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17/11/2016 | FRANCE | N°15DA00550

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 17 novembre 2016, 15DA00550


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 21 mai 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé Me D...C..., liquidateur judiciaire de la société Juy, à procéder à son licenciement.

Par un jugement n° 1301943 du 3 février 2015, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 21 mai 2013 et a mis à la charge de l'Etat une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 avril 2015 et 16 février 2016, Me C...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 21 mai 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé Me D...C..., liquidateur judiciaire de la société Juy, à procéder à son licenciement.

Par un jugement n° 1301943 du 3 février 2015, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 21 mai 2013 et a mis à la charge de l'Etat une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 avril 2015 et 16 février 2016, Me C..., représenté par Me E...H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 février 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de rejeter la demande de M.A... ;

3°) de mettre à la charge de M. A...une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'inspecteur du travail a suffisamment motivé sa décision ;

- l'inspecteur du travail a contrôlé le caractère de la recherche de reclassement ;

- il a satisfait à l'obligation de reclassement en sollicitant par courrier, auquel était joint la liste des salariés, les sociétés du groupe Punch et d'autres sociétés extérieures au groupe ; qu'il a proposé au salarié lors de l'entretien préalable au licenciement les deux postes disponibles ;

- le salarié a refusé tout reclassement à l'étranger ;

- la consultation du comité d'entreprise est régulière dès lors que le secrétaire de cette instance a été rendu destinataire de l'ensemble des recherches de reclassement ; le comité ne pouvait ignorer les mandats détenus par le salarié ;

- le scrutin s'est déroulé à bulletin secret et après audition du salarié ;

- il a satisfait à son obligation de reclassement conventionnel.

Par un mémoire, enregistré le 1er octobre 2015, M.A..., représenté par Me B... G..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de l'inspecteur du travail est insuffisamment motivée ;

- l'inspecteur n'a pas vérifié que l'obligation de reclassement a été satisfaite de manière sérieuse et loyale ;

- la décision de prolonger l'enquête contradictoire est insuffisamment motivée ;

- le comité d'entreprise n'a pas pu rendre un avis éclairé, faute d'information sur les possibilités de reclassement des salariés protégés, sur leur identité et leur mandat ;

- l'avis a été rendu en méconnaissance de l'article R. 2421-9 du code du travail ;

- les dispositions de l'article R. 2421-13 du code du travail ont été méconnues ;

- l'obligation conventionnelle de reclassement a été méconnue.

Par un mémoire, enregistré le 19 février 2016, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a présenté des observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Hadi Habchi, rapporteur public.

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. / (...) " et qu'aux termes de l'article L. 1233-4 de ce code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises " ;

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, est subordonné à une autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein des établissements relevant du groupe auquel appartient cette dernière et dont les activités ou l'organisation offrent aux salariés concernés la possibilité d'exercer des fonctions comparables ;

3. Considérant que pour autoriser le licenciement de M.A..., peintre, qui détenait le mandat de membre du comité d'entreprise au sein de la société Juy, placée en liquidation judiciaire par un jugement du 13 mars 2016 du tribunal de commerce de Compiègne, l'inspecteur du travail a notamment estimé que MeC..., liquidateur judiciaire de cette société avait satisfait à l'obligation qui pesait sur lui de rechercher des postes de reclassement, alors même que ces recherches n'avaient pas abouti ; qu'il ressort des pièces du dossier que le liquidateur a adressé à chacune des sociétés composant le groupe Punch Métal Internationals, groupe auquel appartenait la société Juy, des courriers motivés tendant à obtenir de ces sociétés la communication des postes disponibles pouvant être proposés aux salariés de la société Juy ; qu'il n'est pas sérieusement contesté par le salarié qu'un tableau comprenant l'identité de chacun des salariés de la société, leur poste, leur rémunération ainsi que leur date d'entrée dans l'entreprise était annexé à ces lettres comme d'ailleurs elles le mentionnent expressément ; que, dès lors, le liquidateur doit être regardé comme ayant recherché à reclasser de manière sérieuse et personnalisée le salarié ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a retenu le motif tiré de ce que l'inspecteur du travail a commis une erreur d'appréciation en estimant que le liquidateur avait procédé à une recherche sérieuse de reclassement ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif et la Cour ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-12 du même code : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée. (... ) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés tant en première instance qu'en appel par M.A..., que si la décision en litige fait état du placement en liquidation judicaire de la société Juy et en déduit la réalité du motif économique fondant la demande de licenciement, elle se borne ensuite à constater que le liquidateur a recherché plusieurs postes de reclassement et que ces recherches n'ont pas abouti ; que, ce faisant, la décision attaquée ne se prononce pas sur la réalité des efforts de reclassement de Me C...agissant en qualité de liquidateur de la société Juy, alors qu'un tel élément de l'appréciation à laquelle l'administration doit se livrer lorsqu'elle est saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique, est au nombre des motifs qui doivent figurer dans sa décision ; qu'ainsi, la décision du 21 mai 2013 de l'inspecteur du travail est entachée d'un défaut de motivation de nature à entraîner son annulation ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Me C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 21 mai 2013 de l'inspecteur du travail ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. A...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Me C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me D...C...es qualité de liquidateur judiciaire de la société Juy et à M. F...A....

Copie sera adressée pour information au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience publique du 3 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 17 novembre 2016.

Le rapporteur,

Signé : O. NIZET Le président de chambre,

Signé : P-L. ALBERTINI Le greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°15DA00550

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00550
Date de la décision : 17/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-03-02-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Modalités de délivrance ou de refus de l'autorisation. Modalités d'instruction de la demande. Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : SCP FABIGNON-REMOISSONNET-REBOURCET

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-11-17;15da00550 ?
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