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22/12/2016 | FRANCE | N°15DA01897-15DA01920

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 22 décembre 2016, 15DA01897-15DA01920


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...E...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 novembre 2013 par lequel le maire de la commune de Bois-Guillaume a délivré à la société civile immobilière (SCI) Olivier un permis de construire autorisant, d'une part, la transformation d'une maison individuelle en deux logements et, d'autre part, la construction d'une maison individuelle en extension du bâti existant.

Par un jugement n° 1303536 du 6 octobre 2015, le tribunal administratif

de Rouen a annulé ce permis de construire.

Procédure devant la cour :

I. Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...E...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 novembre 2013 par lequel le maire de la commune de Bois-Guillaume a délivré à la société civile immobilière (SCI) Olivier un permis de construire autorisant, d'une part, la transformation d'une maison individuelle en deux logements et, d'autre part, la construction d'une maison individuelle en extension du bâti existant.

Par un jugement n° 1303536 du 6 octobre 2015, le tribunal administratif de Rouen a annulé ce permis de construire.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 15DA01897 le 1er décembre 2015, et un mémoire complémentaire, enregistré le 27 juin 2016, la SCI Olivier, représentée par la SCP Emo Hébert et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de MmeE... ;

3°) de mettre à la charge de Mme E...la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la SCI a respecté les prescriptions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- Mme E...ne démontre pas son intérêt à agir au regard de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- le motif d'annulation du tribunal tiré de la méconnaissance des dispositions relatives à l'aménagement d'un étage partiel figurant à l'article UF 10 du plan local d'urbanisme (PLU) doit être censuré comme manquant en fait et en droit ;

- les autres moyens présentés en première instance doivent être écartés, en particulier :

- l'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- le caractère incomplet du dossier ;

- la méconnaissance des dispositions des articles UF 3 et R. 111-2 du code de l'urbanisme au regard de la sécurité des accès ;

- la méconnaissance de l'article UF 7 en ce qui concerne les règles d'implantation des constructions ;

- la violation des dispositions de l'article UF 9 ;

- l'atteinte au site au regard de l'article UF 11.1, 11.3, 11.5 et 11.6 du PLU ;

- la méconnaissance de l'article UF 12 en ce qui concerne le nombre de places par logement ;

- la méconnaissance des dispositions de l'article UF 13 en ce qui concerne les plantations ;

- la violation des dispositions de l'article UF 14 ;

- l'absence de respect de l'article 12 du règlement de lotissement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2016, MmeE..., représentée par la SELARL Enard-Bazire, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à la mise à la charge de la SCI Olivier de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société appelante n'a pas justifié des notifications prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- elle confirme ses moyens de première instance tirés de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée, du caractère incomplet du dossier, de la méconnaissance des articles UF 3, UF 7, UF 9, UF 11, UF 12, UF 13 et UF 14 du PLU ainsi que de l'article 12 du règlement du lotissement.

La commune de Bois-Guillaume a produit un mémoire en observations enregistré le 28 novembre 2016.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 15DA01920 le 3 décembre 2015, la commune de Bois-Guillaume, représentée par la SCP Lenglet, Malbesin et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de MmeE... ;

3°) de mettre à la charge de Mme E...la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- Mme E...n'a pas justifié de son intérêt pour agir au regard des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- les dispositions de l'article UF 10 concernant la réalisation d'un étage partiel dans la partie comprise entre 6 et 10 mètres de hauteur pour le bâtiment existant, qui devaient s'appliquer, ont, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal, été respectées en l'espèce.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2016, MmeE..., représentée par la SELARL Enard-Bazire, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Bois-Guillaume de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La SCI Olivier a produit ses observations par un mémoire enregistré le 27 juin 2016.

Une ordonnance a fixé la clôture d'instruction au 30 novembre 2016 dans ces deux instances.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me D...B..., représentant la SCI Olivier.

