pas-de-Calais de lui délivrer le titre sollici

té, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 4 mars 2015 par lequel la préfète du Pas-de-Calais a refusé de lui accorder la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, à la préfète du Pas-de-Calais de lui délivrer le titre sollicité, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 1505098 du 14 octobre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 décembre 2015, M.C..., représenté par Me D...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 14 octobre 2015 et l'arrêté de la préfète du Pas-de-Calais du 4 mars 2015 ;

2°) d'enjoindre à la préfète du Pas-de-Calais, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- il n'est pas établi que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ait été prise par une autorité valablement habilitée par une délégation de signature régulièrement consentie ;

- la décision lui opposant ce refus est insuffisamment motivée ;

- une telle motivation lacunaire révèle que sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen particulier ;

- pour refuser de lui délivrer la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " prévue à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète du Pas-de-Calais a commis une erreur d'appréciation et méconnu le 6° de l'article R. 5221-20 du code du travail ;

- pour estimer qu'il ne pouvait se voir délivrer cette carte de séjour au titre de l'admission exceptionnelle au séjour, la préfète du Pas-de-Calais a méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français devra être annulée par voie de conséquence de l'annulation de celle refusant de lui délivrer un titre de séjour, sur laquelle elle se fonde ;

- cette même décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours a été prise par une autorité incompétente ;

- cette décision est suffisamment motivée ;

- pour prendre cette décision, la préfète du Pas-de-Calais a méconnu le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et commis une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2016, la préfète du Pas-de-Calais conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter comme manquant en fait le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté, refusant à M. C..., ressortissant camerounais, la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et refusant de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, aurait été pris par une autorité incompétente ;

Sur la légalité du refus de séjour :

2. Considérant qu'il résulte de l'examen des motifs de l'arrêté contesté que ceux-ci, qui ne se bornent pas à reproduire des formules stéréotypées, comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. C... ; que, par suite, alors même que ces motifs ne détaillent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé, cette décision de refus de séjour est suffisamment motivée au regard de l'exigence posée par l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard notamment à ce qui vient d'être dit au point précédent, que la préfète du Pas-de-Calais ne se serait pas livrée à un examen suffisamment attentif de la situation de M. C... avant de prendre cette décision ;

4. Considérant que M.C..., qui n'excipe pas de l'illégalité de la décision refusant de lui accorder l'autorisation d'exercer une activité professionnelle en France, ne peut utilement invoquer, au soutien des conclusions qu'il dirige contre la décision lui ayant ensuite refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 6° de l'article R. 5221-20 du code du travail, qui subordonnent l'obtention de cette autorisation préalable à la condition que l'emploi procure à l'intéressé une rémunération d'un niveau suffisant, lequel moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant ;

5. Considérant que M. C...soutient cependant que, pour refuser de lui délivrer un titre de séjour en tant que salarié, la préfète du Pas-de-Calais se serait méprise dans l'appréciation de sa situation, en tenant compte du seul emploi de vacataire sur lequel la commune de Boulogne-sur-Mer l'avait recruté le 11 septembre 2014 ; qu'à l'appui de ce moyen, il fait valoir, d'une part, qu'il occupait un autre emploi, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu le 2 décembre 2014 avec l'EURL G2S, qui l'avait recruté en tant qu'agent de sécurité, et, d'autre part, que, titulaire d'une licence de boxeur professionnel, il était également employé par le club de boxe de Boulogne-sur-Mer ; qu'il est toutefois constant que M. C... a, de sa propre initiative, mis fin au contrat de travail qui le liait à l'EURL G2S dès le 28 février 2015, soit à une date antérieure à celle à laquelle l'arrêté du 4 mars 2015 en litige a été pris ; qu'en outre, par l'attestation établie le 29 mars 2016 par le président du Boxing Club Boulonnais, qu'il verse au dossier et qui se borne à mentionner que ce club verse à M. C...une somme mensuelle de 600 euros à titre de remboursement de frais, l'intéressé ne saurait être regardé comme apportant la preuve, alors au demeurant que ce document ne précise pas la date à laquelle ce versement régulier a débuté, de ce qu'il percevrait une rémunération de la part de cette association ; qu'enfin, M. C... justifie seulement avoir effectué cinq heures de travail dans le cadre du contrat à durée déterminée conclu le 2 mars 2015 avec la SARL ENYOS Sécurité, qu'il n'a pas honoré jusqu'au terme prévu ; qu'ainsi, pour estimer que M. C... ne pouvait prétendre à la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " prévue à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète du Pas-de-Calais ne s'est pas méprise dans l'appréciation de sa situation ;

