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10/11/2016 | FRANCE | N°16DA00668

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 10 novembre 2016, 16DA00668


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2015 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un tire de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

Par un jugement n° 1503941 du 1er mars 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 avril 2016, M.B.

.., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er mars 2016 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2015 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un tire de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

Par un jugement n° 1503941 du 1er mars 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 avril 2016, M.B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er mars 2016 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 2 novembre 2015 du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un certificat de résidence d'algérien portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique, ladite condamnation valant renonciation de son conseil au versement de cette aide, ou, en cas de non-admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle, une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français sont insuffisamment motivées en tant qu'elles ne font pas état des problèmes de santé de son père, qui commandent sa présence à ses côtés ;

- le refus de séjour est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle dès lors que le préfet n'a pas examiné sa situation de manière exhaustive ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'il emporte sur sa situation personnelle ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi de l'éloignement forcé est dépourvue de motivation ;

- la décision lui refusant un titre de séjour et la décision l'obligeant à quitter le territoire français étant illégales, la décision fixant le pays de renvoi, qui en est la décision subséquente, est nécessairement illégale ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2016, la préfète de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...-louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que la décision du préfet de la Seine-Maritime refusant à M. B...un titre de séjour comporte mention des motifs de droit et des circonstances de fait qui en constituent le fondement ; qu'en effet, après avoir visé les textes applicables à la situation de l'intéressé, et en particulier le l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Seine-Maritime précise les raisons pour lesquelles la demande de M.B..., ressortissant tunisien né le 15 janvier 1978, qui déclare être entré en France en septembre 2000, ne peut être accueillie au titre de ces dispositions ; qu'il précise encore qu'il ne justifie pas être dépourvue d'attaches dans le pays dont il a la nationalité, ni de la nécessité de sa présence aux côtés de membres de sa famille en France ou d'une intégration intense, ancienne et stable dans la société française, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'étant pas méconnues ; que, par suite, alors même que les motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle et familiale de l'intéressé, le préfet a suffisamment motivé sa décision et a procédé à un examen particulier de la situation du requérant ;

2. Considérant que la motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français se confond avec celle portant refus de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, dès lors que ce refus est lui-même motivé, une motivation particulière ; que, par suite, et compte tenu de ce qui a été dit au point 1, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation doit être écarté ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien susvisé : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation " ; qu'aux termes de l'article 7 quater du même accord : " Sans préjudice des dispositions du b et d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable aux ressortissants tunisiens en vertu des stipulations de l'article 7 quater de l'accord précité : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si M. B...soutient qu'il réside habituellement en France depuis le mois de septembre 2000, il a seulement produit, pour démontrer l'ancienneté et la stabilité de son séjour, un bon de commande et une facture de camping pour quatre nuits, au titre de l'année 2007, deux factures, au titre de l'année 2008, une facture et un avis d'imposition dans lequel aucun revenu n'est déclaré, au titre de l'année 2009, un avis d'imposition qui ne mentionne aucun revenu et un certificat d'hébergement pour quinze jours, au titre de l'année 2010, un avis d'imposition qui ne mentionne toujours aucun revenu, ainsi qu'une facture, au titre de l'année 2011, une facture et une attestation de consultation d'un médecin le 12 juillet 2012, au titre de l'année 2012, et un avis d'imposition qui ne mentionne toujours aucun revenu au titre de l'année 2013 ; que la résidence habituelle de M. B...en France n'est ainsi pas établie pour les années 2007 à 2013, à supposer même que l'intéressé y réside habituellement depuis la fin de l'année 2013, alors qu'en tout état de cause, la durée de sa présence ne saurait constituer, à elle seule, une circonstance justifiant son admission au séjour ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu'il apporterait à son père une aide indispensable, compte tenu de son état de santé, ou qu'une aide ne pourrait lui être apportée par un tiers ; que M.B..., célibataire et sans enfant, ne se prévaut d'aucune intégration professionnelle ou sociale et ne démontre pas avoir noué, sur le territoire français, des liens d'une intensité telle que le refus de titre de séjour et la mesure d'éloignement en litige porteraient une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale normale ; que, dès lors, la décision de refus de titre de séjour et la décision l'obligeant à quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, ces décisions ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation ; que M. B...ne peut aussi utilement se prévaloir des prévisions de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, qui ne liaient pas l'autorité préfectorale ;

6. Considérant que le préfet de la Seine-Maritime a suffisamment motivé sa décision fixant le pays de destination de l'éloignement forcé en mentionnant, outre les dispositions applicables, que la décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points qui précèdent que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français pour soutenir que la décision fixant le pays de destination de l'éloignement serait privée de base légale ;

8. Considérant qu'aucune des pièces produites au dossier ne permet de considérer que le préfet n'aurait pas procédé à un examen de la réalité des risques encourus en cas de retour en Tunisie avant de prendre la décision en litige ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction assortie d'une astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., au ministre de l'intérieur et à MeD....

Copie en sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 6 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 10 novembre 2016.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : O. NIZET Le président de chambre,

président-rapporteur,

Signé : P.-L. ALBERTINI Le greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°16DA00668


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00668
Date de la décision : 10/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : AIT-TALEB

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-11-10;16da00668 ?
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