1. Considérant que la SCI Olivier, propriétaire de la parcelle cadastrée AO n° 237 de 1 064 m2, située sur le territoire de la commune de Bois-Guillaume (Seine-Maritime), commune couverte par un plan local d'urbanisme, a déposé le 3 décembre 2012 une demande de permis de construire afin, d'une part, de transformer une maison individuelle en deux logements et, d'autre part, sur le même terrain, de construire une maison individuelle en extension du bâti existant ; que ce permis de construire a été accordé le 27 février 2013 ; qu'un permis de construire modificatif a été accordé le 9 avril 2015 relatif à des aménagements extérieurs, à l'emplacement et à la forme du carpark pour le logement, les dimensions de certaines ouvertures, le garde-corps, la suppression de conduits en toiture et la modification des arbres conservés et plantés ; qu'à la demande de Mme E..., le tribunal administratif de Rouen a prononcé l'annulation pour excès de pouvoir de cette autorisation d'urbanisme, par un jugement du 6 octobre 2015, dont la SCI Olivier et la commune de Bois-Guillaume relèvent appel par deux requêtes distinctes ;

2. Considérant que ces deux requêtes tendent à l'annulation du même jugement et concernent le même permis de construire ; que, par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par Mme E...à la requête de la SCI Olivier et la commune de Bois-Guillaume :

3. Considérant que l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'impose pas à l'auteur de la décision litigieuse ou au bénéficiaire de l'autorisation, l'obligation de notifier au tiers la requête d'appel dirigée contre le jugement par lequel ce tiers a obtenu l'annulation de l'autorisation d'urbanisme en litige ;

4. Considérant que la SCI Olivier était le bénéficiaire du permis de construire dont Mme E..., qui a la qualité de tiers par rapport à cette autorisation d'urbanisme, a obtenu, sur sa demande, l'annulation par le tribunal administratif de Rouen ; que, par suite, la SCI Olivier n'avait pas à procéder aux notifications exigées par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme à l'occasion du dépôt de sa requête d'appel devant la cour ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que, sans y être tenue, elle y a procédé selon les modalités prévues par ces dispositions ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée par Mme E...à la requête d'appel de la SCI Olivier doit être écartée ;

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

5. Considérant que l'article UF 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Bois-Guillaume est relatif à la hauteur des constructions ; qu'il comporte un paragraphe 10.1 qui définit la hauteur des constructions de la manière suivante : " La hauteur des constructions est la mesure verticale séparant la surface du sol naturel (avant remodelage du terrain) d'une surface parallèle passant par le point le plus haut de la construction " ; que le paragraphe 10.2 qui concerne la hauteur maximale, prévoit que : " Toute construction nouvelle ne peut dépasser la hauteur "H" ni comporter de façades supérieures à la hauteur "h" fixées ci-dessous : / H = 10m . h = 6m " ; que la disposition figurant au paragraphe 10.3 prévoit de manière limitative ce qui peut être édifié entre les deux points H et h en retenant que : " Dans la hauteur comprise entre "H" et "h" définies ci-dessus peuvent être édifiés : / - un étage partiel n'excédant pas 50 % de l'emprise au sol de la construction, / - certaines superstructures telles que sortie d'escalier d'accès à la terrasse, pergola ... , / - les machineries d'ascenseur qui devront être intégrées à la volumétrie de la construction " ;

6. Considérant que les dispositions du paragraphe 10.3 sont complémentaires de celles du paragraphe 10.2 ; qu'ainsi que le prévoit le paragraphe 10.2, elles ne s'imposent donc qu'aux constructions nouvelles, une construction existante pouvant en effet dépasser les hauteurs fixées par ces dispositions ;

