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19/07/2016 | FRANCE | N°15DA02100

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 19 juillet 2016, 15DA02100


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2015 de la préfète du Pas-de-Calais l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, fixant le Soudan comme pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1507504 du 22 septembre 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté de la préfète du Pas-de-Calais en tant qu'il fixe le Soudan comme pa

ys de destination et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2015 de la préfète du Pas-de-Calais l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, fixant le Soudan comme pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1507504 du 22 septembre 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté de la préfète du Pas-de-Calais en tant qu'il fixe le Soudan comme pays de destination et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 décembre 2015, la préfète du Pas-de-Calais demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille du 22 septembre 2015 ;

2°) de rejeter la demande de première instance tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination.

Elle soutient que M. E...n'établit pas être exposé à des risques en cas de retour dans son pays d'origine.

La requête a été communiquée à M.E..., pour qui il n'a pas été produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Laurent Domingo, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'à la suite de son interpellation le 15 septembre 2015 dans une zone d'accès restreint du site Eurotunnel par les services de la police nationale, M.E..., de nationalité soudanaise, a fait l'objet d'un arrêté de la préfète du Pas-de-Calais pris le même jour lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français, fixant le pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative ; que la préfète du Pas-de-Calais relève appel du jugement du 22 septembre 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté en tant qu'il fixe le Soudan comme pays de destination ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que la Cour européenne des droits de l'Homme a rappelé qu'il appartenait en principe au ressortissant étranger de produire les éléments susceptibles de démontrer qu'il serait exposé à un risque de traitement contraire aux stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à charge ensuite pour les autorités administratives " de dissiper les doutes éventuels " au sujet de ces éléments (28 février 2008, Saadi c. Italie, n° 37201/06, paragraphes 129-131 et 15 janvier 2015, AA. C. France, n° 18039/11) ;

3. Considérant que, si M. E...fait valoir qu'il appartient à l'ethnie zaghawa, qui est persécutée au Darfour et dans d'autres régions du Soudan, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il avait spontanément indiqué lors de son audition par les services de police, le 15 septembre 2015, être né à Khartoum et avoir quitté son pays en raison de la guerre, sans revendiquer ni son appartenance à une quelconque ethnie, ni même faire état de persécutions ; que M. E..., qui n'établit ni être membre de l'ethnie zaghawa, ni même être né au Darfour, n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'il serait exposé à une menace grave en cas de retour au Soudan ; qu'ainsi, la préfète du Pas-de-Calais, qui n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est fondée à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a, par l'article 1er du jugement attaqué, prononcé l'annulation, au motif de la méconnaissance de ces stipulations, de la décision fixant le pays à destination duquel M. E... sera éloigné ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E...devant le tribunal administratif de Lille ;

5. Considérant que, par un arrêté en date du 16 février 2015, publié au recueil spécial n° 16 du même jour des actes administratifs de la préfecture, la préfète du Pas-de-Calais a donné délégation à M. D...A..., chef du bureau de l'immigration et de l'intégration, à l'effet de signer notamment les " arrêtés fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement " ; que cet arrêté prévoit qu'en cas d'absence ou d'empêchement de M.A..., la délégation de signature qui lui est accordée est exercée par Mme F...C..., adjointe au chef de bureau ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige, signée par Mme C..., doit être écarté ;

6. Considérant que la décision fixant le pays à destination duquel M. E...est éloigné, qui vise les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne l'intégralité des quatre premiers alinéas de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comporte ainsi les considérations de droit qui en constituent le fondement ; qu'elle indique que l'intéressé n'établit pas qu'il serait personnellement et directement menacé en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'elle comporte ainsi, également, les considérations de fait qui en constituent le fondement ; que cette décision est, par suite, suffisamment motivée ;

7. Considérant que, si M. E...se prévaut de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet à l'encontre de la décision fixant le pays à destination duquel il sera éloigné, ce moyen ne peut qu'être écarté dès lors que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille, dont il y a lieu d'adopter les motifs, a rejeté à bon droit ses conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la préfète du Pas-de-Calais est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 15 septembre 2015 en tant qu'il fixe le Soudan comme pays de destination ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du 22 septembre 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. E...devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de la décision du 15 septembre 2015 de la préfète du Pas-de-Calais fixant le pays à destination duquel il sera éloigné est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... E....

Copie sera adressée à la préfète du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 5 juillet 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Michel Hoffmann, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Laurent Domingo, premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 juillet 2016.

Le rapporteur,

Signé : L. DOMINGOLe président de chambre,

Signé : M. G...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°15DA02100


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA02100
Date de la décision : 19/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Guyau

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-07-19;15da02100 ?
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