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17/08/2017 | FRANCE | N°16DA01886

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 17 août 2017, 16DA01886


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2015 par lequel la préfète du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et l'a placé en rétention administrative, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, à la préfète du Pas-de-Calais de le mettre sans délai en possession d'une autorisation provisoire de s

éjour et, dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2015 par lequel la préfète du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et l'a placé en rétention administrative, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, à la préfète du Pas-de-Calais de le mettre sans délai en possession d'une autorisation provisoire de séjour et, dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement, de lui délivrer une carte de séjour temporaire ;

Par un jugement no 1503382 du 27 septembre 2016, le tribunal administratif de Rouen a seulement annulé la décision désignant le pays à destination duquel M. B...pourrait être reconduit d'office, ainsi que la décision du même jour le plaçant en rétention administrative et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 octobre 2016, M.B..., représenté par Me C...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 27 septembre 2016, en tant qu'il ne fait pas entièrement droit à sa demande ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté de la préfète du Pas-de-Calais du 23 octobre 2015, en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ou, à défaut, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " Les expulsions collectives d'étrangers sont interdites " ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 23 octobre 2015 par lequel la préfète du Pas-de-Calais a fait obligation à M.B..., ressortissant Syrien, de quitter sans délai le territoire français a été pris au vu d'un examen objectif de la situation particulière de M.B..., qui a été mis à même de faire valoir, à l'occasion de son audition, le jour même, par les services de police, au cours de laquelle il a notamment été interrogé sur sa situation personnelle et familiale et sur les conditions dans lesquelles il a quitté son pays d'origine, tous arguments tirés de sa situation individuelle qui auraient été susceptibles de faire obstacle à son éloignement ; que, dès lors, il ne saurait utilement se prévaloir de ce que d'autres mesures de même objet ont été prononcées le même jour que celui où a été prise la décision litigieuse à l'encontre d'étrangers de diverses nationalités s'étant fixés dans " la Jungle " de Calais pour soutenir que l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet présenterait un caractère collectif et que les stipulations précitées auraient été méconnues ; qu'en outre, le moyen tiré par M. B...de ce que le prononcé de l'obligation de quitter le territoire en litige n'aurait pas été précédé d'un examen particulier doit être écarté ; que l'intéressé ne peut, à cet égard, utilement se prévaloir de l'appréciation portée par le contrôleur général des lieux de privation de liberté à l'occasion de la formulation, le 13 novembre 2015, de recommandations qui ne lient pas le juge administratif, auquel il appartient de se prononcer, au vu des écritures et des pièces produites par les parties, sur chacune des situations particulières qui lui sont soumises ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales : / (...) / f) s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours. / (...) " et qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / (...) " ;

3. Considérant que, dans le contexte décrit au point 1 et compte tenu de ce que, comme il a été dit, la situation de M. B...a fait l'objet d'un examen particulier, la décision en litige, qui reproduit les dispositions précités du 1° du I de l'article L. 511-1 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qui constate que l'intéressé, qui avait été interpellé le jour même dans une zone d'accès restreint du lien fixe transmanche, n'a pas été en mesure de justifier de son identité ni de la régularité de son séjour, doit être regardée comme ayant pour objet de faire cesser cette situation de séjour irrégulier de M. B...sur le territoire français et d'obtenir qu'il quitte, volontairement ou sous la contrainte, ce territoire ; qu'ainsi, cette décision n'a pas été prise en méconnaissance de ces dispositions et les moyens tirés du détournement de procédure et de pouvoir dont elle serait entachée doivent, quelles que soient les diligences accomplies par l'administration pour pourvoir à son exécution, lesquelles sont dépourvues d'incidence sur sa légalité, être écartés ; qu'en outre, M. B... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au soutien des conclusions qu'il dirige contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire, dès lors que celle-ci n'a pas, par elle-même, pour effet de le priver de liberté, alors même que son prononcé a pu justifier un placement en rétention administrative, au demeurant annulé par les premiers juges et qui n'est plus en litige en cause d'appel ;

4. Considérant qu'il résulte de l'examen du procès-verbal de l'audition de M.B..., le 23 octobre 2015 par un officier de police judiciaire, dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, que, si l'intéressé a indiqué avoir quitté la Syrie le 18 août 2015 et mentionné les étapes qui ont jalonné son voyage vers la France, où il a précisé être présent depuis un mois et demi, il n'a aucunement fait connaître les raisons de ce départ, ni n'a fait état de craintes quant à la perspective d'un retour dans son pays d'origine ; qu'il n'a pas davantage indiqué à son interlocuteur, qui lui en a toutefois laissé la possibilité, les motifs de sa venue sur le territoire français ; qu'il ne peut ainsi être regardé, par ces seules déclarations, comme ayant entendu solliciter l'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la préfète du Pas-de-Calais ne pouvait légalement l'obliger à quitter le territoire français sans s'être au préalable prononcée sur son droit à être admis au séjour au titre de l'asile ne peut qu'être écarté comme inopérant ;

5. Considérant qu'il ressort des mentions portées sur le procès-verbal de notification, le jour même de son prononcé, de la décision contestée et sur le procès-verbal de notification, le même jour, de ses droits en rétention, lesquels document ont été signés tant par M. B...que par l'interprète en langue kurde qui l'a assisté, que l'intéressé a été informé de son droit à s'entretenir avec un avocat, des coordonnées de l'association susceptible de l'aider à formuler une éventuelle demande d'asile et des délais dans lesquels celle-ci devrait être formulée ; qu'il suit de là et compte tenu de ce qui vient d'être dit au point précédent, que le moyen tiré par M. B... de ce qu'il n'aurait pas eu connaissance " de ses droits en matière d'asile " doit être écarté ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal de l'audition de M. B...que celui-ci, dépourvu de tout lien sur le territoire français, sans profession et possédant un niveau d'études primaire, n'a pu se prévaloir d'aucune perspective sérieuse d'intégration, ni d'insertion professionnelle ; qu'en outre, il n'a fait état, comme il a été dit au point 4, d'aucune circonstance particulière qui ferait obstacle à ce que, célibataire, sans enfant à charge et âgé de vingt-cinq ans à la date de la décision contestée, il puisse, pour le cas où il ne pourrait regagner son pays d'origine, s'installer dans un pays dans lequel il pourrait être légalement admissible ; que, par suite, le moyen tiré de ce que, pour l'obliger à quitter le territoire français, la préfète du Pas-de-Calais aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B...doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 27 septembre 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 octobre 2015 par laquelle la préfète du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

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N°16DA01886


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01886
Date de la décision : 17/08/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-08-17;16da01886 ?
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