7. Considérant que le projet en litige consiste, d'une part, à modifier la maison d'habitation existante en procédant à l'intérieur du bâti à une séparation verticale pour permettre la création de deux logements indépendants et, d'autre part, à créer en mitoyenneté de cette construction, à l'ouest, une nouvelle maison d'habitation, en extension du bâti existant ; que la maison d'origine est recomposée selon trois niveaux correspondant à un rez-de-chaussée décaissé, un premier étage d'une surface de plancher équivalente, légèrement inférieure à 100 m², et un second étage correspondant aux anciens combles ; qu'il est constant que le bâtiment nouveau a une hauteur maximale inférieure à 6 mètres et que la maison existante a une hauteur maximale inférieure à 10 mètres et que l'étage nouvellement aménagé sous comble a une hauteur comprise entre 5,33 mètres (h) et 9,58 mètres (H) ;

8. Considérant que, pour annuler le permis de construire en litige, le tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur la violation de l'article 10.3 du règlement du plan local d'urbanisme et a retenu, d'une part, que ces dispositions s'appliquent aux bâtiments existants et que l'aménagement sous comble porte " sur la totalité des combles du bâtiment existant et ne peut ainsi être regardé comme un étage partiel, alors même que cet étage présente une surface au plancher de 57 m2, soit moins de 50 % de l'emprise au sol du bâtiment existant " ;

9. Considérant qu'il est constant que la création du second étage procède d'un aménagement de la partie du bâtiment existant située sous comble sans modification de la hauteur de la toiture et comportant une extension de la surface au sol résultant de la transformation des chiens assis ; que ces modifications comme celles concernant les autres parties du bâtiment n'ont pas eu pour objet ou pour effet de permettre la réalisation d'une construction nouvelle pour l'application de l'article 10.2 ; que, par suite, les dispositions de l'article 10.3 n'étaient pas applicables ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier, ainsi que le tribunal administratif l'avait mentionné, que cet aménagement a porté sur moins de 50 % de l'emprise au sol de la construction existante de telle sorte qu'il aurait dû être regardé comme constituant un étage partiel au sens de l'article 10.3 ; que, par suite, la SCI Olivier est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur cet unique motif pour annuler le permis de construire accordé le 12 novembre 2013 ;

10. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme E... devant la juridiction administrative ;

Sur le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte :

11. Considérant, d'une part, qu'en vertu de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme, dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme, le maire est, en principe, l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire ;

12. Considérant, d'autre part, que le premier alinéa de l'article L. 2122-18 du code de l'urbanisme dispose que : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation à des membres du conseil municipal " ;

13. Considérant que, par un arrêté du 3 décembre 2012, le maire de la commune de Bois-Guillaume a chargé M.C..., quinzième adjoint, des affaires de l'urbanisme réglementaire et du droit du sol dans plusieurs domaines limitativement énumérés dont les " autorisations d'utilisation du sol : permis de construire (...) " ; qu'une telle délégation de fonctions qui lui donnait compétence pour signer les permis de construire, ne concernait qu'une partie des fonctions du maire et ne méconnaissait pas, dès lors, les dispositions de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, alors même qu'elle présentait, pour la durée du mandat, un caractère permanent ; que cette délégation a fait l'objet d'une publication dont la réalité et la régularité ne sont pas contestées ; que M. C...est le signataire du permis de construire du 12 novembre 2013 ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'adjoint au maire signataire du permis de construire accordé à la SCI Olivier doit être écarté ;

Sur le moyen tiré des incohérences ou insuffisances du dossier de demande de permis de construire :

En ce qui concerne des incohérences du dossier au regard des dispositions des articles R. 431-5 et R. 431-6 du code de l'urbanisme :

14. Considérant qu'en vertu du f) de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable, la demande de permis de construire précise " La surface de plancher des constructions projetées, s'il y a lieu répartie selon les différentes destinations définies à l'article R. 123-9 " ; que l'article R. 431-6 du même code alors applicable dispose que : " Lorsque le terrain d'assiette comporte des constructions, la demande précise leur destination, par référence aux différentes destinations définies à l'article R. 123-9, leur surface de plancher et indique si ces constructions sont destinées à être maintenues et si leur destination est modifiée par le projet " ;