6. Considérant que, si l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permet à l'autorité préfectorale de délivrer notamment, au titre de l'admission exceptionnelle au séjour, la carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle prévue à l'article L. 313-10 de ce code à des ressortissants étrangers qui ne satisfont pas aux conditions requises pour prétendre à ce titre, cette faculté est toutefois subordonnée à la condition que l'admission au séjour du demandeur réponde à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir ;

7. Considérant qu'il ressort des motifs de l'arrêté contesté que la préfète du Pas-de-Calais ne s'est pas crue à tort liée par le fait que M. C...ne remplissait pas les conditions pour prétendre à une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais qu'elle a examiné d'office si cette carte de séjour pouvait être délivrée à l'intéressé au titre de l'admission exceptionnelle au séjour prévue à l'article L. 313-14 de ce code ; que, pour contester le refus qui lui a été opposé sur ce second fondement, M.C..., entré régulièrement, le 19 mai 2012 sur le territoire français, fait état de ce qu'il a obtenu, le 12 novembre 2013, la délivrance d'une carte de séjour temporaire sous couvert de laquelle il a travaillé durant un an, s'est formé, a obtenu plusieurs qualifications professionnelles et a pu prendre part à des compétitions de boxe et transmettre son savoir en ce domaine dans un cadre associatif ; que, toutefois, ni ces circonstances, ni celle exposées au point 5, ni même le palmarès sportif dont M. C...fait état ne constituaient, eu égard, en outre, à la faible durée du séjour de l'intéressé, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels propres à justifier une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il suit de là que, pour refuser d'admettre à titre exceptionnel au séjour M.C..., la préfète du Pas-de-Calais n'a pas méconnu ces dispositions, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsque l'obligation faite à un ressortissant étranger de quitter le territoire français est prise en conséquence d'une décision de refus de séjour, la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle de ce refus ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 que la décision refusant d'accorder à M. C...le renouvellement de son titre de séjour est suffisamment motivée ; que, par suite, la décision du même jour faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français en conséquence de ce refus est, elle-même, suffisamment motivée ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 7 que le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à M. C...de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux point 5 et 7, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à M. C...de quitter le territoire français serait entachée " d'erreur manifeste d'appréciation " doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision refusant d'accorder à l'intéressé un délai de départ volontaire supérieur à trente jours :

11. Considérant qu'en vertu du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, le ressortissant étranger concerné dispose, en principe, d'un délai de trente jours, l'autorité administrative pouvant toutefois, eu égard à la situation personnelle de l'étranger, lui accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ; qu'il ne ressort pas, en l'espèce, des pièces du dossier et n'est pas même allégué que M. C...aurait fait état auprès de la préfète du Pas-de-Calais de circonstances particulières justifiant qu'un délai supérieur à trente jours lui soit accordé ; que, par suite, la préfète a pu, sans entacher son arrêté d'illégalité, omettre d'y faire figurer une motivation spécifique sur ce point ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 8 à 10 que le moyen tiré de ce que la décision refusant d'accorder à M. C...un délai supérieur à trente jours pour exécuter spontanément l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision lui imposant cette obligation ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, par les moyens qu'il invoque, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte et celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., à Me D...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, à la préfète du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 23 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Nizet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 juillet 2016.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PAPINLe président

de la formation de jugement,

Signé : O. NIZET

Le greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°15DA02098


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA02098
Date de la décision : 07/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Nizet
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : CARDON

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-07-07;15da02098 ?
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