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07/07/2016 | FRANCE | N°16DA00109

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 07 juillet 2016, 16DA00109


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1502894 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 27 juillet 2015 et a mis à la charge de l'Et

at le versement de la somme de 1 000 euros à Me C...en application de l'article 37 de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1502894 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 27 juillet 2015 et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me C...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2016, la préfète de la Seine-Maritime, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 décembre 2015 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif.

Elle soutient que :

- le délai écoulé entre la mise en ligne des conclusions du rapporteur public du tribunal administratif et la tenue de l'audience ne saurait être regardé comme un délai raisonnable ;

- le rapporteur public n'a pas indiqué quelle décision, parmi celles contenues dans l'arrêté, il entendait proposer l'annulation à la formation de jugement ;

- le motif d'annulation retenu par les premiers juges n'est pas fondé.

Par un mémoire, enregistré le 17 mars 2016, M.A..., représenté par Me B... C..., conclut au rejet de la requête, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 .

Elle soutient :

- la requête d'appel du préfet est tardive ;

- le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif est fondé ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur la fin de non-recevoir opposée par M.A... :

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié par la voie électronique au préfet de la Seine-Maritime le 16 décembre 2015 ; que la requête d'appel du préfet, enregistrée au greffe de la cour le lundi 18 janvier 2016 dans l'application Télérecours, a ainsi été présentée avant l'expiration du délai d'appel spécial d'un mois prévu par l'article R. 776-9 du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par M. A...et tirée de la tardiveté de cette requête doit être écartée ;

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., ressortissant sénégalais, célibataire, déclare être entré en France en 2008 ; que s'il justifie avoir entrepris des démarches pour obtenir la nationalité française en se prévalant du certificat de nationalité française de son père, qui s'est révélé être un faux, il n'a déposé une demande de régularisation au regard du droit au séjour que six ans plus tard ; qu'il n'établit pas, ni même n'allègue, être dépourvu d'attaches familiales au Sénégal où il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans ; que l'intéressé ne justifie pas, malgré une participation à des cours d'alphabétisation et un engagement bénévole dans un club sportif, d'une intégration notable à la société française ; que, par suite, eu égard aux conditions irrégulières du séjour en France de M. A...et malgré les liens amicaux qu'il aurait tissés depuis son entrée sur le territoire français, et en dépit de la durée du séjour de l'intéressé en France, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que par suite, la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a annulé, pour ce motif, la décision de refus de titre de séjour et par voie de conséquence celles l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination ;

4. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A...tant en première instance qu'en appel ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

5. Considérant que M. Eric Maire, secrétaire général de la préfecture de la Seine-Maritime, a reçu, par un arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 25 avril 2013, régulièrement publié au recueil des actes de la préfecture n° 52 du même jour, modifié par l'arrêté n° 14-16 du 24 mars 2014 régulièrement publié au recueil spécial n° 33 du même jour, délégation aux fins de signer toutes décisions relevant des attributions de l'Etat en toutes matières à l'exception de trois mesures dans le champ desquelles n'entre pas la décision contestée qui relève de la police des étrangers ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

7. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux cités au point 3, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale de M. A...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet acte a été pris et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du cas des étrangers qui remplissent effectivement toutes les conditions pour se voir délivrer l'un des titres de plein droit mentionnés dans les articles du code auxquels renvoient les dispositions précitées ; que, par suite, M. A...n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de titre de séjour ;

Sur la légalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant que la décision contestée comporte les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde ; que, par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 8 que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale ;

11. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté comme non fondés ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant que pour le même motif énoncé au point 5, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été précédemment que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire pour soutenir que la décision contestée serait privée de base légale ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, que la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision de refus de titre de séjour et, par voie de conséquence, celle portant obligation de quitter le territoire français ainsi que celle fixant le pays de destination ; que, par suite, les conclusions présentées par M. A...sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 10 décembre 2015 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande de M. A...présentée devant le tribunal administratif de Rouen ainsi que ses conclusions présentées en appel au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. D...A...et à Me B...C....

Copie en sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 23 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Nizet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 juillet 2016.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : J-J. GAUTHELe président

de la formation de jugement,

Signé : O. NIZETLe greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°16DA00109

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00109
Date de la décision : 07/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Nizet
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : HANCHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-07-07;16da00109 ?
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