15. Considérant qu'il ressort des documents produits au service instructeur que les surfaces de plancher de la construction nouvelle projetée et de la construction existante modifiée figurent dans le dossier de permis de construire ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que si des modifications d'ailleurs minimes sont intervenues en ce qui concerne les mentions des bâtiments notamment entre les différents dossiers de permis de construire déposés pour le même projet et notamment le dossier de permis de construire modificatif, cette circonstance ait été de nature à induire en erreur le service instructeur ;

En ce qui concerne les insuffisances du dossier au regard des dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme :

16. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement " ;

17. Considérant que le projet architectural comprend une notice de présentation détaillée qui comporte les précisions exigées par l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ; que, d'une part, contrairement à ce qui est soutenu par MmeE..., ce document décrit l'état initial du terrain, la végétation et les éléments paysagers existants et précise les modifications envisagées en ce qui concerne les plantations ; que, d'autre part, contrairement à ce qui est prétendu, les caractéristiques principales du quartier étaient rappelées et l'insertion du projet dans son environnement était également décrite de manière suffisante ; que le dossier n'avait pas à comporter un état exhaustif du bâti existant dans l'environnement du projet ; que ces insuffisances éventuelles ont en outre été corrigées par le permis de construire modificatif délivré le 9 avril 2015 ; qu'ainsi, le service instructeur a pu disposer des informations nécessaires à son examen ; que, par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article R. 431-8 précitées ont été méconnues ;

En ce qui concerne les incohérences ou insuffisances du dossier au regard des dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme :

18. Considérant que le premier alinéa de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme prévoit que : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu " ;

19. Considérant qu'il ressort du plan de masse qu'y figurent notamment les plantations maintenues, supprimées ou créées sans qu'apparaissent des incohérences ou des insuffisances avec ce qui est indiqué sur ce point dans la notice de présentation mentionnée au point 16 ; qu'il n'est pas exigé un décompte exact des arbres existants et des arbres à replanter ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 3 et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :

En ce qui concerne l'article UF 3 :

20. Considérant que l'article UF 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Bois-Guillaume qui est relatif aux " Accès et voirie " comporte un paragraphe 3.1 qui dispose que : " Pour être constructible, un terrain doit être accessible par une voie publique ou privée, dans des conditions répondant par avance à l'importance et à la destination de l'immeuble à édifier. Toutes dispositions doivent être prises pour assurer la visibilité des véhicules sortant des propriétés " et un paragraphe 3.2 qui énonce que : " Les rampes d'accès aux garages doivent observer un retrait de 5 mètres minimum par rapport à la limite du domaine public ou de l'alignement futur " ; qu'en vertu du dernier alinéa du paragraphe 3.4 : " Aucune nouvelle impasse destinée à desservir plus de trois logements ne pourra avoir une largeur d'emprise inférieure à 6 mètres. Une aire de retournement sera obligatoire " ;

21. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est accessible par une voie publique dans des conditions qui répondent à l'importance et à la destination des trois logements créés dans le pavillon existant et le bâtiment créé en extension ; que, compte tenu de la configuration des lieux et de la voie de desserte du terrain d'assiette ainsi que du trafic existant, les quelques véhicules sortant de la propriété seront suffisamment visibles ; que, par suite, les dispositions de l'article UF 3.1 n'ont pas été méconnues ;

22. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet comporte des rampes d'accès à des garages ; que, par suite, Mme E...ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article UF 3.2 ;

23. Considérant que le projet, même s'il porte sur la création de trois logements, ne nécessite pas la création de voies et notamment en impasse ; que, dès lors, la circonstance qu'il ne comporterait pas d'aire de retournement est sans influence sur la légalité du permis de construire attaqué ; que, par suite, Mme E...ne peut utilement se prévaloir de la violation des dispositions de l'article UF 3.4 précitées ;

En ce qui concerne l'article R.111-2 du code de l'urbanisme :

24. Considérant que l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, alors applicable, dispose que : " Le projet ne peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte (...) à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations " ;

25. Considérant que, eu égard aux éléments rappelés au point 21 et même dans l'hypothèse d'une manoeuvre en marche arrière d'un véhicule, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ; que, par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir qu'en accordant le permis de construire, le maire de la commune de Bois-Guillaume a entaché son autorisation d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 7 :

26. Considérant que l'article UF 7 du règlement du plan local d'urbanisme porte sur l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives ; que le paragraphe 7.1 concerne les constructions à usage d'une surface hors oeuvre nette (SHON) inférieure à 500 m2 pour lesquelles il est prévu que : " - Les constructions seront édifiées à une distance au moins égale à la moitié de leur hauteur mesurée à partir du sol naturel et ce en tout point du bâtiment, sans jamais être inférieure à 5 mètres : / (...) " ; que le paragraphe 7.3 dispose en outre que : " Les extensions des constructions existantes qui ne sont pas implantées conformément à l'article 7.1 (...) doivent s'inscrire sous un plan fictif incliné à 45° issu d'une ligne parallèle au terrain naturel située en limite séparative à une hauteur de 3,50 m " ;

27. Considérant, d'une part, que les dispositions précitées ne sont pas applicables au pavillon déjà édifié dont l'assiette n'est pas modifiée et qui ne fait l'objet que d'une réhabilitation ; que, d'autre part, il n'est pas contesté que le bâtiment construit en extension de la construction existante respecte les dispositions de l'article UF 7.3 ; qu'enfin, le moyen tiré de ce que " le mur édifié en limite nord de la parcelle afin de délimiter les espaces verts et les places de stationnement de la nouvelle maison " et qui serait implanté à 2,50 mètres de la propriété de Mme E...serait contraire aux dispositions de l'article UF 7 n'est pas assorti des précisions qui permettent d'en apprécier le bien fondé ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 9 :

28. Considérant que l'article UF 9 du règlement du plan local d'urbanisme concerne l'emprise au sol ; que le paragraphe 9.1 dispose que : " L'emprise au sol des constructions de toute nature à l'exclusion des ouvrages techniques, devra être inférieur à 30 % de la superficie totale du terrain d'assiette. / Cette disposition ne s'applique pas aux parcelles bâties existantes à la date d'approbation du PLU " ;

29. Considérant qu'il est constant que la parcelle concernée a été bâtie dans les années 1970 avant la date d'approbation du plan local d'urbanisme et notamment de la disposition précitée ; qu'elle relève ainsi de l'exception prévue au second alinéa du paragraphe 9.1 ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions sur l'emprise au sol doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 11 :

30. Considérant que l'article UF 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Bois-Guillaume concerne l'aspect extérieur ;

En ce qui concerne la méconnaissance du paragraphe 11.1 :

31. Considérant que le paragraphe 11.1. énonce que : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants aux sites ou aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;

32. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la transformation du bâtiment existant et l'extension envisagée par le permis attaqué s'inscrivent dans un parti pris de modernisation consistant à donner un aspect d'architecture contemporaine à un pavillon construit dans les années 1970 de style plus conventionnel ; qu'ainsi, les formes géométriques données à l'ensemble sont accentuées notamment au niveau de l'extension qui a un toit plat et repose sur un jeu de volumes et au niveau du pavillon existant par les chiens assis rectangulaires qui font saillies ainsi que par le carpark ou les terrasses ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces modifications soient, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de la diversité du bâti existant dans les environs proches, de la végétation qui masque en partie le projet et de ses dimensions modestes, de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants qui sont ceux d'un quartier pavillonnaire comportant un bâti relativement hétérogène et dispersé, ou au paysage urbain qui n'est altéré ni dans sa structure ni dans ses caractères essentiels de quartier résidentiel ; que, par suite, les dispositions de l'article UF 11.1 n'ont pas été méconnues ;

En ce qui concerne la méconnaissance du paragraphe 11.3 :

33. Considérant qu'aux termes du paragraphe 11.3 : " Les façades auront un aspect homogène. Des tons vifs sont autorisés en petite surface lorsqu'ils ont pour objet d'affirmer un parti architectural " ;

34. Considérant que, d'une part, les tons retenus ne sont pas en disharmonie avec ceux utilisés dans le quartier ou contraires aux exigences de l'article UF 11.3 ; que, d'autre part, l'exigence d'aspect homogène des façades n'impose pas des façades uniformes ni par leurs teintes ni par leur aspect ; qu'elle n'est pas méconnue en ce qui concerne le pavillon existant dont les façades qui intègrent notamment des chiens assis en relief et géométriques sont traitées selon un principe de symétrie ; que les ruptures de volume créées par le nouveau bâtiment situées en extension du pavillon existant, suffisamment marquées et lisibles, répondent à un parti architectural qui ne porte pas au principe d'homogénéité des façades une atteinte à laquelle s'opposeraient les prescriptions précitées du paragraphe 11.3 ;

En ce qui concerne la méconnaissance du paragraphe 11.5 :

35. Considérant qu'aux termes du paragraphe 11.5 : " La nature, la hauteur et l'aspect des clôtures doivent s'harmoniser avec les lieux avoisinants " ;

36. Considérant que si la hauteur de la haie champêtre et des brises-vue n'est pas mentionnée, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces éléments de protection, à supposer d'ailleurs qu'ils doivent être assimilés à des clôtures, ne s'harmonisent pas avec les lieux avoisinants ;

En ce qui concerne la méconnaissance du paragraphe 11.6 :

37. Considérant que le paragraphe 11.6 retient que : " Les portails des propriétés doivent en principe être situés à 5 mètres en retrait par rapport à la limite du domaine public ou de l'alignement futur " ;

38. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet créerait ou modifierait des portails ; qu'aucune disposition ne vient appliquer cette obligation de retrait aux places de stationnement ou au jardin ; qu'en tout état de cause, la clôture de panneaux de bois situés derrière les quatre places de stationnement est en retrait d'au moins 5 mètres de la limite séparative du domaine public ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que les dispositions de l'article UF 11.6 auraient été, en l'espèce, méconnue ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 12 :

39. Considérant que l'article UF 12 du règlement du plan local d'urbanisme concerne le stationnement des véhicules ; que le paragraphe 12.1 dispose que : " Afin d'assurer, en dehors des voies publiques, le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations et en cas de changement d'affectation, il est exigé: / 1 - Pour les constructions à usage de logement : 2 places par logement dont 1 couverte. / (...) " ; que le paragraphe 12.4 prévoit que : " Les aires de stationnement doivent être de manière à être dissimulées au maximum des vues environnantes " ;

40. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le projet comporte, conformément aux exigences précitées du paragraphe 12.1, deux places de véhicules dont l'une des deux est couverte pour chacun des trois logements envisagés ; que la circonstance que les deux places d'un des logements soient en enfilade n'est pas contraire aux dispositions précitées de l'article 12 qui n'exigent pas, en outre, d'aire de retournement ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 12.1 doit être écarté ;

41. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les dispositifs prévus permettent d'assurer une dissimulation des aires de stationnement " au maximum des vues environnantes " même si cette dissimulation n'est pas totale notamment pour une personne placée " à l'extérieur de la propriété " ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 12.4 doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 13 :

42. Considérant que l'article UF 13 du règlement du plan local d'urbanisme prévoit au paragraphe 13.3 que : " Lorsque l'abattage d'arbres se révèle nécessaire, le remplacement par une plantation d'essence locale de développement similaire est obligatoire " ;

43. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire que pour compenser l'abattage des arbres rendu nécessaire par le projet, il a été prévu d'assurer un remplacement par des arbres de même essence ; qu'il n'est toutefois pas exigé que le remplacement conduise à des arbres de même volume ; que la circonstance, à la supposer exacte, que le permis de construire n'aurait pas été respecté lors de la réalisation du projet est sans influence sur la légalité de cette autorisation d'urbanisme ; qu'enfin, un permis de construire modificatif a porté sur les arbres à conserver et à remplacer ; que, par suite, MmeE..., qui n'a pas contesté ce permis de construire modificatif, n'est pas fondée à soutenir que l'article UF 13 a été méconnu ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UF 14 :

44. Considérant que l'article UF 14 du règlement du plan local d'urbanisme concerne les " possibilités maximales d'occupation des sols " ; que le paragraphe 14.1 prévoit un coefficient d'occupation des sols maximum de 0,30 pour toutes constructions ;

45. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et il n'est pas sérieusement contesté que ce coefficient a été respecté par le projet sur lequel l'autorité administrative s'est prononcée ; que Mme E...se borne à faire valoir à nouveau qu'il existerait des différences de cotes entre les diverses versions du projet soumis au service instructeur et sur lesquelles le maire s'est prononcé à plusieurs reprises ; que, toutefois et ainsi qu'il a déjà été dit, ces écarts d'ailleurs minimes ne font pas apparaître, en l'espèce, une violation de la règle énoncée à l'article cité au point précédent ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 12 du règlement de lotissement :

46. Considérant qu'un lotissement communal dénommé " Les Vikings " a été créé sur le territoire de la commune de Bois-Guillaume et a fait l'objet d'un règlement le 10 décembre 1963 ; par une délibération du 1er février 1964, le conseil municipal de cette commune a retenu le projet d'aménagement du lotissement ; qu'un acte notarié relatif à ce lotissement comportant règlement de propriété et cahier des charges a été établi le 10 juillet 1964 ; que le chapitre 3 du règlement du lotissement qui porte sur la construction et l'implantation, comporte un article douzième qui énonce diverses contraintes ; que MmeE..., qui ne justifie pas du maintien en vigueur de ce règlement de lotissement, se borne à faire valoir que ces dispositions auraient été méconnues sans assortir son moyen des précisions qui permettraient d'en apprécier le bien fondé ; qu'ainsi et à supposer d'ailleurs que la règle de caducité de ce règlement de lotissement posée à l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme ne rende pas son moyen inopérant, il doit être écarté comme non fondé ;

47. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance de MmeE..., que la SCI Olivier et la commune de Bois-Guillaume sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé le permis de construire du 12 novembre 2013 ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

48. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MmeE..., qui a la qualité de partie perdante, la somme de 1 500 euros à verser à la SCI Olivier et celle de 750 euros à verser à la commune de Bois-Guillaume, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par Mme E...à l'encontre de la SCI Olivier et de la commune de Bois-Guillaume sur leur fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 6 octobre 2015 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande de Mme E...et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Mme E...versera à la SCI Olivier une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Mme E...versera à la commune de Bois-Guillaume une somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Olivier, à la commune de Bois-Guillaume, à Mme A...E...et à la ministre du logement et de l'habitat durable.

Copie en sera transmise, en application des dispositions de l'article R. 751-11 du code de justice administrative, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Rouen.

Délibéré après l'audience publique du 8 décembre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- M. Christian Bernier, président-assesseur,

- M. Xavier Fabre, premier conseiller.

Lu en audience publique le 22 décembre 2016.

Le président-assesseur,

Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,

Président de chambre rapporteur,

Signé : O. YEZNIKIAN

Le greffier,

Signé : C. SIRE

La République mande et ordonne à la ministre du logement et de l'habitat durable, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Christine Sire

Nos15DA01897,15DA01920 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01897-15DA01920
Date de la décision : 22/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SCP EMO HEBERT et ASSOCIES ; SCP EMO HEBERT et ASSOCIES ; SCP LENGLET MALBESIN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-12-22;15da01897.15da01920 ?
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